Rapport sommaire final de la Conférence
Maîtriser les files d’attente 2014 : « Et quel système nous aurions! »
Introduction
La 11e conférence Maîtriser les files d’attente (MFA), qui a eu lieu à Ottawa les 3 et 4 avril 2014,
était centrée sur le thème de la pertinence dans les soins de santé au Canada. Étant donné le
nombre de participants, ce choix n’aurait pu être plus approprié.
Non seulement la réunion de 2014 a-t-elle attiré un des groupes les plus nombreux depuis la
première conférence en 2004 160 personnes , mais chaque province y était aussi représentée,
tout comme l’étaient les Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement fédéral et de nombreuses
organisations des secteurs de la médecine et des soins de santé. L’auditoire nombreux incluait
aussi des étudiants et des représentants des patients.
Préparer le terrain
Le Dr Sam Shortt, directeur du Bureau des initiatives portant sur la qualité à l’Association
médicale canadienne (AMC), a lancé la discussion en présentant un survol de la pertinence dans
les soins de santé (www.cfhi-fcass.ca/sf-docs/default-source/tq2014/tq2014-1-sam-
shortt.pdf?sfvrsn=2). Il a commencé par la définition suivante, que l’AMC a adoptée en 2013 :
« Les soins pertinents s’entendent des bons soins offerts au bon patient par le bon fournisseur, au
bon endroit et au bon moment ».
Le Dr Shortt a expliqué que si les cinq éléments sont présents, les bons soins seront offerts au
bon coût.
« Il s’agit là des soins pertinents définis comme il se doit, a-t-il dit. Si chaque contact dans le
système de santé hospitalisation, visite à un fournisseur de soins primaires, admission aux soins
à domicile répond à chacun des cinq critères de la pertinence, on aura alors optimisé la qualité
des soins et l’utilisation des ressources sur tout le continuum. »
« Et quel système de santé nous aurions! »
Au cours de la discussion qui a suivi, les commentaires d’un médecin ont laissé présager une
partie du débat qui suivrait. Il importe d’améliorer le système de santé, a-t-il dit, mais le
changement ne sera pas efficace à lui seul si l’on ne tient pas compte aussi des déterminants
sociaux de la santé à l’origine d’une grande partie de la demande de services de santé et si l’on
n’essaie pas de surmonter des problèmes comme la pauvreté et l’itinérance.
« C’est l’élément du tableau d’ensemble que nous abordons rarement », a répondu le Dr Shortt,
même s’il a signalé que les déterminants sociaux de la santé viennent en tête de liste des priorités
de l’AMC.
Le Dr Tom Noseworthy de l’Université de Calgary a ensuite préparé le terrain pour une grande
partie de la discussion qui a suivi au cours de la MFA de 2014 en présentant un aperçu de l’état
de la recherche sur la pertinence (www.cfhi-fcass.ca/sf-docs/default-source/tq2014/tq2014-1-
tom-noseworthy.pdf?sfvrsn=2). Il a signalé que la pertinence constitue un principe
multidimensionnel où peuvent exister de multiples points de vue parfois divergents.
Il a déclaré qu’il sera crucial de mettre au point des outils d’aide à la décision et des aides à la
prestation de soins appropriés et il a décrit le travail effectué dans ce domaine par son équipe
émergente des Instituts de recherche en santé du Canada. L’équipe aborde la pertinence de
l’arthroplastie totale (AT) de trois angles différents en sollicitant le point de vue des patients, des
chirurgiens et des décideurs pendant qu’elle met au point un outil d’aide à la décision validé par
les résultats, qui aidera à déterminer la pertinence de l’AT.
