INTRODUCTION GENERALE De nos jours, la science a conquis tous les domaines du savoir à telle enseigne que toute connaissance, pour être crédible, doit être scientifique. Dans cette mesure, toute connaissance qui n’emprunterait pas la voie sûre de la science n’en serait pas une. Seule la science apparaît comme la connaissance la plus certaine et la plus objective. Si la science a atteint ce degré supérieur de vérité et d’objectivité, c’est parce qu’elle s’est dotée de critères et de méthodes fiables tels que l’expérience, la démonstration, le formalisme logico-mathématique… Ce qui nous amène à nous poser les questions suivantes : La vérité est-elle uniquement le privilège du discours scientifique ? Si la vérité scientifique se pose et s’impose comme vérité universelle et modèle de toute vérité, ne peut-elle pas, avoir de limites ? I- LE CONCEPT DE VERITE A- QU’EST-CE QUE LA VERITE ? Communément, l’homme définit la philosophie comme la recherche de la vérité. Mais de quelle vérité s’agit-il ? PLATON répond : « c’est aller au vrai avec toute son âme ». De façon générale, la vérité présente des conceptions diverses relatives aux philosophes, aux hommes, à l’époque, à l’espace… . Répondre à la question « qu’est-ce que la vérité ?», nous met dans une situation difficile qu’ARISTOTE appelle l’aporie (le dilemme). C’est cette situation qui pousse Emmanuel KANT à reprendre à son compte après les anciens pour dire que la réponse à cette question nous donne « le spectacle ridicule de deux hommes dont l’un trait le bouc pendant que l’autre présente un tamis ». Mais après tout esquissons une définition de la vérité. La vérité dans son assertion générale est l’adéquation, la conformité de l’esprit aux choses (A dequatio Rei y intellectus). Ce qui signifie que la vérité est ce qui est conforme au réel, c’est-à-dire une conformité avec une réalité empirique, extérieure à nous. De tels énoncés supposent en effet que : Il existe une réalité objective à partir de laquelle nous pouvons penser le vrai ou le faux. Cette réalité objective est différente et objective à notre pensée. Il vaut mieux penser le vrai plutôt que d’être voué à l’erreur et à l’ignorance. Ces différentes préoccupations nous invitent à spécifier plusieurs formes de vérité. B-LES DIFFERENTES FORMES DE VERITE 1La vérité ontologique L’ontologie est la science, la pensée, la philosophie de l’Etre. C’est la science qui étudie l’essence abstraite et éternelle des choses. C’est le discours sur l’Etre, c’est-à-dire ce qui est au-delà des apparences sensibles. Par exemple chez PLATON, la vérité est celle de l’idée qui au-delà de la caverne, du monde sensible. 2La vérité matérielle C’est la vérité par rapport à ce qui est concret, matériel. Ici, le discours est en conformité avec ce qui est, c’est-à-dire avec la réalité concrète, matérielle, empirique. Cette vérité est basée sur les perceptions sensibles. C’est-à-dire que les sens sont les seuls critères de la saisie du vrai. 3La vérité formelle Cette vérité est celle des sciences dites formelles. C’est-à-dire les sciences dans lesquelles on ne se préoccupe pas du contenu matériel des propositions ou des énoncés mais plutôt de leurs formes, de la manière de conduire le raisonnement. Ces propositions formelles sont appelées « a priori » parce que indépendantes de l’expérience. Cette vérité est celle des sciences logiques et mathématiques. Considérons par exemple le syllogisme de SOCRATE (BARBARA) : A B Majeur : si tous les hommes sont mortels C A prémices Mineur : Or SOCRATE est un homme, C B Donc SOCRATE est mortel conclusion Forme symbolisée Si tout A est B Or C est A Donc C est B Ici, la vérité ne se trouve pas dans le contenu matériel des propositions mais dans leurs formes. Dans le syllogisme de SOCRATE, la vérité ne se trouve pas dans le fait de savoir si effectivement SICRATE est mortel mais de savoir des deux prémices énoncées il s’ensuit une conclusion nécessaire. 