Analyse feuille de route 2050 RAC

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Analyse de la feuille de route de la Commission
européenne vers une économie compétitive
à faible intensité de carbone à l’horizon 2050
Contexte et messages clefs ........................................................................................ 2
L’analyse détaillée ....................................................................................................... 4
-80% en 2050 – le minimum vital............................................................................. 4
Une accélération de l’engagement après 2020 ....................................................... 4
L’impératif d’un objectif de -30% en 2020 de réduction des émissions sur le
territoire européen ................................................................................................... 5
L’efficacité énergétique – des messages creux… ................................................... 7
L’électrification de tous les secteurs… .................................................................... 8
L’énergie nucléaire – pas une source d’énergie renouvelable ni décarbonée......... 9
Le système d’échange de quotas européen – pierre angulaire qui peut sauver ou
mettre en péril l’objectif climatique......................................................................... 10
Le secteur du bâtiment – des prévisions optimistes .............................................. 11
Réduction de la facture énergétique européenne et augmentation de son
indépendance énergétique .................................................................................... 11
Réseau Action Climat - France
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1
Contexte et messages clefs
Le 8 mars 2011 la Commission européenne a publié sa « Feuille de route vers une
économie compétitive à faible intensité de carbone à l’horizon 2050 »
(COM(2011)112 final) qui décrit un scénario climatique de réduction des émissions
de gaz à effet de serre à l’horizon 2050.
Cette publication est une des communications clefs dans le cadre de l’initiative phare
de la Commission pour 2011 « Une Europe efficace dans l’utilisation de ses
ressources1».
Le scénario indique que la trajectoire la moins coûteuse pour arriver à -80% en 2050
nécessite une réduction de -25% des émissions de GES en 2020 au sein de l’Union
Européenne par rapport à 1990.
La présente note d’analyse publiée par le Réseau Action Climat - France souhaite
soulever le débat autour de ce scénario, certainement ambitieux mais insatisfaisant
concernant la trajectoire des émissions, et caractérisé par l’absence de mesures
politiques concrètes qui doivent l’accompagner.
Même si l’objectif de réduction des émissions de 25% en 2020 représente un pas en
avant par rapport au paquet climat énergie il est largement insuffisamment pour nous
mettre sur la bonne trajectoire. Plus on repoussera nos efforts à plus tard, plus chère
sera la transition énergétique.
La clef de voûte du scénario de la Commission est la décarbonisation de l’électricité
(à hauteur de 93 et 99% en 2050) tout en relevant le défi d’augmenter cette
production pour remplacer les énergies fossiles aujourd’hui utilisées surtout dans les
secteurs résidentiel et du transport.
Le mix électrique en 2050 inclura, en plus des énergies renouvelables, des centrales
thermiques couplées au captage et au stockage du carbone (CSC) et du nucléaire.
Toutes ces technologies sont désignées par l’expression « énergies décarbonées ».
Le choix de ce terme est déroutant car ni le CSC et ni le nucléaire ne sont des
énergies « décarbonées » !
Il n’y a pas seulement le paramètre des émissions à considérer dans le choix
énergétique d’un pays ; en faisant reposer son système énergétique sur le nucléaire,
le gouvernement transfert des risques et charges aux générations futures.
Le scénario est ambitieux mais ne remplit que partiellement son objectif, à savoir
tracer une voie commune au sein de l’Union européenne pour être en mesure de
réduire nos émissions d’au moins 80% en 2050 par rapport aux niveaux de 1990.
Ainsi, il reste largement insatisfaisant concernant la trajectoire des émissions (-25%
en 2020) et se caractérise par l’absence de propositions de mesures politiques
concrètes qui doivent l’accompagner. Par ailleurs, il manque une description du
partage des efforts entre les états membres.
Il est intéressant et nécessaire que le débat sur la sur-allocation des permis
échangeables soit rouvert dans la publication. Par contre la diminution de quotas
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
http://ec.europa.eu/resource-efficient-europe/
Réseau Action Climat - France
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2
proposée n’est pas suffisamment ambitieuse pour donner l’impulsion nécessaire
pour stimuler des investissements sobres en carbone nécessaires au sein du secteur
industriel européen.
