Novembre 2006 — N°14 Le journal Réseau de coordination à domicile Soins de support Soins palliatifs Sommaire 1 Peut-on faire l’économie de l’innovation ? 2-3 Annoncer un mauvaise nouvelle 4 La vie du réseau Peut-on faire l’économie de l’innovation ? L’histoire des réseaux de santé est jeune, leur réelle émergence dans le paysage sanitaire date en effet de la fin des années 90 début 2000. Ils ne cessent depuis de se développer, les professionnels de santé se réjouissant de ce nouvel outil innovant qui crée enfin du lien dans l’univers réputé cloisonné de la santé. Le développement des réseaux ne s’est pas réalisé sans mal, certains ont dû abandonner leur projet face à d’insurmontables obstacles, d’autres comme Epsilon ont connu des périodes de crise avant de parvenir à relancer une dynamique. Jusqu’à aujourd’hui, cette dynamique de développement semblait soutenue par les pouvoirs publics qui augmentaient régulièrement les budgets alloués au développement des réseaux. Hélas, début septembre 2006, cet essor a connu un grave coup d’arrêt quand le Ministère de la Santé a décidé d’amputer le budget national de développement des réseaux de 20%. Epsilon a réagi rapidement en fournissant les données budgétaires demandées par nos financeurs (URCAM-ARH). En fonction de ces Directeur de la publication Gilles BEGHIN données, l’URCAM-ARH nous a alloué une somme qui nous permet de Rédacteur en chef terminer l’année sans encombre. Un autre courrier nous a informés Sylvain FERNANDEZ-CURIEL que les budgets prévus pour 2007 ne seraient pas remis en cause. Équipe de rédaction Karima AMAZIT Epsilon devrait donc pouvoir continuer à fonctionner, ce qui ne nous Inès De CASSIN empêche pas de nous interroger sur l’avenir des réseaux. Laurent DEGRAVE Marie GOURMEL Certes notre pays doit réaliser des économies, pour autant celles-ci Chantal MERLAUD doivent elles se réaliser au sacrifice de l’innovation? Anne NAUTIN Séverine TANCHOU Dr Gilles BEGHIN - Président de l’association Epsilon Réseau Epsilon - 195 avenue du Général Leclerc - 78220 Viroflay 01 30 24 28 56 – [email protected] - www.reseau-epsilon.fr 1 Douleur morale La douleur morale est toujours au premier plan de l’annonce d’une mauvaise nouvelle pour le patient. Elle affaiblit provisoirement l’élan vital de la personne, ce qui bloque la pensée. Le patient s’en trouve sidéré et ne peut pas assimiler toutes les informations que le praticien lui donne. Il est vraiment indispensable de prendre en compte cette donnée pour, dans un premier temps, fournir aux patients des informations simples et claires. D’autres rencontres sont ensuite nécessaires pour expliquer plus en profondeur. Cette douleur morale véhicule chez la personne un sentiment de rupture dans son existence ; elle renvoie à cette peur de ne plus exister, de perdre tous ses repères. La douleur morale persiste tant que le patient ne trouve pas les moyens de se penser autrement que « comme avant la maladie» ; elle peut à ce moment éventuellement développer chez le patient des troubles psychopathologiques. Il est donc important d’être très attentif et de pouvoir accueillir les réactions du patient dès les premiers instants du traumatisme de l’annonce. Le travail des soignants est d’aider le patient à surmonter cette douleur. C’est seulement à ce moment là qu’il pourra être plus disponible et accepter les propositions de traitement et créer ainsi une véritable alliance thérapeutique avec le médecin et l’équipe soignante. Il convient d’accompagner le patient, il doit parvenir à faire des compromis avec une réalité, la maladie, dont il ne veut pas et dont il n’avait absolument pas imaginé les conséquences. Le patient peut être accompagné dans le travail de deuil de sa vie antérieure, celle d’AVANT la maladie. Ce deuil va lui permettre de se reconstruire, afin d’affronter épreuves de sa vie AVEC la maladie. les Ecoute L’accueil de la douleur morale est le travail de tous les soignants ; il n’est pas l’exclusivité des psychologues. Il