LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 INTRODUCTION A LA PARTIE Page 1 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 • En 1914, l’Europe contrôle les deux tiers de l’espace mondial et 60% de la population de la planète. A eux seuls, l’Empire britannique et l’Empire français représentent le tiers de la surface du globe. Les Britanniques possèdent l’empire le plus étendu : ils sont présents en Asie (Inde) et en Océanie, mais également en Afrique (Egypte, Afrique orientale et Afrique occidentale anglaises, Union Sud-Africaine), en Méditerranée (Gibraltar, Malte, Chypre) et en Amérique (Guyane anglaise). Aux colonies au sens propre du terme, il convient d’ajouter les dominions, comme la Nouvelle-Zélande et le Canada. • Pour les autres pays colonisateurs, on ne peut guère parler d’empire : l’Allemagne (qui possède le Togo, le Cameroun une partie du Sud-Ouest et de l’Est africains), l’Italie (présente en Erythrée, en Somalie et en Tripolitaine), la Russie, la Belgique (le Congo), les Pays-Bas, la Belgique, l’Espagne (Maroc septentrional), le Portugal (Angola et Mozambique), les EtatsUnis (Les Philippines) et le Japon possèdent des territoires restreints, morcelés ou minuscules. En 1914, le tiers des terres émergées est sous la domination des grandes puissances européennes. Comment sont organisées les colonies ? Autrement dit comment va se mettre en place la domination politique, économique et culturelle des puissances européennes sur les territoires conquis ? Le système colonial, c’est-à-dire les modalités de la présence et de l’influence européenne dans les colonies1, n’était pas identique : les formes de domination coloniale variaient d’une puissance coloniale à une autre. C’est ainsi qu’on a distingué le système colonial français de celui britannique. Chacun de ces systèmes concernait l'économie, la culture et l’administration. CHAP. 18 LE SYSTEME COLONIAL FRANCAIS - Présenter le mode d’administration que les Français ont appliqué à leurs colonies ; - Dire comment s’est faite l’exploitation économique des colonies ou leur mise en valeur par la France ; - Dire comment s’est faite la domination culturelle de ses possessions par la France ; INTRODUCTION En 1914, la France possède le second empire colonial du monde. L’empire français est principalement étendu sur le continent africain : Afrique du Nord (Algérie, Tunisie, Maroc), Afrique occidentale française (AOF), Afrique équatoriale française (AEF), la Réunion, les Comores, Madagascar. En Asie, la France domine l’ensemble de la péninsule indochinoise (Cochinchine, Cambodge, Annam, Tonkin, Laos) et possède cinq comptoirs en Inde (Pondichéry, Chandernagor…). A ces territoires, il faut ajouter des possessions telles que Tahiti ou la Nouvelle Calédonie et, en Amérique, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane 1 Les formes de domination coloniale Page 2 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 française et Saint-Pierre-et-Miquelon. Quelles formes la domination française a-t-elle prises dans ses colonies en général et africaines en particulier? I- L'ADMINISTRATION DES COLONIES PAR LA FRANCE Débat : Comment administrer efficacement et " à bon compte " les colonies ? L’administration est à la base de l’hégémonie impériale des différentes puissances coloniales. La mise en place de structures administratives répond à un objectif principal : le maintien de l’ordre colonial. En ce sens, l’administration civile et militaire assure les liens entre l’État colonial, les colons et les indigènes. Pour cela, l’administration coloniale française en Afrique noire a fonctionné selon un système pyramidal et une centralisation fédérale. Aussi, la France a essentiellement opté pour l’administration directe et l’assimilation, même si ses colonies ne rentraient pas toutes dans la même catégorie. 