Métèques et esclaves à Athènes (Doc. E)
« La République des Athéniens » (on peut traduire aussi « Constitution d'Athènes ») est un pamphlet qui nous est parvenu avec les
œuvres de Xénophon. Il s'agit, en effet, selon toute apparence d'un adversaire de la démocratie écrivant vers 430.
Quant aux esclaves et aux métèques, nulle part leur insolence ne va si loin qu'à Athènes. Dans cette ville, on n'a pas le droit de les
frapper, et l'esclave ne se rangera pas sur votre passage. La raison de cet usage local, la voici : s'il y avait une loi qui permît à l'homme
libre de frapper l'esclave, le métèque ou l'affranchi, souvent il aurait pris un Athénien pour un esclave et l'aurait frappé. Car les
hommes du peuple à Athènes ne se distinguent des esclaves et des métèques ni par des habits ni par un extérieur plus riches.
A ceux qui trouveraient étonnante une autre habitude, celle de laisser les esclaves se livrer au luxe dans Athènes, quelques-uns même
y vivre au milieu de la magnificence (1), on peut démontrer que cette indulgence aussi est, chez les Athéniens, un calcul. Dans un
pays dont la marine fait la puissance, l'intérêt de notre fortune nous oblige à être au service de notre cheptel humain. Nous devons
toucher les redevances qu'ils perçoivent pour nous (2) et pour cela les laisser libres. Or, là où des esclaves sont riches, il ne sert à rien
que mon esclave vous craigne comme il vous craint à Lacédémone*. Car si votre esclave avait à Athènes quelque chose à craindre de
moi, il serait obligé de me remettre l'argent qu'il détient, afin de ne pas mettre sa personne en danger.
Voilà pourquoi nous avons accordé aux esclaves une sorte de droit à la parole par rapport aux hommes libres. Et aux métèques aussi,
vis-à-vis des citoyens de la ville, parce que la multitude des métiers et les besoins de la marine les rendent nécessaires à la cité. Voilà
pourquoi le droit à la parole accordé aux métèques est aussi, de notre part, une concession cohérente.
PSEUDO-XÉNOPHON, République des Athéniens, I, 10-12 (trad. E. Belot modifiée, Paris, Hachette, 1880).
1. Il s'agit des esclaves " habitant à part " et tenant un commerce.
2. Il s'agit ici d'esclaves intendants ou régisseurs d'affaires, qui perçoivent le revenu du travail d'autres esclaves. Toute cette activité
est liée, directement ou indirectement, au commerce et à la vie maritime.