08
la revue de
Le magazine
de l’Institut Paoli-Calmettes
Juillet 2012
-
N° 3
l’ipc
www.institutpaolicalmettes.fr
DOSSIER
LE PARCOURS DU GREFFON ...
LA GREFFE, ET APRES ...
CHIMERE ET DON DE SOI ...
...
SOINS
La radiothérapie
per-opératoire testée à l’IPC ...
VIE DE L’IPC
Le comité de patients
de l’Institut fête ses dix ans ...
A l’IPC,
les preuves
des greffes
A l’IPC,
les preuves
des greffes
LE PARCOURS DU GREFFON ...
LA GREFFE, ET APRES ...
CHIMERE ET DON DE SOI ...
...
DOSSIER
SOINS
z P:4 - Ethique et réflexion
Soins palliatifs
z P:6 - Actu - Prévenir - Dépister
Cancer et environnement
z P:7 - Prendre en charge
La radiothérapie per-opératoire testée à l’IPC
z P:28 - La chirurgie ambulatoire :
nouveaux dispositifs, premiers bilans
z P:31 - Le retentissement social
de la maladie cancéreuse
DOSSIER
z P:8 - Une greffe par jour, des années de vie gagnées ...
z P:13 - Essai clinique
Essai sur les NK,cellule-médicament
Par le Docteur Boris Calmels, Responsable de la production
des préparations de thérapie cellulaire à l’IPC
z P:15 - Reportage
La cytaphérèse
z P:16 - Interview
Une chance sur un million de trouver un donneur compatible
Entretien avec le Docteur Christophe Picard, responsable du laboratoire
d’immunogénétique de l’EFS-AM à Marseille et du centre donneur PACA,
partenaire de l’IPC
z P:18 - Focus
Le parcours du greffon
z P:20 - « La greffe allogénique, une Chimère ? »
z P:22 - La greffe, et après
EN IMAGES
z P:23 - Un défi collectif pour une unité de pointe
RECHERCHE
z P:26 - Essai clinique
Premier essai clinique d’un anticorps
monoclonal chez l’homme à l’IPC
z P:27 - In vitro / In vivo
Cancer du pancréas
VIE DE L’IPC
z P:34 - Focus
Le comité de patients de l’Institut fête ses dix ans
z P:36 - Réseau
L’IPC et ses partenaires dans la région PACA-Corse
z P:38 -
AGENDA / BREVES
Sommaire
Directeur de la publication :
Professeur Patrice Viens
Rédaction en chef :
Anne Fouchard
Rédaction : Elisabeth Belarbi,
Sylviane Bourdiec, Valérie Depraetere-Ferrier,
Anne Fouchard, Leila Lecavorzin-Mille
Contributions : Yolande Arnault, Patrick Ben Soussan,
Didier Blaise, Boris Calmels, Christian Chabannon,
Monique Cohen, François Eisinger, Christophe Picard
Un grand merci aux médecins généralistes
qui ont accepté de commenter nos actualités.
Secrétariat de rédaction : Elisabeth Belarbi, Anne Fouchard
Crédits photos : Jean-Michel Durey, Michel Gélabert
Conception graphique : Nicolas Guieu
Mise en page : Nicolas Guieu
Imprimerie : Pure Impression - SIRIS-ISSN en cours.
Dépôt légal à parution - Achevé d’imprimer juin 2012
Routage : Atout Mailing Services
Editeur : Institut Paoli-Calmettes,
Centre régional de lutte contre le cancer
232, Boulevard Sainte Marguerite - BP 156 - 13273 Marseille
Cedex 9 - Tél. : +33(0)4 91 22 33 33 - Fax : +33(0)4 91 22 35 12
Contact service communication :
Tél. : +33(0)4 91 22 37 48 - [email protected].fr
Le magazine
de l’Institut Paoli-Calmettes
Juillet 2012
-
N° 3
Le paradoxe, avec le cancer, est que plus la recherche
et la connaissance avancent, plus elles se complexifient.
