Les orobanches (Orobanche et Phelipanche ssp) sont des plantes parasites obligatoires, dépourvues de
chlorophylle et entièrement dépendantes de leur hôte pour leur développement. Elles produisent un très grand
nombre de graines extrêmement petites (200 à 400 µm). La structure de l’embryon est réduite puisque ce
dernier est dépourvu de cotylédon et de radicule. L’albumen est constitué uniquement d’une à deux couches de
cellules, les principaux composés mis en réserve étant des lipides et dans une moindre mesure de l’amidon.
Certaines espèces d’orobanche se sont adaptées à des agrosystèmes et sont devenues des adventices très
difficiles à éliminer en Europe. Parmi ces espèces, quelques unes dont Phelipanche ramosa et Orobanche
cumana, pris comme modèles majeurs dans cette étude, sont considérées comme de véritables fléaux
agronomiques dans les cultures oléagineuses (colza, tournesol).
Au cours de l’évolution, la stratégie de survie et de multiplication mise en place par ces plantes parasites
est un exemple extraordinaire d’adaptation végétale. En effet, la germination des graines d’orobanche n’est
induite qu’après perception d’un signal, des stimulants de germination, exsudés dans la rhizosphère par les
racines de la plante hôte. En l’absence de stimulants, les graines entrent en phase de dormance, qui peut
s’avérer très longue (au moins une dizaine d’années), sans que les graines ne perdent pour autant leur faculté
germinative. Parmi les stimulants de germination, les strigolactones sont synthétisées en quantité infime par les
racines d’un grand nombre de plantes hôtes et partiellement sécrétées dans la rhizosphère. Ce sont des
terpénoides dérivant de la voie de biosynthèse des caroténoides sous forme de produits de clivage du β-
carotène. Récemment, il a été démontré que d’autres molécules peuvent aussi induire la germination des
graines d’orobanche à de très faibles concentrations dans la rhizosphère. On citera le dehydrocostus lactone,
exsudé par les racines de tournesol et induisant la germination des graines d’Orobanche cumana. Il en est de
même pour les isothyocianates (ITC), produits de dégradation des glucosinolates sécrétés par les racines du
colza. Si la nature des stimulants de germination a été identifiée depuis plus ou moins longtemps, en revanche
rien n’est connu quant aux gènes et voies de signalisation responsables de cette étape clé du développement
du parasite. Cependant, plusieurs processus métaboliques préparatoires (phase de préconditionnement)
doivent avoir lieu pour rendre les graines réceptives aux stimulants de germination : une hydratation des
graines, une reprise d’un métabolisme respiratoire en lien avec une synthèse de gibbérelline et une rapide
utilisation des sucres réducteurs. Suite au préconditionnement et à la perception du signal chimique, la
germination semble prendre place sous le contrôle des gibbérellines et de l’éthylène. Alors que l’acide
abscissique exogène (ABA) inhibe la germination en présence de stimulants de germination, la synthèse
d’éthylène, induite par les stimulants, déclenche la germination sans que cela soit corrélé avec une levée de
l’inhibition par l’ABA. La concentration de cette hormone semble en effet constante tout au long du processus.
Enfin, malgré plusieurs études, l’existence de récepteurs aux strigolactones n’a pu être démontrée.
Compte tenu de l’importance de cette étape clé dans le développement de l’orobanche et du manque de
données scientifiques, l’étude proposée a deux objectifs 1) élucider et comparer les processus physiologiques
amenant les graines d’orobanche (P. ramosa, O. cumana) à germer après perception des stimulants de
germination (strigolactones, ITC, dehydrocostus lactone…) et 2) analyser la mobilisation des réserves au cours
de la germination et le développement post-germinatif.
Le premier objectif sera mené par des approches sans a priori (transcriptomique, métabolomique…) et
avec a priori (dosages des hormones végétales, étude de la possible implication de la voie de signalisation du
sphingosine - données confidentielles au LBPV à ce jour) afin d’identifier les voies de signalisation mises en
place avant la perception du signal (étape de préconditionnement) et/ou déclenchées par les stimulants de
germination. Le second objectif sera mené également avec des approches sans a priori (transcriptomique,
métabolomique…) et avec a priori (catabolismes lipidique et glucidique) afin de caractériser les principales
voies de mobilisation des réserves au cours de la germination et du développement post-germinatif des graines
d’orobanche avant fixation à une racine hôte (développement indépendant de l’hôte).
L’étude proposée s’inscrit donc dans une problématique agronomique importante et vise à une meilleure
connaissance de la biologie de la germination de l’orobanche pour proposer des méthodes de lutte durable
contre cette adventice. Le LBPV est une unité de recherche dédiée spécifiquement à l'étude des plantes
parasites des grandes cultures, avec pour principaux modèles d’étude P. ramosa et O. cumana, en partenariat
avec les filières professionnelles concernées. Le travail sera mené en collaboration avec l’IRHS d’Angers (Puce
à ADN, biologie de la semence), l’UMR 5546 CNRS/Université Paul Sabatier Toulouse et l’Institut JP
Bourgin/INRA Centre de Versailles-Grignon (comparaison de modèles : champignon mycorhizien et mousse
Physcomitrella).