N° 22 - novembre 2012 sommaire Plasmaphérèse : mise en place Nous avons le plaisir de partager avec vous la vie d’Hemotech depuis plus de 6 ans grâce notre lettre HOH en Bref, mais voila près de 25 ans que notre histoire est étroitement liée au traitement du sang. EP et Vascularites à ANCA Artériopathie périphérique Notre expérience passée dans le domaine de la transfusion et l’expertise acquise dans le domaine de l’insuffisance rénale et de la circulation extra corporelle nous ont amené depuis longtemps à nous intéresser à l’hémaphérèse thérapeutique, avec l’appui de fournisseurs précurseurs dans ces techniques, comme Asahi Kasei Medical. PUBLIS EN BREF édito HEMA.T Medical est née en 2006 de cet enthousiasme et de cet apport de connaissances. Elle propose aux spécialistes du domaine un ensemble de dispositifs médicaux : filtres, colonnes, moniteur d’hémaphérèse… nécessaires aux traitements par hémaphérèse thérapeutique. Un récent congrès Hemotech organisé sur le thème «Thérapies extra-corporelles : évolution et innovations», a fait le point sur leur contribution dans la prise en charge de pathologies très variées, confirmant l’intérêt des néphrologues pour ces thérapies. Vous trouverez ci-joint l’avis de néphrologues, traitant de l’expérience acquise lors de la mise en place d’une activité de plasmaphérèse au sein d’une unité d’hémodialyse, ou traitant d’applications cliniques touchant différentes pathologies. Geneviève Jourdin - Pharmacien Directeur mise en place d’une activité de plasmaphérése au sein d’une unité d’hémodialyse La plasmaphérèse est une technique utilisée depuis quelques décennies sur le CHU de Nancy, avec des indications néphrologiques de plus en plus larges, dans différentes situations néphrologique aiguës, en post-greffe sur le rejet humoral ou en cas de récidive de certaines néphropathies ou encore, probablement dans un futur proche, en prégreffe dans les situations à risque immunologique élevé. D’autres indications verront sûrement le jour au fil du temps. Historiquement cette technique était réalisée par le centre de transfusion sanguine. Il nous a semblé alors évident que nos patients devaient être gérés en totalité par nos soins, de la gestion de l’abord vasculaire, que nous assurions déjà, à la prescription et réalisation de la séance, et non plus seulement par le petit bout de la lorgnette. Le changement dans nos pratiques était justifié par différents points qui ne nous satisfaisaient plus. L’éloignement géographique entre le service de néphrologie et le centre de traitement, nécessitant une logistique compliquée de transport. Des patients cathétérisés sur leur abord vasculaire, intégralement géré par nos soins, étaient transportés (par VSL ou autre) jusqu’au site de traitement. Quid des mesures d’hygiène et des risques thrombotiques et hémorragiques liés à cet abord exposé ? Enfin, la difficulté d’accès et d’organisation pour réaliser les séances selon les recommandations, avec impossibilité de traitement les week-ends et jours fériés, ou les jours où il n’y avait pas de place, retardait le traitement, avec une perte de chance pour le patient. Les innovations technologiques ont aussi favorisé notre intérêt pour ce traitement, en passant de la centrifugation à la filtration, avec des possibilités d’échanges simples ou en double cascade, permettant encore une optimisation et une personnalisation du traitement au patient, selon les caractéristiques de la pathologie, les aspects physiques et cliniques du patient et les paramètres biologiques. A vos agendas ! Retenez la date des 28 & 29 mars 2013 pour assister au prochain congrès organisé par Hemotech sur le thème «Prise en charge de la maladie rénale chronique : stratégie, évaluation et résultats » www.hemotech.fr ou www.congres-hemotech.com La PLASAUTO Σ™, petit joyau de technologie et d’utilisation ultra simple, a donc mis les Patient pieds dans le service de dialyse dès Octobre Echange Plasmatique 2011. Une formation assidue a été réalisée par les membres de l’équipe Hema.T Medical, de la