La genèse des couleurs, Un dialogue entre lumière et matière LA RETINE ET SES CAPTEURS « CCD » « Y a-t-il, au fond des yeux, sur la rétine, un miroir, un petit coin que la tendresse ne voile pas, et où je ne me reflète pas en beau ? » Jules Renard, 1864 – 1910 Structure d’un œil Coupe schématique de l’œil d’un mammifère Un objet lumineux peut être assimilé à une juxtaposition de points objets lumineux. Chaque point lumineux envoie des rayons dans toutes les directions. Une partie de ces rayons atteint l’œil d’un observateur. L'œil est un récepteur de lumière extrêmement sensible. Quelques photons seulement suffisent, à un œil placé dans le noir complet depuis plusieurs minutes, pour qu'il détecte de la lumière. Par contre, le domaine des longueurs d'onde auquel il est sensible est très restreint, de 400 à 800 nm. Domaine spectral de l'œil La rétine, partie photosensible de l'œil, est une membrane constituée de milliards de cellules photoréceptrices, regroupées en deux types : les cônes et les bâtonnets. 1 La genèse des couleurs, Un dialogue entre lumière et matière Cônes et bâtonnets Les bâtonnets sont les plus sensibles à la lumière. Ils sont responsables de la vision en lumière atténuée. Ils absorbent vers 500 nm et sont insensibles à la partie rouge extrême du spectre, ce qui correspond à la perception d'images dans le bleu-vert (vision crépusculaire). Ces capteurs sont majoritairement présents sur la périphérie de la rétine. Les cônes, moins nombreux, permettent en lumière suffisante, la vision colorée. Il existe trois types de cônes, absorbant dans trois régions différentes du spectre, permettant ainsi la reconstitution fine des couleurs. La partie centrale de la rétine (partie centrale de la vision) ne contient que des cônes. Cônes et bâtonnets en microscopie électronique Des cônes différenciés La rétine humaine possède les trois types de cônes suivants : Les cônes S, sensibles aux petites longueurs d’onde (assimilées au bleu). Les cônes M, sensibles aux longueurs d’onde moyennes (assimilées au vert). Les cônes L, sensibles aux grandes longueurs d’onde (assimilées au rouge). L’œil humain est sensible aux trois couleurs primaires de la lumière. On dit que l’Homme a une vision trichromique. Courbes de sensibilité spectrale des trois types de cônes Lorsque de la lumière colorée arrive sur la rétine, la présence de ces trois types de cônes permet de mesurer précisément l’intensité relative des trois couleurs primaires, et de reproduire ensuite le plus fidèlement possible la teinte de l’objet observé. L’œil fait la synthèse additive des couleurs. Rq : Un jaune obtenu par synthèse additive du vert et du rouge peut être perçu de la même façon qu’un jaune quasiment monochromatique. Une même couleur perçue peut donc correspondre à plusieurs couleurs spectrales. Rq : Daltonisme (mot provenant du physicien anglais John Dalton atteint de ce défaut de la vision). Certaines personnes présentent une déficience d’un ou plusieurs de ces cônes. On dit qu’elles souffrent de dyschromatopsie, ou encore daltonisme. Survenant généralement à la suite d’une lésion cérébrale, nerveuse ou oculaire, la forme la plus fréquente de daltonisme partielle est la confusion du vert et du rouge, mais d’autres formes existent, comme la confusion du bleu et du jaune. Dans des cas très rares, la dyschromatopsie est totale : la déficience de perception des couleurs est totale, et le sujet atteint vit dans un monde fait de nuances de gris. Il existe de nombreux tests permettant de détecter le daltonisme. Un des plus connus est le test d'Ishihara pour la confusion rouge/vert. Le principe est de mettre un chiffre constitué de points verts dans une surface constituée de points rouges. Celui qui voit le chiffre n'est pas daltonien. Test d’Hishihara 2 La genèse des couleurs, Un dialogue entre lumière et matière Un détail insignifiant, mais aux conséquences tellement importantes... Au niveau de la rétine, le processus de vision peut en première approximation se résumer par une réaction d’isomérisation. Cônes et bâtonnets possèdent tous les deux une molécule appelée rétinal, de formule brute C20H28O, qui est une des clés de ce processus. DANS L’OBSCURITE, AU REPOS : Une des formes de la vitamine A, le rétinol, se transforme en (11trans)-rétinal (ou (11E)-rétinal) (oxydation enzymatique de la fonction alcool du rétinol en fonction aldéhyde, sous l'action de la rétinol déshydrogénase). Rétinol (11E) - rétinal La rétinal isomérase, présente dans les cônes et les bâtonnets, isomérise le (11trans)-rétinal en (11cis)-rétinal (ou (11Z)-rétinal). (11Z) - rétinal Le cis-rétinal réagit alors par sa fonction carbonyle C=O sur la fonction amine -NH2 de l'opsine, une protéine (chaîne d’acides aminés) qui a la capacité de réagir à la lumière, et que l’on trouve aussi bien sur les cônes que sur les bâtonnets, et transforme la fonction amine en imine : . L’opsine devient rhodopsine. 3 La genèse des couleurs, Un dialogue entre lumière et matière Rq : La rhodopsine existe également sous une forme ionique : Rhodopsine Egalement appelée pourpre rétinien, la rhodopsine est LA molécule responsable de la photosensibilité des cônes et des bâtonnets. Le retour au (11trans)-rétinal nécessite un apport d’énergie, par exemple sous la forme d’un photon lumineux. A LA LUMIERE : Sous l'effet d'un photon, il y a isomérisation immédiate de la partie cis du cis-rétinal de la rhodopsine, qui redevient trans, ce qui entraîne une impulsion électrique transmise au nerf optique sous la forme d’un message nerveux. Après toute une série de transformations, se terminant notamment par une hydrolyse, le trans-rétinal est réduit en rétinol sous l'action de la rétinal réductase. Le rétinol et l’opsine sont régénérés... Le cycle peut recommencer. Pendant ce temps, le message nerveux est transmis par le nerf optique au cerveau, qui interprète ce signal comme de la lumière. Le nombre d’isomérisations dépend de l’intensité lumineuse reçue. Le retour au repos, c'est-à-dire le passage du rétinal de l’isomère Z à l’isomère E, se fait sur une durée de l’ordre de 0,04 secondes. Ce « temps de relaxation » est à l’origine du phénomène de persistance rétinienne. 4 La genèse des couleurs, Un dialogue entre lumière et matière Résumé en schémas VU PAR UN BIOLOGISTE : PHOTOISOMERISATION DU CIS-RETINAL EN TRANS-RETINAL (ETAPE 1) : 5