Sa spécialité: le stress

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LA PRESSE
MONTRÉAL
DIMANCHE
5
FÉVRIER
2006
ACTUEL
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ACTUEL
Qui sont nos chercheurs?
Dans le cadre du concours de
rédaction journalistique « Dans un
labo près de chez vous », organisé par
l’Université de Sherbrooke, La Presse
publie les textes des trois gagnants,
des jeunes de troisième, quatrième et
cinquième secondaires du Québec.
Ce concours vise à démystifier la
profession de chercheur scientifique et
à faire découvrir ses aspects
méconnus.
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«Tripper» sur les baleines
MARC-ANTOINE FORTIN
Troisième secondaire
Collège Saint-Charles-Garnier,
Québec
Banalement, un chercheur est
un individu qui se consacre à la
recherche scientifique. Mais lors
de ma rencontre avec M. Robert
Michaud, j’ai entrevu un métier
différent, où la curiosité est maîtresse et où tout est remis en
question. Vision d’un homme
que la flamme scientifique a
complètement embrasé...
Robert Michaud, biologiste se
concentrant sur le comportement animal, dirige les programmes de recherche sur les
baleines du St-Laurent. En plus,
il consacre une partie de son
temps aux étudiants qui complètent leur maîtrise sur le comportement animal. Pour ajouter
à cet horaire chargé, M. Michaud travaille en conservation,
ce qui l’amène à oeuvrer avec le
gouvernement mais aussi avec
différents groupes et organisations pour mettre en place des
stratégies pour protéger les baleines et leur habitat. Il a pour
mission de faire « tripper » les
gens sur les baleines et croyezmoi, il a réussi dans bien des
cas.
Insatiable curiosité
Selon lui, la meilleure aptitude
pour faire non seulement de la
biologie, mais tous les autres
métiers scientifiques, c’est la curiosité. La curiosité consiste à
toujours accepter que l’on puisse trouver plus, à ne pas prendre
pour acquises les réponses
qu’on lit, ce qui nous force à développer notre sens critique.
Comme biologistes sur le comportement animal, les chercheurs sont souvent amenés sur
le terrain, dans de difficiles conditions. Le moins qu’on puisse
dire, c’est qu’il faut aimer le
plein air...
Quelques années après avoir
complété son baccalauréat en
1982, M. Michaud fonde, avec
un autre chercheur, le GREMM
(Groupe de recherche et d’édu-
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Robert Michaud, biologiste et directeur du Groupe de recherche et
d’éducation sur les mammifères marins à Tadoussac.
cation sur les mammifères marins), groupe privé à but non lucratif. À ce jour, cet organisme
compte 40 membres.
Loin d’avoir percé tous les
mystères sur le comportement
animal, M. Michaud commence
au contraire à répondre à des
questions, ce qui le pousse à
continuer. Il sent aussi qu’en
faisant connaître les baleines au
grand public, il arrivera à les
protéger un peu mieux, ce qui le
motive quand le réveil est difficile.
La curiosité est le propre des
jeunes. Pour faire un métier qui
les garderait jeune, qui les ferait
« tripper », Robert dirait aux
adolescents de choisir un métier
qu’ils aimeraient faire aujourd’hui. C’est un métier des moins
routiniers, car les chercheurs se
doivent de trouver des choses
nouvelles.
Robert souhaite plus que tout
découvrir les secrets des baleines, des bélugas et nous les rendre plus familiers comme le sont
le chimpanzé ou le dauphin,
beaucoup plus connus. Plus encore, il désire percer le mystère
de leur communication. Dans
les limbes de ses rêves (peutêtre pas insensés...), Robert souhaiterait créer un grand
sanctuaire dans le Saint-Laurent
pour protéger les baleines mais
aussi la population côtière. La
conviction d’avoir contribué à ce
projet le comblerait. S’il n’aura
sans doute pas convaincu tous
les jeunes d’embrasser la profession de chercheur, il m’aura au
moins transmis sa passion de la
science.
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Sa spécialité:
le stress
MARJOLAINE LAVIGNE
Cinquième secondaire
École Mgr- Richard, Montréal
Christian Nozais, chercheur en écologie aquatique à l’Université du Québec à Rimouski.
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Passionné d’écologie aquatique
DOMINIQUE GUILLEMETTE
Quatrième secondaire
École Paul-Hubert, Rimouski
Avez-vous une passion ? Vous levez-vous tous les matins heureux
de cette journée qui s’annonce,
heureux de savoir que vous allez
encore passer une bonne partie de
votre vie à faire ce que vous aimez
le plus au monde : votre travail ?
Si vous répondez non à l’une ou
l’autre de ces questions, eh bien
consolez-vous en vous disant
qu’il existe au moins une personne qui démontre un amour insatiable pour la profession qu’il
exerce.
D’origine française, Christian
Nozais est chercheur à l’Université
du Québec à Rimouski. Il passe la
majeure partie de son enfance en
Afrique du Sud puis, à l’âge de 15
ans, déménage en France, accompagné de sa famille. Dès lors, il
étudiera à Paris, au C.E.S. « l’Essclangon » et quelques années plus
tard, sera admis au lycée MarcelPagnol. À l’université, il travaillera avec acharnement pendant neuf
ans pour décrocher une maîtrise
ainsi qu’un doctorat en biologie
marine. Enfin, voilà neuf ans qu’il
s’est établi parmi nous.
