Introduction
1492, une année importante ! Elle marque en effet lachè-
vement de la Reconquista par la prise, réalisée par les ar-
mées chrétiennes, du royaume Maure de Grenade. Mais cest
aussi lannée où commence la conquête du continent amé-
ricain, plus précisément des Antilles, grâce au voyage en-
trepris par Christophe Colomb parti d’Espagne, le 2 août. Il
parvint en Amérique le 10 octobre suivant. C’est une récom-
pense pour lEspagne qui lutta pendant des siècles pour re-
conquérir au Christ-Roi son sol occupé par les mahométans.
Le courage de ce peuple lui valut la tâche, ô combien ardue
et enthousiasmante, d’avoir à civiliser et évangéliser les peu-
ples païens de ces territoires. Par cette conquête, les espa-
gnols les retirèrent de leur mode de vie primitif, « des ténè-
bres de la mort » (Luc 1, 79) où ils étaient assis. 1
Au génois Colomb et à lEspagne revenaient dallu-
mer et de commencer à répandre en ces contrées le feu que
Notre–Seigneur Jésus-Christ vint apporter sur terre. Le mo-
tif missionnaire fut principal dans la conquête de lAméri-
que même si, pour des raisons inavouables, certains « histo-
riens » feignent de lignorer aujourd’hui. A les en croire, les
Espagnols auraient massacré des civilisations dont les vertus
navaient d’égales que la paix qui était leur quotidien.
I – LES CIVILISATIONS PRÉCOLOMBIENNES
Il nest pas question de faire une présentation exhausti-
ve de ces civilisations (sil est possible de les appeler ain-
si). Nonobstant des qualités indubitables, ces peuples étaient
plongés dans une telle barbarie que lon se demande com-
ment certains ont pu les présenter à légal des civilisations
prestigieuses. Tous ces peuples adorent le soleil et une mul-
titude dautres dieux, corporels ou incorporels, auxquels on
offre des sacri ces parmi lesquels des sacri ces humains.
Vous pardonnerez le caractère un peu horri ant des descrip-
tions qui suivent, mais le prestige dont jouissent ces « civi-
lisations » aux yeux du grand public nous impose de donner
quelques détails de la dure réalité
A – Les aztèques et les mayas
Chez les aztèques, les sacri ces humains, publics ou pri-
vés, étaient quasi-quotidiens et revêtaient des formes variées
« bien propres à éviter la monotonie » 2. De nombreux sa-
cri és étaient emmenés sur les montagnes a n de leur ar-
racher le cœur encore palpitant, comme cétait la règle dans
tous les sacri ces, pour loffrir au dieu de la pluie. Si les en-
fants pleuraient, c’était signe de pluie. Le sang des victimes
était recueilli et servait à fabriquer les statues du dieu de la
guerre.
Il existait également des sacri ces de jeunes gens, élevés
spécialement dans ce but, à qui lon arrachait aussi le cœur.
Du sommet des temples-pyramides, on jetait ensuite les
corps décapités ; la tête était piquée sur un pieu, le reste étant
dépecé et man. Il s’agissait donc de sacri ces humains an-
thropophagiques.
Les jours de grande fête, de profondes incisions étaient
pratiquées sur dautres jeunes gens aux oreilles et à la lan-
gue, aux bras et à la poitrine. Lorsquune grande quantité de
sang était recueillie, on en aspergeait les idoles.
Des sacri ces massifs de prisonniers étaient offerts au
soleil. Les cœurs des prisonniers étaient offerts au soleil par
les plus vieux des prêtres. Après dépeçage, corps et sang
étaient cuits et mangés par les maîtres de ces prisonniers
avec parents et amis. Après le repas, les convives assistaient
à un tournoi dans lequel les combattants étaient vêtus des
peaux des corps prédemment dégustés.
Les sacri ces offerts au dieu du feu voyaient les prison-
niers recouverts entièrement dune couche de marijuana qui
leur faisait perdre connaissance. Alors, les pieds et les mains
attachés, ils étaient jetés sur un grand tas de braises où ils
grillaient longuement. On les en retirait ensuite avant quils
ne meurent, pour leur arracher le cœur. Puis on mangeait les
corps « grillés au barbecue, heureuse variante des habituels
ragoûts du sang. » 3
Dautres pratiques consistaient à se piquer les jambes
avec des épines de maguey ou à se percer la langue avec un
petit couteau a n d’y faire passer des pailles de graminées,
le nombre de pailles étant proportionnel avec la dévotion de
chacun. Les prêtres ne se lavaient jamais et avaient donc
leurs longs cheveux constamment poissés du sang des vic-
Texte tiré de louvrage Croisades, inquisitions… Faut-
il demander pardon ? Editions du M.J.C.F. Avec laimable
autorisation de léditeur.