Avant, on parlait du « cancer » ; aujourd’hui, on sait que « le » cancer
n’existe pas, mais qu’une multitude de formes cancéreuses, des cancers,
existent. On sait que la nature ou la quantité d’une protéine en surface
ou à l’intérieur d’une cellule favorisent la prolifération de tumeurs,
ou que certaines cellules malignes parviennent à survivre, même privées
d’oxygène, même soumises au « stress » de chimiothérapies agressives
ou d’irradiations massives.
Avant, on disposait d’un triptyque limité : chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie.
Schématiquement, on luttait contre le cancer avec des armes de destruction
massive, on bombardait tout, pour détruire un ennemi trop bien enfoui
pour être débusqué. Aujourd’hui, la chirurgie est de plus en plus préservatrice,
la radiothérapie permet des irradiations plus ciblées qui épargnent les tissus sains,
la chimiothérapie est moins hasardeuse grâce à l’analyse biologique de la tumeur.
Aujourd’hui, on envoie des éclaireurs (les techniques de ganglions-sentinelles),
on dissèque l’ADN des tumeurs et, grâce au développement des outils
de séquençage à haut débit du génome, on sait identifier quel segment
de quel gène comportant une anomalie il faut « réparer » ou reprogrammer.
Les armes sont plus nombreuses et précises, et surtout, la manière
de les employer ouvre considérablement le champ des possibles :
techniques de radiothérapie per-opératoire associant chirurgie et radiothérapie,
combinaison entre chimiothérapies et thérapie cellulaire, agrégation d’anticorps
monoclonaux aux chimiothérapies classiques, … Avec les traitements « ciblés »,
nous employons des stratégies basées sur la carte d’identité génétique
de la tumeur, et sa façon d’évoluer et de proliférer.
Mais on a aussi compris la sensibilité des cellules cancéreuses à leur environnement,
et l’importance qu’il y a à tenir compte de la personne malade dans sa globalité :
l’âge, le poids, les autres pathologies, la capacité à tolérer tel ou tel traitement,
mais aussi l’état psychologique et social … C’est cet ensemble que la « médecine
personnalisée » doit considérer pour ne pas seulement lutter contre la maladie
cancéreuse mais soigner les malades : proposer des traitements sur mesure
à des individus, par essence irréductibles, uniques, et en interdépendance
avec leur environnement.
Cette édition de la Revue de l’IPC illustre bien ces changements et montre que,
si elle rend difficiles les discours et les réponses simples, la prise en compte
de la complexité est l’avenir, prometteur, de la cancérologie.
Irréductibles
paradoxes
PAR LE PROFESSEUR
PATRICE VIENS
Directeur général de l’IPC
EDITO
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Une aide à bien vivre
ce qui reste à vivre
L’idée première de l’individu face à l’annonce
d’un cancer est la mort. Les soins palliatifs ne
se résument pas au contrôle de la souffrance
due à la maladie, ils englobent également
l’accompagnement des malades qui se confrontent
à la vision de leur propre décès.
Plutôt qu'une aide à « bien mourir » , les soins
palliatifs sont une aide à bien vivre ce qui reste
à vivre, ils sont « la matérialisation de l’attention
portée au malade et à sa souffrance ».
Le Professeur Aubry estime que les questions
de fin de vie doivent être abordées assez tôt avec
le malade, afin de le préparer progressivement
à l’idée de sa prise en charge et à l’éventualité
de son décès. Nier que la mort est une possibilité
est un mauvais réflexe. Au cours de sa maladie,
le patient est émotionnellement dans l’espérance
et l’annonce directe de la mise en place de soins
palliatifs r ompt brutalement cette condition.
Il souligne, de plus, qu’une annonce brutale peut
ne pas être entendue, témoignant d’une réaction
de rejet et d’incompréhension.
« Il faut replacer l’humilité au cœur du dialogue
médecin/malade, en admettant qu’il existe
des incertitudes et que l’on ne connaît pas les
aboutissants de la maladie ». De cette manière,
les espoirs de l’individu perdurent, même pendant
les soins palliatifs.
Les soins palliatifs ne se limitent pas aux questions
de fin de vie et échappent à une définition simple.