présentation technique de la machine à l’atelier, à vide, à l’équipe médicale et para médicale, et 3 mois après, en salle, avec l’utilisaEquipe médicale Echange Simple Indication tion et l’application pratique chez nos premiers Equipe Double Efficacité du paramédicale Cascade traitement patients à partir du mois de Janvier 2012. Prescription Parallèlement, il a fallu que l’équipe médicale se forme sur les conditions de réalisation pratique, avec de nombreux points à résoudre : quel débit de sang, quel soluté de substitution et Anticoagulation quel volume de substitution, comment gérer Allergie l’anticoagulation, chez des patients fragiles, à Hypocalcémie risque, comme des transplantés rénaux récents, ou chez des patients venant de subir une > Gestion de la plasmaphérèse biopsie rénale (greffon ou rein natif), comment gérer l’hypocalcémie, les risques allergiques et ceux que l’on ne important, lié à la maladie ou à la réalisation proche d’une biopsie rénale. Nous continuons de nous évaluer et d’améliorer nos pratiques. connaissait pas encore ? La prudence et la concertation de toute l’équipe, avec appui biblio- Une fiche de séance pré-remplie a été élaborée de manière conjointe graphique, expérience des autres centres et grâce aussi aux réunions pour faciliter la prescription médicale, et la lecture des consignes de inter centres organisées par Hema.T Medical, nous ont permis de réalisation par l’équipe para-médicale. réaliser les séances en toute sécurité et confiance, pour le patient et C’était un challenge très excitant pour tout le monde et nous sommes le personnel et de forger progressivement notre propre expérience, fiers de mener à bien cette nouvelle activité. Après 6 mois de foncde développer et d’appliquer nos propres solutions et d’avoir notre tionnement, nous avons déjà réalisé une centaine de séances. Nous fonctionnement, intégré à notre service d’hémodialyse. Par exemple, remercions vivement l’investissement et la disponibilité sans faille sur le plan organisationnel, une infirmière est dédiée à la réalisation de l’équipe d’Hema.T Medical. J’en profite aussi pour remercier le de la séance de plasmaphérèse. Sur le plan des solutions médicales, moteur de cette petite révolution, le Docteur Thanh Cao Huu. Le nous avons mis au point nos propres recommandations de prépara- champ des possibles est ouvert… tion du circuit avec du sérum physiologique hépariné et l’utilisation Dr Joëlle Cridlig - CHU Nancy Brabois de protamine en sortie de membrane en cas de risque hémorragique Echanges Plasmatiques (EP) et Vascularites à ANCA Depuis l’étude MEPEX (Jayne D, JASN 2007), il est admis que l’association d’EP au traitement immunosuppresseur conventionnel est formellement indiquée pour les formes rénales sévères des Vascularites à ANCA : Granulomat ose avec Polyangéite (ex-Wegener), Polyangéite Microscopique, ou formes limitées au rein. La sévérité est définie par la nécessité de dialyse (95 patients sur les 137 de l’étude), ou une créatininémie > 500 µmol/l. La mise en œuvre optimale de ce traitement dépend de plusieurs conditions : ■ 7 EP de 60 ml/kg doivent être réalisés en 14 jours, selon le protocole MEPEX. Il n’est pas démontré qu’il y ait un intérêt à ajuster le protocole selon l’évolution des titres d’ANCA. ■ La pose ou le maintien d’un cathéter central doit être limité aux nécessités de la dialyse, en raison du risque infectieux, majeur dans cette population (25 % de décès à 1 an, dont 2/3 d’origine infectieuse). L’abord vasculaire pour les EP chez les patients qui ne sont pas, ou ne sont plus dialysés, sera préférentiellement un abord veineux périphérique chaque fois que possible. ■ Le soluté de substitution doit être l’Albumine Humaine, et lorsque du PFC est indiqué (hémorragie ou risque hémorragique), la quantité doit être limitée à 1 litre en fin d’échange. En effet seule l’Albumine permet, avec la répétition des EP, la déplétion en facteurs du Complément qui a certainement un rôle dans l’efficacité thérapeutique. Le rôle du Complément dans les mécanismes des lésions