Le Dr Noseworthy a décrit le travail effectué jusqu’à maintenant et déclaré que les étapes
suivantes incluront la création d’un outil d’aide à la décision comportant des caractéristiques
prédictives et qui « appuiera les décisions d’un patient et d’un chirurgien sur la pertinence de
l’AT. »
La pertinence dans la pratique : les bons soins et traitements
La conférence MFA de 2014 se déroulait au bon moment. Par hasard, la première journée de la
réunion a eu lieu le lendemain du lancement, le 2 avril, de Choisir avec soin
(http://www.choisiravecsoin.org/), programme innovateur dans le cadre duquel on demandera
aux médecins et aux patients de déterminer si certains examens et traitements sont vraiment
nécessaires. Des sociétés de spécialistes, dont neuf ont déjà envoyé huit listes factuelles de cinq
examens, ou actes qui peuvent être surutilisés dans chaque spécialité, joueront un rôle clé. Le
Forum sur les enjeux de la pratique générale et familiale de l’AMC et le Collège des médecins de
famille du Canada, par exemple, ont conjugué leurs efforts pour formuler des recommandations
comme celle-ci : Ne pas utiliser le test Pap comme moyen de dépistage du cancer du col utérin
chez les femmes de moins 21 ans ou de plus de 69 ans.
Pourquoi? « Le préjudice que pourrait causer le dépistage chez les femmes de moins de 21 ans
l’emporte sur les avantages et il y a peu de données probantes qui indiquent qu’il faut procéder à
ce test une fois par année lorsque des tests antérieurs ont donné des résultats normaux. Les
femmes qui ont subi une hystérectomie totale pour des troubles bénins n’ont plus besoin de se
soumettre à ce test de dépistage. Il faudrait cesser de le pratiquer à 70 ans si trois tests antérieurs
ont donné des résultats normaux. »
« Pendant des années, tant les médecins que les patients ont cru
que "plus c’est mieux". Il est temps de commencer à "y penser
deux fois". »
La Dre Wendy Levinson, coprésidente et l’une des instigatrices de l’initiative Choisir avec soin, a
expliqué la raison d’être du programme dans un commentaire paru récemment dans le JAMC :
« Pendant des années, autant les médecins que les patients ont cru que "plus c’est mieux". Il est
temps de commencer à "y penser deux fois" et d’éviter les examens, les interventions et les
traitements inutiles et qui pourraient être nuisibles. »
La Dre Levinson, spécialiste en médecine interne générale de l’Université de Toronto, a décrit
plus en détail le programme au cours de la réunion MFA : « C’est une question de changement
de culture, a-t-elle dit. Parfois, il est tout simplement plus facile [pour les médecins] de cocher
la case et de prescrire l’examen que d’expliquer pourquoi le patient ne devrait pas le subir. Cette
campagne vise à aider les médecins et les patients à échanger au sujet du recours excessif aux
examens et aux interventions. Nous avons créé un monde ou plus, c’est mieux, et nous devons
commencer à expliquer que plus, ce n’est pas toujours mieux et que cela peut même causer un
préjudice. »
Elle a déclaré que Choisir avec soin est une initiative dictée par les médecins parce que c’était
nécessaire et que si c’étaient plutôt les gouvernements qui avaient lancé le projet, la population
canadienne le considérerait tout simplement comme un effort de réduction des coûts. Le
lancement du programme a obtenu l’appui de l’AMC et de huit associations médicales
provinciales. « La campagne a soulevé un enthousiasme général, a-t-elle dit. Le défi réside
maintenant dans sa mise en œuvre. »
Les Dres Laurie Mallery et Paige Moorhouse de Halifax ont le même défi à relever. Leur stratégie
clinique PATH (People Assessing Their Health Autoévaluation de la santé) doit encourager les
travailleurs de la santé à aider les patients et les membres de leur famille à choisir un éventail de
mesures thérapeutiques et palliatives pour préserver la qualité de vie à la fin de la vie (www.cfhi-
fcass.ca/sf-docs/default-source/tq2014/tq2014-1-laurie-mallery-paige-moorhouse.pdf?sfvrsn=2).
Elles offrent essentiellement leur propre stratégie pour choisir avec soin, mais elles s’adressent
aux patients vulnérables (http://pathclinic.ca/).
