Des chercheurs albertains explorent le lien entre les troubles

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Nouvelles-CATIE
Des bulletins de nouvelles concis en matière de VIH et d’hépatite C de CATIE.
Des chercheurs albertains explorent le lien entre les troubles
neurologiques et la survie
22 septembre 2010
Le cerveau est entouré d’une membrane qui porte le nom de barrière hémato-encéphalique (ou barrière sangcerveau dans la langue courante). Pour contourner cette barrière, le VIH infecte les cellules du système immunitaire
et s’y cache. Lorsque ces cellules infectées entrent dans le cerveau, elles crachent de nouvelles copies de VIH, des
protéines virales et des messagers chimiques qui causent le dysfonctionnement des cellules cérébrales et, parfois,
leur mort. Ainsi, bien que l’infection au VIH soit couramment décrite comme une maladie du système immunitaire, la
complexité et l’ampleur de ce dernier sont telles que l’infection finit par nuire à de nombreux organes et appareils du
corps, y compris le système nerveux.
Dès les premiers jours de l’épidémie du sida, les médecins reconnaissaient que le VIH pouvait causer une gamme de
troubles neurologiques, dont le plus inquiétant était peut-être la démence liée au VIH.
De nos jours, grâce à la grande accessibilité du traitement anti-VIH (couramment appelé trithérapie ou multithérapie),
la démence liée au VIH est beaucoup moins courante qu’elle ne l’était avant l’arrivée de la trithérapie. Toutefois,
puisque la démence n’est qu’un seul des nombreuses complications neurologiques que peut causer l’infection au
VIH, des chercheurs albertains se sont intéressés à étudier l’état de ces complications à l’époque actuelle. Les
résultats de leur grande étude portent à croire que, même si la démence liée au VIH s’observe beaucoup moins
fréquemment en raison de la trithérapie, d’autres problèmes neurologiques semblent toucher une proportion
substantielle des personnes vivant avec le VIH (PVVIH). De plus, certains troubles neurologiques observés de nos
jours semblent compromettre la survie des PVVIH touchées.
Détails de l’étude
Dans le cadre d’une étude menée à la Southern Alberta Clinic de Calgary, des chercheurs ont suivi la santé des
participants entre 1998 et 2009. Ils s’intéressaient particulièrement à la présence de troubles neurologiques chez les
PVVIH. L’équipe a comparé les caractéristiques de 404 PVVIH atteintes d’un trouble neurologique à celles de 1 247
autres PVVIH ne souffrant d’aucun trouble neurologique. Les chercheurs ont recruté pour cette étude un total de 1
651 personnes séropositives dont le profil moyen était le suivant au début :
20 % de femmes, 80 % d’hommes
âge – 33 ans
principale distribution ethnoraciale : 70 % de Blancs, 10 % d’Autochtones, 10 % de Noirs
50 % des participants étaient gais ou bisexuels
23 % des participants s’injectaient de la drogue
24 % étaient co-infectées par le virus de l’hépatite C
Résultats
Au cours de l’étude, un trouble neurologique a été diagnostiqué chez 25 % des participants. Les personnes
diagnostiquées étaient plus susceptibles d’avoir :
cherché à se faire soigner lors d’un stade assez avancé de l’infection au VIH, car leur compte de CD4 était
généralement plus faible (111 cellules) que celui des personnes ne présentant aucun trouble neurologique (208
cellules). De plus, on ne s’étonnera pas d’apprendre que les personnes ayant un faible compte de CD4+ et un
trouble neurologique étaient susceptibles d’afficher un taux plus élevé de maladies liées au sida;
une charge virale relativement plus élevée (25 000 copies/ml) que celle des personnes n’ayant pas de trouble
neurologique (15 000 copies/ml).
Les facteurs suivants n’ont pas eu d’incidence sur l’apparition d’un trouble neurologique :
âge
sexe
consommation de drogues ou d’alcool
co-infection par le virus de l’hépatite C
L’accent sur les diagnostics neurologiques
Au moment du diagnostic du trouble neurologique, les participants vivaient avec le VIH depuis six ans en moyenne.
Au cours de la période à l’étude, 53 troubles neurologiques ont été détectés, les plus courants étant les suivants :
neuropathie périphérique
troubles neurocognitifs liés au VIH (HAND = HIV/AIDS-related neurologic disorders , terme englobant à la fois
la démence et d’autres atteintes neurocognitives légères)
crises (de nature épileptique)
maux de tête très graves
infections cérébrales
difficulté à contrôler et à coordonner ses muscles et ses mouvements
faiblesse musculaire
Résumé des résultats clés :
Les personnes atteintes du sida étaient de deux à trois fois plus susceptibles de faire l’objet d’un diagnostic de
trouble neurologique, que les personnes vivant avec le VIH mais non atteintes du sida.
