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Quand Platon écoute les Beatles sur son iPod
mouvement des sept planètes connues à l’époque, qui incluaient le
Soleil et la Lune, produisait des sons, une « musique des sphères »
en tournant autour de la Terre, il les associera à des intervalles
musicaux2. L’historien Diogène Laërce rapporte que Pythagore
aurait en outre inventé un instrument de musique, le monocorde,
lointain ancêtre de la cithare, grâce auquel il chantait Homère,
Hésiode ou les airs de alétas.
De la pratique…
Puisque l’origine de la philosophie se confond d’une certaine
façon avec la musique, il ne faut pas se surprendre de découvrir au
fil des siècles des philosophes instrumentistes, se réservant chaque
jour du temps pour flûter (Schopenhauer) ou pianoter (Nietzsche,
Barthes, Habachi, Sartre…), ou d’en voir d’autres chatouillés par
la composition. Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), l’un des
pères spirituels de la Révolution française, fut à cet égard parti-
culièrement prolifique. Outre une centaine de morceaux, men-
tionnons son intermède Le Devin du village, présenté au château
de Fontainebleau devant le roi Louis XV. Enthousiaste, ce dernier
offrit une bourse au compositeur, qui la refusa, au grand désarroi
de son bon ami Diderot… D’autres grands noms ont laissé une
œuvre musicale intéressante, à découvrir : le bouillant Nietzsche
(1844-1900), virtuose du piano qui interprétait des sonates de
Beethoven à 12 ans, compositeur de pièces pour piano, d’orato-
rios, de quatuors et de lieder ; Gabriel Marcel (1889-1973), impro-
visateur hors pair, qui a mis en musique Baudelaire, Rilke et tant
d’autres ; Adorno (1903-1969), élève d’Alban Berg, l’un des pion-
niers du dodécaphonisme sériel, considéré par plusieurs comme
le plus musicien des philosophes, avec une trentaine de titres.
Lorsqu’il n’était pas occupé à séduire des jeunes femmes en leur
jouant au piano le répertoire romantique du XIXe siècle, Jean-Paul
Sartre (1905-1980) a trouvé le temps d’écrire quelques chansons3.
Peut-être avez-vous déjà entendu Dans la rue des Blancs-Manteaux
2. Pour la petite histoire, il faudra attendre le XIe siècle avant qu’un moine,
Guy d’Arezzo, nomme ces sept notes de do à si.
3. François Noudelman, Le Toucher des philosophes, Gallimard, 2008.