Cette posture conduit Claude Grignon à se démarquer d’un
certain nombre de recherches en sociologie et en histoire,
dont les auteurs, selon lui, refusent l’autonomie symbolique
aux cultures dominées (voir son entretien dans Collovald,
Pudal & Sawicki 1991). Les travaux de Pierre Bourdieu et
ceux, beaucoup plus anciens, de Maurice Halbwachs,
participent, dans cette perspective, d’une sociologie
légitimiste des goûts. Parmi les points de désaccord avec le
sociologue Pierre Bourdieu, nous retiendrons celui portant
sur la notion de « style de vie ». Pour Claude Grignon,
distinguer comme le fait Pierre Bourdieu (1979), le « style
de vie pour soi » des classes cultivées du « style de vie en
soi » des classes dominantes revient à une « certitude
dominocentrique » qui conduit à réserver la capacité d’avoir
du style aux indigènes de la culture légitime. Grignon et
Passeron font une critique analogue de la thèse de Maurice
Halbwachs La classe ouvrière et les niveaux de vie (1912),
en réfutant notamment la double correspondance établie par
Halbwachs entre les classes populaires, les besoins
élémentaires, les consommations et les goûts les plus
communs d’une part, et les classes dominantes, les besoins
les moins matériels, les biens les plus rares et les goûts les
plus épurés d’autre part. Selon Grignon, Halbwachs « met
au jour un présupposé implicite de la sociologie légitimiste
des goûts : l’ordre symbolique (hiérarchie des goûts) ne