Bouger par procuration, Manger par compensation ? L’effet modérateur d’une communication publicitaire vs. une communication préventive Kergoat Marine* Enseignant-chercheur en Marketing et Docteur en Psychologie IDRAC International Business School Giraudeau Estelle** Université Paris Ouest Nanterre la défense Meyer Thierry** Professeur de Psychologie Sociale Université Paris Ouest Nanterre la défense * IDRAC International Business School, département Marketing, 47, rue Sergent Michel Berthet, CP 607, 69258 Lyon Cedex 09, France ; [email protected] ** Université Paris Ouest Nanterre La Défense, département de Psychologie, LAPPS - EA 4386, 200 avenue de la République, 92001 Nanterre Cedex, France ; [email protected]; [email protected] Bouger par procuration, manger par compensation ? L’effet modérateur d’une communication publicitaire vs. une communication préventive Résumé: Cette étude s’intéresse à l’activation automatique de comportements alimentaires (i.e. nombre de bonbons Dragibus ingéré) suite à l’exposition à une communication publicitaire vs. préventive présentant des activités physiques. Les participants (N=164) ont été également répartis en fonction du niveau d’implication manipulé par leur degré de proximité avec la cible visée par la communication (étudiants Français vs. adultes Finlandais). Ceux exposés à la publicité ont mangé davantage de bonbons que ceux exposés au message de prévention. Ce résultat confirme notre hypothèse d’un effet modérateur du type de communication (publicité vs. prévention) présentant des activités physiques, sur la prise d’aliments. Mots-clés :publicité, prévention, activité physique, alimentation, comportement automatique Move by proxy, food compensation? The moderator effect of advertisement message vs. preventative message Abstract: This study is about automatic activation of alimentary behaviors (i.e., number of sweets “Dragibus” ingested) when exposed to an ad vs. a preventative message showing physical activities. Participants (N=164) were also randomly assigned according to their level of involvement manipulated by their perceived proximity with the target of the messages (French students vs. Finland adults). Those exposed to the advertisement message ate more sweets than those exposed to preventative message. This result confirms the hypothesized moderator effect of different kind of messages(ad message vs. preventative message) on food intake when exposed to physical activities. Key-words:advertising, preventative message, physical activity, food, automatic behavior Bouger par procuration, manger par compensation ? L’effet modérateur d’une communication publicitaire vs. une communication préventive Introduction Allez-vous manger davantage si vous êtes exposés à des messages vous montrant une activité physique ? Autrement dit, l’activation de la catégorie « activité physique », amorcée par l’exposition à une communication persuasive, va-t-elle déclencher chez vous un comportement automatique de type alimentaire ? Albarracin, Wang, et Leepers (2009) ont mis en évidence un effet pervers de messages de prévention faisant la promotion d’activités physiques sur le comportement alimentaire. Les participants exposés à des messages promouvant l’activité physique mangeaient plus d’aliments (i.e., bonbons et raisins) laissés à leur disposition que ceux exposés à un autre type de message de prévention. Plus récemment, une étude a révélé un effet inverse dans le cadre d’une exposition à des communications publicitaires (Van Kleef, Shimizu et Wansink, 2011). Contrairement aux participants exposés à des publicités commerciales sur des services comme des assurances pour voiture ou des programmes d’adoption d’animaux de compagnie, ceux exposés à des publicités pour des équipements sportifs ou des centres de sport fitness ont ingéré significativement moins d’aliments. Ces deux recherches soulignent un lien jusqu’alors peu étudié entre activité physique passive (i.e. exposition à un message relatif à l’activité physique) et prise d’aliments, et tendent à montrer des résultats contraires en fonction du type de communication. Dans cette perspective, nous nous sommes intéressés à l’activation de ce lien en fonction du type de communications persuasives employées : publicité vs prévention. L’activation automatique de certains de nos comportements pouvant dépendre du degré avec lequel nous traitons un 1 message persuasif (Bargh et Chartrand, 2000 ; Meyer, 2000), nous avons également manipulé le niveau d’implication de nos participants. 