a été démontré dans des modèles expérimentaux. Il est illustré par les tentatives actuelles de traitement avec des médicaments anti-complémentaires, par exemple l’Eculizumab. Il est aussi admis que les EP sont indiqués en cas d’hémorragie alvéolaire massive, ou qui ne cède pas rapidement avec les bolus de Solumédrol. Cette indication reste basée sur les résultats d’études ouvertes. C’est une indication à utiliser le PFC en fin d’échange. Dans le futur, des progrès sont attendus dans ce domaine : ■ L’extension des indications : il apparaît probable qu’un bénéfice des EP en termes de fonction rénale peut aussi être obtenu pour des niveaux de sévérité moins avancés. Une étude récente suggère un bénéfice pour une créatininémie initiale supérieure à 250 µmol/l (Szpirt W, NDT 2011). Cette hypothèse est en cours d’évaluation dans le cadre de l’étude randomisée Européenne PEXIVAS, qui doit inclure 500 patients présentant soit un DFG estimé < 50 ml/min, soit une hémorragie alvéolaire. ■ L’optimisation des protocoles d’immunosuppression associés aux EP : la nécessité de fortes doses prolongées de corticoïdes sera aussi testée dans le cadre de PEXIVAS; le Cyclophosphamide pourrait être remplacé par le Rituximab, mais l’association aux EP pose un problème particulier : l’élimination de l’anticorps monoclonal par un EP dans les jours qui suivent (jusqu’à 50 % de la dose administrée). Pr Jacques Pourrat - CHU Rangueil, Toulouse RHEOPHERESIS in the treatment of PERIPHERAL ARTERY DISEASE Dr Alfonso Ramunni Coordinator of Apheresis, Study Group Italian Society of Nephrology Nephrology, University of Bari, Italy Traitement des maladies artérielles périphériques par Rhéophérèse Résumé français réalisé par Hema.T Medical Les PAD ou artériopathies périphériques résultent d’un rétrécissement de certaines artères, notamment au niveau des membres inférieurs, par dépôts de plaques d’athérome, pouvant aller jusqu’à l’apparition d’ulcères graves, gangrène et amputation. La prévalence des artériopathies périphériques est élevée et augmente significativement avec l’âge. D’après les données 2004 de l’American Heart Association, elle s’étend de 1,9 % pour des hommes dans la tranche d’âge 50-59 ans à 15 % pour les femmes de plus de 70 ans. Il est montré que cette prévalence est multipliée en IRC en fonction du niveau de filtration glomérulaire : Artère normale Artère avec artériopathie périphérique Plaque d’athérome Incidence par 1000 personnes-an eGFR 90 4,7 % eGFR 60 à 89 4,9 % eGFR 15 à 59 8,6 % ARIC Study, Wattanatik K, JASN, 200 Ces résultats sont confirmés par la méta-analyse ci-dessous : Am J Kidney Dis. 2012 Oct;60(4):641-54. Peripheral Artery Disease and CKD: A Focus on Peripheral Artery Disease as a Critical Component of CKD Care. Table 1. Prevalence of PAD in Patients With Kidney Disease Study USRDS 17 DOPPS 18 HEMO 19 Fishbane et al 20 Testa & Ottavioli21 Population Prevalence Diagnostic Criteria 45.9% 25.3% 23% 35% 33% Claims data Clinical a Clinical a ABI 0.9 ABI 0.9 Patients on Dialysis 35,438 incident dialysis patients 29,873 prevalent hemodialysis patients 936 prevalent hemodialysis patients 132 prevalent hemodialysis patients 226 prevalent hemodialysis patients Patients With CKD Stage > 3 NHANES 14 CRIC 22 2 m 211 participants with CCr 60 mL/min/1.73 2 3,199 participants with eGFR 60 mL/min/1.73 m 24% 7.4% ABI 0.9 Self reported Table 2—ORs (95% CI) for prevalent foot complications and associated risk factors comparing history of PAD dialysis-treated patients and no dialysis patients CHS23 ARIC 24 648 participants with kidney diseaseb 376 participants with eGFR 60 mL/min/1.73m2 CHS25 648 participants with kidney diseaseb n No dialysis* 187 15.9% AB0.9 I 12% ABI 0.9 8.6 incident cases/1,000 Clinicala and ABI person-yearsOR (95% CI)0.9P value Dialysis* 10.7 incident cases/1,000 Incident intermittent person-years claudication 139 Abbreviations: ABI, ankle-brachial index; ARIC, Atherosclerotic Risk in Communities; CHS, Cardiovascular Health Study; CKD, Lower limb complications chronic kidney disease; CCr, creatinine clearance; CRIC, Chronic Renal Insufficiency Cohort; DOPPS, Dialysis Outcomes and Practice Prevalent foot ulcerglomerular (%) filtration rate; HEMO, 4.8 21 NHANES, 5.1National (2.3–11) 0.0001 Patterns Study; eGFR, estimated Hemodialysis Study; Health and Nutrition Examination PAD, peripheral Data System. 