Toutelaculture
Soyez libre, Cultivez-vous !
http://toutelaculture.com
personnel, femmes de chambre, serveurs et grooms s’y affairent en permanence, au milieu de
clients en pleine crise politique et sentimentale. Si la transposition historique n’est pas d’un
intérêt évident, la mise en scène intelligente de Denis Podalydès rend compte avec finesse de
la perpétuelle tension entre sphère publique et sphère privée qui innerve l’opéra. Titus fait-il sa
première entrée en scène, accompagné des sénateurs romains, que toutes les portes
s’ouvrent sur l’espace d’un bâtiment que l’on devine vaste. Doute-t-il de la loyauté de son ami
Sextus, que ces mêmes portes se referment sur l’intimité de la confiance blessée. Idem
lorsque Annius et Servilia chantent un amour, qu’ils croient interdit, en un tendre duo.
Ce petit miracle musical est servi par les voix somptueuses de Julie Boulianne et Julie Fuchs.
C’est assez rare pour être signalé : tout est parfait dans une distribution (pour une fois) bien
dirigée ! La Vitellia de Karina Gauvin est impériale : on retiendra son délicieux numéro de
séduction au premier acte, où la trahison de Sextus se noue autour de hanches
voluptueusement drapées… Même sans grand air solo, Julie Fuchs irradie, et le Titus de Kurt
Streit convainc par son humanité, là où les aigus s’éteignent parfois. Mais la véritable
découverte de la soirée, c’est Kate Lindsey ! Gagnante à l’applaudimètre, elle incarne, par son
phrasé souple et son timbre lumineux de mezzo-soprano, l’idée même du plus pur chant
mozartien. Son Sextus, presque chétif dans le costume du traître qu’il peine à endosser,
s’impose par des complaintes aussi déchirantes que « Deh per questi instante solo ». Avec une
direction tout en rondeur et sérénité à la tête du Cercle de l’Harmonie, Jérémie Rhorer confirme
son statut de Maître ès Mozart : c’est clair, brillant, sans chichis. Même les récitatifs avancent,
sans pour autant être expédiés.
Pour plaire au Sénat et honorer ses lauriers, Titus renonce et pardonne. Il apparaît divin aux
yeux du peuple romain, mais au prix de doutes et de douleurs bien humains : telle est la leçon
que Mozart offre à méditer, peut-être même jusqu’au théâtre de l’Elysée…
Visuels: © Vincent Pontet Wikispectacle
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)
2 / 2