1er colloque francophone d`anthropologie de la santé à Madagascar

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APPEL A COMMUNICATION
Colloque international
14, 15, 16 mars 2016 – Antananarivo, Madagascar
« Santé des femmes et des enfants : des soins domestiques aux politiques
publiques. 1er colloque francophone d’anthropologie de la santé à
Madagascar »
Initié par l’Institut Pasteur de Madagascar, l’Institut de Recherche pour le
Développement et la Coopération française
Comité d’organisation : Dolorès Pourette (IRD-CEPED),
Christine Bellas-Cabane (Ambassade de France), Chiarella Mattern (IPM)
Argumentaire du colloque
L’anthropologie de la santé est un nouveau champ de recherche à Madagascar. La
population de la Grande Ile est confrontée à de nombreuses problématiques de santé
(paludisme, malnutrition, mortalité maternelle et infantile, diarrhée infantile, peste, rage,
hépatite B, infections sexuellement transmissibles…) dont les dimensions socioanthropologiques sont importantes mais encore peu étudiées. Le contexte sanitaire est en
outre caractérisé par des inégalités socio-économiques et des inégalités d’accès aux soins
qui se creusent d’année en année. Les crises récurrentes qui affectent le pays ont
notamment contribué à fragiliser les populations les plus défavorisées. Au moment où le
pouvoir d’achat des ménages a beaucoup diminué, le système de santé publique s’est
considérablement affaibli et la qualité de l’offre de soins s’est particulièrement dégradée.
Si la population la plus aisée peut faire appel à un secteur médical privé relativement
diversifié, les populations les plus pauvres développent quantité de pratiques dans leurs
recherches de soins (phytothérapie, recours aux matrones et autres guérisseurs
traditionnels). Certaines pratiques trouvent leurs sources dans les mouvements de
mondialisation qui ont bouleversé Madagascar dans les années 1980 à l’instar du reste de la
planète (« traitements par la prière » proposés par les nouvelles églises, recours aux
médicaments pharmaceutiques industriels…).
Afin de mener des réflexions sur les nombreux enjeux anthropologiques que posent les
questions de santé à Madagascar, nous organisons le premier colloque en anthropologie de
la santé sur la Grande Ile. L’entrée générale des réflexions qui seront menées au cours de ce
colloque est la santé des femmes et des enfants. Cette thématique générale focalise un
certain nombre d’enjeux importants dans le domaine de la santé : les politiques de santé
maternelle et infantile, la prise en charge de la grossesse et des nouveaux nés, les difficultés
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dans l’accès aux soins, les conditions d’accouchement, la qualité de l’offre de soins, l’accueil
des soignants, les rapports sociaux de genre, l’usage de la médecine par les plantes, les
pratiques traditionnelles entourant la grossesse et les soins donnés à l’enfant, le traitement
des infertilités, etc.
Les objectifs de ce colloque sont de faire un état des lieux des recherches en cours et
achevées à Madagascar, de mettre en réseau les chercheurs et enseignants-chercheurs
impliqués dans ce champ d’étude, et de faire émerger de nouvelles problématiques de
recherche à Madagascar, permettant à terme de contribuer à l’amélioration de la santé des
femmes et des enfants et à une meilleure appropriation des programmes de santé.
Les interventions permettront des échanges entre intervenants locaux et conférenciers
internationaux. Bien qu’il s’agisse d’un colloque en anthropologie de la santé, il sera
également un espace d’échanges et de dialogues pluridisciplinaires. Des interventions de
professionnels de la santé et d’acteurs de terrain seront ainsi les bienvenues. Seront
privilégiées les communications en relation avec Madagascar.