Considérer les représentations des patients et
des soignants est nécessaire pour établir des soins
de qualité. Les soignants s’y confrontent et s’interrogent
sur l’information à transmettre aux patients.
Extraits de la conférence
du Professeur Régis Aubry
et du Docteur Thérèse Aurran-Schleinitz
le 2 février à l’IPC
Les formations du personnel soignant à ces pro-
blèmes éthiques sont insuffisantes (voir encadré).
Les médecins devraient être formés aux « tech-
niques de communication », avoir une approche
de l’éthique médicale et apprendre le travail en
équipe. « Il faut faire travailler les étudiants
sur leurs propres représentations et développer
leurs champs de compétences ».
Car l’un des enjeux actuels est de développer
une culture palliative intégrée à la pratique
de tous les professionnels de santé, et c’est dans
les domaines de la recherche et de la formation
qu’il reste le plus gros travail à faire.
Mais peut-on informer
explicitement les patients ?
Thérèse Aurran-Schleinitz, hématologue à l’IPC,
affirme assister à l’évolution de la prise en charge
des patients en fin de vie et à l’am élioration
de l’information qui leur est donnée.
Elle constate que si le dialogue était inexistant
auparavant, aujourd’hui les choses sont plus
claires. L’émergence des soins palliatifs l’inter -
roge sur la nécessité et le besoin d’informer
explicitement le patient. Cette question a fait
l’objet de recherches pour un Master, à l’espace
éthique Méditerranéen de Marseille , sous la
direction du philosophe Pierre Le Coz. L’opinion
de trente médecins et quinze infirmiers a été
assemblée et analysée.
Le raisonnement éthique réside ici dans le conflit
entre le besoin de respecter l’autonomie du malade
et le devoir de non-malfaisance du personnel
soignant. Si le médecin aspir e à être sincère et
explicite par respect pour le patient, il est toutefois
tenté de le protéger d’une mauvaise nouvelle
supplémentaire et d’un vocabulaire qu’il pourrait
percevoir assez violemment.
De cette étude, il ressort que la représentation
des soins palliatifs ch ez les soign ants tour ne
autour de trois idées. S’ils sont synonymes d’une
meilleure qualité de vie, de douceur, de confort
et d’abolition de la souffrance, ils le sont aussi
de l a m ort e t de l ’échéance à c ourt t erme.
Ils soulèvent également un sentiment d’ échec
thérapeutique douloureux pour les soignants,
les renvoyant à leur propre défaite.
La grande majorité des interrogés se prononce
en faveur de l’annonce explicite du pr onostic,
avec des réserves toutefois sur le caractère vio-
lent qui peut être perçu par le patient. Le besoin
de transmettre cette information est prégnant,
mais le problème subsiste dans la forme du mes-
sage. Selon Thérèse Aurran-Schleinitz, le terme
« annonce » serait alors mal choisi, il faudrait
plutôt parler d’ « information », qui lui semble
plus adapté. T enir compte des peurs et des
attentes des patients et r especter les bor nes
entre ce qu’ils peuvent entendre et ce qui doit
être dit est primordial pour une communication
efficace et soutenable.
ETHIQUE ET REFLEXION
SOINS
Soins palliatifs
« respecter
l’autonomie
du malade »
Le pr ogramme 2008/2012 sur la fin de vie,
dans le cadre de la loi Leonetti du 22 avril 2005
relative aux droits des malades et à la fin de vie
arrive à t erme e t c ’est l e m oment d u b ilan.
Le premier rapport de l’Observatoire national de
la fin de vie, dirigé par le Professeur Régis Aubry,
a été remis le 14 février à François Fillon.
Loin d’être dans une position idéologique,
l’Observatoire cherche à f ournir aux décideurs
des éléments susceptibles d’orienter les futures
politiques de développement de soins palliatifs.
Les principaux axes étudiés sont la per ception
des questions de fin de vie par la population,
les besoins et réponses apportés aux patients
et l’état des lieux de la r echerche et de l’ensei-
gnement en France.
La mort est un sujet de discussion difficile à appré-
hender. Voltaire affirmait que « L'espèce humaine
est la seule qui sa che qu'elle doit m ourir » .