1- Les types de colonies : colonies d’exploitation et colonies de peuplement Il faut distinguer les colonies d’exploitation (le but est d’exploiter les richesses des colonies et le peuplement européen est très faible) des colonies de peuplement : comme l’Algérie : l’immigration européenne est encouragée (espagnols, italiens, français : ils formeront ce qu’on appellera les « pieds –noirs »). Les colonies de peuplement françaises sont aussi marquées par une présence plus forte des colons : on compte 850 000 français en Algérie, 180 000 au Maroc, 110 000 en Tunisie. Par contre, dans les colonies d’exploitation, situées dans les zones tropicales, le nombre des colons est plus faible (cette petite minorité est le plus souvent constituée par des fonctionnaires, des techniciens, des commerçants et des missionnaires). 2- Un système d’administration pyramidal et une centralisation fédérale En 1902-1904, la capitale de l'AOF (Afrique occidentale française)2 fut Dakar. Sous les ordres du Gouverneur Général, pouvant seul correspondre avec le Ministre des Colonies, se trouvaient placés les lieutenants - gouverneurs (plus tard gouverneurs) des 5 colonies : Sénégal, Guinée, Côte d'Ivoire, Dahomey, et un vaste ensemble appelé d'abord Sénégambie et Niger, puis Haut - Sénégal et Niger, d'où se détachèrent deux colonies nouvelles : en 1911 le Niger, en 1918 la Haute-Volta. La Mauritanie devint colonie en 1920. Les budgets locaux étaient alimentés par des impôts directs. Chaque colonie était divisée en cercles, et ceux-ci en subdivisions, commandés les uns et les autres par des administrateurs des colonies, dotés de tous les pouvoirs et de toutes les responsabilités (administration, police, développement économique...). Au début, ces administrateurs sont souvent des anciens officiers puis, de plus en plus, des élèves de l'Ecole Coloniale, voués à l'Afrique. Sous leurs ordres sont placés les chefs indigènes, chefs de villages, de cantons, parfois coiffés de chefs supérieurs (l'empereur du Mossi..). Concernant les liens entre les notabilités locales et les autorités coloniales, la domination de l’État colonial peut susciter des résistances locales ou se heurter à des «forces» 2 L’AOF correspond à un autre gouvernement colonial créé en 1895 et groupant en une fédération les territoires du Sénégal, de la Mauritanie, du Soudan français (aujourd'hui Mali), de la Haute-Volta (aujourd'hui Burkina), de la Guinée française, du Niger, de la Côte-d'Ivoire et du Dahomey (aujourd'hui Bénin). Page 3 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 concurrentes, comme les notables citadins et ruraux, religieux et lettrés. L’administration coloniale contribue à consolider ou affaiblir les élites indigènes, dont les rapports avec les populations ont pu ainsi être modifiés par la colonisation. Mais l’Empire français, comme son « homologue » britannique d’ailleurs, souffre dès les débuts d’une grande pénurie de personnels administratifs (en 1900 en AOF, on compte seulement 256 Européens dans les services administratifs) ; il n’a donc d’autre choix d’avoir recours aux autorités établies afin d’administrer les colonies. On se sert ainsi du pouvoir traditionnel chaque fois que les structures locales s’y prêtent. Ainsi le roi Agoliagbo du Dahomey est conservé jusqu’en 1900 ; dans le Haut Oubangui, les pouvoirs des sultans sont maintenus dans leur prérogative. Certains chefs ont pris sur eux d’entrer dans le jeu de la colonisation pour leur profit : c’est le cas du zarmakoy de Dasso (le royaume de Dasso est un état précolonial dans ce qui est maintenant le Niger), Aouta. A l’arrivée des Français à Dasso en 1898, le zarmakoy en fonction refuse de se soumettre. Aouta joue alors le rôle d’intermédiaire dans les négociations et s’impose naturellement comme successeur aux yeux des Français. En terre d’islam, les lettrés sont volontiers utilisés comme intermédiaires (interprètes, enseignants, chefs). En pays animiste, on tente d’abord d’éliminer les chefs récalcitrants avant de s’en servir comme chefs administratifs de canton ou de village. Leur pouvoir est cependant bien différent de ce qu’il était avant la colonisation : ils sont de fait transformés en petits fonctionnaires mal payés et se contentent de transmettre les ordres. Cette fonction d’intermédiaire avec les Blancs provoque partout le mépris et la haine des populations indigènes. L’armée