La Commission européenne estime dans sa publication qu’une réduction de 25%
des émissions de gaz à effet de serre en 2020 est faisable grâce à des efforts dans
le domaine de l’efficacité énergétique. Mais ses communications d’aujourd’hui se
révèlent être vide de contenu à ce sujet et n’arrivent pas à combler le manque
d’engagement.
Sans engagements supplémentaires, seulement 9% des 20% d’efficacité
énergétique jusqu’à 2020 pourront être atteints. 2
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
2
Energy Savings 2020” (Ecofys/Fraunhofer), Septembre 2010
http://www.ecofys.com/com/publications/brochures_newsletters/energy_savings_2020.htm
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3
L’analyse détaillée3
-80% en 2050 – le minimum vital
The transition towards a low-carbon economy means that the EU should prepare for
reductions in its domestic emissions by 80% by 2050 compared to 1990
Il s’agit d’un objectif ambitieux car tous les gaz à effet de serre (GES) sont concernés
mais il se situe tout en bas de l’échelle scientifique pour nous donner une chance sur
deux de respecter l’objectif climatique des 2°C. Une réduction de 50% des GES en
2050 à l’échelle mondiale, pour rester en deçà des 2°C d’augmentation des
températures mondiales par rapport à 1850, demande une réduction de 80 à 95%
des émissions des pays industrialisés selon le GIEC. Cet objectif ne reflète par
ailleurs pas la volonté d’une centaine de pays qui souhaite maintenir l’augmentation
de la température mondiale en dessous de 1,5°C pour préserver les plus
vulnérables.
Une accélération de l’engagement après 2020
Such a pathway would require an annual reduction compared to 1990 of
approximately 1 percentage point in the first decade until 2020, 1.5 percentage points
in the second until 2030, and 2 percentage points in the last two decades until 2050.
The effort would become greater over time as a wider set of cost-effective
technologies would become available.
La feuille de route n’explique ni pourquoi et ni comment on progresse lentement au
début et plus vite après 2020 alors que les réductions deviendront plus coûteuses?
! Dans le secteur du bâtiment par exemple, on dit souvent « Les premiers
centimètres (d’isolation) sont les plus efficaces à moindre coût . »
La stratégie de la feuille de route vise à repousser des engagements forts à une
période ultérieure où une « révolution technologique » pourrait résoudre les
problèmes de coûts.
Il est vrai que l’effet d’apprentissage permettra peut-être de diminuer les coûts
technologiques qui sont aujourd’hui pour certaines technologies encore très élevés
mais cette mutation reste hypothétique si ses fondations ne sont pas posées
aujourd’hui.
De plus, une telle stratégie a de très forts risques de se heurter à l’effet cliquet des
investissements en infrastructures. En effet, nos choix industriels et d’équipements
d’aujourd’hui conditionnent nos émissions de GES de demain (carbon lock-in). Pour
exemple, la durée de vie moyenne d’une centrale à charbon est de 30 ans. Comment
ainsi espérer diminuer plus fortement nos émissions plus tard si nous n’effectuons
pas un virage industriel important dès maintenant ?
Il est donc irréaliste de se reposer si fortement sur les progrès de la technologie
quand il s’agit de définir une profonde mutation de nos sociétés.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
3
Les encadrés correspondent aux citations de la feuille de route de la communication 2050 de la CE
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Comme le montre le graphique en dessous de ce texte – en plus du danger du
« carbon lock-in », fixer seulement un objectif de réduction de -25% ralentira la
courbe de réduction par rapport à un objectif plus ambitieux et amènera donc à une
augmentation des émissions globales sur toute la période même si le même objectif
de réduction en 2050 est atteint.