1. Activation de catégories mentales et comportement automatique Les catégories mentales sont des construits cognitifs sur lesquels sont rattachés un ensemble de cognitions, d’affects et de comportements organisés en réseaux. Il y a interconnexion et association entre ces différents éléments qui forment ainsi des catégories mentales. A l’aide de techniques d’amorçage implicites (e.g., amorce subliminale) ou explicites (i.e., au-dessus du seuil de perception) permettant l’activation de catégories mentales, de nombreuses études ont mis en évidence l’impact de ce phénomène sur les performances intellectuelles, les jugements, ou encore les comportements. L’activation de la catégorie mentale « personnes âgées » a eu pour effet de réduire la vitesse de marche des participants (Bargh, Chen et Burrows, 1996) ; l’activation du stéréotype « blondes » a eu pour effet de réduire la performance des participants à une tâche de trivial pursuit (Bry, Follenfant et Meyer, 2007). Ces effets reposent sur des processus automatiques et non-conscients ; c’est-à-dire qu’ils s’effectuent sans intention et sans contrôle, contrairement aux processus contrôlés et dirigés par les intentions et buts de la personne (Bargh, 1996). Le plus souvent, l’activation de catégories mentales conduit à un effet d’assimilation, c’est-à-dire à une réponse comportementale qui va dans le sens de la catégorie activée (e.g., personnes âgées – marche lente). Mais des effets de contraste peuvent être également observés, conduisant la personne à une réponse comportementale en opposition au contenu de l’amorçage. Par exemple, suite à l’amorçage d’un exemplaire « Albert Einstein », les performances des participants ont significativement chutées, illustrant ainsi un effet de contraste (Dijksterhuis&al., 1998). 2. Les publicités comme supports d’amorçage 2 Les communications persuasives comme les messages publicitaires ou les messages de prévention ont le potentiel d’amorcer des comportements et des préférences chez le consommateur liés au concept activé (Harris, Bargh etBrownell, 2009). Le simple fait de regarder de brèves séquences vidéo mettant en scène des performances sportives peut augmenter les intentions d’achats d’équipements sportifs et l’envie de pratiquer une activité sportive (Peck etChilders, 2008). Une autre recherche basée sur le même principe d’assimilation met en évidence le lien entre publicité et grignotage, notamment sur un jeune public (Harris&al., 2009). Ces derniers montraient une activité de grignotage plus importante lorsqu’ils étaient exposés à une publicité alimentaire. De manière intéressante, les adultes mangeaient également davantage quand ils étaient exposés à une publicité de friandise (snack) plutôt qu’à une publicité sur des nutriments. Ce résultat est cependant modéré en fonction du sexe des participants et de leur catégorisation comme mangeurs « modérés » ou mangeurs « effrénés ». Des effets de contraste ont été également observés comme une limitation de la consommation de produits riches en calories suite à l’activation du concept « Produit riche » vs. « Régime ». Plus de 62% des participantes ont choisi une pomme plutôt qu’une barre chocolatée suite à l’exposition au concept « Produit riche » (Fishbach, Friedman etKruglanski, 2003). Si le lien entre publicité alimentaire et prise d’aliments est évident, l’activation du concept « Activité physique » et prise d’aliments l’est un peu moins. Pourtant, l’interconnexion de ces deux comportements est implicitement présente. 3. Activité physique et comportement alimentaire L’activité physique est bénéfique sur le plan physique et psychologique. Effectuée régulièrement, elle prévient de maladies chroniques, cardiaques, et même de certains types de cancer. Sur le plan psychologique, elle réduirait les risques de dépression, d’anxiété ou de 3 stress en jouant un rôle sur l’humeur et l’estime de soi (Ancellin, 2012 ; Scully&al., 1998). Activité physique et réduction alimentaire sont considérées comme complémentaires pour combattre le surpoids, et les campagnes de santé publique soulignent régulièrement ce lien (e.g., Campagne MangerBouger de l’INPES, 2001). Des facteurs d’ordre cognitifs et affectifs seraient également à l’œuvre dans cette association entre activité physique et comportement alimentaire. Notamment l’idée que dépenser de l’énergie suite à l’exercice d’une activité physique se compenserait par l’apport automatique d’énergie trouvée dans l’alimentation (King, 1999). De plus, l’individu peut surestimer l’énergie dépensée lors de l’activité physique, et ingérer de ce fait par la suite une quantité plus importante d’aliments, réduisant les aspects bénéfiques de l’exercice physique. Sur le plan affectif, la nourriture peut aussi être considérée par certaines personnes comme une récompense suite à un effort physique. Dans un