coloniale recrute quant à elle sur place dès les débuts de la colonisation : la première compagnie de tirailleurs sénégalais est créée en 1823 et en 1857 un décret met en place le premier bataillon. Quelle que soit la nature de la collaboration, les tâches délivrées aux Africains restent subalternes et exigent peu de qualification Quant à l’AEF, il s’agit d’un gouvernement général créé en 1910 et regroupant en une fédération les quatre territoires français de l'Afrique équatoriale: le Gabon, le Moyen-Congo (aujourd'hui Congo-Brazzaville), l’Oubangui-Chari (aujourd'hui Centrafrique) et le Tchad. Page 4 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 3- L’administration directe et assimilation La France, l’Espagne, le Portugal et l’Italie ont le plus souvent recours à l’administration directe des territoires qu’ils occupent. Dans ce cas, l'action administrative à tous les degrés est uniquement aux mains de fonctionnaires blancs. Cette situation s’explique par la volonté d’ « assimilation3» de ces métropoles. En effet, fidèles aux principes universalistes de 1789, les Français mènent une politique d'assimilation. Ils souhaitent transformer (sans les consulter) les indigènes en Français à part entière, au détriment de leurs cultures traditionnelles. Dans le domaine politique, l’assimilation est la volonté de donner à terme aux peuples colonisés le même statut que les citoyens français. Mais, loin de bénéficier aux indigènes qui demeurent à de rares exceptions près de simples sujets, cette politique satisfait surtout les colons qui sont les seuls à recevoir les mêmes droits que les citoyens métropolitains. Le pouvoir appartient à des fonctionnaires civils et militaires européens, qui s’appuient parfois sur les autorités traditionnelles indigènes, comme les chefs de tribus, les caïds, les mandarins. Ainsi, les Français ont tendance à administrer leurs protectorats (Tunisie, Maroc, Indochine) comme de simples colonies. Au Sénégal, seuls les « habitants » de quatre communes4 du Sénégal jouissent réellement de ces droits. Depuis 1848, ils élisent un député à l’Assemblée française, possèdent des institutions municipales comme en France et ont la faculté d’acquérir la nationalité française à condition de se soumettre à ses lois. Mais cette dernière mesure est assez mal reçue par les colons et par les Africains qui refusent de renoncer à l’islam (ce n’est qu’en 1916 que les « habitants » sont naturalisés collectivement sans avoir à répudier l’islam). Pour les autres territoires, tous les indigènes 3 La France est presque la seule nation qui se soit approchée de la solution du problème de l'administration des races étrangères, elle ne les détruit pas comme ont trop souvent fait les autres peuples ; elle sait mieux que personne se les assimiler. Elle seule, jusqu'à présent, a osé concevoir la métropole et les colonies comme formant une seule patrie et un seul Etat. Français de France et Français d'Afrique, des Antilles, de l'Océan Indien, de l'Indochine et, aussi bien ceux des Hindous, Sénégalais, Océaniens, Kabyles ou Arabes qui ont été élevés à la cité française, tous, sous les lois délibérées en commun, ont les mêmes devoirs et les mêmes lois. 4 (Saint-Louis, Dakar, Rufisque, Gorée) Page 5 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 étaient sujets français, sans droits politiques. Les citoyens français, en dehors des 4 communes, n'en avaient guère plus, car il n'existait ni représentants au Parlement, ni assemblées locales. La législation résultait de décrets préparés par le ministre, ou d'arrêtés des gouverneurs. Auprès de ceux-ci, des conseils de gouvernement, composés de hauts fonctionnaires et de quelques membres nommés (dont un ou deux africains) n'avait qu'un rôle consultatif effacé pour certains actes administratifs. Cette politique fut également partiellement appliquée en Algérie, divisée en trois départements et rattachée au territoire français. Mais, dans ce pays, les musulmans n'ont pas le droit de vote (1919 octroi du droit de vote aux musulmans anciens combattants, propriétaires et fonctionnaires, abolition des