Nous avons choisi de placer sous le signe de la francophonie ce premier colloque
d’anthropologie de la santé organisé à Madagascar. Il marquera lors de sa séance inaugurale,
à l’Institut Français de Madagascar, la première manifestation de la semaine de la
francophonie. Les propositions de communications pourront s’inscrire dans les axes
thématiques suivants :
-
La santé des femmes : de la magie de la naissance à la santé de la reproduction
La santé de la reproduction est un vaste champ qui repose sur la notion de santé au sens
large, englobant la notion de bien-être physique et psychologique concernant la vie sexuelle
et reproductive dans son ensemble. Derrière cette dénomination institutionnelle, se
déroulent des expériences vécues par des femmes, des hommes, des couples, des familles,
des jeunes filles…, dans un contexte où la mortalité maternelle reste élevée (478 décès
maternels pour 100 000 naissances vivantes) et où la mortalité néonatale stagne (26 décès
pour 1000 naissances vivantes). Plus largement, elle concerne également les professionnels
de santé, comme les « sage-femme », et leurs statuts, prérogatives, attitudes et pratiques.
Cet axe thématique accueillera des communications sur les différents aspects de la santé de
la reproduction dans une perspective anthropologique : négociation des pratiques sexuelles ;
recours à la contraception ; grossesses précoces ; vécu de la grossesse et pratiques qui
l’entourent (pratiques d’évitement : ne pas dire / ne pas montrer, recours thérapeutiques,
suivi de grossesse et ses configurations sociales, préparation à la naissance) ; expériences de
l’accouchement (lieu et acteurs impliqués, complications obstétricales) ; pratiques
postnatales (confinement ou mifana, soins postnatals) ; recours à l’avortement et
complications qui y sont liées ; Aide Médicale à la Procréation (AMP) ; perceptions et prise
en charge de la stérilité…
Seront également bienvenues des communications sur les maladies gynécologiques, les
fistules obstétricales, et les infections sexuellement transmissibles, dont le sida : quels sont
leurs statuts, comment sont-elles perçus, font-elles l’objet de pratiques de prévention, quel
est l’impact du genre sur leur appréhension, quels recours thérapeutiques suscitent-elles ?
Des interventions sur les pratiques des soignants (sages-femmes, gynécologues,
obstétriciens…) et leurs représentations des patient-e-s seraient appréciées : pratiques
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obstétricales, accueil et communication entre soignants et soignés, rôle et attitudes des
différents professionnels.
-
La santé des enfants
L’anthropologie de l’enfance s’est constituée en France à partir des années 1980 autour des
travaux de Doris Bonnet, Suzanne Lallemand, Charles-Edouard de Suremain... Ces travaux
ont mis en évidence la portée heuristique de ce champ de recherche et les nombreux enjeux
sociaux, politiques qu’il soulève (Bonnet & Pourchez, 2007).
Les études socio-anthropologiques sur l’enfant et sa santé sont rares et peu connues à
Madagascar, où pourtant les taux de mortalité infantile restent élevés. Nous sollicitons des
communications sur les configurations sociales autour de la naissance et de la petite
enfance. Les places et rôles de la matrone (accoucheuse traditionnelle) en articulation avec
les professionnels de santé méritent d’être questionnés. La place des pères dans les soins et
la prise en charge des enfants, le partage des responsabilités et éventuellement la
redistribution des tâches telle qu’on l’observe dans certains contextes africains sont à
interroger. Les rôles confiés aux femmes de la famille (grand-mère, tante…), notamment
pendant les premières semaines suivant l’accouchement au cours desquelles la mère doit
rester confinées, méritent d’être analysés. Il serait intéressant de présenter des recherches
sensibles à la marginalisation de la mère (face au père, à la famille élargie, aux leaders de la
communauté, aux autorités religieuses locales, etc.) dans les processus de gestion du
rapport à la naissance et aux soins aux enfants.
Il semble qu’à Madagascar, il y ait peu de réseaux de solidarité féminine institutionnalisés ou
d’associations de patients. Les associations de tradipraticiens ou les associations
confessionnelles peuvent-elles être légitimes pour porter des initiatives visant à améliorer la
santé des femmes et celle des enfants ?
Sont également attendues des interventions sur les pratiques autour de la naissance et de la
petite enfance (maternage, allaitement…), sur les pratiques alimentaires, sur les conduites
préventives (rites de protection, vaccination, dépistage : drépanocytose, hépatite B, VIH…) et
curatives (itinéraires de soins, perceptions et catégorisations des symptômes des enfants),
sur la place et le statut de l’enfant malade dans la famille et les institutions de soins. Sont
également attendues des communications sur les attitudes des personnels de santé face aux
enfants (prise en charge de la douleur, des plaintes de l’enfant) et leur entourage.