15 6.4 2.6 (1.2–5.6) 0.008 PriorSurvey; amputation (%)artery disease; USRDS, US Renal a Includes history of known PAD, amputation, revascularization, claudication, signs of critical limb ischemia, or reduced pulses on PAD (%) 43 2.4 ( 1.5–3.8) 0.0001 64 examination. b Serum creatinine level 1.5 mg/dL in men and 1.3 mg/dL in women. Elle met en évidence une prévalence de PAD entre 23 et 45,9 % chez les patients dialysés. (Table 1) Une étude rapportée dans Diabetes Care 33 :1811-1816, 2010 indique clairement que le traitement par dialyse est un facteur de risque indépendant de l’ulcère du pied ; la prévalence d’ulcère du pied et d’artériopathie périphérique étant très significativement différente du groupe non dialysé : p = 0,0001. (Table 2) Le traitement traditionnel associe soin de l’ulcère, médicaments et revascularisation. Mais la mortalité reste importante, jusqu’à 25 %, de même que les amputations : 30 %. N.Weiss. Atherosclerosis supplements 10 (2009) 62-69 Selon la loi de Hagen-Poiseuille, une élévation de la viscosité du sang augmente sa résistance à l’écoulement et réduit le flux sanguin, particulièrement au niveau microcirculatoire. La viscosité sanguine dépend principalement de la concentration plasmatique en fibrinogène, a 2-macroglobuline et lipoprotéines. Tout système permettant de réduire la concentration de ces substances pourrait donc être une stratégie thérapeutique utile pour corriger les perturbations de microcirculation. P Schuff-Werner, et al, Jpn J Apheresis 16:25-30,1997 Kirschkamp T, et al, Ther Apher Dial, 2008 Cet objectif peut être atteint par plasmaphérèse en réalisant une double filtration avec le filtre Rheofilter ER4000 fabriqué par Asahi Kasei Medical. Des études pilotes sur le traitement du pied diabétique [1] et sur des ischémies graves des membres inférieurs [2] ont montré la faisabilité et l’efficacité de cette technique. [1] R Klingel, Therapeutic Apheresis and Dialysis 2003 7 (4):444-455 [2] R Klingel, Therapeutic Apheresis and Dialysis 2005 9 (6):4734-481 Dans notre hôpital, nous avons de même appliqué ce traitement à 2 patients souffrant d’artériopathie périphérique avec d’excellents résultats cliniques, l’hôpital C. Poma de Mantova a eu la même expérience sur 2 autres patients. Ramunni A, et al, Clin Res Cardiol Suppl 2012, vol 7(1) :41-4; Ramunni A et al, Atherosclerosis, in press. Schéma de traitement utilisé 3 rhéophérèses/semaine pendant 2 semaines, traitement d’1 masse plasmatique 2 rhéophérèses/semaine les deux semaines suivantes, traitement d’1 masse plasmatique 1 rhéophérèse/semaine le mois suivant, traitement d’1 masse plasmatique 1 rhéophérèse/semaine le 3e et 4e mois, traitement d’1,5 masse plasmatique Total séances : 22 en 4 mois Des études plus poussées devraient être entreprises et les expériences partagées pour confirmer les bénéfices de cette technique et définir des schémas thérapeutiques peut-être mieux adaptés. 1- Les leçons de l’épidémie de syndrome hémolytique et urémique à Escherichia coli O104:H4 en Allemagne. Validation of treatment strategies for enterohaemorrhagic Escherichia coli O104:H4 induced haemolytic uraemic syndrome : a case-control study. Jan Menne et al. BMJ 2012 Jul 19;345:e4565. Dans une étude multicentrique (23 hôpitaux) rétrospective cascontrôle publiée dans le BMJ en 2012, un groupe de cliniciens impliqués dans la prise en charge de patients affectés d’un syndrome hémolytique et urémique dû à l’Escherichia coli O104:H4 a essayé d’apprendre le plus possible de cette épidémie. Dans les trois premières semaines de l’épidémie, un groupe comprenant des néphrologues, gastroentérologues et neurologues de Hannovre, Lübeck et Kiel ont collecté prospectivement les données