
Désirs de possibles
Jacques Bœsch, chargé des affaires culturelles HUG
Depuis toujours, à côté des soins, de la recherche et de l’enseignement,
l’art et la culture sont présents à l’hôpital. Une étonnante diversité de
manifestations en témoigne et contribue à la qualité de la vie hospita-
lière en humanisant ses espaces. Elle ouvre sur d’autres manières de
ressentir, de regarder, de penser et de partager le plus sensible. Elle
ose aborder la plupart des questionnements humains, la vie et la mort,
la santé et la maladie, la souffrance et la solitude, le bonheur et un sens
possible donné à l’existence. Constamment dissidente, la présence
d’œuvres, d’auteurs et d’artistes résiste, allège et libère. L’essentiel est
de permettre à tout un chacun d’en faire l’expérience.
Tony Morgan s’est toujours questionné sur le rôle social de l’artiste.
Ses œuvres sont des prises de paroles fortes, jamais gratuites,
immensément humaines. Dès 1999, pendant ses séjours aux HUG,
il poursuit son travail de créateur. Il prend des notes courtes, sim-
ples et fulgurantes, quelques traits, une phrase, un mot. Il consigne
dans ses carnets sa souffrance, les propos de ses voisins, les dires
des médecins et des soignants. De là naît The Hospital Edition, un
ensemble de 3 éditions de gravures et un projet pour l’hôpital, où
patient, soignants et proches seraient amenés à un dialogue autour
du corps, de l’esprit, de la maladie et de la relation, autour du dehors
et du dedans.
Longtemps, nous avons différé la présentation du projet à l’hôpital,
pariant que, tant qu’entre nous des projets resteraient ouverts, des
possibles subsisteraient. Et que Tony pourrait s’y accrocher. Nous
pourrions ainsi l’accompagner, être de son côté face à la maladie.
Il décède en octobre 2004.
Et nous avons poursuivi malgré tout. Les chargés des affaires cultu-
relles des HUG se sont associés à ses proches. Des enseignants et
des étudiants de la Haute école d’art et de design de Genève les ont
rejoints. La manifestation The Hospital Edition – Tony Morgan en est
le témoignage.
Au centre, ce Journal du Patient, des images et des textes que Tony
Morgan adresse au patient, en l’invitant à être un acteur de sa maladie.
Un journal, aujourd’hui enrichi par le regard des étudiants : les paroles
« d’acteurs » de l’hôpital qu’ils ont collectées, et la charte des HUG
qu’ils proposent en regard des œuvres et des mots de Tony Morgan
et d’Andrea Carlino.
En achevant désormais ce journal, en lui donnant une forme gra-
phique, les étudiants ont, à leur tour, TOUT RÉPARÉ, un clin d’œil
qu’ils adressent à Tony Morgan en refermant cette publication sur
ces mots-image.
Autour du Journal du Patient et avec ses images, d’autres actions
offrent des espaces pour instaurer la réflexion et des liens, tels que
le souhaitait Tony Morgan dans son projet : des stickers rencontrés
au hasard des espaces hospitaliers, des sets de table sur les plateaux
de la cafétéria du personnel de l’hôpital, deux expositions des œuvres
originales à l’Hôpital et à l’École d’arts appliqués et des films sur le
travail et l’artiste.
Cette présence d’œuvres authentiques va surprendre, étonner, et,
bien sûr, susciter des discussions comme le quotidien hospitalier
nous y invite.
Genève, septembre 2007
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