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Quelles réflexions vous ont guidé lors de l’élaboration
de ce projet ?
P.G : Notre principe directeur a été de regrouper toutes les ac-
tivités au même niveau et de défendre une pratique de la mé-
decine de l’aigu. Les patients en situation d’urgences,
notamment les cas d’urgences absolues, doivent être déplacés
le moins possible. Ils doivent donc être accueillis dans un envi-
ronnement technique et technologique leur permettant de de-
meurer dans un seul établissement, voire même sur un seul
niveau. Pour arriver à cet objectif, les compétences médicales
vont devoir se déplacer autour du patient. Par ailleurs, nous sou-
haitons regrouper sur un même niveau, ou dans des espaces de
proximité immédiate, les installations relatives aux urgences
aigues du CHRU, qui représentent 120 000 patients par an. Pa-
rallèlement à la refonte de notre service d’urgence, nous avons
ouvert un bâtiment de réanimation qui dispose d’une salle des
urgences vitales située à trois mètres de l’accueil des urgences
chirurgicales aigues. Cette mutualisation des moyens et des
compétences est très importante car elle prévient la redondance
de dispositifs lourds relativement onéreux. Enfin, le CHRU a
comme autre projet la création d un Hôpital Cœur Vaisseaux
Poumons (HCVP) comprenant également un niveau consacré aux
urgences aigues. Le plateau technique regroupera les installa-
tions de la chirurgie cardiaque, vasculaire et les soins intensifs
de cardiologie, et bien entendu tout ce qui se rapporte à la car-
diologie interventionnelle. Ces deux bâtiments hôpital Salen-
gro regroupant urgences et réanimation et l’hôpital
cardiovasculaire et pulmonaire seront l un en face de l autre.
Les liens fonctionnels nous permettront ainsi l aboutissement de
notre projet autour de la médecine de l aigue. Cela nous per-
mettra de réduire les distances du parcours de soins. Au-dessus
de ces urgences modernisées, sera mis en place un plateau
technique de neuroscience qui concentrera les activités de neu-
rochirurgie et de neuroradiologie interventionnelle. Nous
sommes en train de reconsidérer le concept de bloc opératoire
des urgences reprenant certains aspects du fonctionnement
d’établissements nord-américains, que nous avons amélioré.
C’est ainsi qu’un bloc opératoire équipé d’imagerie interven-
tionnelle, véritable salle hybride permettra au cœur du plateau
opératoire des urgences fait de 5 salles la réalisation de gestes
techniques complexes. Dans notre projet architectural, le point
sur lequel nous avons insisté est l’accueil des familles et la
confidentialité de leurs échanges avec l’équipe médicale. Nous
avons, dans un premier temps, défini notre projet médical en
explicitant notre désir d’associer les technologies nouvelles, le
développement de la recherche et de l’enseignement et la pra-
tique de la médecine de l’aigue pour ne pas faire du domaine
des urgences un monde clos. C’est ce projet médical et les exi-
gences de ce secteur qui ont défini les caractéristiques du pro-
jet architectural et le travail des ingénieurs et de l’architecte.
Qui a été associé à ces différentes réflexions ?
P.G : Comme tous les projets de ce type, cette réflexion est née
de la concertation et des échanges entre l’équipe médicale, la
Direction générale, le président de CME et notre équipe d’ingé-
nieurs et architectes. Ce groupe restreint devait avant tout s’as-
surer de la faisabilité du projet avant de le partager avec l’en-
semble des acteurs de l urgence afin que tous soient impliqués.
La communication interne sur ce projet est très importante car
l’ensemble des acteurs du fonctionnement quotidien des ur-
gences doit partager le projet afin de développer le sentiment
d appropriation avant même sa mise en place en 2015 afin d’éviter
tout conflit social le moment venu. Notre souhait le plus récent
et sur lequel nous réfléchissons depuis peu est d’associer à cela
un projet culturel, un aspect très présent dans la plupart des
projets actuels. Nous avons donc soumis à notre Directoire la
proposition d’un lieu différent et animé d’un projet artistique
autour de la mise en place d’une « place de l’urgence » qui se-
rait le cœur des échanges entre les différents couloirs du futur
service. Cet espace serait avant tout un moyen de transformer
l’aspect traditionnel d’un service d’urgences et d’offrir aux visi-
teurs et aux patients, un autre cadre que celui de l’hôpital.
Puisque nous réhabilitons une structure existante, l’absence de
lumière dans l’hôpital Roger Salengro restera un problème ma-
jeur. Nous voudrions donc permettre aux occupants de ces ins-
tallations, une autre perspective que celle de l’hôpital en
permettant à des architectes d’intérieur et des artistes de s’ap-
proprier cet endroit pour y instaurer une vision différente de
celle, classique, de l’hôpital et des urgences.
Quelles spécificités architecturales requiert l’activité
des urgences ?
P.G : Le service des urgences doit être un environnement qui
engendre une certaine sérénité. L’activité d’urgence est, par
définition, une convergence du stress et de l’anxiété. C’est pour-
quoi nous devons rester attentifs à certains éléments comme
les conditions d’accueil des patients et des accompagnants, les
conditions d’attente et de renseignements ainsi que la confi-
dentialité des liens entre les proches des patients et le person-
nel soignant. Le fait que nous évoluions dans un service
d’urgences ne nous exempte pas d’apporter le confort et le res-
pect dus à la personne. Il ne peut y avoir de services d’urgences
efficaces sans la création d’un circuit court. La plupart de nos
circuits courts sont des circuits courts médicochirurgicaux per-
mettant une activité de traumatologie ambulatoire nous met-
trons en œuvre un circuit court médical et une urgence dentaire
en dehors des heures ouvrables. Concernant plus spécifique-
ment les urgences des plus anciens, nous devons mettre en
place des circuits individualisés dès l’entrée, malgré l’admis-
sion commune. Les patients très âgés, de plus de 75 ans, admis
aux urgences posent des difficultés particulières en termes de
prise en charge car nous n’aurons jamais les moyens de créer
un service d’urgences gériatriques. Il nous faut donc faire en
sorte que les patients les plus âgés n’arrivent pas aux urgences
mais soient, le plus souvent possible, directement orientés vers
le circuit court gériatrique de l’hôpital. Dans les cas où cela se-
rait impossible, nous devons avoir des installations et des équi-
pements adaptés à ce type de patients. L’accompagnement
constant d’un proche du patient est primordial dans ce cas-là,
car, souvent cette personne est également âgée.
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