La pièce et la scénographie
Tout se passe sur une île. Un lieu entouré d’eau, isolé, d’où il est difficile de
s’échapper. Une rumeur annonçant un tremblement de terre circule parmi la population. Un
homme, Stocchi, enquête pour connaître la vérité. Il va interroger Maria, une jeune fille
étrange, qu’on dit un peu folle qui semble être l’auteur de cette rumeur. Tout les sépare : lui
est l’ordre, la rigueur, l’obéissance, la logique ; elle est la légèreté, le désordre, la liberté, le
rêve. Cette rencontre est d’abord un affrontement, une lutte et un combat où chacun utilise
ses armes - Stocchi passant tour à tour du rôle de flic à celui de curé - se transforme, contre
toute attente, en pas de deux … Stocchi, alors n’est plus qu’un homme avec toutes ses
fragilités.
François Boyer à travers cette pièce, offre aux metteurs en scène et comédiens une
œuvre d’une diversité rare. Avec Dieu aboie-t-il ? Le spectateur passe, en deux parties, de la
comédie, au fantastique, de la poésie, au drame … et ce, jusqu’à la tragédie. Il faut remonter
au théâtre de Shakespeare pour trouver un tel mélange des genres, une telle variété
dramaturgique. La première partie est légère, comique, absurde par moments, surprenante à
chaque réplique, très exigeante pour les comédiens. Ils devront la jouer un peu comme un
combat de boxe. Tous les coups, souriants ou non, sont permis. Puis, cette lutte va se
transformer peu à peu en ballet. Un pas de deux où triomphe l’amour. Après un intermède
terrifiant, qui nous plonge brusquement dans une réalité triviale, la seconde partie propose
une autre partition, plus grave. Nous sommes dans le drame. Un constat d’impuissance,
d’impossibilité à vivre les choses. Stocchi est rattrapé par ses conventions : son destin…
Maria, a celui des tragédies …
La difficulté du texte réside dans le fait que la situation des personnages est
complexe. Stocchi, personnage multiple, offre au comédien d’aborder une même situation
par le biais de quatre états : flic, curé, homme, juge… et Maria répond à ces personnalités
qu’il revêt pour venir à bout de son « interrogatoire ». Elle incarne, quant à elle, le
mot « Liberté » qu’elle doit s’approprier ; une liberté que Maria s’est imaginée avec ses
propres codes. Les comédiens doivent donc se lover dans un univers loin des conventions et
modes de pensée qui sont les nôtres. De plus, le texte ici moderne et accessible est
profondément poétique. Ainsi, son apprentissage et sa restitution demande de le « parler »
tout en respectant cette dimension. C’est ce qui fait la richesse même du théâtre de François
Boyer.