contexte où les effets d’amorçage peuvent s’exprimer par la mise en place de comportements ou de jugements qui y sont associés (e.g., présence d’aliments), l’activation du concept « Activité physique » peut potentiellement amorcer la mise en place d’un comportement automatique de type alimentaire. La simple lecture d’un texte sur l’activité physique peut conduire à une augmentation de la prise d’aliments (Werle, Wansink et Payne, 2011). C’est ce qu’ont également observé Albarracin et ses collègues (2009) ainsi que Van Kleef et ses collègues (2011) lors de l’exposition à des messages de prévention ou publicitaire. En revanche, les effets observés ont été, respectivement, soit un effet d’assimilation, conduisant les participants à manger davantage, soit un effet de contraste, conduisant les participants à réduire leur consommation d’aliments. La question est de savoir si ces résultats contradictoires sont potentiellement liés à la différence du format communicationnel employé dans les études, de type publicitaire ou préventif. 4 4. Communications persuasives et réponses comportementales automatiques Le type de communication, publicitaire vs.préventif, peut-il influer sur la direction d’un comportement automatique ? Autrement dit, un certain type de communication est-il plus à même d’engendrer un phénomène d’assimilation ou un phénomène de contraste ? Les nombreux travaux de théorisation de ces phénomènes ont majoritairement souligné l’importance des processus de comparaison à l’œuvre dans l’activation de comportements automatiques, qu’ils soient de l’ordre de l’assimilation ou du contraste. Ces processus de comparaison mettent ainsi en jeu la comparaison de Soi à l’amorce. Par exemple, selon le modèle d’Accessibilité Sélective (Mussweiller, 2003), c’est en fonction d’une impression globale de similarité ou de différence que la personne va, de façon automatique, rechercher les infos qui confirment cette impression. L’accessibilité d’informations concernant la similarité entre l’amorce et Soi favoriserait l’assimilation, et l’accessibilité d’information concernant la différence entre l’amorce et Soi favoriserait le contraste. Pour reprendre l’étude utilisant l’amorçage avec l’exemplaire « Albert Einstein » ; c’est par un processus de comparaison avec l’amorce via une impression de différence avec celle-ci (i.e., « je ne suis pas Einstein ! ») que les participants s’évaluent comme stupide, et de ce fait présentent de moins bons résultats lors d’une tâche de décision lexicale (Dijksterhuis&al., 1998). L’effet de contraste observé dans l’étude de Van Kleef et al. (2011) pour les participants ayant un IMC (Indice de Masse Corporelle) élevé peut sous-tendre un processus de comparaison basé sur la différence évaluée entre l’amorce et la cible. La communication publicitaire se distingue d’une communication préventive notamment par l’utilisation d’acteurs jeunes et attractifs, minces et énergiques si l’on se réfère aux publicités sur des équipements sportifs ou des salles de fitness. Ces prototypes de jeunesse, de beauté et de santé sont à même de rendre saillant des processus de comparaison dont l’issue peut être la perception de différence entre l’amorce et Soi. Au-delà du contenu de la communication, la nature même de la 5 communication (i.e., ses objectifs et leurs significations pour le récepteur) est à même d’amorcer des concepts associés distincts. La catégorie « publicité » est associée entre autres au concept « consommation », tandis que la catégorie « prévention » est associée au concept « risque ». En ce sens, on pourrait s’attendre à un potentiel d’activation entre le concept activité physique et prise d’aliments plus probable lors de l’exposition à une communication publicitaire. 5. Communications persuasives, amorçage et traitement de l’information La question du niveau d’élaboration dans l’évaluation d’une communication persuasive a fait l’objet de nombreux travaux (Perloff, 2010). Les personnes exposées à des messages promotionnels traitent l’information la plupart du temps de manière superficielle, car peu impliquées par ces derniers. Selon le modèle de Bagozzi, Gurhan-canli et Priester (2002), on peut supposer que les campagnes de prévention nécessite davantage un processus réfléchi et délibératif, conduisant à une action raisonnée ; alors que la publicité contribue davantage à l’émergence d’une action impulsive de consommation. D’après les recherches sur l’amorçage, l’effet des publicités sur le comportement peut apparaitre en dehors de la conscience et ainsi activer de manière automatique et non intentionnelle l’ensemble des éléments (concepts, comportements) associés au produit commercialisé. L’efficacité