dans une base, puis d’autres centres se sont joints avec une collection rétrospective des données. Jusque-là, les recommandations pour le traitement des patients avec SHU étaient basées sur de petites séries de cas et incluaient plasmaphérèses avec ou sans corticoïdes. Les antibiotiques étaient réputés nocifs et suspendus ; dans quelques cas, l’eculizumab semblait utile. Cette étude change un peu la donne : il n’est pas trouvé de bénéfice aux plasmaphérèses ou aux corticoïdes chez les patients affectés d’un SHU à E Coli O104:H4, et un tel traitement prolongé semble faire plus de mal que de bien. Pas de bénéfice trouvé à l’Eculizumab. Ce qui est nouveau, c’est qu’un traitement antibiotique agressif n’était pas nocif et semblait même bénéfique. En particulier, Meropenem et Ciprofloxacine étaient administrés par voie intraveineuse à des doses adaptées à la filtration glomérulaire ; Rifaximin 600 mg par jour était donné par voie orale aux patients en unités de soins intensifs. Avec antibiotiques, la durée de l’excrétion dans les selles de l’E Coli était significativement raccourcie de 22,6 à 14,8 jours (p<0.01) ; l’incidence des convulsions était significativement plus faible dans le groupe avec antibiotiques ; le taux de décès était inférieur (0 % versus 5,2 %, p=0.029). Les auteurs soulignent l’intérêt de l’utilisation des antibiotiques. Une étude contrôlée serait bien sûr utile pour le confirmer. 2- Un même rein greffé deux fois en 15 jours… Resolution of recurrent focal segmental glomerulosclerosis after transplantation. Gallon L, Leventhal J, Skaro A, Kanwar Y, Alvarado A. New England Journal of Medicine april 26, 2012. 366;17:1648-9. Le risque majeur de la hyalinose segmentaire et focale primitive (HSFP) après transplantation rénale est la récidive de la maladie sur le greffon. Il est estimé à 30 % à la première transplantation. Les plasmaphérèses sont souvent utilisées en adjonction au traitement immunosuppresseur avec des résultats cliniques variables et aucun essai randomisé. L’histoire rapportée dans le New England Journal of Medicine est celle d’un homme de 27 ans en dialyse pour une HSFP, greffé avec le rein de sa sœur, donneuse vivante de 24 ans. Malgré 2 séances de plasmaphérèse avant et 5 séances après la greffe, il présente une récidive de la maladie prouvée histologiquement à J6 de la greffe. Le greffon est retiré à J14 devant l’aggravation clinico-biologique. Après consultation du comité d’éthique de l’hôpital et obtention du consentement du donneur et du receveur, il est décidé de réimplanter le greffon à un patient de 66 ans sur liste d’attente, avec son consentement éclairé. L’amélioration de la filtration glomérulaire et la diminution de la protéinurie sont immédiates et la biopsie de greffon à J8 montre que celui-ci est maintenant indemne de lésions. Huit mois plus tard, le second greffé garde une fonction du greffon normale et une protéinurie minime. Ce cas clinique est un argument de plus pour la théorie d’un facteur circulant causant la HSFP et suggère qu’il est possible de réparer les dommages causés par une glomérulosclérose segmentaire et focale à un rein après qu’il soit réimplanté dans un organisme présentant un «système circulatoire sain». 3- Echanges plasmatiques pour les vascularites associées aux ANCA sévères ? Plasma exchange for renal vasculitis and idiopathic rapidly progressive glomerulonephritis : a meta analysis. Michael Walsh. American Journal of Kidney Disease 2011 ; 57(4):566-574. Les vascularites associées aux ANCA, comprenant les granulomatoses de Wegener, les polyangéites microscopiques et les vascula- rites limitées au rein, peuvent entraîner des glomérulonéphrites rapidement progressives et l’addition des plasmaphérèses au traitement immunosuppresseur standard reste controversée quant à son intérêt sur la fonction rénale et sur la mortalité. Walsh et coll ont réalisé une méta-analyse des études randomisées contrôlées sur le sujet : 9 études ont été identifiées portant sur un total de 387 patients, montrant que : 1) il n’y a pas