Marie Bodet – « Le Marketing du Féminisme » - Master Management de l'Information Stratégique – 2015 4
Introduction
« On ne nait pas femme : on le devient ».1 Cette citation de Simone de
Beauvoir est sans doute la plus marquante de la pensée féministe. Considéré
comme le plus grand livre de philosophie contemporaine sur le féminisme, Le
deuxième sexe positionne pour la première fois en France la femme comme figure
de l’Autre aliénée par la culture dominante masculine.2 Les inégalités homme/femme
seraient donc construites culturellement et non naturellement : au départ égaux
intellectuellement et physiquement, l’idéologie masculine omniprésente ferait de la
femme un être inférieur et de l’homme son maître. Le terme « maître » peut paraître
exagéré mais pour de Beauvoir, l’oppression de la femme par l’homme est bien
comparable à l’esclavage. Il est important de remettre ce livre fondateur
existentialiste dans son contexte. En 1949, la France se relève de deux guerres
successives aux conséquences matérielles et immatérielles catastrophiques. Tout
est à reconstruire, y compris une natalité durablement effondrée. Malgré le baby-
boom, la natalité peine à se redresser et le modèle de la mère au foyer apparaît
comme un idéal féminin plus que jamais auparavant. Le « natalisme » à la suite de la
Seconde Guerre Mondiale est alors au centre des préoccupations politiques, le rôle
de la femme étant vite réduit à la maternité.3 La sexualité de la femme est bien sûr à
cette époque un sujet tabou et la question du travail des femmes ne se pose pas
malgré leur mobilisation pendant la guerre. Dans ce contexte économique, social et
politique réducteur pour la gent féminine, Le deuxième sexe qui propose sa libération
par l’accès au travail, la sexualité assumée et le refus de la maternité, fait l’effet
d’une bombe. Le débat houleux autour de ce livre à scandale, qualifié de « manuel
d’égoïsme érotique »4 voire de revue pornographique par certains intellectuels, a
contribué aux nombreuses avancées en matière de droit des femmes.
Nous pouvons nous demander si, plus de soixante ans plus tard, le combat
féministe a encore lieu d’être. En effet, grâce à Simone de Beauvoir et bien d’autres
1 Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe, Gallimard, 1949, pages 285 et 286.
2 « De Beauvoir et Le deuxième sexe : explication », La Philosophie, 2012.
3 Sylvie Chaperon, « Histoire d’une œuvre fondatrice du féminisme », le Monde Diplomatique, 2009.
2 « De Beauvoir et Le deuxième sexe : explication », La Philosophie, 2012.
3 Sylvie Chaperon, « Histoire d’une œuvre fondatrice du féminisme », le Monde Diplomatique, 2009.
4 Citation de Jean Kanapa, ancien élève de Jean-Paul Sartre, 1949.