Source : CAN-E
L’impératif d’un objectif de -30% en 2020 de réduction des
émissions sur le territoire européen
The analysis shows that the cost-efficient pathway to the necessary reduction in
2050 requires a 25% domestic reduction in 2020. It also shows, however, that the EU
can produce this reduction if it delivers on its existing commitment to increase energy
efficiency by 20% by 2020.
Afin d’atteindre son objectif de réduction des émissions de GES à l’horizon 2050 (80%), la Commission européenne se prononce en faveur d’un objectif d’étape de 25% en 2020 qui serait réalisé sur le territoire de l’UE.
Cet objectif de -25% domestique en 2020 apparaît dans cette communication comme
un cheveux sur la soupe.
En effet, de plus en plus d’études 4 montrent qu’un renforcement de l’objectif de 20% des GES en 2020 à -30% serait extrêmement bénéfique pour l’Europe.
En effet, ces dernières publications estiment qu’un objectif domestique de -30% d’ici
2020 créerait jusqu’à 6 millions d’emplois en Europe et générerait une augmentation
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
4
« 30% : why Europe should strengthen its 2020 climate action », CAN-Europe - 2011 / « A New Growth Path
for Europe - Generating Prosperity and Jobs in the Low-Carbon Economy Synthesis Report » PIK, Oxford, ECF,
E1M, Université Paris 1 - 2011
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du PIB européen d’environ 10% d’ici 2020. De plus, cet objectif, réalisé sur le
territoire, permettrait à la France d’économiser 3,5 milliards d’euros par an d’ici 2020
(soit près de 20% du déficit de la sécurité sociale).
La communication de la Commission européenne devra donc impérativement
évoluer sur ce point afin de maximiser les bénéfices sociaux et économiques de la
lutte contre le changement climatique en Europe.
Alors que l’objectif de -30% est soutenu par plusieurs états5 et entreprises6 qui se
sont officiellement positionnés en sa faveur, la France reste étrangement muette.
Viser l’objectif de -30% signifierait pourtant pour la France une diminution de son
taux de chômage de 3 points7 en créant 700 000 emplois non délocalisables8 tout en
permettant de combler plus de 15% du déficit de la sécurité sociale9.
De nouveau l’objectif de -25% est le minimum conseillé par le GIEC si on veut
respecter l’objectif de 2°C. Pour se placer sur la bonne trajectoire économique et
climatique, les chefs d’Etats devraient décider lors du Conseil Européen de juin 2011
de passer à un objectif domestique de -30% au minimum, accompagné par un
objectif en termes d’efficacité énergétique contraignant et soutenu par une politique à
hauteur de l’objectif.
Il faut rester attentif pour la suite des évolutions politiques à l’échelle européenne car
déjà dans sa communication de mai 2010 (COM(2010)265 final10) la Commission
avait calculé l’impact du passage à -30%. Cependant l’objectif était divisé en 25%
domestique et 5% à l’extérieur de l’UE alors que l’impact économique d’un passage
à -30% complètement domestique ou en partie à l’extérieur est très différent.
Par ailleurs un autre facteur décisif est si l’UE s’engage seule pour une politique
climatique ambitieuse ou si elle se situe dans un système avec un accord climatique
mondial.
La colonne bleue dans le graphique plus bas s’explique par un objectif -25%
domestique + 5% à l’extérieur, ce qui permet à l’UE de profiter de l’absence
d’objectifs climatiques ambitieux ailleurs et de permis d’émission internationaux bon
marché. L’objectif de -30% dans un système avec un accord global (colonnes
orange) est plus coûteux car les permis d’émissions seront une ressource rare.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
5
Royaume-Uni, Espagne, Danemark, Portugal
The Climate Group : Joint Business Declaration, Oct 2010 / http://www.euractiv.com/en/pa/green-businessesrock-employers-lobby-news-502814
7
Univ Paris 1, Univ of Oxford, PIK, ECF : A New Growth Pathway for Europe, Fev 2011
8
WWF 2008 : - 30% de CO2 = + 684 000 emplois , 2008
9
HCWHE and HEAL, 2010. Acting now for a better health:A 30% reduction target for EU climate policy. et LFSS
2011
10
Brussels, 26.5.2010 - COM(2010) 265 final - Analysis of options to move beyond 20% greenhouse gas
emission reductions and assessing the risk of carbon leakage {SEC(2010) 650}
6
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6
Source : GEM E3 model, European Commission, 2010
11
L’efficacité énergétique – des messages creux…
The analysis shows that the cost-efficient pathway to the necessary reduction in
2050 requires a 25% domestic reduction in 2020. It also shows, however, that the EU
can produce this reduction if it delivers on its existing commitment to increase energy
efficiency by 20% by 2020.