de l’amorçage peut toutefois dépendre du niveau d’élaboration cognitive avec lequel le message persuasif est traité. Dans le cas d’une exposition à une campagne préventive promouvant la pratique d’une activité physique, l’activation d’un comportement automatique, se traduisant par une quantité plus importante d’aliments ingérés, est moins susceptible d’apparaitre si la personne élabore une réflexion plus active sur les comportements à mettre en œuvre (e.g., bouger ; moins manger) pour l’atteinte du but « être en bonne santé ». Cet effet ne serait pas spécifiquement observable pour une publicité dans la 6 mesure où un niveau de traitement plus élaboré n’aura pas, a priori, spécialement d’incidence sur l’effet d’amorçage « activité physique » sur le comportement alimentaire, ou en d’autres termes ne sera pas rendu saillant par la nature de la communication. 6. Problématique et hypothèses La présente étude a pour objectif de tester l’activation d’un comportement de type alimentaire amorcé par l’exposition à une communication persuasive, de type publicitaire ou préventif, sur l’activité physique. Un matériel expérimental identique (i.e., séquence de vidéos d’activités sportives intenses) a été présenté comme étant destiné à une publicité pour des équipements sportifs ou destiné à un message de prévention pour inciter les gens à pratiquer davantage une activité physique. Nous avons également manipulé le niveau d’élaboration des participants en faisant varier l’implication de ces derniers. Parallèlement, nous avons évalué dans le cadre de cette étude une campagne de prévention élaborée par l’INPES (2011) visant à sensibiliser les gens à la pratique d’une activité physique régulière. Cette campagne était intéressante dans la mesure où l’activité physique recommandée (30 minutes d’activités physiques par jour) était représentée par des activités de tous les jours (marcher, monter les escaliers), soit des activités « douces » en comparaison à notre séquence vidéo présentant des sports intenses. Sur la base d’un contenu identique en termes d’exposition à de l’activité physique, nous faisons l’hypothèsequ’une plus grande quantité d’aliments sera ingérée lors de l’exposition à une communication publicitaire plutôt que préventive (H1). Nous faisons également l’hypothèse que cette différence sera d’autant plus importante en situation de forte implication (H2). En effet, en niveau d’implication forte, l’aspect sensibilisateur de la communication préventive devrait être plus saillant et activer davantage des intentions d’actions contrôlées 7 telle que la volonté de pratiquer plus d’activités physiques, mais aussi par extension de manger mieux et moins. En comparaison à la communication préventive INPES, présentant des activités physiques douces, les participants exposés à la séquence d’activités intenses dans le cadre d’un message publicitaire ou préventif devraient ingérer davantage d’aliments (H3). Cette différence devrait être plus importante avec la communication publicitaire qu’avec la communication préventive (H4). Ces résultats seront d’autre part modérés par le niveau d’implication des participants. La différence entre les deux communications préventives étant susceptible de disparaitre en condition de forte implication (H5). Méthodologie 1. Participants L’échantillon est composé de 164 étudiants (131 femmes et 33 hommes) inscrits en première année de licence à l’université Paris Ouest (Mâge = 20,7 ans). Leur participation est requise dans le cadre de leur cursus afin de valider 3 crédits. Les participants ont été répartis dans l’une des six conditions expérimentales [3 (Type de communication : Prévention vs. Publicité vs. INPES) X 2 (Niveau d’implication : Faible vs. Fort) facteurs intersujets]. La répartition par sexe est homogène dans les différentes conditions expérimentales. 2. Variables indépendantes La variable « type de communication » est à trois modalités : Communication publicitaire vs. Communication préventive vs. Campagne INPES. Pour les besoins de l’étude, une vidéo au format Youtubea été créée pour les deux premières modalités de la variable. Celle-ci était présentée comme servant à l’élaboration soit d’une communication publicitaire pour des 8 équipements sportifs, soit d’une communication préventive pour des programmes d’activités physiques. La variable « Implication » a été manipulée par le fait que nous annoncions aux participants que l’élaboration de ce spot publicitaire (vs. Cette campagne de prévention) serait destiné, soit aux jeunes étudiants d’Ile-de-France, soit à des Finlandais âgés de 40 ans et plus. 3. Variables dépendantes En amont de l’étude, les participants ont répondu à un masstesting où a été relevé pour les besoins de l’étude leur poids et taille afin de calculer leur IMC (M = 21,79 ; un IMC normal se situant en dessous de < .25). Les principales VD sont résumées dans le tableau n°1. Pour des raisons de crédibilité, nous avons relevés des mesures attitudinales sur la vidéo (attractivité des images, pouvoir persuasif, etc.), mais celles-ci ne seront pas intégrées dans la présentation des résultats. 