impôts arabes) A partir des années 1920, on observe cependant une évolution dans la conception française de l’administration des territoires sous tutelle. C’est ainsi que le ministre des colonies, Albert Sarraut, défend une politique d’association5 et propose de donner aux populations indigènes des droits équivalents à ceux des métropolitains. Et à la même époque, Lyautey, résident supérieur au Maroc jusqu’en 1925, exprime son espoir de voir émerger une élite capable de conduire le territoire vers son émancipation. Le Maroc6, la Tunisie, Indochine en furent donc les bénéficiaires. Toutefois, on observe que d’une manière générale, l’administration française demeure largement centralisatrice. L’administration directe demeure la règle. II- L’EXPLOITATION COLONIALE En métropole, il n’y a pas d’adhésion unanime sur l’exploitation coloniale: si l’on est en général favorable à l’acquisition de colonies, on pense dans les milieux dirigeants que cela ne doit rien coûter à la métropole. Les colonies doivent être source de profit. C’est ainsi que le budget colonial est rogné d’année en année jusqu’en 1901, date à laquelle est votée une loi sur l’autonomie financière des colonies. A- La mise en valeur des terres S’il est vrai que les colonies offrent des débouchés pour les produits manufacturés des métropoles, elles constituent avant tout des sources d’approvisionnement7 en matières premières notamment agricoles. Il y a donc développement de l’agriculture commerciale destinée à l’exportation : Les colons développent les cultures d'exportation. Tout d’abord on a procédé à l’installation de colonies agricoles européennes ; Ceci s’est passé par : L’expropriation des indigènes, qui étaient soit : - refoulés vers les domaines arides ou montagneux (comme en Algérie) 5 Dans le domaine politique, elle consiste à maintenir les institutions locales et traditionnelles et à s'appuyer sur elles pour administrer les territoires colonisés. 6 Au Maroc, le sultan maintient son autorité dans le domaine religieux. En réalité, l’essentiel du pouvoir est détenu par le résident français. 7 Ravitaillement en produits. Page 6 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 L’armée française chassa les populations pour donner les terres aux colons, ou à des entreprises. A Madagascar, les paysans furent spoliés de leurs terres au bénéfice des colons. En 1926, l’Etat se considéra comme propriétaire de toutes les terres considérées comme vacantes. Les bénéficiaires de ces expropriations étaient les colons, ou les sociétés européennes ; Exemples : La « Société du Haut Oubangui » possédait 14 millions d’hectares de terres en Afrique Equatoriale Française. Les compagnies possédant ces domaines immenses mettent en place des plantations qui vont fournir aux métropoles les matières premières agricoles dont elles ont besoin : produits tropicaux (coton, café, cacao, oléagineux), caoutchouc, riz, vin, etc. en AOF et AEF, viticulture en Algérie… Les matières premières non agricoles sont également pillées : bois et ivoire d’Afrique noire… En Côte d’Ivoire par exemple, jusqu’en 1930, les produits de cueillette constituent l’essentiel de la production et des exportations : Kola, Produits du palmier, Bois : l’abattage des bois précieux, teck et surtout acajou se développaient pour le compte de quelques sociétés métropolitaines. Caoutchouc : l’administration encourageait cette récolte dont la demande ne cessait de croître sur les marchés européens. • Les conséquences de cette exploitation sont nombreuses et désastreuses pour les colonies : Les populations indigènes sont contraintes au travail forcé8 (interdit qu’en 1931). La pratique de la monoculture fragilise donc l’économie des colonies : les cultures vivrières traditionnelles sont peu remplacées, créant des difficultés alimentaires pour les indigènes. Le portage : cette contrainte du portage a donné lieu à de véritables opérations de ratissage en Afrique française. Les colonies sont extrêmement dépendantes des fluctuations des cours des matières premières. (comme le montrera la crise de 1929.) . La crise économique affecte la côte