Si, à la naissance chaque êtr e est déjà voué
à disparaître, vivre le plus longtemps possible
et dans les meilleur es conditions semble êtr e
l’objectif de l’espèce humaine. Au fil de l’évolution,
l’homme a tenté d’apprivoiser la nature, la santé
et la mort. La France est le pays où la fin de vie
est la plus médicalisée, mais selon le Professeur
Aubry « il reste encore beaucoup à faire
pour que notre société puisse aborder la question
de notre finitude ».
Aider les personnes malades
à réinvestir dans la dignité
Les demandes d’euthanasie sont l’expression de la pire des souffrances.
Elles sont de plus en plus présentes à cause de la capacité de la médecine à prolonger
la vie et parfois dans des conditions douloureuses. Seulement la diminution de la qualité
de vie ne s’accompagne pas uniquement d’une douleur physique, et imaginer que des soins
pourraient empêcher la souffrance morale est une illusion.
Cependant, la souffrance existentielle s’atténue lorsque les patients sont bien
accompagnés et lorsque leurs représentations sont prises en compte. Aider les individus
à se réinvestir dans la dignité et à réduire leur sensation d’être une charge pour leur famille
et pour la société permet l’allègement de la souffrance psychique.
La majorité des demandes d’euthanasie s’estompe donc avec la dispense de soins palliatifs
de qualité, mais ne disparaîtra peut-être pas pour autant.
Les questions sur l’euthanasie ne doivent pas se limiter à une approche idéologique
de type pour ou contre. Tenter de comprendre les motivations qui favorisent la demande
a une portée plus significative.
Il existe un écart entr e la per ception par la population et l a réalité de la fin
de vie. La population estime que l’on meurt de plus en plus seul et de moins
en moins à l’hôpital. 70 % des Français ignorent l'existence d'une loi sur l'achar-
nement thérapeutique et les familles ont tendance à considérer que les médecins
ne poussent pas assez les ressorts de la médecine pour aller plus loin.
L’euthanasie est abordée par l’Observatoire via une question sémantique.
Doit-on discuter des demandes d’euthanasie ou de ce que l’on fait de ces demandes ?
Une analyse des décisions médicales permettra une comparaison des pays euro-
péens ayant légiféré sur l’euthanasie, comme les Pays-Bas et la Belgique.
La cultur e palliative , très récente dans notr e pays , n’est pas encor e assez
développée. Seulement 2 % des médecins et 10 à 15 % des infirmiers ont été formés
aux questions de fin de vie depuis 2005.
Une approche plus littéraire, plus philosophique, plus épistémologique devr ait
être développée.
La recherche sur la fin de vie est très en retard en France, ce qui est probablement
à notre culture biomédicale. Une approche pluridisciplinaire et qualitative
est nécessaire.
Extrait
du premier rapport
de l’observatoire national
de la fin de vie
PROFESSEUR
REGIS AUBRY
Président de l’Observatoire
national de la fin de vie et
responsable de l’unité de soins
palliatifs à l’hôpital de Besançon
DOCTEUR THERESE AURRAN-SCHLEINITZ
Hématologue à l’Institut Paoli-Calmettes
07
06
Pour répondre, il faut clarifier ce que l’on entend
par « environnement » : s’agit-il de l’environne-
ment non maitrisable par la personne (pollution
industrielle, radioactivité naturelle), ou d’une défi-
nition plus large incluant des facteurs comme
le tabagisme, relevant plutôt du « mode de vie » ?
Prenons l’exemple du cancer du sein.
Plus de 100 facteurs liés au mode de vie ou à
l’environnement, et plus de 500 gènes sont décrits
comme « facteurs de risque ». Ainsi, si dans le passé
d’une patiente atteinte d’un cancer du sein, trois
de c es f acteurs s ont p résents - p ar e xemple,
une i rradiation t horacique, u ne a limentation
riche en graisses animales et une muta tion
d’un gène (l’hérédité) - son cancer sera-t-il qualifié
de génétique, de nutritionnel ou de radio-induit ?