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times. En conquence, prêtres, idoles, temples, pierres de
sacri ce étaient en permanence entourés dessaims de « mil-
lions de mouches vrombissant » aux dires des Conquistadors
eux–mêmes.
20 000 victimes étaient ainsi sacri ées chaque année,
mais il y avait des occasions exceptionnelles telle l’inaugu-
ration du temple de Mexico qui vit en quatre jours 20 000
exécutions humaines (certaines sources donnent même jus-
quà 80 000 4).
Dans ce but sanguinaire, les enfants et les jeunes
gens, soit du peuple aztèque, soit des peuples vassaux
(Cempoaltèques) étaient réduits en esclavage ; les prison-
niers provenaient de guerres, appelés « guerres euries »,
menées spécialement à cet effet par les azques contre leurs
voisins. Personne ne s’étonnera dès lors que ces peuples voi-
sins accueillent les Espagnols à bras ouverts et deviennent
volontairement leurs alls.
Les Mayas avaient les mêmes pratiques auxquelles ils
ajoutaient la noyade dans les puits résers au culte, et la dé-
capitation rituelle. Quand les Espagnols débarquèrent, cette
civilisation avait presque disparue à cause de leur religion
inhumaine. Et il serait arrivé de même aux aztèques si la
conquête ne lavait empêchée.
B – Les incas
Lempire Inca est peut–être l’application la plus poussée
que lon ait vue du socialisme en ce temps. En effet, la loi ré-
glementait tous les détails de l’existence quotidienne. Deux
exemples suf samment éloquents le prouvent 5 : l’usage des
chaises était prohibé, seuls les bancs devaient être utilisés ;
l’habillement devait être différent dans chaque région, mais
à lintérieur de celle-ci tous les hommes d’un côté et toutes
les femmes de lautre étaient habillés de façon strictement
identique avec interdiction d’en modi er la forme ou la cou-
leur. La vie y était très routinière et tout ce qui était hors du
commun était abhorré. Cette prise en charge totale rédui-
sant les Incas à des robots sans attrait pour leur société ex-
plique bien plus la victoire de seulement 200 espagnols sur
cet empire que les armes à feu et les chevaux des Européens
(à lopposé, les Araucans du Chili résisteront deux siècles).
A la tête de cet empire se trouvaient des rois quasi-divins
qu’une suite accompagnait partout. Chaque courtisan avait
une fonction comme celle par exemple consistant à recueillir
la salive du roi, qui ne devait pas toucher le sol. Sa femme
était sa sœur aînée ; quand il venait à mourir, on lenterrait
avec quelques serviteurs et servantes, vivants quant à eux !
Les Incas nétaient pas seuls à pratiquer ce genre denterre-
ments.
Les sacri ces humains anthropophagiques étaient aussi
pratiqués, sans être aussi importants que chez les Aztèques.
Mais, une éducation spéciale était done à certains enfants
par les prêtres a n quils soient offerts en sacri ce à lâge de
quinze ans, sacri ce qui leur était annoncé un an à lavan-
ce
Ces pratiques abominables continueront durant le XVIème
siècle de façon clandestine, les Espagnols les ayant bien sûr
interdites. Ce qui est incompréhensible par contre, c’est lélo-
ge que nos contemporains font de ces civilisations. Ces pra-
tiques sont fort semblables aux lois modernes : l’avortement
denfants innocents, l’euthanasie des malades incurables.
II – LA CONQUETE ESPAGNOLE
Si le lecteur a pu être à juste titre horri é par ces sacri-
ces, combien le furent les Espagnols qui les découvrirent.
Les populations alentour : Cempoaltèques, Tlaxcaltèques,
Tarasques, Cañaris, Huancas, subissant cette cruauté reli-
gieuse reçurent avec joie ce que les Espagnols leur appor-
taient : la civilisation et l’Évangile. Il y eut des baptêmes en
masse. Il fallut donc appliquer les principes chrétiens sur une
terre renouvelée.
