Un ralentissement de la croissance chinoise n'est pas forcément néfaste
Virginie Maisonneuve dans Chine
Très attendu, le PIB du second trimestre chinois a été annoncé à 7,5%, en ligne avec les prévisions
officielles. Il démontre un léger ralentissement en rythme annuel par rapport au premier trimestre mais
un léger rebond en glissement trimestriel.
La Chine, une économie en transition
Alors que plusieurs commentateurs n’ont pas hésité à tirer le signal d’alarme quant à la perspective d’un
ralentissement de la croissance chinoise, il est néanmoins essentiel de se rappeler que la Chine est une
économie en transition. Ayant connu une croissance à la vitesse exceptionnelle, se propulsant de la
place de 13ème économie mondiale en 1980 à la deuxième aujourd’hui, la Chine amorce une nouvelle
phase de son développement. L’accent sur les données macroéconomiques à court terme détourne
l’attention de ces évolutions importantes.
Le besoin pour la Chine de passer d’un modèle privilégiant les investissements lourds à un modèle
tourné vers la consommation est un enjeu discuté depuis plus d’une décennie mais qui n’est pas facile à
mettre en place. La consommation domestique chinoise représente seulement 40% du PIB contre plus
de 70% aux Etats-Unis et plus de 55% en Inde. L’objectif de faire de la consommation un moteur de
croissance a été retardé par l’impact des mesures d’urgences mises en place en 2009 afin d‘éviter un
ralentissement trop rapide au milieu de la crise. Certaines de ces mesures ont provoqué des
augmentations de la liquidité et de mauvaises affectations du capital, avec notamment pour
conséquence l’émergence du secteur du shadow banking.
La nouvelle équipe dirigeante, emmenée par le Président Xi Jinping et le Premier ministre Li Keqiang, est
attentive à redonner au pays une base solide pour réussir cette nouvelle phase de développement au
cours de la prochaine décennie. Ils souhaitent plus particulièrement cibler les inefficacités structurelles
grâce à des mesures clés visant à réformer le secteur financier, à s’attaquer au shadow banking, à
assurer une meilleure allocation des capitaux (vers les petites et moyennes entreprises par exemple), à
faire évoluer les entreprises détenues par l’Etat et à adresser les problématiques environnementales.
C’est une tâche herculéenne qui est cruciale pour la transition de la Chine vers sa nouvelle phase.
Comme dans n’importe quelle transformation capitale, certains de ces changements ne seront pas
toujours les bienvenus et prendront du temps à se mettre en place, mais ils sont essentiels pour accéder
à une croissance de meilleure qualité mieux adaptée au futur du pays. Le succès de cette transformation
est clé et, selon nous, plus important que les données macros à court terme. Dans l’idéal, certaines
mesures auront été prises d’ici le prochain Congrès du Parti cet automne et la nouvelle équipe sera à
même à cette occasion de détailler plus avant son plan pour la croissance.
Quel est l’impact pour l’économie mondiale ?
Certains craignent qu’une décélération de la croissance chinoise soit négative pour l’économie
mondiale. Bien que ceci apparaisse comme une conclusion logique compte tenu du poids de la Chine et
de son profil démographique, ceci ne sera pas forcément le cas. En effet, il se pourrait bien qu’un
ralentissement modéré, passant des niveaux fulgurants de croissance du PIB (de l’ordre de 10-12%) qui
ont marqué les dernières années, à des niveaux plus modérés (de 7-8%, voire 6%), ne soit pas
nécessairement néfaste pour la santé de l’économie mondiale. La part que représente la Chine au
niveau de l’économie mondiale est en nette hausse et même compte tenu d’une croissance ralentie,
celle-ci restera bien supérieure à la croissance économique globale moyenne. Il est ainsi envisageable
que la Chine continuera de servir de moteur de soutien à l’économie mondiale malgré le ralentissement
constaté.
Le timing est également important : ces événements se produisent au moment même où l’économie
globale commence à se stabiliser et où la reprise américaine s’accélère, ce qui signifie que la
conjoncture mondiale est plus favorable à cette période de transition chinoise. Les actions dynamiques
du Japon, ayant pour but d’asseoir sa relance économique en mettant en place des réformes
structurelles, soutiendront plus largement la croissance mondiale. Il est intéressant de noter que la
rivalité historique entre ces deux pays pourrait même pousser, de manière indirecte, la Chine à porter
plus d’attention sur les réformes qui lui sont nécessaires.
Ce qui serait dommageable pour la conjoncture mondiale serait une onde de choc, nourrie par des
inefficacités qui sont restées trop longtemps sans solution, au sein de l’économie chinoise. Il importe
que nous soyons moins soucieux des chiffres chinois à court terme et que nous apprécions les
changements de fond qui sont déjà en train de s’accomplir dans le pays.
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