5. Résonance Magnétique: principes de base, appareillage Types de rayonnements et grandeurs physiques Si les techniques d'imagerie par rayons X (radiographie et TDM) utilisaient comme facteur de contraste entre les tissus de l'organisme les propriétés de l'atome (pouvoir absorbant, densité électronique), l'Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) utilise quant à elle les propriétés du noyau de l'atome. D'où le terme de Résonance Magnétique Nucléaire pour désigner la technique de base utilisée. On a aujourd'hui tendance à gommer le terme « nucléaire » car il fait peur au public. Pourtant il est important de comprendre que cette technique diagnostique n'a rien d'une technique irradiante (au sens de « produisant des radiations ionisantes dangereuses ») et n'a rien à voir avec le « risque nucléaire » auquel on pense en voyant une centrale nucléaire. ll eût sans doute mieux valu expliquer le terme au grand public pour contribuer à démystifier le noyau de l'atome plutôt que de le faire disparaître dans l'appellation courante IRM. En réalité c'est plus précisément le noyau de l'atome d'hydrogène (de loin le plus abondant dans notre corps) qui servira de base à l'imagerie clinique courante. Ce noyau est constitué d'un seul et unique proton, porteur d'une charge positive (H+). Le noyau d'hydrogène est en rotation rapide. Les lois de l'électromagnétisme nous disent qu'une charge électrique en mouvement génère un champ magnétique. Effectivement, à chaque noyau d'hydrogène est associé un petit vecteur de champ magnétique, le moment magnétique de spin. Lors de l'introduction du corps dans un champ magnétique puissant, les moments magnétiques des milliards de protons vont s'aligner selon l'axe nord-sud de l'aimant qui produit ce champ. Certains s'aligneront dans la même direction (parallèles), d'autres dans la direction opposée (antiparallèles). D'autre part, comme une toupie dans le champ de gravité terrestre, le proton va présenter un mouvement de précession autour de l'axe du champ magnétique appliqué. Cette précession se fera à une fréquence caractéristique appelée fréquence de Larmor, donnée par où Bo est le champ magnétique externe appliqué (en pratique de 0.2 à 2 Tesla en imagerie clinique), et y le rapport gyromagnétique, une constante dépendant du noyau étudié. La figure 24 illustre ces phénomènes. Il se fait que la position antiparallèle est à plus haute énergie et il existe donc un petit excès de protons qui sont alignés dans le sens parallèle (puisque la thermodynamique nous apprend que le système va tendre à l'équilibre vers une situation de moindre coût énergétique). Dès lors il en résulte une aimantation nette, macroscopique, de l'objet étudié. En donnant de l'énergie sous forme de radiofréquences, nous détruisons cet équilibre, nous « excitons > le système en faisant passer des noyaux en position antiparallèle. Le système va ensuite revenir à l'équilibre en libérant de l'énergie sous la même forme: à savoir des ondes de radiofréquence qui seront recueillies par une antenne. A partir de là le traitement numérique du signal via le système informatique se rapproche de ce qui a été présenté pour la TDM. Figure 24 Les bases et les différentes étapes de l'imagerie par résonance magnétique nucléaire (IRM): 1) le noyau d'hydrogène chargé positivement tourne sur lui même en générant un petit vecteur de champ magnétique m; 2) en l'absence d'un champ magnétique extérieur significatif, ces vecteurs magnétiques individuels sont orientés dans tous les sens et la magnétisation nette est nulle; 3) en présence d'un aimant puissant les vecteurs s'alignent sur le champ B0, certains dans une direction, les autres dans l'autre direction; 4) de plus les petits moments magnétiques font un mouvement dit de précession autour de l'axe du champ magnétique appliqué (comme une toupie autour de l'axe de la force gravitationnelle) à une fréquence angulaire 5) il résulte du minime déséquilibre entre noyaux orientés de façon parallèle ou antiparallèle une magnétisation globale du corps M, macroscopique, parallèle au champ magnétique appliqué; 6) si o n excite les noyaux d'hydrogène du corps avec une onde de radiofréquence à la fréquence v, on fera diminuer cette magnétisation globale en faisant passer plus de noyaux en position antiparallèle; 7) lors du retour à l'équilibre appelé RELAXATION, les noyaux émettent de l'énergie sous la même forme d'ondes radio que nous récupérerons dans l'antenne réceptrice; cette relaxation se fait avec des constantes de temps T1 et T2; le signal mesuré est décodé sur le plan des fréquences et subit des transformations mathématiques (transformées de Fourrier) pour finalement donner une image. Champ magnétique statique Ce champ est généré par un aimant puissant, le plus souvent cylindrique, généralement supraconducteur (c'est-à-dire que le fil de la bobine d'induction