b) La deuxième critique, plus fondamentale, est développée par Corinne GENDRON au
Québec. Elle consiste à dénoncer le caractère profondément erroné d’une présentation qui
met sur le même plan trois « piliers », alors qu’il s’agit de choses de nature extrêmement
différentes :
• le social, l’humain est en fait l’objectif, le but, la fin recherchée
• l’économique n’est en fait qu’un moyen
• l’environnement est une contrainte, une condition.
Il est de fait non seulement faux de les mettre sur le même plan, mais c’est aussi à proprement
parler pernicieux, car cela permet tout un ensemble de déviations et détournements de sens de la
notion de développement durable.
Cette mise au point très éclairante permet en effet de faire apparaître des visions très divergentes du
développement durable qui s’expriment à travers cette même image des trois piliers.
On aurait alors d’une part une représentation du développement durable :
Objectif : épanouissement de tout homme
Moyens : développement économique
Contrainte : soutenabilité environnementale
Et d’autre part la croissance verte. Considérons maintenant en effet la phrase suivante : « Le
Développement Durable peut être considéré comme une conception macro-économique permettant à la Société de se
développer dans un environnement sain et humainement acceptable.» (Lucille Dumas, publication AUEG).
Il apparait clairement qu’ici l’objectif est l’économique (la poursuite de la croissance comme objectif
en soi), et que le social et l’environnement sont des conditions. Il faut que la croissance poursuivie ne
se heurte pas à des limites environnementales (soutenabilité environnementale), ni à des explosions
sociales (acceptabilité sociale). Ce n’est plus le développement durable, c’est la croissance verte !
c) « Le quatrième pilier », (la bonne gouvernance ou la démocratie participative) apparaît,
quant’à lui, comme étant de nature hybride. Il est à la fois un objectif (car désirable en soi) et
un moyen (il est en quelque sorte une condition de la progression sociale et de la gestion
environnementale).
Si l’on approfondit la réflexion sur l’équité et son rôle dans le Développement Durable, on peut dire
avec Corinne Gendron que : « (…) l’intégrité écologique est une condition, l’économie un moyen, et le
développement social et individuel une fin du développement durable, alors que l’équité en est à la fois une condition, un
moyen et une fin ». (Options Politiques/Policy Options, July-August 2005, pp. 20-25)
Le lecteur conviendra que ce n’est pas du tout la même chose que de parler de « trois piliers » … !
En conclusion, cette grille de lecture consistant à identifier, dans tout discours relatif au
développement durable faisant référence aux piliers, quel est l’objectif, le ou les moyens, la ou les
contraintes, permet de repérer assez vite quel est le type de développement véritablement recherché.
Vincent PLAUCHU, Blog, le 21/08/2013
http://blogs.upmf-grenoble.fr/vincentplauchu/developpement-durable/