4. Matériel et procédure générale La vidéo réalisée par nos soins se constituait de plusieurs séquences d’activités sportives intenses telles que la capoeira, la course en montagne, l’athlétisme, la musculation, etc., et durait au total 1minute et 20 secondes. La vidéo INPES est une campagne réalisée en 2011(http://www.inpes.sante.fr/30000/actus2011/007.asp). Cette dernière met l’accent sur l’activité physique douce, de tous les jours, à savoir de privilégier la marche, la montée d’escalier, ou encore se rendre sur son lieu de travail à vélo. La variable comportementale s’est traduite par le nombre de bonbonsDragibus (marque Casino) mangé par les participants. Les bonbons (N=30) étaient disposés dans un bol en plastique à droite de l’ordinateur et disponibles tout au long de l’expérience. Après chaque passation, le nombre de Dragibus mangé était comptabilisé et le stock de Dragibusentièrement 9 renouvelé pour des raisons d’hygiène. Pour ne pas confondre prise alimentaire et manipulation d’objet, un mouchoir blanc en papier plié en 4 était disposé à côté du bol, à titre de contrôle. La prise ou non du mouchoir était relevée à la fin de l’expérimentation. Les passations ont été réalisées dans une salle de laboratoire composée de 12 box, chacun équipé d’un ordinateur sur lequel les participants visionnaient la vidéo, puis répondaient ensuite au questionnaire. L’étude durait en moyenne 15 minutes. Nous avons justifié la présence de bonbons comme une façon de les remercier pour leur participation à l’étude. Variables dépendantes (VD) Mesure de la VD Variable comportementale Nombre de bonbons ingéré Intention de pratiquer une activité sportive Echelle de mesure en 7 points. 1 « une fois par semaine » à 7 « sept fois par semaine » Intention d’acheter des équipements sportifs Echelle de mesure en 5 points. 1 « Pas du adaptés pour la pratique d’un sport tout » à 5 « Tout à fait » Intensité de l’activité sportive présentée dans Echelle de mesure en 5 points. 1 « Très la communication faible » à 5 « Très intense » Niveau d’implication par rapport au message Echelle de mesure en 5 points. 1 « Pas du tout concerné » à 5 « Tout à fait concerné » Tableau 1. Présentation des principales variables dépendantes Résultats 1. Vérification des manipulations 10 Nous avons procédé à des ANOVAS 3 (type de communication) X 2 (niveau d’implication) sur l’ensemble de nos variables (voir tableau n°2 pour une synthèse des principaux résultats). L’intensité de l’activité physique proposée dans notre vidéo est jugée intense et n’est pas différemment évaluée en condition Publicité (M = 4,11) ou Prévention (M = 4, 29), P < .48. En comparaison à ces deux conditions, l’activité est jugée comme moins intense par les participants exposés au message INPES (M = 2,16) ; Post-hoc (HSD Tukey), p < .0001. La manipulation de notre variable implication ne semble pas fonctionner, les individus ne se déclarent pas plus concernés par le spot en situation de forte implication (m = 2,96) qu’en situation de faible implication (M = 2,76 ; p < .35). En revanche, les participants se sont déclarés plus concernés par le spot (F(2, 158) = 8,25 ; p < .0004) lorsqu’ils étaient exposés à la campagne INPES (M = 3,38) comparativement à ceux exposés à la communication publicitaire (M = 2,42) ou préventive (M = 2,77) ; Post-Hoc, p < .01. 2. Effets comportementaux et intentionnels Pour cette analyse, nous avons introduit dans le modèle de régression linéaire la variable IMC en covariance. L’ANOVA se révèle significative pour la variable « type de communication ». La consommation de Dragibus est plus importante lorsque les participants sont exposés à la communication publicitaire (M= 10,73) plutôt qu’à la communication préventive (M = 5,61), p < .02 ;η² = .10, ce qui confirme l’hypothèse H1. La consommation de Dragibus est également significativement plus élevée lorsque les participants ont visionné la publicité plutôt que la campagne INPES (M = 3,58) ; p < .002. L’hypothèse H3 n’est cependant que partiellement confirmée, car nous n’observons pas de différence significative entre les deux communications préventives, p < .58. L’hypothèse H4 soutenant une différence plus importante entre la communication publicitaire et la campagne INPES qu’entre cette