4- La vérité évidente C’est la vérité qui est vraie en elle-même, qui n’a pas besoin de vérification et de démonstration pour être vraie. L’idée ou le jugement vrai se reconnaît par ses critères intrinsèques. C’est ce qu’explique SPINOZA (1632-1677) « verum index sui » cela signifie que la vérité est en elle-même son propre signe. La vérité est ici a priori parce que totalement indépendante de l’expérience. Chez DESCARTES par exemple, la vérité évidente est l’idée claire et distincte par l’esprit qui n’autorise pas de doute. Exemple : le cogito de DESCARTES est une vérité intuitive et évidente. De même, les vérités axiomatiques en mathématique sont des vérités évidentes. 5- La vérité expérimentale Cette vérité est celle des sciences dites expérimentales telles que la physique, la chimie, la biologie… Ici la vérité est l’adéquation entre l’hypothèse et les faits. Le vrai est ce qui est vérifié expérimentalement. Elle fait intervenir un type d’investigation appelé méthode expérimentale (observation-hypothèse-expérimentation). De toutes ces formes de vérité, les vérités formelle et expérimentale sont celles qui vont nous intéresser car ce sont elles qui sont en rapport directement avec la science. Mais de façon générale, la vérité quelle qu’elle soit apparaît toujours comme une vérité relative. C-LA RELATIVITE DE LA VERITE La difficulté que présente la définition de la vérité réside dans son caractère relatif. Dire que la vérité est relative signifie qu’il n’existe pas de vérité absolue, universelle et valable pour tous mais qu’elle dépend des époques, des modes de pensée, des circonstances… Le principe de la relativité de la vérité se résume dans l’histoire de la philosophie à travers la phrase de SOPHISTE PROTAGORAS : « l’homme est la mesure de toute chose » (relativisme de PROTAGORAS). Cela signifie que toute chose dans la vie est soumise à l’appréciation personnelle de l’homme qui est une appréciation subjective. La vérité ici n’est pas une et absolue : elle est plurielle et changeante selon les individus et leur goût. Tel est le propre de la vérité chez les sophistes en général. En réalité toutes ces formes de vérité que nous venons d’énumérer sont loin d’être des vérités universelles, définitives même si quelques une sont scientifiques. Toute vérité est toujours relative à un système qui la fonde et lui donne ses lettres de noblesse. Par exemple, la géométrie Euclidienne, malgré son importance et son efficacité a été dépassée par celle de LOBTCHEVSKI en 1826 par le rejet du cinquième postulat d’EUCLIDE. De même la physique qualitative de PTOLELEE et d’ARISTOTE a été dépassée au 17èmè siècle par celle de NEWTON et GALILEE. Dans ce domaine les exemples sont nombreux. De façon générale, il convient d’affirmer que la vérité est relative aux différentes circonstances qui la définissent. C’est ce qui a fait dire à GASTON BACHELARD (1884-1962) que : « toute vérité est une vérité de système ». c’est aussi le point de vue commun qui affirme souvent « à chacun sa vérité ». la vérité en tant que telle est tributaire des goûts et des couleurs des hommes qu’on ne peut universaliser. La vérité ainsi définie ne se laisse appréhender que dans le dévoilement à travers le langage et la communication. II- LANGAGE ET COMMUNOCATION A- DIFFERENCE ENTRE LANGAGE, LANGUE ET PAROLE Le langage au sens large signifie tout système ou ensemble signes, de symboles phonétiques, visuels… qui servent à communiquer. Pour qu’il y ait langage, il faut que ces signes soient utilisés intentionnellement, qu’ils expriment un besoin motivé par le désir de communiquer. En ce sens on parlera de langage oral, gestuel, écrit et même de langage animal. Mais au sens restreint, le langage apparaît comme une institution universelle et spécifique à l’homme comportant les caractéristiques suivantes : Le langage humain est culturel Le langage humain est