est mis à très base température, où la résistance au courant est quasi nulle). Dans les appareillages actuels utilisés en clinique il mesure de 0.2 à 2.0 Tesla (le Tesla est une unité de mesure de champ magnétique). Le champ statique n'a pas d'effet biologiques connus. Par contre il est générateur de danger au niveau du site d'IRM: cet aimant puissant va attirer très fortement les objets métalliques ferromagnétiques qu'on amènera à proximité. Ceci explique les précautions considérables qu'il faudra prendre pour ne pas rentrer dans la salle avec des objets métalliques mobiles qui pourraient devenir autant de projectiles. Figure 25 : Antennes de radiofréquences Figure 26 Schéma d’un aimant cylindrique supraconducteur et aspect Impulsions de radiofréquences, phénomène de résonance Une antenne émettrice va émettre des ondes radio à une fréquence égale à la fréquence de précession du proton (fréquence de Larmor). C'est la condition nécessaire pour que le phénomène de résonance se produise et pour que donc de l'énergie soit transférée au système (excitation). Ensuite on mesure, toujours avec une antenne (c'est parfois la même), l'énergie libérée par le système lors du retour à l'équilibre et qui sera émise sous forme d'ondes radio toujours à la même fréquence. Les caractéristiques de durée de la phase de retour à l'équilibre (relaxation) sont différentes selon les tissus du corps, et entre les tissus sains et pathologiques; les constantes de temps sont le T1 et le T2. Ces paramètres vont générer des contrastes, donc une image. Gradients et encodage spatial Pour savoir qu'un signal détecté par notre antenne réceptrice vient d'un endroit précis du corps et donc pour que notre ordinateur puisse nous sortir une « carte » de la relaxation des protons, il faut mettre des repères dans l'espace. On le fait en provoquant une variation de l'intensité du champ magnétique dans une faible proportion mais dans toutes les directions. On introduit donc des gradients de champ qu'on produit â l'aide de petites bobines spéciales judicieusement positionnées. C'est ce qu'on appelle « encodage spatial ». Comme la fréquence de résonance (v) dépend du champ il y aura de petites différences de fréquence d'un point à l'autre du patient; et donc en faisant un spectre des fréquences on aura une information sur la localisation dans l'espace des signaux perçus. Séquences d'impulsions Il faudra combiner au cours du temps les impulsions de fréquence radio destinées à exciter le système et l'application des gradients destinés à faire l'encodage spatial, et ce' de manière à ce que le signal mesuré soit optimal. Cette combinaison complexe s'appelle séquence d'impulsions. La séquence la plus connue est la séquence dite « d'écho de spin » (spin echo). Sans rentrer dans le détail, disons que le changement de séquence peut amener des images extrêmement différentes de la même région du corps. Certaines images seront plus influencées sur le plan des contrastes par la valeur T 1, d'autres par la valeur T2, d'autres en%n par la densité de noyaux d'hydrogène (leur nombre par unité de volume) ou par les mouvements (comme le sang circulant). Les contrastes dans l'image Les facteurs influençant le contraste de l'image peuvent être: x la valeur de T1 (temps de relaxation longitudinal) x la valeur de T2 (temps de relaxation transversal) O x la densité de noyaux d'hydrogène dans le tissu x le flux Les trois premières valeurs sont les plus importantes pour déterminer les contrastes utiles en clinique. Le poids de ces différents facteurs de contraste varie dans l'image selon la séquence d'impulsions choisie. Spectroscopie in vivo La Résonance Magnétique Nucléaire était au départ une technique d'analyse chimique utilisée au laboratoire. L'environnement chimique, moléculaire, des atomes (hydrogène, phosphore 31, fluor 19, carbone 13) entraîne de petites différences de fréquence de résonance. Ceci permet en étudiant non pas des images mais des spectres de fréquence (voir exemple figure 25), de tirer des conclusions sur la composition chimique d'une solution. Cette spectroscopie, avec des champs magnétiques de plus de 1 Tesla, peut se faire en clinique, in vivo, en ciblant une région d'intérêt dans le corps. Il s'agit de méthodes encore aujourd'hui expérimentales mais qui pourraient dans l'avenir s'avérer utiles en routine clinique. Figure 27 Spectre proton d’une métastase cérébrale, obtenu in vivo ;NAA= n-acetyl-aspartate ; Cho= Choline, Cr= Créatine ; un pic assez large est visible vers –1.3 ppm et correspond à des lipides, produits de dégradation des membranes dans cette tumeur. Figure 28 Imagerie spectroscopique d’une lésion cérébrale (métastase irradiée et opérée). La zone rouge correspond à une zone où le rapport Choline / N-acétylaspartate est élevé. Elle pourrait correspondre à une zone de récidive au milieu d’une lésion nécrotique.