d’Ivoire dès 1930. Jusqu’en 1935, cette crise se traduit par : Une baisse vertigineuse des prix Un important recul de la production des denrées d’exportation. La baisse des achats de produits importés 8 Le travail forcé est en principe interdit dans les colonies françaises. Mais dans les faits, il reste pratiqué sous forme de prestation (qui reprend en l’amplifiant la coutume traditionnelle du travail dû au chef pour les travaux communs du village). Page 7 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 Les difficultés de paiement de l’impôt de capitation. B- L'équipement des colonies Les équipements et l’infrastructure sont un facteur important de l’exploitation économique. Le développement du réseau de communication vise à relier les postes coloniaux entre eux, à faciliter l’écoulement des produits locaux vers les côtes pour leur acheminement vers les métropoles. Aussi, les politiques de « mise en valeur » ne bénéficient-elles pas directement aux populations indigènes. Mais l'effort consenti est différent d'une puissance coloniale à l'autre. En 1913, la France consacra 9 % de ses capitaux à son empire, contre 47 % pour la Grande-Bretagne. Pour beaucoup, elles concernent les transports. En AEF, c'est la réalisation du Congo-Océan de Brazzaville à l'Océan. (795 km). Le réseau routier d'Oubangui (AEF) représente, en 1926, 4200 km. En AOF, il représente 27 000 km. D’autres réalisations techniques sont à mettre au crédit de l’exploitation des colonies : ainsi, l’assainissement de régions insalubres qui peuvent être mises en culture. C’est le cas de la plaine de la Mitidja en Algérie. De même, le développement de l’irrigation et la recherche agronomique, permettant de meilleurs rendements (vignes et agrumes en Algérie, culture de l’olivier dans le Sahel tunisien, coton en Inde et en Egypte, etc.). Si ces innovations ne bénéficient pas directement aux populations indigènes, elle représente néanmoins une amélioration indiscutable des infrastructures des régions colonisées. C- Le financement des colonies : l’exploitation des « indigènes ». La mise en valeur de la colonie se réalise essentiellement par l’utilisation de ses ressources propres. Le colonisé en est le principal acteur. Il y participe par : Le paiement d’un lourd impôt de capitation9. Il finance 25 % du budget colonial en moyenne (France, Portugal, Belgique). Le montant par habitant et par an s'élève à 2 francs en AOF, 1.55 F en AEF et 1.35 Francs belges au Congo Belge (salaire moyen mensuel au Congo belge : 19.35 francs belges). La capitation représente d'importants revenus : AOF : 156 millions de francs en 1929, 181 millions en 1935. Des prestations obligatoires et gratuites (10 à 12 jours de travail par colonisé et par an). L’exploitation économique des colonies est basée sur le travail des populations colonisées (achat des productions, salariat) mais il faut noter également l'existence du travail forcé dans tous les empires coloniaux. Dans l'empire français, il s'agit de prestations gratuites pour des travaux d'intérêt local ou colonial (12 jours en AOF- 15 jours en AEF), forme d'impôt en travail. Il s'agit souvent de grands chantiers ou de portage même si les progrès des réseaux routiers permettent de limiter cette pratique. Les conditions de travail sont difficiles. La construction du chemin de fer Congo-Océan s'avéra un enfer: sur les 127 000 hommes recrutés de force (1921-1932), 25 000 moururent d'épuisement, de maladie ou victimes de 9 Impôt par tête Page 8 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 mauvais traitements. A Madagascar, Gallieni instaure une prestation en travail de 50 jours pour tout malgache de 16 à 60 ans (fanompoana). Pour les conscrits non retenus par l’armée, un service de 3 ans de travail est établi (SMOTIG). Des emprunts en métropole remboursables. L’investissement privé est très faible. Force est de constater que les entrepreneurs n’ont pas investi dans les colonies les sommes espérées. Ainsi, en 1914, sur les 45 milliards de francs investis par la France à l’étranger, seuls 10% le sont dans l’empire. En fait, le discours expansionniste