Comme beaucoup d’autres,
Christian fut bercé par les livres et
les films de Jacques-Yves Cousteau. Depuis, il dévore tout ce qui
touche de près ou de loin sa passion du monde aquatique. C’est
pourquoi, il a choisi de fixer ses
recherches sur la chaîne trophique. Il est notamment intéressé à
connaître les structures qui constituent la nourriture des organismes benthiques. En concentrant
ses efforts sur ce domaine, il cherche à découvrir comment des déséquilibres ou changements dans
la colonne d’eau influencent l’alimentation de ces organismes.
Ah, j’oubliais ! Qu’aurait pensé
Christian si j’avais omis de mentionner qu’il est aussi enseignant ? Je serais passée à côté
d’un de ses principaux objectifs. Il
affirme, bien qu’il chérisse beaucoup la voie qu’il a choisie, que la
vie n’est pas que travail. Selon
lui, elle regorge aussi de connaissances et d’expériences encore inconnues d’une trop grande partie
du monde. Transmettre son savoir
et son vécu à ceux et celles qui assureront la descendance de ses accomplissements est quelque chose
qu’il considère comme primordial. Débordant d’ambitions et de
rêves, il tient aussi personnellement à marquer son passage et à
développer de nouvelles formes
d’études. Considéré par tous comme un homme tenace et persévérant, il n’aura sans doute aucun
mal à y parvenir.
« Avant de terminer, auriez-vous
un message particulier à transmettre à ceux et celles qui liront ce
que j’écrirai à propos de vous ? »
lui ai-je demandé. Je fus stupéfaite de la sincérité et de la profondeur de sa réponse. Je suis convaincue que ces quelques phrases
en laisseront plus d’un songeur.
« Prenez soin de cette planète,
mais ne la prenez pas pour acquise. Si ce que je viens de dire en
fait réfléchir quelques-uns, j’en
serai comblé. Sans oublier : écologiste aquatique, pas de doute,
c’est le plus beau métier du monde », s’est-il permis d’ajouter fièrement.
Depuis toujours, plusieurs chercheurs ont fait leur marque dans le
domaine de la santé. Par contre,
plusieurs d’entre nous se questionnent sur le stress. La chercheuse Sonia Lupien pourrait nous en
dire long sur ce sujet.
Sonia Lupien a fait ses études en
sciences humaines au cégep de
Saint-Jérôme. Par la suite, elle passa beaucoup de temps sur les bancs
de l’Université de Montréal. Elle y
étudia la psychologie expérimentale, elle y fit une maîtrise en neuropsychologie, et eut un doctorat
en sciences neurologiques. Pour
devenir chercheuse, elle dut faire
un stage post-doctoral à l’Université de Californie à San Diego ainsi
qu’à l’Université Rockefeller à New
York. Depuis 1996, elle est chercheuse à l’Université McGill, au
département de psychiatrie.
Sacrées hormones
Professeure Lupien (elle est aussi
professeure à l’Université McGill)
concentre principalement ses recherches sur le stress, mais particulièrement sur les hormones du
stress, sur le cerveau ainsi que sur
la mémoire. Elle a fait de multiples
découvertes. « Si on est stressé
pendant trop longtemps, notre
corps produit une hormone nommée cortisol qui atteint le cerveau
et qui affecte la mémoire », précise
la chercheuse. Le cortisol est aussi
appelé hormone du stress. Elle démontre aussi qu’une production
élevée de ces hormones est liée à
une diminution du volume de
l’hippocampe, une petite région du
cerveau qui ressemble à un cheval
de mer.
Néfaste à tous les âges
À l’aide de son équipe, Sonia Lupien, a étudié l’effet du stress sur
les enfants âgés de 6 à 14 ans, sur
les jeunes adultes puis sur les personnes âgées. Pour les deux pre-
PHOTO LA PRESSE
Sonia Lupien, chercheuse en
neuropsychologie à l’Université
McGill et spécialiste du stress.
miers groupes, elle conclut que le
cerveau des personnes stressées est
moins performant que celui d’une
personne tranquille. Pour ce qui est
des personnes âgées, celles qui ont
un taux de cortisol élevé ont de
moins bons résultats que les autres
sur les tests de mémoire. Elle a
aussi remarqué que la partie du
cerveau responsable de l’apprentissage et de la mémoire est plus petite. D’après la chercheuse, le stress
est néfaste à tous les âges et nous
devrions reconnaître l’importance
de ce facteur sur notre santé mentale.
Mme Lupien adore son métier car
elle peut faire ce qu’elle veut,
quand elle le veut et où elle le souhaite. Ce qu’elle aime, c’est qu’elle
peut expérimenter dans son laboratoire pour répondre à ses propres
questions sur le cerveau. Elle dit
que c’est un feeling génial.
Toutefois, Sonia Lupien a un objectif qui la pousse à entreprendre
ses recherches. Son rêve, c’est de
découvrir comment prévenir les effets négatifs du stress chez l’humain. Cela pourra lui permettre de
détecter très tôt les gens qui sont à
risque de développer une dépression, une maladie liée au stress.
C’est ce qu’on lui souhaite !
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