passe par l’ECOUTE. Cette écoute en relation d’aide est avant tout une question de disponibilité psychique. Il est important que le patient comprenne que l’on a entendu sa souffrance. La douleur morale pourra ainsi se transformer, se sublimer. Toute l’énergie jusque là mobilisée sur la perte peut trouver d’autres buts, d’autres objectifs : l’adaptation à une nouvelle vie. Le soignant par son écoute peut permettre au patient de mobiliser des ressources qu’il ne soupçonnait même pas. Tout le monde s’accorde à dire que c’est au médecin d’annoncer le diagnostic ou de façon plus générale la mauvaise nouvelle au patient. C’est une tâche extrêmement complexe qui bien souvent génère beaucoup d’anxiété. Il est donc important que le médecin s’y prépare au mieux afin que cette annonce, dont l’impact va bouleverser le patient, sa vie et son entourage, soit atténuée de son potentiel de violence destructrice. Cinq étapes pour une annonce Tout d’abord le médecin doit tenter de maîtriser l’environnement. Il doit s’assurer du confort du patient. Le choix de l’endroit est important. Il est absolument nécessaire de ne pas être dérangé pendant l’entretien. Dans le cadre d’une hospitalisation, il faut évidemment proscrire toute annonce dans un couloir ! Si le patient peut se déplacer il est approprié de trouver un endroit calme. Le bureau du praticien est idéal. Si le patient n’est pas seul (à son domicile,au cabinet du médecin ou dans sa chambre à l’hôpital) il faut s’assurer du lien qui existe entre lui et la tierce personne ; et 2 bien sûr demander au patient s’il préfère avoir un entretien en tête à tête…On peut toujours trouver un autre moment si nécessaire. Inversement, si le patient est seul, il convient de lui demander s’il souhaite être accompagné. Dans la deuxième étape le médecin essaie de faire l’inventaire de ce que sait déjà le patient :que sait-il de sa maladie? Que saitil de l’impact de sa maladie sur l’avenir ? Le médecin peut s’aider de questions telles que: « Que pensez vous de cette boule ? » « Que vous a dit le chirurgien ? » « Etes vous inquiet par ce symptôme ? » « Avez vous envisagé que cela puisse être grave ? ». La troisième étape du protocole permet d’appréhender ce que le patient veut savoir. Il faut absolument respecter la légitimité de ne pas vouloir savoir. Une question comme « voulez vous que je vous explique tous les détails de votre maladie ou voulez vous que l’on parle uniquement des traitements ? » peut aider le médecin dans cette étape. La quatrième étape consiste à communiquer l’information au patient. Cela mobilise de réelles qualités pédagogiques. Il est important d’utiliser des mots simples, d’éviter de se retrancher derrière un vocabulaire très spécifique et hermétique. Il est important de reformuler ; de faire des synthèses et surtout de demander au patient ce qu’il comprend de l’information qu’on lui donne. Il ne faut pas oublier que l’annonce d’un diagnostic grave sidère la pensée et que bien souvent les patients n’entendent pas ce que le médecin explique. Il faut y aller lentement et dire au patient qu’on aura l’occasion d’en reparler ou de revenir sur des points compliqués. La dernière étape correspond à l’accueil des réactions du patient. Il est important de laisser le patient exprimer sa colère, ses angoisses, ses peurs. De réelles qualités d’emphatie sont nécessaires. Le médecin doit aider le patient à mettre des mots sur ce qu’il éprouve. Dans certaines situations, le patient va projeter de l’agressivité sur le professionnel. Le médecin doit alors prendre de la distance, ne pas se sentir menacé par ces attaques, cette agressivité qui se retourne contre lui. Il est important de garder à l’esprit que cela résulte d’un mécanisme de défense de la part du patient. Le médecin doit s’évertuer à ne pas retourner cette agressivité contre le patient. Une attitude contenante et des réponses bienveillantes vont permettre de ne pas briser le lien thérapeutique. La toute dernière