Par ailleurs, la feuille de route pour 2050 montre qu'atteindre l'objectif d'efficacité
énergétique en 2020 entraînerait de fait une baisse des émissions de gaz à effet de
serre de 25 % en 2020. Malheureusement cet objet risque de ne pas être atteint.12
Selon les mots du Commissaire européen à l’énergie, Mr. Oettinger, l’objectif de 20%
d’énergies renouvelables est en bonne voie mais l’objectif en termes d’efficacité
énergétique est loin d’être atteint. Les analyses montrent que sans des efforts
supplémentaires moins de la moitié de l’objectif pourrait être accompli.
Le Plan d’efficacité énergétique publié par la Commission le 8 mars donne un
panorama des directives et initiatives existantes par secteur mais répète la décision
du Conseil Européen du 4 février 2011 : il ne sera reconsidéré de rendre cet objectif
contraignant que en 2013 s’il s’avère qu’il ne sera probablement pas atteignable
autrement.
L’évolution du bilan français de consommation d’énergie primaire montre aussi que
la France est loin d’être sur le bon chemin pour atteindre l’objectif européen en
termes d’efficacité énergétique. Ainsi entre 1990 et 2008 la consommation d’énergie
primaire a augmenté de 13%. La diminution de la consommation entre 2008 et 2009
(14,4 Mtep) s’explique par l’impact de la récession et non par des efforts en termes
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
11
http://ec.europa.eu/clima/documentation/international/docs/26-05-2010working_ doc2_en.pdf
“Energy Savings 2020” (Ecofys/Fraunhofer), Septembre 2010
http://www.ecofys.com/com/publications/brochures_newsletters/energy_savings_2020.htm
12
Réseau Action Climat - France
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d’efficacité énergétique. Il sera donc nécessaire d’éviter, par des mesures politiques
adaptées, qu’une croissance économique entraine avec elle la consommation
d’énergie primaire.
Source : Energy Savings 2020” (Ecofys/Fraunhofer), September 2010
L’électrification de tous les secteurs…
Electricity plays a central role in the low-carbon economy. The analysis shows that it
can almost totally eliminate CO2 emissions by 2050, and offers the prospect of
partially replacing fossil fuels in transport and heating. Although electricity will
increasingly be used in these 2 sectors, electricity consumption overall will only
increase in line with historic growth rates, thanks to continuous improvements in
efficiency on the demand side.
In 2050, the EU's total primary energy consumption could therefore be almost 40%
below 2005 levels.
La feuille de route mentionne que la consommation d’électricité augmentera selon le
taux de croissance historique qui se chiffre à +32% entre 1990 et 2008. Ce taux de
progression amène à une augmentation de 75% de la consommation d’électricité
entre 2008 et 2050. Une telle progression demanderait un investissement très
important dans les capacités de production et les réseaux électriques et une réflexion
sur la gestion des consommations de pointe.
Aussi le changement technologique nécessaire notamment dans le secteur des
transports, qui sera selon le scénario électrifié en grande partie, parait très ambitieux.
Energie
Réduction GES Réduction
Consommation en
primaire en en 2020 (par GES
en
électricité
2050
rapport à 1990) 2050
Scénario
Feuille de route
Commission 2011
–
-40%
par
rapport à 2005
Réseau Action Climat - France
-25%
-80%
Augmentation suivant
la tendance historique
= +75% entre 20082050 (+32% entre
1990 et 2008)
!