A – Pouvoirs et législations
Ferdinand et Isabelle, les Rois Catholiques, en ce temps
de chrétienté collaborèrent avec le Pape dans une certaine
mesure. Avant d’examiner leur action et celle de leurs suc-
cesseurs, il nous faut donc indiquer les documents ponti -
caux de cette époque relatifs à la Conquista.
1 – Les documents ponti caux
Pour bien comprendre la conquête du nouveau monde, il
faut avoir présent à lesprit deux choses : d’une part, les pa-
roles de Jésus-Christ à ses apôtres avant lAscension : « Allez
enseigner toutes les nations, les baptisant au nom du Père,
du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à garder tout ce
que je vous ai comman » (Mat. 18, 19–20) ; d’autre part,
Il a aussi dit à Pierre, et donc à ses successeurs, de paître
les agneaux et les brebis (Jean 21, 15–17) et ces deux ca-
tégories représentent les dèles et les pasteurs. La doctrine
de l’Évangile préside donc à toute découverte du nouveau
continent et sexprime dans les actes des papes de l’époque.
Ainsi, Alexandre VI décidet–il de con er la majeure par-
tie de lévangélisation à l’Espagne, une partie revenant au
Portugal. Les Indiens seront donc Espagnols ; à charge pour
les souverains de ce pays denvoyer des missionnaires et de
les nancer. C’est ce qui ressort de la bulle Inter Cœtera du
3 mai 1493 con rmée la même année par la bulle Piis -
La conquête des Amériques
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3
delium. Ces nouveaux pouvoirs des rois d’Espagne sont ac-
crus par d’autres bulles qui, par làmême, con rment les
précédentes : Jules II avec Eximiae devotionis en 1503 et
Universalis ecclesiae en 1508, puis une autre bulle en 1513 ;
on X en 1518 ; Adrien VI par Omnimoda en 1522 ; Paul III
en 1535 et en 1547 ; Paul IV en 1555 ; Urbain VIII en 1639 et
Benoît XIV en 1741.
Ce bel ensemble fut toutefois interrompu sous le seul
ponti cat de Paul III, trom par le dominicain Minaya qui
sopposait à la colonisation et donc à lévangélisation. Les
missionnaires sans protection étaient la proie des Indiens,
puisquil estimait que lévangélisation devait se faire sans
protection. Pour combattre la colonisation, ce religieux et
ses confrères chargèrent les Conquistadors de tous les cri-
mes et déclarèrent que les Indiens étaient moins sanguinai-
res avant la venue des Espagnols. Par exemple, peu après
les lois de 1513, le dominicain Cordoba écrit à Ferdinand le
Catholique : « Que votre Majesté ordonne quon les aban-
donne, car il serait bien meilleur quils aillent seuls en enfer,
comme avant, que ne se damnent ensemble, eux et les nô-
tres ». Cette façon de présenter les choses naboutit pas 6. Les
dominicains Montesino, Las Casas (dont son frère d’habit,
Domingo de Soto, dénonça les exagérations et les inexactitu-
des) et quelques autres religieux dautres ordres ressemblent
fort auxres de la théologie de la libération et des calom-
nies actuelles contre l’Église.
Ces calomnies trompèrent Paul III qui, par son bref du
29 mai 1537 Pastorale of cium et la bulle du 2 juin 1537
Sublimis Deus, critiqua les responsables espagnols, avec vé-
hémence, mais sans les nommer, et prit des mesures d’une
extraordinaire sévérité telles que lexcommunication « la-
tae sententiae » (sans déclaration nominative, latente), to-
talement injusti ées. Sapercevant quon lavait circonvenu,
Paul III révoqua avec colère les documents quon lui avait
extorqués, par le bref Non incendens videtur du 19 juin
1538. 7
2 – La législation espagnole
Malgré tout, les souverains espagnols navaient pas at-
tendu si longtemps pour légiférer en faveur des Indiens ;
ils l’ont même fait dès le début. Les premières instructions
données à Christophe Colomb par les Rois Catholiques à
Barcelone, datées du 29 mai 1493, recommandent de « trai-
ter bien et avec amour les Indiens, sans leur faire aucun en-
nui, et de manière quavec eux ils aient beaucoup de conver-
sations et de familiarité, leur faisant les meilleurs œuvres
quil se peut ». Le ton est donné et il ne changera pas. Dans
la même lignée, Isabelle la Catholique interdit lesclavage
s le 6 juin 1495, condamnation quelle réitérera en 1499.