-
Anthropologie des politiques publiques de la santé : les pratiques locales à
l’épreuve de la globalisation
Dans les pays « en développement » actuellement nommés pudiquement « en transition »
comme Madagascar, de nombreux partenaires (agences onusiennes, coopérations
bilatérales, Fonds mondial, alliance pour la vaccination, fondations) proposent leur aide aux
gouvernements, le plus souvent sous forme de programmes verticaux. Malgré un réel effort
pour travailler « en complémentarité », ces programmes sont parfois vécus localement
comme concurrentiels par ceux qui les mettent en œuvre. Comment peut se faire la
hiérarchisation entre les différentes priorités dans un pays aux multiples difficultés comme
Madagascar ?
Promoteurs de santé à l’échelle planétaire, comment sont perçus ces programmes par les
acteurs de santé aux différents niveaux du système de santé, des ministères aux acteurs de
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terrain ? Comment les acteurs de santé de terrain (souvent formés à la hâte) comprennentils et s’approprient-ils les messages de prévention qu’ils diffusent aux populations ? Quel est
le lien avec le travail de routine, l’adhésion à l’objectif de ces programmes, les apports
financiers et matériels formels et informels pour ceux qui les mettent en œuvre ?
Quelle est la compréhension, l’acceptation, par les bénéficiaires, de ces programmes de
santé (vaccination, lutte contre le VIH, le paludisme) ? Quel est le lien avec leurs
préoccupations quotidiennes en matière de maladies et de nutrition ? Quelle valeur
symbolique attribuent-ils à ces « promesses de santé » ? Quelle est la complémentarité des
pratiques coutumières de lutte contre les maladies de la femme et de l’enfant, encore très
vivaces à Madagascar, et celles induites par ces programmes ?
Plus généralement, des réflexions sur l’élaboration et la mise en place des politiques de
santé mère-enfant à Madagascar sont attendues. Comment ces politiques sont-elles
élaborées, transmises, comprises, réappropriées et appliquées sur le terrain par les acteurs
de santé ? Quel rôle l’anthropologie peut-elle jouer dans l’élaboration, la perception et
l’application de ces dispositifs de santé ? Quelle place ces politiques accordent-elles aux
pratiques et savoirs des tradipraticiens et des matrones intervenant dans la santé des
femmes et des enfants ? Comment ces tradipraticiens sont-ils mobilisés dans l’offre de
soins ? Quelle évaluation peut-on faire de ces expériences de collaboration ?
L’Etat malgache est en train de mettre en place la Couverture Santé Universelle (CSU). Dans
cette perspective, il semble nécessaire d’avoir des éléments de connaissances des
perceptions du système de santé par les malades et les soignants, des freins qui entravent le
recours aux soins dans les centres de santé, ainsi que des mécanismes de gratuité pouvant
être instaurés.
-
Culture, soins et santé publique
La place de la culture dans les recherches et les interventions de santé publique a retenu
abondamment l’attention dans les années 1970-2000 en anthropologie de la santé (Massé,
1995). Il est toujours pertinent de s’y intéresser, toutefois il est aussi devenu évident que le
rôle des facteurs politiques et surtout des rapports sociaux asymétriques doit être pris en
compte par une anthropologie critique de la santé publique. Il est acquis désormais en
anthropologie de la santé que le défi à relever est de chercher les modes de cohabitation des
lectures culturalistes et critiques, des approches constructivistes et politiques, de l’influence
des représentations socioculturelles et des violences structurelles (Massé, 2010). Des
réflexions sur les enjeux et modalités soulevés par cette difficile cohabitation seraient
appréciées, notamment dans le domaine de la santé mère-enfant.