8
"Vision" 2011 pour
l’Union
Européenne
EU-27 Greens/EFA 2011
Europe’s share of the
Climate challenge –
SEI and Friends of the
Earth Europe 2008
Roadmap 2050 – ECF
2008
-48%
par
rapport à 2008
-35%
91%
+12% entre 2008 et
2050 avec un pic en
2040
-71%
par
rapport à 2010
-40%
-90%
+25%
consommation
2010 et 2050
-20%
-80%
+50% entre 2010 et
2050
de
entre
L’énergie nucléaire – pas une source d’énergie renouvelable ni
décarbonée
The share of low-carbon technologies in the electricity mix (i.e. renewables, fossil
fuels with carbon capture and storage, and nuclear) is estimated to increase from
45% today to around 60% in 2020, in particular through meeting the existing
renewable energy target, to 75 - 80% in 2030, and nearly 100% in 2050. As a result,
and without prejudging Member States' preferences for an energy mix which reflects
their specific national circumstances, the EU electricity system could become more
diverse and secure.
Le mix électrique en 2050 inclura, en plus des énergies renouvelables, des centrales
thermiques couplées au Captage et Stockage du Carbone (CSC) et du nucléaire –
toutes ces technologies sont désignées par l’expression « énergies décarbonées ».
Le choix de ce terme est déroutant car ni le CSC ni le nucléaire ne sont des énergies
« décarbonées » !
Il semble donc que la Commission ait cédé au lobbye pro-nucléaire. Récemment lors
du Conseil Européen du 4 février et lors du Conseil sur l’énergie du 28 février les
représentants français avaient essayé de placer le nucléaire au même rang que les
énergies renouvelables. Par ailleurs la feuille de route souligne l’indépendance de
chaque état membre dans son choix énergétique - hors paquet climat - énergie et
l’objectif de 20% énergies renouvelables.
La publication indique que le mix électrique en 2050 sera composé par 100%
d’énergies decarbonées sans pour autant donner les informations ni par pays ni sur
la part des différentes technologies décarbonées dans le mix électrique européen en
2050.
Le choix du nucléaire dans le mix énergétique de la France (78% d’électricité
d’origine nucléaire) a des impacts négatifs – sans mentionner le problème irrésolu du
stockage des déchets - qui mettent en question la définition des « technologies
décarbonées ».
Le choix politique français de favoriser le nucléaire a provoqué une augmentation de
la demande en électricité (notamment par le chauffage électrique) qui justifiait le
système existant. Aujourd’hui le parc immobilier français est chauffé à 30% par
l’électricité (contre 3% en Allemagne). L’utilisation non linéaire du chauffage
provoque des pics de consommation en hiver dans la soirée. Le contenu en carbone
de l’électricité qui est relativement faible augmente à ces moments car des
importations de KWh très carbonés de l’Allemagne deviennent ainsi nécessaire.
L’utilisation du nucléaire, à la base une énergie moins émettrice en CO2 que des
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centrales thermiques fossiles, peut donc entrainer des impacts systémiques qui
rendent nécessaire l’utilisation de centrales thermiques réactives au gaz ou au fioul
alors qu’elles sont très émissives en terme de GES.13
Indiquer que le nucléaire est une technologie decarbonée crée un biais idéologique.
Le système d’échange de quotas européen – pierre angulaire qui
peut sauver ou mettre en péril l’objectif climatique
The EU Emissions Trading System (ETS) will need to be strengthened to drive a
wide range of low carbon technologies into the market, so that the sector itself can
adapt its investment and operational strategies to changing energy prices and
technology. For the ETS to play this role, both a sufficiently strong carbon price
signal and long term predictability are necessary. In this respect, it is important to
note that the agreed linear reduction of the ETS cap14 will not lead to the level of
reductions projected for the power sector in 2030.