Puis elle continue sur sa lancée en 1501, en adressant de nou-
velles instructions au gouverneur des Antilles, Nicolas de
Ovando. Celles-ci stipulent que les Indiens sont des hommes
libres, sujets naturels de la Couronne comme les Espagnols.
Ces instructions exigent que les femmes et jeunes lles qui
auraient été capturées soient libérées et que leurs biens leur
soient rendus. Leur travail devra être payé et limpôt devra
être xé de concert avec leurs anciens chefs, impôt qui sera
revu à la baisse. En n, les instructions rappellent l’impérieu-
se nécessité de leur enseigner les vérités de la foi.
Mais ces mesures étaient dénuées dune pore sociale
réelle, laissant les Indiens sans organisation politique véri-
table. Alors, la souveraine envoya des instructions complé-
mentaires palliant ce manque. En 1503 et 1504, outre leur
protection contre la rapacité des aventuriers européens, la
souveraine prévoit que les Indiens seront regroupés dans des
villages, et con és à un espagnol, « une bonne personne »,
pour y être protégés, gouvers et civilisés. Chaque chef
de famille sera pleinement propriétaire dune maison et de
champs sur lesquels il fera des cultures ou élèvera du bétail.
En n dans chaque village un prêtre soccupera de léglise et
de lécole. Ce système élaboré par la reine sappelle « enco-
mienda ». Il sera très béné que et cest pourquoi les ennemis
de la conquête le critiqueront particulièrement. Mais Isabelle
va plus loin et ordonne à Ovando de construire des hôpi-
taux-hospices où seront accueillis les pauvres tant Indiens
qu’Espagnols. Cinq seront construits aux Antilles presque
exclusivement à ses frais personnels. Lencomienda perdu-
rera jusquà la n du XVIIIe siècle avec des modi cations,
et sera pour les Indiens source de bienfaits temporels, de
conversions et d’authentique vie chtienne. Le seul repro-
che fait à cette encomienda est davoir été mise en œuvre à
trop peu d’endroits. Elle sera remplacée au XIXe siècle par
l’hacienda, dinspiration libérale et laïciste, dans laquelle les
Indiens seront effectivement dépossédés. En 1504, Isabelle
écrira dans le codicille de son testament, ce qu’elle na cessé
de stipuler dans ses instructions, à savoir : bons traitements
et réparation des torts causés.
Après l’interde de Philippe le Beau, cest Ferdinand
dAragon, régent de Castille, qui va prendre en charge les af-
faires américaines dès 1512, après que les dominicains dont
nous avons parlé se soient plaints du sort des Indiens, spé-
cialement par les sermons de Montesino. Le régent réunit
un certain nombre de conseillers. Leur avis commun sera
à lorigine des lois de Burgos (en janvier 1513), qui renfor-
cèrent la protection des Indiens notamment par le respect
obligatoire deriodes de repos. De plus, a n de bien con-
naître la situation, Ferdinand demanda des rapports à qua-
tre spécialistes. Il est à noter que les interventions des dits
dominicains, surtout celle de Cordoba rappore ci–dessus,
contredisent les rapports plutôt favorables au système. Le
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roi catholique promulguera de nouvelles lois à Valladolid,
six mois après celles de Burgos, pour protéger spécialement
les femmes, les jeunes lles, les jeunes gens, enfants et tra-
vailleurs des mines qui béné cieront de trois mois par an
pour cultiver leurs terres.
Le seul défaut des lois de Burgos, repris par celles de
Valladolid, concerne les repartimientos. Ces repartimien-
tos sont des répartitions de charges personnelles de travail
données aux Indiens contre un salaire. Les dominicains vont
dénoncer la soi-disant lourdeur des charges de travail que
les lois limitent pourtant strictement ! Ils en pro teront pour
rejeter toute la responsabilité sur le fonctionnement de len-
comienda, quils ont en horreur. Las Casas réussira à la fai-
re supprimer par Charles Quint dans des lois promulguées
le 20 novembre 1542. Heureusement, cette suppression ne
sera jamais appliquée, ayant été refusée par tout le continent
américain. Charles Quint annulera ces dispositions par deux
cédules : l’une promulguée à Malines, le 20 octobre 1545 et
lautre à Ratisbonne, le 6 avril 1546. Las Casas se voyait dé-
savoué sur toute la ligne, sauf concernant lesclavage. 8 En
effet, depuis 1534, la Couronne avait autorisé lesclavage
dans deux cas : selon les coutumes indiennes, les prison-
niers de guerre pouvaient devenir des esclaves, et il était
possible de prendre comme esclave une personne qui létait
déjà. Mais en 1542, cest-à-dire huit ans après leur autorisa-
tion, ces deux cas d’esclavage seront à nouveau interdits. Le
Mexique comptait alors 3 000 esclaves sur une population de
6 à 7 millions de personnes. Les derniers seront libérés en
1561. Quant au Pérou, seconde vice-royauté d’Arique, il
n’y avait tout simplement pas desclaves.