Chez environ 50 % des personnes souffrant d’un trouble neurologique, on a diagnostiqué au moins un autre
trouble neurologique.
Tendances au fil du temps
Le nombre de diagnostics de troubles neurologiques a diminué au fil du temps. Entre 1998 et 1999, 86 diagnostics
avaient été posés. Entre 2006 et 2007, cependant, on n’a diagnostiqué que 65 nouveaux cas de troubles
neurologiques. Il reste que le nombre de personnes séropositives souffrant de ce genre de problème a augmenté en
raison du nombre considérable, quoique décroissant, de diagnostics posés chaque année. Le nombre de diagnostics
a atteint un niveau stable en 2004.
Qui est le plus à risque?
Les chercheurs ont employé le terme « late presenters » pour décrire les personnes les plus à risque d’être
atteintes d’un trouble neurologique. Il s’agit de personnes séropositives qui, pour une raison ou une autre, se font
soigner lors d’un stade relativement avancé de l’infection au VIH. Dans le cadre de cette étude, le compte de CD4+
de ces personnes avait chuté sous la barre des 200 cellules avant qu’elles se fassent soigner. En moyenne, les
personnes soignées tardivement présentaient un trouble neurologique trois ans après le diagnostic de séropositivité.
Problèmes neurocognitifs
Les chercheurs ont également constaté que les personnes dont la charge virale se situait à plus de 10 000 copies/ml
couraient un risque considérablement plus élevé de présenter un trouble neurologique lié au VIH.
En guise de mise en perspective, les chercheurs ont souligné que les troubles neurologiques se déclaraient dans
cette étude à un rythme que l’on s’attendrait à voir chez des personnes séronégatives âgées d’une vingtaine
d’années de plus, c’est-à-dire des personnes de 55 à 60 ans. Ce résultat soutient une hypothèse qui semble devenir
de plus en plus courante, à savoir que l’infection au VIH semble provoquer une accélération des organes et appareils
du corps, particulièrement le système cardiovasculaire et le cerveau.
La bonne nouvelle est que les taux de troubles neurocognitifs ont diminué lors des cinq dernières années de l’étude,
ce qui porte à croire que l’efficacité accrue de la trithérapie a contribué à réduire l’incidence de cette complication
inquiétante.
Causes de décès
Cent soixante et onze (171) personnes sont mortes au cours de l’étude. Le risque de décès était considérablement
plus élevé chez les personnes atteintes d’un trouble neurologique. Les causes de décès ont été réparties en trois
catégories courantes :
décès liés au sida – 79 personnes
décès non liés au sida – 81 personnes
causes inconnues – 11 personnes
Le fait de vivre avec un diagnostic de trouble neurocognitif lié au VIH augmentait de 300 % le risque subséquent de
décès.
Un diagnostic d’infection potentiellement mortelle du cerveau ou de la moëlle épinière augmentait le risque de décès
de 500 %.
Un diagnostic de neuropathie périphérique n’était pas associé à une augmentation du risque de décès.
Comparaison des taux de mortalité
Dans cette étude, les taux annuels de mortalité ont été exprimés comme suit par les chercheurs :
18 décès pour chaque tranche de 1 000 personnes séropositives atteintes d’un trouble neurologique
8 décès pour chaque tranche de 1 000 personnes séropositives n’ayant pas de trouble neurologique
En guise de comparaison, mentionnons que le taux annuel de mortalité chez les Canadiens séronégatifs d’âge et de
sexe comparables était le suivant :
2 décès pour chaque tranche de 1 000 personnes
Ces estimations sont préoccupantes et laissent croire que les personnes séropositives atteintes de troubles
neurologiques doivent être suivies plus étroitement et/ou subir d’autres interventions visant à prolonger leur survie.
Une étude importante
Les taux de troubles neurocognitifs liés au VIH et d’infections potentiellement mortelles du cerveau observés lors de
cette étude albertaine sont comparables aux résultats obtenus lors d’études d’envergure menées aux États-Unis et
dans l’Union européenne. Il est donc probable que les données albertaines et leurs implications sont solides.
D’autres études sont maintenant nécessaires pour évaluer l’impact des troubles neurologiques dans d’autres pays
afin de confirmer et d’étoffer les résultats rapportés par cette grande clinique canadienne.
Implications
Les résultats de cette étude albertaine soulignent la nécessité de commencer le suivi et le traitement de l’infection au
VIH longtemps avant que le compte de CD4 chute jusqu’à un niveau dangereux. Il faut agir ainsi parce que les
dommages infligés au système immunitaire par le VIH risquent d’avoir des conséquences inattendues et d’une
grande ampleur sur le cerveau et l’état de santé global des PVVIH et ce, longtemps après le début de la trithérapie.
—Sean R. Hosein
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