ne convainc pas les investisseurs, qui préfèrent placer leurs capitaux dans d’autres régions du monde. E- Les échanges commerciaux • Les échanges entre les métropoles et leurs colonies se caractérisent par un déséquilibre : les colonies exportent des matières premières, agricoles ou minières, nécessaires aux industries européennes, et importent des produits manufacturés. Ces derniers sont principalement des biens de consommation, mais également des biens d’équipement. En effet, les industries européennes sont à la recherche de marchés nouveaux, suite aux bouleversements dus à la révolution industrielle. • C’est en période de crise qu’on observe un réel rapprochement économique entre les métropoles et leur empire. Les métropoles prennent alors des mesures protectionnistes, et leurs échanges s’amplifient avec les colonies. Ainsi, après la crise de 1929, les échanges de la France et du Royaume-Uni avec leurs colonies sont nettement dopés : dans les années 1930, le pourcentage des exportations de la France avec ses colonies passe de 20% à plus de 30% de ses exportations totales. Le pourcentage des importations passe dans le même temps de 12 à 27%. Il en va de même pour le commerce extérieur britannique. On peut donc affirmer qu’en période de crise, les colonies deviennent une sorte de refuge pour les métropoles. Sur le plan des importations, comme des exportations, les colonies ne jouent qu’un rôle marginal. Le seul Etat à avoir tiré de réels bénéfices de ses colonies est la Hollande : la mise en culture des îles appartenant aux Pays-Bas est organisée de façon à ce que l’Etat néerlandais bénéficie de revenus conséquents. Les cultures commerciales sont largement étendues, mais au prix de la diminution des cultures vivrières et de l’extension du travail forcé. F- UN FAIBLE DEVELOPPEMENT INDUSTRIEL Les puissances coloniales ne cherchent pas à développer l'industrie (ex : en Inde et en Egypte (la France et le Royaume-Uni limitent les innovations de Muhammad Ali, rapport de Paul Doumer au sujet de l’Indochine). Les colonies ne devaient pas gêner l’industrie européenne qui était plutôt à la recherche de débouchés. Ces propos de Jules Ferry le confirment d’ailleurs : « (…) La question coloniale, c'est, pour des pays voués par la nature de leur industrie à une grande exportation, comme la nôtre, la question même des débouchés [...] la fondation d'une colonie c'est la création d'un débouché (…) »10 III- COLONISATION, SANTE ET ENSEIGNEMENT 10 Discours de Jules Ferry en faveur de l'expansion coloniale, devant la chambre des députés, le 28 juillet 1885. Page 9 sur 10 LES SYSTEMES COLONIAUX EN AFRIQUE ENTRE LES DEUX GUERRES 24 février 2014 Jusqu’à l’entre-deux-guerres, l’administration fut pratiquement impuissante face aux ravages des épidémies, souvent favorisées par la colonisation (populations épuisées car sollicitées pour le portage, la construction de chemin de fer, le travail sur les chantiers et dans les mines, par les migrations vers les villes...). La mortalité est en hausse et les famines déciment une grande partie de l’Afrique noire à la fin du XIXe siècle (cependant, l’usage du chemin de fer permit de remédier aux famines les plus graves). L‘usage de la quinine reste le privilège des Européens. C’est seulement dans les années 1930 que les premiers efforts sanitaires amorcèrent un démarrage démographique perceptible. Jusqu’en 1914 (à de rares exceptions près), l’enseignement est le fait des missionnaires. Le but avoué est la conquête intellectuelle et morale des peuples. En fait, l’instruction des indigènes visait juste à doter d’un minimum d’instruction les auxiliaires de la colonisation. On redoute en effet de semer des idées subversives dans les esprits. Dans l’ensemble, cet enseignement est donc rudimentaire et inadapté. CONCLUSION http://www.histoire.ac-versailles.fr/old/pedagogie/colonew/protecdirect.htm Les colonies françaises d'Afrique, http://www.ph-ludwigsburg.de/html/2b-frnz-s01/overmann/baf4/colonisation/afriquecartes.html http://www.ph-ludwigsburg.de/html/2b-frnz-s-01/overmann/baf4/colonisation/senegal.htm Page 10 sur 10