Au-delà du buzz, le portrait complexe des convertis à l'islam.
Certaines radicalisations rapides ont fait les gros titres, comme celle de Maxime Hauchard,
jeune Normand devenu l'un des bourreaux du groupe Etat islamique (EI), ou dernièrement du
Burundais Bertrand Nzohabonayo, l'agresseur de policiers à Joué-les-Tours. «Il ne faut pas
forcément voir dans le converti un blond aux yeux bleus... On note pas mal de conversions de
personnes d'origine antillaise, haïtienne, d'Africains chrétiens»
, remarque Bernard Godard, bon connaisseur du paysage musulman français.
Le politologue Franck Frégosi relève «un nombre important» de nouveaux musulmans optant
«pour une voie intégraliste de
l'islam, étant entendu que tous les salafistes ne sont pas favorables au combat armé»
. Pour Bernard Godard, ce salafisme souvent quiétiste et non jihadiste, c'est en partie
«l'islam qui séduit les musulmans nés en France: on va tout de suite à la source, on veut être
authentique. Il y a là une oumma (communauté des croyants, NDLR), virtuelle peut-être, où les
convertis ne se distinguent pas des autres musulmans.»
«Mini-typologie»
A partir du terrain à Marseille, le sociologue Loïc Le Pape tente une «mini-typologie» des
conversions, où le basculement jihadiste est très minoritaire. La voie mystique, ancienne, séduit
des profils plutôt intellectuels et continue à alimenter des confréries soufies comme la
marocaine Boutchichiya - à laquelle est affiliée le rappeur Abd al Malik - ou l'algérienne
Alawiyya, mais semble en recul. Les conversions dites matrimoniales perdurent, notamment
parce qu'une musulmane ne peut théoriquement épouser un non musulman. Loïc Le Pape note
également des conversions par affinité: des jeunes ayant vécu dans des quartiers avec des
musulmans, parfois séduits autant par
«une ambiance»
- notamment pendant le ramadan - que par une doctrine, mais aussi des personnes intéressées
par la théologie musulmane ou la veine orientaliste de la culture islamique.
«Toutes les voies se mélangent un peu, les conversions sont autant relationnelles que
rationnelles. La question qui reste est: que vient-on chercher dans l'islam?», estime Franck
Frégosi. Le père Jean Courtaudière y réfléchit en Seine-Saint-Denis, où il a accompagné une
trentaine de familles catholiques dont un enfant s'est converti.
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