Il faut également clarifier ce que l’on entend par
« cause » : la subjectivité façonnée par le cadre
de lecture culturel et l’histoire personnelle
de celui qui est amené à « juger » de la « cause »
du cancer prédétermine la qualification.
Et des éléments jugés non valides scientifiquement,
comme un choc af fectif par ex emple, peuvent
être r essentis par certains comme une cause
de leur maladie.
Comment savoir ?
Sur quoi s’appuyer donc pour déterminer la part
environnementale ? Trois modes de production de
connaissance peuvent être proposés : l’expertise,
l’expérience et l’expérimentation. Le modèle de
l’expert comme source du savoir légitime renvoie
à des temps anciens : « Aristote a dit ». Pourtant,
la question « comment sait-on » est plus impor-
tante que la question « qui sait ? ».
L’expérience est par cellaire et conjonctur elle.
Elle n’explique facilement que le passé, mais
est beaucoup moins performante pour prédir e
le f utur. S eule l’ expérimentation s cientifique
possède les caractéristiques permettant à la fois
la validation/confirmation et la généralisation
des résultats. Néanmoins, même la science ne peut
se p révaloir d e n eutralité, e t l ’expérimentation
est longue, coûteuse, et ne peut répondre
en temps réel aux questions posées. Elle produit
des connaissances solides, mais parcimonieuses
et décalées dans le temps.
Dans un domaine les enjeux sont cruciaux
et les décisions urgentes, la confiance qu’inspirent
les producteurs de connaissance est essentielle.
Or, ce que nous dit la science est plus ou moins
« audible » par des personnes en défiance vis-à-
vis des institutions, dans un climat de concurrence
entre une idéologie qui a pour elle l’avantage
des discours simples, et une science fragile,
car nuancée.
Quelles études permettent
de répondre à ce type de questions ?
Dans les études épidémiologiques cas versus
témoins, i l s’ agit d e c omparer l es p ersonnes
ayant eu un cancer à celles qui en sont indemnes,
en leur posant des questions sur leur vie : tabac
ou non, métier pratiqué, lieu de vie etc.
De cette façon, les études sur les migrants ont
mis en évidence que l’occurrence des événements
(cancer) était plus dépendante de la variation
du contexte que du « terrain génétique ».
Bientôt, de nouveaux outils, comme les systèmes
d’information géographique (SIG) permettr ont
de modéliser et de corréler sur une carte les lieux
d’exposition et la présence de l’événement étudié.
Ou encore le bio-monitoring, consistant à détecter
les polluants dans un milieu au travers de leurs
effets sur les organismes. Ou enfin, l’étude de
la toxicité sur le génome de substances suspectées
délétères.
Comment s’expriment
nos connaissances ?
Avec la notion de « risque relatif », il s’agit de savoir
si une personne exposée à un risque donné (tabac
ou pollution) a 2 fois, 3 fois ou 30 fois plus de risque
qu’une personne non exposée. Spectaculaire,
la notion a la faveur des jour nalistes. En ef fet,
le risque relatif est souvent artificiellement élevé.
Dire que les leucémies de l’enfance sont 2 fois
plus élevées en cas d’exposition aux radiations
revient à dire que le risque passe de 1/100 000
à 2/100 000, soit moins de 3 cas par an.
Tandis que parler de risque de cancer du sein
augmenté d e 1 % revient à d ire q u’il peut y
avoir 600 cas en plus chaque année. Une petite
augmentation d’une maladie fréquente a plus
d’impact qu’une augmentation importante
d’une maladie rare.
Le risque absolu est ce qui préoccupe les indivi-
dus : quel est mon risque d’être atteint de cette
maladie (sans comparaison avec une population
jugée normale) ? La part attribuable relève
du langage des décideurs : combien de cas
pourrait-on prévenir chaque a ne en évitant
le facteur de risque en question ? Le choix du lan-
gage, de l’outil de mesur e prédétermine donc
la perception par les personnes de l’importance
d’un risque.
Que sait-on ?