S’agissant des relations soignant-soigné, à Madagascar (Mestre, 2014) comme dans d’autres
contextes (Jaffré et Olivier de Sardan, 2003), des statuts et des systèmes de valeurs inégaux
se heurtent sans toujours se rencontrer dans le rapport de soins. Comment ces inégalités se
traduisent-elles dans les démarches de recherches de soins des femmes et des mères, et
dans les pratiques des soignants ? Quels sont les facteurs induisant des attitudes d’aide et de
compassion ou de rejet ? En miroir, quelles perceptions les mères, les pères et les familles
ont-ils des soignants, dans les centres de santé et dans les hôpitaux ?
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-
Anthropologie du médicament
Le médicament est un objet complexe et « bon à penser » (Desclaux et Egrot, 2014). Ses
définitions relèvent de différents registres – médical, pharmacologique, juridique,
commercial – et ses usages et significations sont multiples et varient en fonction des
contextes sociaux (Baxerres, 2010).
A Madagascar, comme dans d’autres pays du Sud (Desclaux et Egrot, 2014) où l’accès aux
soins est difficile, où les inégalités de santé sont marquées et où les médicaments essentiels
sont insuffisants ou parfois absents, on observe une circulation et une consommation
importantes des médicaments, notamment dans les pratiques d’automédication.
Seront bienvenues des communications sur les perceptions et statuts du médicament à
Madagascar, le recours aux médicaments notamment autour de la fécondité (contraception,
avortement), le rôle du marché informel du médicament dans ces pratiques, le recours aux
antibiotiques et autres médicaments dans les pratiques d’automédication familiale, les
perceptions des effets secondaires des médicaments (notamment des contraceptifs
hormonaux, des traitements antirétroviraux)… Des communications sur la valorisation de la
pharmacopée traditionnelle par des laboratoires pharmaceutiques sont aussi encouragées.
Plus précisément, nous attendons des communications sur l’usage et la distribution des
« médicaments traditionnels améliorés » (Simon & Egrot, 2012) qui sont produits et
commercialisés entre autres par les établissements tels que « Homéopharma » ou l’« Institut
Malgache des Recherches Appliquées » à Madagascar. Aujourd’hui, des compléments
alimentaires (notamment les compléments nutritionnels à prendre durant la grossesse) et
des produits de phytothérapie traditionnelle sont valorisés par ces entreprises et circulent
via différents canaux de distribution (pharmacies, grandes surfaces). Ces médicaments néotraditionnels visent notamment la prise en charge des maladies du quotidien et des maladies
chroniques.
Modalités de soumission
Les propositions de communications seront reçues jusqu’au 10 janvier 2016 au plus tard à
l’adresse :
[email protected]
Les propositions de communications devront comporter :
- Le nom, la fonction, l’appartenance et le lieu de résidence (ville, pays) de l’auteur /
des auteurs
- Le titre de la communication
- Un résumé de la communication (1 page maximum)
Dates et lieu du colloque :
Le colloque se tiendra du 14 au 16 mars 2016 à Antananarivo.
Il n’y a aucun frais d’inscription. Cependant, une pré-inscription est recommandée afin de
pouvoir organiser au mieux le déroulement du colloque et l’accueil des participants.
Un budget sera prévu pour prendre en charge les frais de déplacements des communicants
originaires des provinces malgaches.
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Comité d’organisation :
POURETTE Dolorès (IRD-CEPED)
BELLAS-CABANE Christine (Ambassade de France à Madagascar)
MATTERN Chiarella (Institut Pasteur de Madagascar-IPM)
RABOANARY Emma (IPM-Université de Bourgogne)
ANDRIANASOLO Andry (IPM-Université de Bourgogne)
RAKOTOMANANA Elliot Fara (IPM)
RAMANAMAHEFANA Kanto (IRD)
Comité scientifique:
POURETTE Dolorès (IRD-CEPED)
BELLAS-CABANE Christine (Ambassade de France à Madagascar)
MATTERN Chiarella (Institut Pasteur de Madagascar-IPM)
BONNET Doris (IRD-CEPED)
DESCLAUX Alice (IRD)
JAFFRE Yannick (CNRS, EHESS Marseille)
MASSE Raymond (Université de Laval)
OLIVIER DE SARDAN Jean-Pierre (LASDEL)
POURCHEZ Laurence (INALCO)
RAKOTOMALALA Olivier (UCM)
RIDDE Valéry (Université de Montréal)
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