La Cenerentola
LE COMPOSITEUR ET LA MUSIQUE
Fiche pédagogique p. 5 Opéra de Rouen Haute-Normandie
Gioacchino Antonio Rossini (1792-1868)
C’est dans le petit port reculé de Pesaro (près de Rimini en Italie),
que Rossini grandit, au sein d’une famille
modeste mais entièrement tournée vers
la musique. Son père joue du cor dans
l’orchestre municipal et sa mère est
chanteuse. Très jeune, il accompagne son
père au violon dans de petits orchestres
de villages.
L’intuition musicale
Adolescent, c’est en recopiant les grands airs d’opéras de Haydn
et de Mozart que Rossini apprend la musique en autodidacte. Il
développe un tel sens musical qu’il est capable, après l’écoute
d’un opéra, de transcrire de mémoire plusieurs des airs qu’il vient
d’entendre. Il compose son premier opéra à 14 ans puis part étudier
au Lycée musical de Bologne. Il suit des cours de chant, de cor
d’harmonie, de violoncelle, de piano et de composition. Rapidement,
ses œuvres font le tour de l’Italie (Venise, Rome, Milan, Naples...).
Une célébrité à 21 ans
À 21 ans, Rossini est une vedette, ses airs sont sifflés partout dans
la rue. Il se marie avec sa plus grande interprète, la cantatrice
Isabel Colbran. Recevant un accueil triomphal à Paris, il y prend
la direction du Théâtre Italien en ayant pu imposer des conditions
financières intéressantes. Décrit comme paresseux, il est capable
d’écrire deux à trois opéras par an mais recycle volontiers la matière
musicale d’œuvres qu’il a composées précédemment. Il écrit Le
Barbier de Séville en 14 jours seulement, d’après un livret adapté
d’une comédie française de Beaumarchais ; c’est un triomphe,
l’œuvre devient emblématique de l’Opéra-bouffe. Il y laisse son
empreinte caractérisée par un rythme effréné, une attention
constante au crescendo et au bel canto et une importance donnée
à la musique plutôt qu’au texte. Il compose par ailleurs Guillaume
Tell, L’Italienne à Alger et Otello. C’est en 1817 qu’il compose La
Cenerentola, dernier opéra-bouffe destiné au public italien.
De la musique et du bon vin
Rossini n’a que 37 ans lorsqu’il décide de mettre un terme à sa
carrière. Pendant près de quarante ans, il ne composera plus que
quelques œuvres sacrées et préfèrera s’adonner à ses autres
passions, la gastronomie fine et les bons vins. Rossini meurt en
1868 des suites d’une pneumonie. Il partira couvert de succès,
ses œuvres étant considérées comme les derniers et les meilleurs
opéras-bouffes italiens, dont la musique est empreinte de bonne
humeur et de vivacité.
Le bel canto
Tout juste sorti de ses récents succès de L’Italienne à Alger ou
du Barbier de Séville, Rossini en reprend avec brio les ressorts
dans La Cenerentola : rythme endiablé, mélodies énergiques et
surtout usage du bel canto avec des mélodies brillantes que les
chanteurs interprètent avec expressivité. Le bel canto (le « beau
chant ») désigne une technique italienne de chant fondée sur
la recherche du timbre et de la virtuosité. C’est, du XVIIe siècle
jusqu’au milieu du XIXe, la technique préférée pour chanter
en Europe. Rossini est le dernier compositeur à utiliser le bel
canto. Le principe consiste à sublimer la réalité concrète par les
raffinements et ornements d’un chant virtuose. Le chant est donc
premier, c’est-à-dire qu’à cette époque l’orchestre est réduit au
rang d’accompagnateur et les tentatives de « mise en scène » ne
sont faites que pour mettre en valeur la voix. L’exemple le plus
saisissant de cette primauté de la beauté vocale est le recours
aux castrats qui, jusqu’au XIXe siècle, se voient confier les rôles
de héros jeunes et amoureux. Les voix aigües sont privilégiées et
ne doivent pas chercher à imiter le langage parlé mais à créer
des images musicales. Par exemple, le compositeur traduira
le sentiment d’inquiétude par d’amples vocalises figurant les
vents en fureur et la mer déchaînée. Pour exprimer le désespoir,
le chanteur déroulera de longues phrases en demi-teintes,
prodiguant un son d’abord très doux puis progressivement enflé,
et de délicats ornements.
Le crescendo
Un autre des secrets de composition de Rossini réside dans
l’emploi qu’il fait du crescendo, c’est-à-dire la montée en
intensité d’un thème repris en boucle, soit par l’augmentation
progressive de la puissance d’un même groupe d’instruments,
soit par l’adjonction, elle aussi progressive, de nouvelles
sonorités au chœur de l’orchestre. Ce n’est pas lui qui a inventé
ce procédé mais il en est devenu l’un des maitres incontestés.
Omniprésent dans son œuvre, le crescendo est utilisé dans 18
de ses 25 ouvertures, les plus belles illustrations figurant dans
les ouvertures de L’Italienne à Alger (1813), Le Turc en Italie
(1814), Torvaldo et Cristina (1815), La Cenerentola (1817), La Pie
voleuse (1817), Bianca et Falliero (1819) et Maometto II (1820).
Grâce au mouvement élancé qui en résulte, le crescendo parvient
à emporter littéralement ses auditeurs, mais aussi les musiciens
de l’orchestre, eux-mêmes saisis par la frénésie de sa musique.