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À lire avant le spectacle
Quand ?
La Clémence de Titus est l’avant-dernier opéra de Mozart. Créé le 6
septembre 1791 à Prague, l’ouvrage lui a été commandé pour
marquer le couronnement de Léopold II roi de Bohême. Parce qu’il
attendait de connaître les chanteurs prévus pour cette création
avant d’écrire leurs rôles, Mozart ne bénéficia que de quelques
semaines pour mener à bien la composition de La Clémence de
Titus, raison pour laquelle il en fit composer les récitatifs par un de
ses élèves. Après sa création, l’œuvre connut quelques reprises
jusque dans le premier quart du 19e siècle. Puis elle sombra dans un
oubli qui dura jusqu’au milieu du 20e siècle. D’abord déconsidéré,
cet «opéra seria transformé en opéra vera» (pour reprendre une
définition de Mozart lui-même) a conquis une réelle popularité et il
a aujourd’hui regagné sa place au rang des chefs-d’œuvre de la
maturité de son auteur.
Quoi ?
Le livret reprend un drame fameux du grand Pietro Metastasio,
écrit en 1734, mis en musique par une quarantaine de
compositeurs différents, mais restructuré et partiellement réécrit
en l’occurrence par le poète de la cour de Vienne Caterino Mazzolà.
L’histoire, typique des drames métastasiens, met en scène
l’empereur de Rome Titus et son entourage. Victime d’un complot
ourdi par son ami Sextus et suscité par l’ambitieuse Vitellia, qui se
sert de l’amour que lui voue Sextus pour parvenir à ses fins,
l’empereur découvrira les diverses trahisons dont il est l’objet mais
finira par pardonner à tout le monde.
Comment ?
La Clémence de Titus doit en partie son oubli au fait qu’il s’agissait
d’une œuvre de circonstance inscrite dans la forme vétuste de
l’«opéra seria». Mais à y regarder de plus près, on s’aperçoit que
Mozart s’est presque totalement libéré de ce moule formel jadis
contraignant. En 1791, la forme de l’opéra seria, qui a dominé les
théâtres d’Europe pendant une centaine d’années, est en voie de
désuétude. Mozart ne se prive pas d’y introduire de nombreux
ensembles pour plusieurs voix, jadis proscris mais désormais
devenus monnaie courante dans l’opéra buffa et contaminant
toutes les formes lyriques. Par ailleurs, il soigne comme à son
habitude la structure d’ensemble de son opéra, veillant à assurer
une grande continuité dramatique entre les différentes scènes et à
construire l’ouvrage sur une charpente extrêmement cohérente. De
cette manière, tous les personnages, à commencer par ceux de
Sextus et de Vitellia, acquièrent une véritable épaisseur humaine. Et
l’ouvrage retrouve la tonalité douce-amère des autres opéras de
Mozart.