de preuve que les échanges plasmatiques diminuent la mortalité (RR 1.01), 2) il y a une diminution du critère combiné décès ou insuffisance rénale chronique (RR 0.8) , 3) les plasmaphérèses diminuent le risque d’insuffisance rénale (RR 0.64). Malheureusement, le nombre de patients compris dans cette métaanalyse est insuffisant pour conclure définitivement au bénéfice des échanges plasmatiques et rares sont les études documentées au plan histologique. La question demeure donc de savoir s’il faut adjoindre les échanges plasmatiques au traitement des vascularites associées aux ANCA sévères. Il va maintenant nous falloir attendre les résultats de l’essai PLEXIVAS conduit par le groupe EUVAS et le Vasculitis Clinical Research Consortium (500 patients, 84 mois, 1er patient inclus au 8 juin 2010), en espérant que, lorsque l’essai sera fini, la méta-analyse pourra être répétée pour donner une réponse sur l’efficacité des échanges plasmatiques chez les patients avec maladie rénale sévère associée aux ANCA et peut-être permettre une analyse du pronostic en fonction de l’histologie initiale, et du niveau de filtration glomérulaire de départ. Patience… c’est juste pour la prochaine décennie… Note au lecteur Pour cette bibliographie, un peu raccourcie dans ce numéro, quelques nouvelles de sujets polémiques, à partir d’études contradictoires que la communauté néphrologique aime bien.. 1-Hémodiafiltration : le débat continue ! a.Grooteman MPC, van den Dorpel MA, Bots ML, et al. Effect of Online Hemodiafiltration on All-Cause Mortality and Cardiovascular Outcomes. Journal of the American Society of Nephrology 2012; 23: 1087–96. b. Kuhlmann MK. On-Line Hemodiafiltration: Not a SelfFulfilling Prophecy. Journal of the American Society of Nephrology 2012; 23: 974–5. c. Locatelli F, Canaud B. Dialysis adequacy today: a European perspective. Nephrology Dialysis Transplantation 2012; 27: 3043–8. d.Locatelli F, Altieri P, Andrulli S, et al. Predictors of haemoglobin levels and resistance to erythropoiesis-stimulating agents in patients treated with lowflux haemodialysis, haemofiltration and haemodiafiltration: results of a multicentre randomized and controlled trial. Nephrology Dialysis Transplantation 2012. doi:10.1093/ndt/gfs117. Dans le numéro de Juin du JASN, un essai randomisé HDF versus low-flux HD, 3 ans de suivi, ne montre pas de différence en terme de mortalité ou d’événements cardio-vasculaires. Il semblerait qu’il existe un effet bénéfique lorsque de grands volumes sont utilisés. 4,5 et 6- Indications des plasmaphérèses en 2012 De nombreuses pathologies peuvent aujourd’hui relever de plasmaphérèses, qu’il s’agisse de pathologies rénales, à auto-anticorps (glomérulonéphrites à anticorps anti membrane basale glomérulaire, glomérulonéphrites à ANCA, purpura thrombotique thrombocytopénique, syndrome catastrophique des anti-phospholipides….), ou liées à des allo-anticorps (rejet humoral, désensibilisation anticorps anti-HLA, transplantation ABO incompatible…), à des immuns complexes (cryoglobulinémie, lupus érythémateux systémique…), ou des désordres neurologiques ou hépatiques. Trois publications en 2012 font une précieuse synthèse de ces indications et donnent des recommandations. Il s’agit de : The role of plasmapheresis in critical illness Nguyen TC, Kiss JE, Goldman JR, Carcillo JA.Crit Care Clin. 2012 Jul;28(3):453-68, vii. Therapeutic apheresis for renal disorders Amber P. Sanchez, David M. Ward. Seminars in dialysis vol 25, N°2 (march-april) 2012, pp 119-131. Plasmapheresis in immunologic renal disease Pusey, C.D., Levy, J.B. Blood Purification 2012;33:190-198. A lire et à relire…. Dr Catherine LASSEUR - AURAD Aquitaine Dans un éditorial associé, M. Kulhman rappelle les bénéfices attendus en termes d’épuration des toxines urémiques. La question posée est celle d’un consensus autour d’une prescription adéquate de l’HDF, en volume mais aussi en temps de dialyse, pour les patients chez qui le débit sang espéré n’est pas atteint ou chez les patients de grand volume. Dans NDT, un éditorial-review de F. Locatelli et B. Canaud sur la dialyse adéquate aujourd’hui, revient sur ces questions. La dialyse adéquate en hémodialyse serait plutôt haute perméabilité, temps de dialyse minimum 4h30 et taux d’UF horaire inférieur à 10 ml/h/kg. Pour l’HDF les conclusions sont proches de l’éditorial de Kulhman quant à l’importance du volume de substitution. HDF et résistance à l’EPO : confirmera-t-on les effets bénéfiques attendus ? Non, dans l’essai multicentrique italien publié par Locatelli. 