10 Dialoguer LibreCours • MAGAZINE DE L’UNIVERSITÉ DE NAMUR • N° 92 / SEPTEMBRE 2014 ROBOTS GUERRIERS ? DU LABORATOIRE AUX PATIENTS LE PROFESSEUR LAMBERT À LA TRIBUNE DES NATIONS-UNIES C’est devant les représentants des Nations-Unies que Dominique Lambert (Département sciences, philosophies & sociétés) a livré une réflexion éthique et sociologique sur les systèmes d’armes autonomes létales. Une intervention qui s’inscrit dans le cadre d’une réunion d’experts qui se tenait à Genève en mai dernier. D « es robots capables de rechercher, d’identifier et d’utiliser des armes (létales ou non) sans médiation humaine dans un environnement non limité (ouvert), ni prescrit a priori, avec la capacité de s’y adapter (éventuellement par apprentissage) », telle est la définition que Dominique Lambert propose pour identifier les systèmes d’armes autonomes. Surréaliste ou futuriste ? Pas tant que cela, la recherche en robotique progresse très vite, c’est pourquoi une réflexion s’impose ! UNE CAPACITÉ MORALE Sans être technophobe technophobe, le professeur Lambert a défendu la place de l’Homme POUR DES ROBOTS ? dans sa capacité à décider, à réconcilier, à Sans être technophobe, le professeur namurois humaniser et à construire son histoire. articule sa réflexion autour de deux principaux questionnements : la complexité de l’agir humain est-elle transposable en algorithme et quelles seraient les conséquences, voire les dérives, d’une « déshumanisation » de la guerre ? Les exigences du droit humanitaire, les décisions militaires (anticiper les évolutions du conflit, décider le risque que l’on est prêt à accepter), la différenciation entre combattants et non combattants… font appel à notre capacité intuitive et prospective ou à nos valeurs, difficilement traductibles en algorithmes. À ceux qui pensent qu’il serait possible de doter les robots de capacités morales en installant des « logiciels éthiques », Dominique Lambert répond qu’on n’obtiendrait qu’une simulation de « l’agir moral humain qui suppose la référence à des intentions particulières que l’on ne peut attribuer à une machine ». En outre cela poserait de nombreuses questions : Quelle éthique implémenter ? Les situations complexes peuvent-elles être appréhendées par un logiciel ? Comment le logiciel abordera-t-il les conflits de valeurs ? « Il y a un sens profond et une importance cruciale à maintenir l’humain dans la boucle de décision morale », insiste l’orateur. Quant aux conséquences, elles pourraient être effrayantes. L’usage d’armes autonomes provoquerait, selon le professeur namurois, « une volonté de vengeance et de destruction plus grandes d’humains par des méthodes plus barbares (terrorismes). Des risques d’escalade de la violence liés au caractère ressenti comme déloyal et asymétrique de ce type d’armes ne doivent pas être négligés ». Autres conséquences à craindre : une banalisation de la guerre, devenue une entreprise sans risque pour celui qui l’entreprend, ou une déresponsabilisation sous le couvert de défaillances technologiques. Plus largement, la politique, la diplomatie et la profession militaire risqueraient d’être vidées de leur sens. On assisterait alors à une dépolitisation qui va de pair avec une déshumanisation. En guise de conclusion, Dominique Lambert invite chacun à réfléchir à la place qu’occuperait encore l’Homme dans un monde peuplé de robots autonomes : « Il serait auto-contradictoire de promouvoir des robots qui finalement mettraient l’homme complètement hors-jeu en le privant de sa capacité de décider, de réconcilier, d’humaniser et de construire lui-même son histoire ». A.M. À LIRE… Thrombose et hémostase : UNE APPROCHE On le sait, du laboratoire universitaire aux patients, les voies peuvent être longues et obturées. Mais il arrive que des chercheurs et des cliniciens collaborent étroitement pour améliorer la circulation et déboucher ces artères. Vous l’aurez compris… c’est pour traiter les thromboses et l’hémostase que certains chercheurs et professeurs de la Faculté de médecine, et plus particulièrement le Département de pharmacie de l’Université de Namur, et le CHU Dinant Godinne UCL Namur ont créé le centre NTHC (Namur Thrombosis and Hemostasis Center). Une vingtaine de pharmaciens universitaires et de cliniciens (anesthésistes, hématologues, internistes, pharmaciens biologistes, pharmaciens cliniciens) y développent une réelle collaboration débouchant sur une expertise interdisciplinaire, fondamentale et appliquée, au service du patient. Christian Chatelain (à droite) et son équipe entendent donner à tous les médecins, de toutes les disciplines, une information solide et cohérente sur les thromboses et l'hémostase. R esponsables d’accidents cardiovasculaires (infarctus du myocarde ou accident vasculaire cérébral), les thromboses artérielles représentent la première cause de mortalité dans les pays industrialisés. En Belgique, 15.000 patients en décèdent chaque année et 10.000 personnes souffrent de thrombose veineuse, dont environ un tiers meurent ensuite d’embolie pulmonaire. Pour prévenir ces pathologies, différents traitements existent : l’aspirine, les antivitamines K ou encore les nouveaux agents anticoagulants. Néanmoins, leur utilisation nécessite un suivi régulier en raison des risques associés à Le NTHC en chiffres… Enseigner le lexique Garcia-Debanc Cl., Masseron C. et Ronveaux C. (sous la direction de) PUN, 2013 • 7 professeurs • Une dizaine de Médecins/ pharmaciens cliniciens Les patrimoines littéraires à l'école : usages et enjeux Sylviane Ahr et Nathalie Denizot (sous la direction de) - PUN, 2013 • Une trentaine de publications de qualité et une centaine de conférences nationales et internationales en 3 ans Villes martyres Marck Derez et Axel Tixhon (sous la direction de) - PUN, 2014 • 7 doctorants Visé, Aarschot, Andenne, Tamines, Dinant, Leuven, Dendermonde. Belgique-Août-septembre 1914 www.pun.be • Une dizaine de projets de recherche • 2000 patients suivis /an Responsables d’accidents cardiovasculaires les thromboses artérielles représentent la première cause de mortalité dans les pays industrialisés. ces traitements. On estime en effet que 50 % des patients sont confrontés à des problèmes de sous ou surdosage aigus ou chroniques. Du laboratoire universitaire à l’hôpital et de l’hôpital au laboratoire universitaire, les échanges au sein du NTHC sont quotidiens. À partir des dosages sanguins des patients, l’équipe du professeur Jean-Michel Dogné, directeur du Département de pharmacie de l’UNamur, développe et valide des outils d’analyse qui permettent de détecter les risques de thrombose ou d’assurer un suivi des patients sous traitement. À titre d’exemple, ces outils visent à identifier des microparticules sanguines libérées en cas de thrombose ou de risque de thrombose qui peuvent servir de biomarqueurs. L’Université dispose en effet d’un matériel pointu et d’une expertise pour développer ce type de techniques. Ces tests sont ensuite appliqués et validés au sein du laboratoire clinique co-dirigé par les professeurs