Si l’environnement dans son acceptation la plus
large (englobant le mode de vie, l’alcool,
le tabac, l’alimentation et l’obésité) est beaucoup
plus déterminant pour les cancers que l’hérédité,
l’environnement au sens strict - la pollution -
a un impact faible à ce jour. Ce fait incontestable
mérite néanmoins deux nuances très importantes :
z Ce que l’on peut dire, aujourd’hui, c’est que l’en-
vironnement d’il y a 25 ans n’a pas sensiblement
modifié le risque de cancer. Or, personne ne peut,
aujourd’hui, prétendre savoir quels seront
les impacts de l’environnement actuel dans 25 ans.
Personne ne peut savoir si cet impact sera toujours
faible ou au contraire très important.
z Aux côtés de l’analyse quantitative des risques,
il faut faire la différence entre risques subis
et risques choisis. La recherche d’une équité envi-
ronnementale repose grandement sur cette
différence. C’est, en soi, un enjeu majeur.
La radiothérapie per-opératoire de contact est une innovation majeure qui consiste à irradier
le lit tumoral à la suite de l’ablation de la tumeur, lors de l’intervention chirurgicale. En ciblant
directement la zone tumorale, elle préserve mieux les tissus sains et comme la radiothérapie
externe, évite une ablation lourde d’organe.
70 % des femmes traitées conservent tout ou partie de leur sein. Cette méthode plus précise
et m oins t oxique r emplace l es 2 5 s éances d e r adiothérapie g énéralement p ratiquées
dans les semaines suivant la chirurgie. Le risque de récidives de 5 % r este le même que
pour les méthodes habituelles.
Avec plus de 50 000 cas par an en France, le cancer du sein est le plus fréquent des cancers
chez les femmes. Grâce aux progrès de la médecine ces vingt dernières années, le pronostic
de guérison augmente et les soins sont moins contraignants et invalidants, la chirurgie
de plus en plus conservatrice et de moins en moins douloureuse.
Une étude pilote nationale
La radiothérapie per-opératoire de contact est évaluée via une étude pilote nationale, à laquelle
l’IPC participe. Dirigée par l’Institut de Cancérologie de l’Ouest (ICO) qui a aussi mené
les premiers essais, elle fait suite à un appel à projet de l’INCa. Il s’agit d’une étude scien-
tifique et économique ayant pour but la définition des bonnes pratiques chirurgicales
et de radiothérapie, des critèr es d’inclusions des patientes et la validation des pr otocoles
de traitements. L’ICO et l’IPC sont membres de la fédération UNICANCER.
Pour p articiper à ce tte étude e t proposer cette nouvelle technique, l’IPC a dû investir
240 0 00 Eu ros d e f onds p ropres a uxquels s ’ajoutent l es c ontributions d e l ’INCa et
de la Fondation du Crédit Agricole PACA de 150 000 Euros chacun. Cet investissement
a permis l’acquisition du matériel et l’aménagement d’une salle d’opération. A cela s’annexe
un budget de 150 000 Euros alloué par l’INCa pour le fonctionnement de l’étude pilote.
En 2014, après validation de l’étude, la radiothérapie per -opératoire pourrait s’étendre
nationalement et couvrir une variété de tumeurs cancéreuses.
SOINS
Dans le cadre d’une étude pilote et depuis
le 8 février dernier, l’IPC offre une thérapeutique
nouvelle et prometteuse aux patientes atteintes
d’un cancer du sein.
Cancer et environnement
ACTU - PREVENIR - DEPISTER
Les scientifiques sont divisés sur la part
environnementale des cancers. Selon les auteurs,
et selon la définition que l’on retient, elle est estimée
entre cinq et quatre-vingt-dix pour cent …
Comment résoudre cette apparente contradiction
sur les risques environnementaux ?
LE POINT DE VUE DE MEDECINS GENERALISTES
Docteur
Jean-Marc Vernet,
Médecin généraliste à Marseille
« Trop de flou »
« Les médias nous alertent
beaucoup sur le sujet :
mais qu’y a-t-il de vrai, de faux ?
Avons-nous suffisamment
de bonnes informations ?
Certainement pas.
Comment avoir la bonne
information, c’est d’ailleurs
souvent une interrogation
des patients.