articulé et écrit. Le langage ainsi défini se distingue de la langue qui est l’instrument de communication propre à une société humaine. La langue est un ensemble de symboles verbaux ou écrits propres à un corps social. Exemple : la langue française, anglaise… Le langage ne doit pas non plus être confondu à la parole qui, quant à elle, est l’acte individuel par lequel s’exerce la faculté du langage. Le langage se traduit en ce sens dans la parole par laquelle on perçoit la langue. B- LA COMMUNICATION De façon générale, la communication est la façon ou le fait de communiquer. C’est-à-dire d’être en relation avec quelqu’un ou quelque chose. Plus précisément, elle désigne l’ensemble des procédés et des moyens techniques permettant les échanges, les informations et les dialogues. Aujourd’hui, ce terme est utilisé pour désigner les nouvelles techniques de diffusion de l’information (NTIC) : les médias, la radio, la téléphonie cellulaire, le réseau satellitaire, le téléfax, l’internet… De jours nous pouvons dire que les instruments de communications sont très perfectionnés, contrairement aux systèmes anciens rudimentaires des temps passés tels que le tam-tam. C- LA COMMUNICATION COMME LA FONCµTION ESSENTIELLE DU LANGAGE La Communication est la fonction essentielle du langage car toute parole suppose une volonté de communiquer. Mais des conditions doivent être remplies pour que la communication soit possible. La communication étant définie comme un échange de message, la langue est conçue comme un code commun qui rend possible cet échange de messages. Communiquer, c’est donc transmettre une information à l’aide d’une langue (code). Selon le linguiste ROMAN JACOBSON, tout acte de parole met en jeu quatre éléments qui sont très liés : l’émetteur, le récepteur, le thème du message et le code utilisé. Message Emetteur récepteur Code De façon générale, le langage est lié à l’idée de vérité qu’il véhicule. III- LE ROLE DU LANGAGE DANS LA RECHERCHE DE LA VERITE La vérité de la pensée a été très liée au langage. En effet chez les anciens elle est un discours sur l’Etre, c’est-à-dire ce qui est au-delà des apparences. Le langage lui-même apparaît comme le dévoilement de la pensée, de la vérité. La vérité n’a de sens que par rapport au discours et à la pensée. C’est ce que montre HEGEL qui affirme le caractère indissociable entre le langage et la pensée. Il dit à ce sujet : « c’est le son articulé, le mot qui seul, nous offre une existence ou l’intérieur et l’extérieur sont si intimement unis. Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus vraie», philosophie de l’esprit, p914. Hegel montre pat là qu’il n’ya point de pensée sans langage et que toute pensée doit pouvoir s’extérioriser à travers un langage qui lui donne sens et forme. Cependant, le langage n’est pas toujours utilisé pour exprimer la vérité. Il peut être aussi un instrument utilisé pour tromper ou entretenir le faux et la non vérité. C’est le cas par exemple chez les sophistes (rhéteur) comme les PROTAGORAS, GEORGIAS, ANNITOS… . De même le langage peut ne pas être toujours fidèle à la pensée, c’est le cas des actes manqués, des oublis, des lapsi… où le langage ne traduit pas toujours ce à quoi l’on pense. Dans ce domaine, il ya le fait que toutes les pensées ne sont pas bonnes à dire soit à cause du danger qu’elles représentent, soit à cause de leur caractère ésotérique (sacré, secret). Les mots deviennent incapables de traduire la vie intérieure qui constitue souvent un secret. Malgré tout, pensée et langage sont liés. CONCUSION IL convient de retenir que la vérité st difficile à être définie car elle est relative au temps, à l’espace et à plusieurs sortes de conceptions. Mais dans un monde dominé par la science, la vérité semble seulement celle du discours scientifique. On peut alors se demander si c’est la connaissance scientifique qui définit alors le critère de la vérité.