…
With the Climate and Energy package, the EU already has in place a range of key
instruments it can build on. In its May 2010 Communication15, the Commission has
already indicated that excess allowances from phase 2, which are estimated to
amount to 500 to 800 million allowances, would increase the total amount of
allowances available in phase 3, compared to what was envisaged during the review
of the ETS. Setting aside an equivalent number of allowances during the period
2013-2020 in phase 3 would restore the originally foreseen overall allowances
budget for the next decade. This would restore the reward for low carbon
investments, preparing the sector for the innovations needed in a 2030 perspective.
La feuille de route rouvre le débat sur la sur-allocation des quotas pour la deuxième
période du système d’échange européens des quotas de CO2 et leur ré-allocation
pour la phase 3.
Alors que la Commission avait déjà proposé de supprimer 1,4 milliards de permis du
budget de la 3ème période d’engagement (2013-2020) afin de préparer l’industrie
émettrice à un objectif de 30% de 30% de réduction d’émissions, la feuille de route
2050 propose seulement d’enlever 500 à 800 millions de permis pour ajuster l'offre
excédentaire des permis de la Phase 2. Même le chiffre plus élevé de 800 millions
est susceptible d'être une sous-estimation de la sur-allocation de la phase 2. Il y a
plutôt un surplus d’un milliard de permis - le résultat de la sur-allocation et de la
réduction automatique des émissions dues à la récession économique.
Le budget de la phase 3 a été obtenu en calculant une baisse annuelle de 1,74% par
rapport au budget moyen de la phase 2. Mais, à cause des excédents de la phase 2,
la moyenne est augmentée de quelques 200 millions de permis. En ajustant cette
ligne de référence vers le bas, l’association Sandbag arrive à un budget qui est 1,4
milliard de tonnes inférieur à celui qui est actuellement proposé.16
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
13
« Du gâchis à l’intelligence. Le bon usage de l’électricité » Les Cahiers de Global Chance avec l’association
négaWatt, n°27, janvier 2010 - http://www.global-chance.org/spip.php?article47
14
ETS Directive foresees a linear reduction of the cap of 1.74 percentage points per year. This reduction is legally
enshrined in the ETS and continues after 2020.
15
COM(2010) 265 final
16
http://www.sandbag.org.uk/blog/2011/feb/21/targets-and-budgets-back-spotlight/
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Les chiffres inscrits dans la feuille de route sont donc largement insuffisants pour
stimuler les réductions des émissions et les investissements sobres en carbone
nécessaire au sein du secteur industriel européen.
Par rapport à la feuille de route, il se pose encore une question méthodologique : estce que la réduction des allocations proposée pour la phase 3 a été prise en compte
dans les scénarios généraux de la Commission européenne ? Aucune indication
n’est fournie dans les documents présentés.
Le secteur du bâtiment – des prévisions optimistes
Commission's analysis shows that emissions in this area could be reduced by around
90% by 2050, a larger than average contribution over the long term.
Les résultats des calculs effectués pour la feuille de route montrent une diminution
des émissions du secteur résidentiel et tertiaire entre 88 et 91%. Ces objectifs élevés
permettent à contrebalancer les réductions moins importantes du secteur du
transport et de l’agriculture.
Ces réductions correspondent à un facteur 8,8 à 11 – ce qui paraît ambitieux mais
techniquement faisable dans le contexte français actuel. Par contre il manque un
chiffre pour l’année 2020. La réduction indiquée pour 2030 se situe entre -37% et 54%. L’objectif français de réduction pour le parc existant fixé dans les lois Grenelle
de -38% en 2020 montre que la France sur ce point est plus en ligne avec la logique
d’une transition rapide nécessaire que la feuille de route 2050.
Début 2011 la publication « Habitat Facteur 4 »17 a démontré que les émission de
CO2 du secteur résidentiel peuvent être réduites jusqu’à un facteur 16 en 2050, en
décrivant 4 scénarios contrastés selon le choix énergétique pour le chauffage. Mais
ces scénarios sont basés sur des hypothèses très optimistes :
- la performance énergétique des bâtiments neufs suit la réglementation thermique
fixée (BBC à partir de 2012 et des bâtiments positifs à partir de 2020),
- chaque bâtiment du parc existant sera rénové énergétiquement dans les 40 années
à venir.