Par exemple, ils me demandent
si le téléphone portable peut
donner un cancer du cerveau,
ou pas … De même, que penser
des hautes fréquences ?
En réalité, nous sommes face
simultanément à beaucoup
d’informations et à un vrai flou. »
Docteur
Jean-Jacques Bardou,
Médecin Ostéopathe à Roquevaire
« Vu l’augmentation
du nombre de cancers,
le lien avec l’environnement
est évident »
« J’ai fini mes études
de médecine en 1985.
Depuis, par exemple en ce
qui concerne les lymphomes
et les leucémies, les courbes
sont vraiment ascendantes.
Je suis convaincu de l’impact
de l’environnement au sens large :
pollution de l’air, de l’eau,
de l’alimentation (pesticides,
colorants, conservateurs, etc.). »
La radiothérapie
per-opératoire testée
à l’IPC
PRENDRE EN CHARGE
LE POINT DE VUE DE MEDECINS GENERALISTES
Coût total des équipements : 540 000 Euros
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DOSSIER
DOSSIER
Car l’IPC a choisi de s’engager résolument dans
la thérapie cellulaire, une spécialité qui contribue
à la force et l'originalité de l'IPC aujourd’hui.
En France, les pr emières tentatives de gr effes
de moelle commencent dans les années 1950.
En 1956, aux Etats-Unis, le Professeur E. Donnall
Thomas démontre que des cellules de la moelle
osseuse peuvent être injectées dans un orga-
nisme humain ; quelques années plus tard,
il réalise la pr emière greffe de moelle osseuse
chez un patient porteur de leucémie, au Fred
Hutchinson Cancer Research Center de Seattle
qu'il crée au début des années 1970.
Le Professeur Thomas verra ses travaux récom-
pensés par le Prix Nobel de médecine en 1990.
La révolution des greffes
en cancérologie
Les cancers hématologiques étant plus rares que
les cancers à tumeurs solides, le champ d’appli-
cation de la thérapie cellulair e et de la gr effe
allogénique concerne une minorité de patients,
en comparaison de l’ensemble des pathologies
cancéreuses traitées à l’IPC : 365 greffes en 2011,
sur plus de 6 000 nouveaux patients par an,
et une file active de 24 549 malades.
La majorité des cancers se manifestent pa r des
tumeurs solides pour lesquels il n'y a pas besoin
de chimiothérapies intensives parallèlement
à l a c hirurgie e t à l a r adiothérapie, e t d onc
il n’est pas besoin d'y associer une greffe.
Bien que s’adressant à une minorité de patients,
la thérapie cellulaire et les greffes sont une activité
majeure à l’IPC, activité qui a enregistré une crois-
sance de 300 % en dix ans.
les os et non dans la moelle épini ère - d ans
un os du bassin d’un donneur compatible,
ou des cellules souches dans le sang d’un donneur
pour l’implanter chez le patient malade, explique
le Professeur Blaise. Parce qu’elle produit
les défenses immunitaires, la moelle osseuse
va combattre la maladie cancéreuse. » Dans cette
stratégie, c’est vraiment la gr effe qui assur e
le traitement de la maladie.
Si les hémopathies malignes (cancers du sang)
ont fourni les premiers exemples de guérison
par chimiothérapie, traitement auquel ces cancers
sont sensibles, l’allogreffe a permis la prise
en charge des formes résistantes ou rechutant
après chimiothérapie. Elle est un traitement
complémentaire - de consolidation - de la chimio-
thérapie qui va permettre d’obtenir une rémission
complète, c’est-à-dire l’absence de cellules
leucémiques résiduelles détectables.
A la différence des autres cancers, les cancers
qui affectent le sang ou les tissus lymphoïdes
ne se caractérisent pas comme les « tumeurs
solides » que l’on peut extraire voire guérir par
la chirurgie. De fait, ils ne peuvent êtr e traités
que par chimiothérapies, ou radiothérapie.
Mais ces traitements puissants laminent les dé-
fenses immunitaires des malades, les r endant
très sensibles aux agressions notamment virales
ou bactériennes. Malgré cela, la plupart du temps,
des rechutes sont à craindre, du fait des cellules
leucémiques résiduelles.