Lappareil législatif gouvernemental fut donc rapidement
élaboré pour protéger, civiliser et évangéliser les Indiens et
sanctionner les manquements des colons
B – Lʼapplication des principes
Les manquements et les abus furent sanctionnés, car
ils existaient. Ce qui est faux, cest de donner à ces man-
quements valeur de principes et den exagérer fortement
le nombre. A vrai dire, la cupidité nest pas chez tous les
Conquistadors. De plus, larchevêque dominicain de Lima
(Pérou), de concert avec tous les religieux, prit lexcellente
initiative en 1560 de refuser labsolution de leurs péchés à
ceux qui, ayant pris des biens indûment ou ayant causé quel-
que dommage, nont pas indemnisé les victimes ou restit
le bien. Cette mesure concrète fut dune ef cacité inouïe car,
à cette époque, les gens avaient encore souci de leur salut.
Les religieux furent à lorigine dautres bienfaits, notamment
léducation. Ainsi chaque couvent soccupait d’une école
(on nen décomptait pas moins de 300 rien qu’au Mexique).
De plus les Espagnols, outre lart des sacri ces humains
et le rétablissement de la paix, apportèrent le fer, la roue
que les Indiens ne connaissaient pas, le blé, lorge, les che-
vaux, les mules, les ânes, les bœufs, les brebis, les chèvres,
les porcs, une multitude darbres, une véritable agriculture.
Ils construisirent des hôpitaux, des collèges pour garçons et
d’autres pour les lles, et par dessus tout, ils leur rent le
don inestimable de la foi. Par exemple, le franciscain Martin
de Valencia, arrivé dès 1493, détruit en 1525 toutes les ido-
les du royaume Tarasque, brisant avant de les jeter au fond
du lac, celles dor, dargent et de pierres précieuses 9, et brû-
lant les autres. Il va jusquà demander aux Tarasques de dé-
truire eux-mêmes leurs temples. De même, le Conquistador
Fernan Cortès, invité par lempereur Aztèque, encore in-
vaincu, à le visiter à Mexico, entrne ses 130 hommes à se
jeter sur les idoles pour les détruire ! Ils étaient pourtant en-
tous de toute larmée Azque pour le moins aguerrie au
combat. Ces faits manifestent bien le vrai but de la conquête :
la conversion des nations et non lenrichissement des naviga-
teurs, la charité et non la cupidité. Dès lors, si des Indiens ont
pu mourir injustement par de mauvais traitements ou autre
iniquité, ce furent des faits marginaux. Beaucoup moururent
malheureusement pour des raisons virales ou microbiennes.
Les autorités, tant locales quespagnoles veillaient et sanc-
tionnaient tous les abus. Ainsi les vice-rois du Portugal et
du Mexique consacraient deux jours par semaine aux ré-
clamations que les Indiens venaient formuler. Les chefs des
Tlaxcaltèques pouvaient, en raison des liens étroits qui les
unissaient aux Espagnols, se rendre en Espagne même pour
clamer. Et ils le rent de temps en temps.
Dailleurs l’empereur, par souci de justice suspen-
dit toute conquête, le 16 avril 1550, a n que se déroule la
« Controverse de Valladolid » où saffrontèrent devant quin-
ze juges Las Casas et Sépulveda qui débattirent du bien fon-
dé et de la manière de conquérir. Sépulveda lemporta et les
conquêtes reprirent toujours sous la même législation. Cette
politique ne devait plus changer jusqu’à lindépendance de
l’Amérique au XIXe siècle. Alors les ennemis de l’Église
laccusèrent avec lEspagne de crimes dont elle était inno-
cente (mais queuxmêmes commettaient) 10, et se forgea la
« légende noire de la Conquista ».