27 centres, randomisation HD, HF (online prédilution ou HDF). La variable la plus importante est l’effet centre… à méditer. 2 - Chélateurs des phosphates en IRC a. Block GA, Wheeler DC, Persky MS, et al. Effects of Phosphate Binders in Moderate CKD. Journal of the American Society of Nephrology 2012; 23: 1407–15. b. Drueke TB, Massy ZA. Phosphate Binders in CKD: Bad News or Good News? Journal of the American Society of Nephrology 2012; 23: 1277–80. La sécurité et l’efficacité des chélateurs chez le patient IRC non dialysé seraient finalement peu connues selon G. Block. Il publie un essai randomisé dans le JASN, 148 patients, DFG de 20 à 45 ml/min, acétate de calcium, sevelamer, carbonate de lanthane contre placebo. La phosphorémie et l’excrétion de phosphate diminuent, pourtant les calcifications artérielles progressent et la conclusion est que sécurité et efficacité demeurent incertaines ! T. Drüeke et Z. Massy ne sont pas tout à fait d’accord dans un éditorial associé. Ils apportent une critique méthodologique de l’essai et rappellent les autres avantages attendus pour certains chélateurs sur le long terme. Bref, le débat continue. 3 - Le coût de la dialyse et le rapport coût/bénéfice Vanholder R, Davenport A, Hannedouche T, et al. Reimbursement of Dialysis: A Comparison of Seven Countries. Journal of the American Society of Nephrology 2012; 23: 1291–8. Dans le JASN, R. Vanholder et col. comparent le coût de la dialyse dans 7 pays, USA, Canada et 5 pays européens. Selon le type de traitement, HD en centre ou hors-centre ou DP, les différences varient selon un rapport de 3. L’étude pointe les grandes différences qui existent entre pays selon les mesures incitatives pour le hors-centre ou pour une meilleure qualité supposée. Il existe aussi des différences selon les pays en fonction des traitements et/ou du coût médecin pris ou non en charge dans le forfait. Bref à lire pour éclairer le débat et nos pratiques, puisque comme le rappelle la conclusion, il n’est pas démontré si ces différences entre coûts de traitement sont associées à une amélioration de la qualité des soins. Turin TC, Tonelli M, Manns BJ, Ravani P, Ahmed SB, Hemmelgarn BR. Chronic kidney disease and life expectancy. Nephrology Dialysis Transplantation 2012; 27: 3182–6. Avoir une IRC, c’est probablement avoir une espérance de vie plus courte. Curieusement, il existe des données ou plutôt des prévisions pour les patients atteints d’HTA ou de diabète, chez le patient dialysé mais pas chez le patient IRC à différents stades. Une étude canadienne dans une population de 30 à 85 ans à différents degrés d’IRC donne une évaluation de la réduction de l’espérance de vie. Même en IRC, elle est plus importante chez la femme. Pour un âge de 40 ans, l’espérance de vie est de 30 et 34 ans chez l’homme et la femme avec un DFG > 60 ml/min, 24 et 28 ans pour un DFG entre 45 et 59 ml/min. Elle n’est plus que de 9 à 10 ans, sans différence selon le sexe, pour les patients avec un DFG inférieur à 30 ml/min. 5 - Hyperparathyroïdie : quel traitement à quel coût ? a. Komaba H, Moriwaki K, Goto S, et al. Cost-Effectiveness of Cinacalcet Hydrochloride for Hemodialysis Patients With Severe Secondary Hyperparathyroidism in Japan. Am J Kidney Dis 2012. doi:10.1053/j. ajkd.2011.12.034. b. Cozzolino M, Brancaccio D, Cannella G, et al. VDRA therapy is associated with improved survival in dialysis patients with serum intact PTH. Nephrology Dialysis Transplantation 2012. doi:10.1093/ndt/gfs108. Une étude médico-économique japonaise (sous presse dans