58 ◗ REE N°4/2012
les atomes froids
Comment refroidir les atomes froids avec la lumière laser ? Principes et techniques
pour un nuage d’au plus un milliard d’atomes dans un vo-
lume d’environ 1 mm3, protégé par une enceinte à vide.
Interaction atome-rayonnement
Du point de vue de la mécanique quantique, l’énergie in-
terne de l’atome est quantifiée. L’échelle des niveaux d’éner-
gie dépend de la structure de l’atome : c’est une sorte de
carte génétique propre à chaque atome. Considérons deux
niveaux d’énergie : le niveau fondamental f et le niveau ex-
cité e. La différence d’énergie entre les deux niveaux peut
être exprimée en termes de fréquence, appelée fréquence
de résonance de la transition atomique
ν
a. Quand l’atome est
éclairé par un faisceau laser de fréquence
ν
, le photon laser
a d'autant plus de chance d'être absorbé par l'atome que la
fréquence laser est proche de la fréquence atomique
ν
a . On
dit que le laser est quasi-résonant lorsque le désaccord en
fréquence δ = ν a – ν est très faible comparé aux fréquences
caractéristiques du système (atome, laser).
La durée de vie de l’atome dans le niveau excité est limi-
tée ; il se désexcite vers le niveau fondamental par émission
spontanée d’un photon (photon de fluorescence). Comme
pour un oscillateur classique, la largeur de la résonance, est
inversement proportionnelle au temps d’amortissement.
Pour les transitions atomiques, la largeur de résonance est
définie par la largeur naturelle du niveau excité que l’on note
Γ. La durée de vie de l’atome dans ce niveau est égale à Γ-1.
Par ailleurs, le photon, « particule élémentaire de la lumière »,
est doté d’une impulsion (voir l’encadré 1). Lorsqu’il absorbe
un photon, l’atome encaisse son impulsion et recule d’une
vitesse qu’on note désormais
ν
r. De même, quand l’atome
émet un photon spontanément, il restitue l’impulsion acqui-
se. Il faut noter ici un point crucial pour la suite, la direction
du recul induit par l’absorption du photon est bien définie,
par la direction du vecteur d’onde. En revanche le recul dû à
l’émission spontanée est totalement aléatoire.
Les forces de la lumière : force de pression
de radiation
La force exercée par la lumière sur les atomes est à l’ori-
gine de tous les mécanismes de manipulation d’atomes par
laser. L’idée que la lumière puisse exercer une action méca-
nique sur la matière est vieille de plus de trois siècles. L’intui-
tion de Johannes Kepler fut juste, lorsqu’il expliqua pourquoi
la queue des comètes est orientée à l’opposé du soleil, par
la pression de radiation exercée par la lumière solaire sur les
particules de poussière qui constituent la queue. A l’échelle
atomique, cette force de pression de radiation se manifeste
par un changement de vitesse occasionné par le transfert de
l’impulsion du photon à l’atome. Comme nous l’avons men-
tionné précédemment, lorsqu’un atome absorbe un photon,
il change de niveau d’énergie et il recule. La vitesse de recul
varie selon la nature de l’atome, elle vaut 6 mm/s pour un
atome de rubidium. A priori, ce changement de vitesse est
très faible comparé à la vitesse moyenne des atomes dans
un gaz à température ambiante, qui est d’environ quelques
centaines de mètres par seconde. Pour que l’action de la
lumière sur l’atome soit appréciable, il faudrait lui transmet-
tre beaucoup de reculs en le faisant interagir « longtemps »
avec des photons se propageant dans la même direction. De
ce point-clé découle le rôle fondamental du faisceau laser
dans la manipulation du mouvement des atomes. Dans un
faisceau laser les photons possèdent quasiment la même
énergie et la même impulsion, c’est pour cette raison que
l’action mécanique du laser sur les atomes est spectaculaire.
Figure 1 : Comparaison entre les différentes échelles de températures.
Encadré 1 : Le laser et son photon.