Si ces objectifs techniquement faisables doivent être respectés il faut aujourd’hui des
mesures politiques en cohérence avec l’ambition en termes de réduction des
émissions de gaz à effet de serre.
Rendre l’objectif en termes d’efficacité énergétique européen contraignant donnerait
un signal fort.
Réduction de la facture énergétique européenne et augmentation
de son indépendance énergétique
Taken over the whole 40 year period, it is estimated that energy efficiency and the
switch to domestically produced low carbon energy sources will reduce the EU's
average fuel costs by between ! 175 billion and ! 320 billion per year. The actual
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
17
Traisnel, Joliton, Laurent, Caffiaux, Mazzenga « Habitat Facteur 4 - Étude d'une réduction des émissions de
CO2 liées au confort thermique dans l'habitat à l'horizon 2050 » Les Cahiers du CLIP N°20/2010
http://www.iddri.org/Publications/Les-cahiers-du-CLIP/Habitat-Facteur-4
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cost saving depends on the extent to which action on climate change is undertaken.
The highest fuel savings will be achieved if the rest of the world also steps up its
efforts to save energy and reduce greenhouse gas emissions as this will lead to a
reduction in global fossil fuel prices. If the rest of the world does not do so, however,
a major benefit of EU action would be to protect the economy against high energy
prices. The analysis, as well as the IEA World Energy Outlook 2010, clearly
demonstrates that fossil fuel prices are indeed projected to be significantly higher in
case of limited global action.
In 2050, the EU's total primary energy consumption could therefore be almost 40%
below 2005 levels. More domestic energy resources would be used, in particular
renewables. Imports of oil and gas would decline by half compared to today, reducing
the negative impacts of potential oil and gas price shocks significantly. Without action
the oil and gas import bill would instead double compared to today, a difference of !
400 billion or more by 2050, the equivalent of 3% of today's GDP.
Pour le calcul de la feuille de route, les prévisions du prix de d’énergie du « World
Energy Outlook »18 ont été utilisées.
Il serait dans l’intérêt de la Commission de recalculer le scénario en ajustant les prix
des énergies car même avant la flambée des prix du pétrole induites par les
soulèvements politiques depuis janvier 2011, ilatteignait déjà en décembre 2010
celui du WEO en 2020.
Une réduction des importations d’énergies fossiles en France et donc de leur part
dans la consommation nationale d’énergie pourrait libérer des ressources
économiques pour financer notamment les énergies renouvelables et des mesures
d’efficacité énergétiques.
Le montant de leur facture française représentait en 2007 2,4% du produit intérieur
brut, un niveau qui, hormis 2006, n’avait pas été atteint depuis longtemps (1985).
Elle correspond à la richesse créée par les Français en 5,5 jours de travail.19
Dans ce contexte, les projets d’exploitation des gaz non conventionnels (gaz de
schistes) en France signifient un bouleversement total de la donne dans le cadre de
la lutte contre le changement climatique, ces projets allant à l’encontre de l’objectif
facteur 4 visé pour 2050.20 Comment peut-on imaginer soutenir le développement de
« nouvelles » énergies carbonées tout en prônant une substitution des énergies
fossiles en faveur des renouvelables et une mise en application des mesures
d’efficacité énergétique ?
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
18
http://www.worldenergyoutlook.org/
Facture énergétique de la France en 2007
http://www.statistiques.developpement durable.gouv.fr/article.php3?id_article=936
20
La totalité des émissions associées à l'extraction du méthane des gaz de schiste atteindrait 33g/eq-CO2 par
million de joules d'énergie, comparativement aux 20,3g/eq-CO2 par million de joules d'énergie pour des
carburants classiques (diesel ou essence) –
Robert W. Howarth , David R. Aktinson : Preliminary Assessment of the Greenhouse Gas Emissions from Natural
Gas obtained by Hydraulic Fracturing - Cornell University (2010)
19
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