Elles sont à l’origine d’un des moments les plus émouvants au cours de la réunion MFA de 2014
lorsqu’elles ont présenté une vidéo d’un patient vulnérable âgé de 85 ans, atteint d’un cancer de
la vessie qui, à cause de problèmes de cognition, ne pouvait se rappeler le nom de son père. « Il
est mort de vulnérabilité et non du cancer », a déclaré la Dre Moorhouse.
Les Dres Mallery et Moorhouse ont soutenu que le système de santé rend souvent le processus de
traitement trop compliqué pour les patients vulnérables en fin de vie. Au lieu d’une longue série
de rendez-vous avec des spécialistes comme des diététistes, elles proposent un processus en trois
temps avec ces patients : comprendre, communiquer et responsabiliser. Il en découlera une
« voie à suivre » pour les patients vulnérables. Sur les 150 premiers patients qui ont terminé le
programme, 71 avaient 77 interventions prévues et 75 % de ces actes et interventions ont été
annulés. Elles ont affirmé que leur modèle offre une solution de rechange aux soins agressifs.
Est-il possible de produire de meilleurs résultats tout en maîtrisant les files d’attente? En un mot :
« Oui. »
Que pensent les patients?
Deux conférenciers ont abordé la question, le premier du point de vue du patient et l’autre, de
celui du fournisseur de soins. Au cours de la conférence, de nombreux participants ont affirmé
que le point de vue du patient est crucial lorsqu’il est question de la pertinence des soins parce
qu’il est souvent à l’origine de la demande de soins. Un médecin a donné un exemple : « Comme
quelqu’un m’a dit, sa mère de 85 ans voulait une coloscopie parce que toutes ses amies en
avaient subi une. »
Physicien de formation, Dave Wells, a commencé à s’intéresser aux enjeux liés à la sécurité des
patients et à la pertinence des soins après qu’on a diagnostiqué chez son épouse Solveig un
carcinome spinocellulaire sublingual en 2003 (www.cfhi-fcass.ca/sf-docs/default-
source/tq2014/tq2014-1-david-wells.pdf?sfvrsn=2). Après de nombreux cycles de traitement, elle
est décédée en 2013. Depuis qu’il est devenu « patient participatif » au cours de la maladie de
son épouse, il est devenu membre de Patients pour la sécurité des patients du Canada,
programme dirigé par les patients et administré par l’Institut canadien pour la sécurité des
patients.
« Nous avons commencé par rédiger un énoncé d’une page sur
nos croyances et attentes avant de rencontrer les médecins.
[Résultat] : nous avons vécu une décennie de traitements sans
surprise. »
M. Wells, âgé de 74 ans, a déclaré que son épouse et lui avaient tenu pour acquise la prise en
charge de leurs soins au cours des 40 premières années de leur mariage, mais que le diagnostic
reçu par son épouse a changé la situation. « C’est alors que nous avons entrepris notre
cheminement vers la mobilisation des patients, a-t-il dit. Depuis, le patient participatif que j’étais
est devenu militant. »
Il a décrit les différentes expériences que son épouse a vécues dans le système de santé comme
un parcours vers l’affirmation. « Nous avons commencé par rédiger un énoncé d’une page sur
nos croyances et nos attentes avant de rencontrer les médecins, a-t-il dit. [Résultat :] nous avons
vécu une décennie de traitements sans surprise. »
M. Wells, qui a accompagné son épouse à tous ses rendez-vous, a déclaré que ce niveau de
participation des patients s’est étendu aussi à son gendre dont l’affirmation de soi au sujet d’un
problème cardiovasculaire « lui a probablement sauvé la vie ». M. Wells l’a lui aussi échappé
belle à cause d’une appendicite, mais comme il a réagi avec fermeté, l’issue a été positive. « Je
n’ai pas fait abstraction de ma douleur, a-t-il dit. J’étais disposé à attendre plus de 12 heures pour
être admis. Finalement, le rendement de l’hôpital a été exceptionnel, mais le chirurgien m’a dit
que je l’avais échappé belle. »
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