Voici les faits réels, tels que l’histoire les rapporte, de la
conquête des Amériques par l’Espagne catholique. Ils suf -
sent largement pour répondre aux mensonges rabâchés par
une mauvaise propagande anti-chrétienne. Les souverains
espagnols mirent sur pied une législation exceptionnelle
adaptée à la mise en valeur des immenses terres découver-
tes. Certes, il y eut des guerres tribales, des révoltes indien-
nes, des exploitations des indigènes par des colons peu scru-
puleux. Le paradis nexiste plus sur terre, de tels malheurs
sont inévitablement liés à toute société humaine. Mais – et
La conquête des Amériques
le Thomatique ? Une base de données d’articles de fond touchant à la foi catholique.
5
cest la marque d’une saine organisation politique – les gou-
vernants tentèrent toujours de mettre n à ces tribulations
pour le bien commun de tous. Ils y parvinrent et non seule-
ment les Indiens dArique Centrale et du Sud furent libé-
rés du joug asservissant des civilisations précolombiennes,
mais une cité nouvelle vit le jour où fusionnèrent sous légi-
de du catholicisme, et dans la paix, les colons européens, les
Indiens libérés et les noirs amenés dAfrique : la civilisation
latino-américaine était née, issue de la colonisation et par là-
même, unique et remarquable réussite dans lhistoire mon-
diale des missions.
Bibliographie :
DAlès, Dictionnaire apologétique de la foi catholique,
article « Précolombien ».
Jean Dumont : La vraie controverse de Valladolid,
Critérion, 1995.
Igor Chafarévitch : Le phénomène socialiste, éditions du
Seuil, 1977
Notes
1 Il fallait, pour les civiliser et les évangéliser, les intégrer
dans une structure politique saine. De plus, il est impos-
sible de parler de découverte, la tradition nous rapporte
en effet quun apôtre, saint Thomas ou saint Barnabé,
sest rendu aux Amériques pour y prêcher l’Évangile ; par
ailleurs, nous savons que dès le Xe siècle, le navigateur
Islandais Leif a longé les côtes de ce continent jusquà
la hauteur des États-Unis actuels. La preuve nous en est
donnée par la découverte à Newport, sur l’île de Rhodes
Island, de vestiges d’une église de pierre remontant au
XIe siècle.
2 Jean Dumont : La vraie controverse de Valladolid,
Critérion, 1995, p. 235 (ce livre contient nombre d’infor-
mations intéressantes qui nous ont été fort utiles pour cet
article. Cependant, nous pouvons y déplorer un certain es-
prit pas toujours très catholique dans certaines analyses).
3 Ibid.
4 Savoir et Servir, n° 55 : La messe a-t-elle une histoire ?
p. 9.
5 Ces informations sont dones par Igor Chafarévitch : Le
phénomène socialiste, éditions du Seuil, 1977.
6 Cordoba semble ici se soucier des Espagnols alors que son
seul intérêt est le départ des Conquistadors. On notera au
passage le peu de zèle dont il fait preuve pour le salut des
Indiens, à croire quil leur est impossible de se sauver.
7 La délégation apostolique dont béné ciaient les souve-
rains Espagnols était totalement con rmée doù la res-
ponsabilité quils avaient devant Dieu et leur souci cons-
tant des Ariques.
8 Sa moralité demeure largement paradoxale et même con-
tradictoire, lui qui dénonçait lesclavage tout en utilisant
des esclaves ! Après avoir été nommé évêque du diocè-
se mexicain de Chiapas en mars 1545, il devra quitter sa
charge en février 1546 ayant été rejeté par tous les reli-
gieux du pays.
9 Il ne les a donc pas gardées par cupidité.
10 Bien des choses resteraient à dire en effet sur la conquê-
te de lAmérique du Nord par lAngleterre anglicane ou
sur les possessions de la Hollande protestante en Orient
et en Amérique du Sud. Azteca, Gary Jennings, 1980,
Atheneum, New-York. Lauteur a travaillé 10 ans dans la
jungle, dans les ruines de la civilisation aztèque, en bi-
bliothèque pour écrire son livre où il ne cache pas – loin
de là – les mœurs de cette civilisation tout en étant assez
violemment anticatholique.
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