étape de l’entretien aura pour objectif de restructurer l’avenir du patient. Le médecin va tenter, avec l’aide du patient, de hiérarchiser les préoccupations. Le médecin va distinguer les problèmes irréversibles des problèmes solubles. Il va définir les priorités. Il va proposer une stratégie d’avenir : quels traitements curatifs ou symptomatiques ? Il va proposer aussi d’autres personnes ressources. Enfin, l’entretien se terminera par la prise d’un prochain rendez-vous afin de reprendre le contenu de cet entretien. Spiritualité et fin de vie En avril dernier, le docteur Claude Rougeron est venu présenter ses travaux autour de la spiritualité en fin de vie, lors d’une soirée de formation qui avait retenu l’attention d’un auditoire nombreux. Pour approfondir vos réflexions dans le domaine, vous pouvez assister à des sessions d'éthique biomédicale animées par le Docteur Claude Rougeron (Médecin généraliste, directeur du département de médecine générale de la faculté Paris Ouest, Docteur en éthique médicale) et Mme Mireille Leduc (enseignante-chercheur, théologienne) organisées au Foyer de La Part Dieu à Poissy. Programme (les sessions commencent à 9h30 et se terminent à 18h): 9 décembre 2006 : Les besoins spirituels racontés par les malades : la grâce de l'écoute 13 janvier 2007 : Le pardon : un soin spirituel 17 mars 2007 : Le don de la vie face à l'euthanasie, quel sens ? Renseignements : www.foyer-la-part-dieu-poissy.com 3 La RESPALIF resplendit Le 5 octobre 2006 s’est tenu le premier colloque de la fédération des réseaux de soins palliatifs d’Ile-de-France (RESPALIF). réseau Onco 94 (Val de Marne) et le réseau Boucle Nord (Haut de Seine). Bienvenue à eux ! Avenir des rémunérations spécifiques L’expérimentation visant à évaluer la pertinence de rémunérations spécifiques pour les professionnels de santé libéraux prenant en charge des patients en soins palliatifs va prendre fin, le 31 décembre 2006. Dans les neuf réseaux participant à l’expérimentation, de nombreux professionnels de santé ont bénéficié de ces rémunérations. Un engouement qui semble montrer qu’elles étaient nécessaires afin de valoriser le temps passé auprès de patients en fin de vie à photo réseau SPES domicile. La pérennisation de ces rémunérations sera Monsieur Philippe BAS (photo ci-dessus), décidée le 16 janvier prochain. Espérons que Ministre délégué à la Sécurité sociale, aux les restrictions budgétaires auxquelles sont personnes âgées, aux personnes handicapées soumis les réseaux ne présagent pas d’un et à la famille, a ouvert cette journée en désengagement des financeurs sur ce dossier. rassurant les réseaux sur la volonté du Il s’agirait d’un vrai coup dur pour les gouvernement de continuer à les soutenir, en professionnels libéraux concernés et les dépit des restrictions budgétaires annoncées patients qu’ils soignent et suivent. au mois de septembre (lire l’édito). Les 280 participants ont ensuite Formation Epsilon attentivement suivi les interventions de la matinée, qui visaient à présenter la place des Le jeudi 14 décembre à 20h30 à Claire réseaux de soins palliatifs franciliens dans le Demeure, le docteur Gaëlle-Anne Estocq, paysage sanitaire, et les tables rondes de m é d e c i n l’après-midi, qui donnaient la parole aux coordinateur du acteurs des réseaux (professionnels de santé réseau Onco 92 Sud libéraux et hospitaliers, bénévoles...). animera une Si vous souhaitez avoir connaissance des actes formation sur les de cette journée, n’hésitez pas à nous effets secondaires contacter. des chimiothérapies. En soirée les présidents et directeurs des neuf réseaux constituant la fédération RESPALIF se sont réunis afin, notamment, de Prochain numéro valider l’inscription de trois nouveaux réseaux: Rendez-vous en janvier 2007 ! le réseau Océane (Seine-Saint-Denis), le MISSION REGIONALE DE SANTE Agence Régionale de l’Hospitalisation d’Ile-de-France Union Régionale des Caisses d’Assurance Maladie d’Ile-de-France L A V I E D U R E S E A U 4