Mission pour la Science et la Technologie de l’Ambassade de France aux Etats-Unis
Nanocooling is cool : des films minces nanostructurés pour refroidir
les puces électroniques
Publié le mardi 10 mars 2009
Voir en ligne : https://www.france-science.org/Nanocooling-is-cool-des-films.html
Lorsqu’on regarde la courbe des performances des CPU d’ordinateurs en fonction de l’année de production,
une variante de celle qui est connue sous le nom de "Loi de Moore", on s’aperçoit que la vitesse d’horloge, qui
était de 3 GhZ en 2002, était de … 3 GHz en 2007, quand elle aurait dû être de 24 GHz ! Une des raisons de
cette stagnation - à laquelle on a remédié en augmentant le nombre de cores - est à chercher dans
l’augmentation de la puissance dissipée, et donc de la température, dans les processeurs, au fur et à mesure
que leur taille diminue. Le problème touche à la fois les performances, car les courants de fuite aux portes des
transistors augmentent exponentiellement avec la température, et le coût de fonctionnement, notamment des
grandes centrales de données, où les coûts liés au refroidissement des machines dépassent parfois le coût
d’achat des machines elles-mêmes. De plus, il serait parfois intéressant de pouvoir refroidir le processeur, ou
la puce à ADN, ou tout autre micro appareil localement, et sur demande, en fonction de l’activité et des flux de
chaleur instantanés.
Les solutions proposées utilisent l’effet thermoélectrique ou effet Peltier. Découvert en 1834 par Jean-Charles
Peltier, ce phénomène physique dépend du fait que dans un conducteur les porteurs de chaleur et d’électricité
sont la même entité, l’électron ; en même temps, la quantité de chaleur transportée par unité de charge est
fonction du matériau. Si l’on réalise une jonction entre deux conducteurs, et si l’on applique une différence de
potentiel aux extrémités de la jonction, on obtient un courant électrique, qui est évidemment continu à travers
la jonction. Le courant de chaleur, quant à lui, n’est pas, en général, le même dans les différents matériaux : le
flux de chaleur est donc discontinu à la jonction, ce qui se traduit par l’apparition d’une source ou d’un puit de
chaleur, selon le sens du courant. La jonction peut donc fonctionner comme pompe de chaleur. Une autre
façon de décrire le mécanisme est la suivante : à l’équilibre, les niveaux de Fermi des deux matériaux
s’égalisent, et des électrons sont transférés d’un matériau à l’autre. Ceci crée un champ électrique qui
s’oppose au passage des électrons, et permet d’atteindre un état stationnaire. En polarisant la jonction, les
électrons doivent surmonter une différence de potentiel électrique additionnelle. Si elle renforce le champ
électrique initial, les électrons doivent dépenser plus d’énergie pour la surmonter, et l’on extrait de la chaleur.
Le refroidissement ainsi obtenu peut atteindre 40°C, et les modules Peltier sont utilisés dans beaucoup
d’applications qui demandent un refroidissement efficace avec peu d’encombrement : frigos portables,
caméras, satellites et autres engins spatiaux… et composants d’ordinateurs. Deux matériaux qui sont souvent
utilisés dans les thermocouples (dont le fonctionnement est basé sur un autre effet thermoélectrique) sont le
tellure et le bismuth. Récemment, un article dans Nature Nanotechnology annonçait la réalisation d’un module
Peltier constitué d’une structure multicouche à films minces dans laquelle des super réseaux de tellurure de
bismuth et de tellurure d’antimoine (de type p) alternent avec des super réseaux à base de tellurure de
bismuth pur et dopé au sélénium (de type n). La structure est déposée par épitaxie en phase vapeur aux
métallo-organiques, sur un substrat de GaAs.
L’avantage de ce module thermoélectrique par rapport à ceux déjà réalisés à base de silicium et de
germanium n’est pas tellement dans l’efficacité, puisque les auteurs de l’article, déclarent un refroidissement
d’environ 15°C, encore loin des 40 degrés théoriquement possibles. En effet, les composants Si/Ge montrent
en général une forte dégradation de performances une fois intégrés à l’arrière de la puce, ce qui n’est pas le
cas du nouveau composant.
La technique, sûrement prometteuse, a été mise au point dans les laboratoires d’Intel en Arizona, en
collaboration avec Arizona State, et deux entreprises de Caroline du Nord.
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