dernière et la communication préventive est de ce fait confirmée. Les hypothèses H2 et H5 ne sont pas 11 confirmées, certainement par le fait que la manipulation de la variable implication n’a pas fonctionnée. D’autre part, nous observons que l’exposition à de l’activité intense augmente l’intention d’acheter des équipements sportifs adaptés pour la pratique d’un sport. En condition de Publicité (M = 3,19) ou de Prévention (M = 3,57) avec activité intense, une plus grande intention est déclarée en comparaison à la condition INPES (M = 2,54), F(2, 116) = 7,16 ; p < .002 (Post-hoc, p < .03). Communication Communication Communication Publicitaire Préventive INPES Nombre de bonbons ingéré 10.73a 5.61bc 3.58c Intention d’acheter des 3.19a 3.57a 2.54b Niveau d’implication par 2.42a 2.77a 3.38b 4.29a 2.16b équipements sportifs rapport au message Intensité de l’activité 4.11a sportive présentée dans la communication Tableau 2. Moyennes de l’étude en fonction du type de communication (Une lettre différente signifie une différence significative, p < .05) Discussion Comme attendu, l’hypothèse selon laquelle les participants exposés à une communication publicitaire allaient manger plus de bonbons que ceux exposés à une communication 12 préventive a été confirmée. L’amorçage de la catégorie « activité physique » active une réponse comportementale alimentaire différente en fonction du type de communication. Les participants mangent moitié moins de bonbons quand on leur présente le message préventif. Cette étude nous permet ainsi de clarifier les effets propres au contenu des messages des effets propres à la nature de la communication. Sur la base d’un contenu identique (i.e. séquence vidéo de pratiques sportives), c’est bien la nature de la communication qui a influencé la prise de bonbons. La différence significative observée entre la publicité et la campagne INPES va aussi dans le sens de nos hypothèses. Toutefois, la différence entre ces deux conditions se situe à la fois au niveau de la nature de la communication (préventive vs. publicitaire) et de l’intensité de l’activité physique présentée (douce vs. intense). On ne peut de ce fait identifier précisément la cause de la différence. L’absence de différence significative entre les deux communications préventives tend à suggérer que ce n’est pas le niveau d’intensité de l’activité physique présenté qui influe sur la prise d’aliments. De futures recherches manipulant la nature du message ainsi que l’intensité de l’activité physique présentée permettrait des conclusions plus robustes quant aux effets respectifs et d’interactions de ces deux variables. La publicité amorce l’émergence de comportements impulsifs, sur la base d’un traitement automatique et superficiel du message. Le message de prévention est plus susceptible d’amorcer une évaluation réfléchie du message. En ce sens, l’activation du concept « activité physique » peut activer le concept « santé » et ainsi produire une réponse comportementale de réduction alimentaire. Cet effet peut être particulièrement vrai pour la prise de bonbons ; aliment calorique et totalement non bénéfique pour la santé. Il serait intéressant de répliquer l’étude en utilisant des aliments plus sains. Le type d’aliments proposé ainsi que la perception d’aliments comme étant un repas ou un snack a une influence sur la quantité d’aliments ingérés (Wansink, Payne et Shimizu, 2010). 13 Le niveau d’implication n’a pas produit les résultats escomptés, et il semble que sa manipulation n’est pas particulièrement fonctionnée. Les participants se sentent au final plus concernés par la campagne INPES, certainement en raison des activités physiques proposées. Au-delà de cette étude, d’autres recherches sont nécessaires afin de mieux comprendre les mécanismes psychologiques qui sous-tendent le lien entre « activité physique passive» et prise d’aliments. Il serait notamment intéressant d’identifier plus précisément les facteurs qui conduisent à un phénomène d’assimilation (i.e. plus d’aliments) ou à un phénomène de contraste (i.e. moins d’aliments). Enfin, il serait intéressant pour de futures recherches d’élargir la cible étudiée notamment en termes d’âge ou de PCS, et d’inclure également d’autres variables de segmentation telles que le ou les sports pratiqués ainsi que les goûts alimentaires. 14 Bibliographie AlbarracinD., WangW. etLeepers J. (2009), Immediate increase in food intake following exercice messages, Obesity, 17, 1451-1452. Ancellin R. (2012), Activité physique et cancers. Fiche repère : état des connaissances en date du 30 janvier 2012, Institut National du Cancer, Boulogne-Billancourt. 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