l‘AJKD) compare Cinacalcet et parathryoïdectomie, dans une cohorte de patients dialysés avec un taux de PTH > 500 pg/ml. Le modèle de Markov utilisé est sûrement compréhensible par les initiés, c’est une sorte de virtualisation du devenir du patient à partir des études déjà publiées. Une cohorte «hypothétique» de 1000 patients est constituée et suivie jusqu’au décès. Le modèle prend en compte les complications retrouvées dans les récentes études dans les 2 bras. Le «surcoût» par année-traitement patient est très important. Un éditorial associé reprend les différentes études qui ont montré les avantages spécifiques du traitement sur la survie du patient et/ou les complications cardiovasculaires. L’ensemble pose la question, dans différents systèmes de soins, de la recherche d’une décision thérapeutique adéquate avec les limites financières attendues des systèmes de santé. Non pas «a contrario» mais sur le même sujet, une étude multicentrique de survie, italienne, inclut 2453 patients dialysés, traités ou non par Calcitriol ou Paricalcitol. Le risque de mortalité le plus élevé est retrouvé dans le groupe PTH < 150 pg/ml. Néanmoins, même dans ce groupe, la mortalité la plus faible est retrouvée chez les patients traités par les dérivés actifs de la vitamine D. 6. Comparaison HD versus DP a. Yeates K, Zhu N, Vonesh E, Trpeski L, Blake P, Fenton S. Hemodialysis and peritoneal dialysis are associated with similar outcomes for endstage renal disease treatment in Canada. Nephrology Dialysis Transplantation 2012; 27: 3568–75. b. Noordzij M, Jager KJ. Survival comparisons between haemodialysis and peritoneal dialysis. Nephrology Dialysis Transplantation 2012; 27: 3385–7. Une nouvelle étude qui apportera de l’eau au moulin de la controverse DP vs HD. L’analyse du registre canadien pour la période 1991-2007 montre que sur la période la plus récente 20042007, il n’existe plus de différence de mortalité entre les 2 techniques, contrairement aux études «historiques». Les 2 premières années, la survie est meilleure en DP. Certains sousgroupes semblent plus bénéficier de telles ou telles techniques, comme HD pour les femmes diabétiques de plus de 65 ans. Selon les auteurs, cette étude permet de mieux éclairer le choix du patient et de l’équipe. Un éditorial associé insiste sur les biais méthodologiques qui existent dans les différentes études publiées… souvent clés de la polémique (quelles modalités, quelles typologies de patients, quel abord vasculaire ?). 7. La meilleure pour la fin : fréquence des visites Slinin Y, Guo H, Li S, et al. Association of Provider-Patient Visit Frequency and Patient Outcomes on Hemodialysis. Journal of the American Society of Nephrology 2012; 23: 1560–7. Des études historiques, dont DOPPS en 2002 mais aussi l’analyse USRDS 2010, avaient montré l’influence du temps-médecins ou en tout cas du temps-visite (selon les pratiques, selon les pays il peut s’agir d’une visite infirmière structurée) sur le devenir du patient et la mortalité. Il avait donc été proposé en 2004 aux USA de rembourser non plus un forfait de suivi mais à la visite-patient. Dans le JASN est publiée une étude qui analyse le devenir des 131 000 patients qui ont commencé l’hémodialyse entre 2003 et 2006. 60 % reçoivent 4 ou plus visites par mois en dialyse. Les variables entrées dans le modèle de Cox sont aussi bien sociodémographiques que médicales ou relatives à la qualité des soins. Si le nombre de visites a augmenté de 1,9 à 3,6 par mois, il n’y a pas de différence significative sur la mortalité entre plus de 4 visites par mois ou moins. Le nombre de première hospitalisation et certains critères de qualité (albumine, quantité de dialyse, phosphatémie) sont positivement influencés par le nombre de visites. Dr Philippe CHAUVEAU 19, avenue de l’Europe - BP 62 270 - 31 522 Ramonville Saint-Agne CEDEX Hemotech Tél. 05 61 75 27 27 - Fax 05 61 75 00 43 - [email protected] - www.hemotech.fr Certification ISO 9001 :2 008 - Imprimé sur papier recyclé Cyclus 4 - Insuffisance rénale et espérance de vie