Un rempart contre la maladie
Il existe deux types de greffe : autologue (auto-
greffe) et allogénique (allogreffe). Lors de la
première, des cellules souches hématopoïétiques
sont prélevées chez le patient entre deux chimio-
thérapies et congelées. Elles sont réinjectées au pa-
tient ap rès une chimioth érapie intensive a yant
pour but de traiter la maladie. Dans cette stratégie,
le traitement de la maladie est assuré par la
chimiothérapie, la greffe représentant un moyen
de sauvegarde hématologique pour éviter une
aplasie de trop longue durée liée à la chimiothé-
rapie à forte dose. La greffe allogénique, forme
de thérapie cellulair e r epose sur un principe
aussi simple qu’ambitieux : au lieu de bombarder
ou d’irradier l’organisme pour détruire les cellules
cancéreuses, sans épargner, de fait, les cellules
saines et vitales, la gr effe de moelle osseuse
ou de sang dresse un rempart contre la maladie,
grâce au système immunitaire puisé chez un don-
neur. « Comme on va prélever un organe sain, un
foie ou un rein par exemple, sur une personne
pour remplacer un organe malade, o n prélève
de la moelle osseuse - qui est contenue dans
Responsable de l’Unité de T ransplantation et
de Thérapie cellulaire à l’Institut Paoli-Calmettes
(IPC), le Professeur Didier Blaise précise :
« avant l’avènement de la chimiothérapie quand
on diagnostiquait une leucémie aiguë chez un
malade, cela signifiait que son espérance de vie
était d’une semaine, à peine. Parler de leucémie
« aiguë » était un euphémisme pour dire qu’il ne
lui restait que quelques jours à vivre. »
Aujourd’hui, un malade atteint de leucémie aiguë
n’est plus une personne en sursis ; les chances
de guérison sont estimées à 60 % ou 70 %.
La thérapie cellulaire a émergé dans le champ
de la cancérologie il y a une quarantaine d’années,
permettant une révolution dans le traitement de
cancers hématologiques aux pronostics sombres
qui mettaient en échec les approches classiques.
Les cancers hématologiques regroupent
les leucémies - classées en quatre grands types,
les l ymphomes - h odgkiniens ou n on - et les
myélomes. Premières indications pour les thérapies
cellulaires, les leucémies aiguës peuvent êtr e
lymphoblastiques, une forme qui atteint le plus
souvent les jeunes enfants, ou myéloblastiques,
une forme qui touche plutôt les adultes.
365 greffes de cellules souches hématopoïétiques
et de lymphocytes ont été réalisées à l’IPC en 2011.
Plus de 15 000 patients ont reçu des traitements
par cytokines en 20 ans.
Plus de 6 000 patients ont été traités par greffes
allogéniques ou autologues. L’activité de greffe
allogénique (par un donneur), a connu une croissance
de 300 % en 10 ans.
Activité à l’IPC En 2011
z Allogreffes 126
z Autogreffes 210
z Réinjection de lymphocytes du donneur 30
z Cytaphérèse : Nombre de patients et donneurs 290
z Cytaphérèse : Nombre de prélèvements 475
Les greffes à l’Institut Paoli-Calmettes en 2011
Une greffe par jour,
des années de vie
gagnées …
« un engagement
original de l’IPC »
AVEC 365 GREFFES EN 2011, SOIT UNE PAR JOUR,
L’IPC EST A LA POINTE DE LA THERAPIE CELLULAIRE.
EN TRAITANT DES CANCERS DU SANG PAR LE SYSTEME
IMMUNITAIRE DES CELLULES, LA GREFFE PERMET
ENFIN DE PARLER DE GUERISON …
Ressources : Sites : Agence de Biomédecine : http://www.agence-biomedecine.fr/professionnels/prelevement-et-greffe-1.html
Don de moelle osseuse : http://www.dondemoelleosseuse.fr - SFGM-TC : Société Française de Greffe de Moelle et de Thérapie Cellulaire : http://www.sfgm-tc.com
European Group for Blood and Marrow Transplantation (EBMT) http://www.ebmt.org
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