Éducation thérapeutique : comment motiver nos patients

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22/06/04
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Pra tique Soins
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Éducation thérapeutique
Comment motiver nos patients
Qu’e ntend-on par éduca tion théra p e u tique ? Qu’est- ce
que le diagnostic thérapeutique ? Le Pôle de prévention
des maladies cardio-vasculaires et d’éducation du patient
d’Abbeville (Somme) témoigne de son expérience.
L
e concept d’éducation thérapeutique initié dans le
monde de la diabétologie
et de l’asthme, s’étend progr e s s ivement aux autres spécialités, et
la notion de diagnostic éducatif
(qu’est-ce qu’il a, qu’est-ce qu’il
fait, qu’est-ce qu’il sait...) s’impose dans les pratiques. Cela a
amené à la création de structures
spécialisées dans l’éducation,
avec des équipes multidisciplinaires pouvant recevoir un
patient et son entourage afin
d’amorcer une démarche éducative et éventuellement de faire
évoluer certains comportements.
Toutefois, il ne faut pas penser
que l’éducation thérapeutique
doit se limiter à de telles structures, et chaque soignant, médecin ou paramédical, peut au quotidien essayer de la mettre en
pratique. En effet, nous sommes
tous quotidiennement confrontés
à des patients conscients ou non
de la nécessité de modifier leur
mode de vie, mais qui ne sont
pas prêts, en fait, à changer leurs
habitudes quotidiennes.
Bien sûr, le monde de la diabétologie réfléchit depuis longtemps à ce
problème, et certains points ont
été longuement détaillés : importance de l’enthousiasme du soignant pour faire passer le message ; nécessité de hiérarchiser les
priorités pour ne pas tout imposer
d ’ e m b l é e ; insister sur l’aspect
positif que l’on peut trouver, par
exemple à l’arrêt du tabac (notion
de plaisir), mais d’autres points
paraissent fondamentaux.
Estime de soi
Essentiellement dans les populations défavorisées, dont le man-
que de formation limite l’accès à
l’emploi et qui vivent des difficultés personnelles et des situations
familiales instables, il est important
de travailler sur la notion d’estime
de soi. En effet, ce n’est que
lorsque le patient a confiance en
lui qu’il peut se sentir capable
d’accepter et de prendre en main
sa pathologie (surveillance, traitement...). Quels que soit notre
fonction et notre mode d’exercice,
il faut essayer de trouver le soignant (médecin, infirmier, diététicien, psychologue, kinésithérapeute) ou le membre de la famille
qui peut trouver le mot juste pour
redynamiser le patient.
Pas de fatalité
Un autre obstacle à la réalisation
d’efforts personnels est la notion
de fatalité. Pour bon nombre de
nos patients, cette maladie est
familiale, ce qui équivaut à “je n’y
peux rien”. Nombre d’entre eux
expliquent qu’ils sont conscients
que les médecins font tout leur
possible pour leur éviter la maladie
et que, grâce aux progrès, en part iculier techniques (pontages...), ils
vivront peut-être plus longtemps
que leurs parents, mais vivent en
fait les conséquences de la maladie (néphropathie, infarctus...)
comme une fatalité. Les convaincre « que l’accident peut être prévenu, la récidive doit être évitée »
est déjà une première étape pour
la motivation.
Une autre piste est de surveiller
très attentivement les mots que
nous utilisons. Lorsque nous
essayons de féliciter un patient en
raison d’un bilan biologique excellent ou lorsque nous l’informons
qu’une intervention de type pon-
tage s’est bien passée, le patient
peut être faussement rassuré et
ne pas comprendre l’intérêt de
poursuivre ses efforts au long
cours. À l’inverse, si le soignant
dit : « En arrêtant de fumer, tout
devrait aller mieux », c e rtains de
nos patients n’en sont pas
convaincus et pensent que l’arrêt
du tabac ne changera pas le cours
des choses. Évitons cert a i n e s
phrases comme : « Si j’étais à votre
p l a c e . . . » , car nous ne sommes
pas à leur place et admettons que
le fait d’avoir logiquement ou
médicalement raison n’aboutit
pas obligatoirement à ce que les
patients adhèrent à nos recommandations.
Il faut donc prendre le temps de
réfléchir à notre propre comportement, et il faut insister sur l’une
des règles de l’éducation thérap e u t i q u e : l’écoute du patient
pour qu’il comprenne l’intérêt
que lui porte l’équipe soignante
dans le but de faire de lui un
acteur de sa santé.
Isabelle Grosset, infirmière
Sophie Jagieniak, psychologue
Claudine Trochet, diététicienne
Pôle de prévention cardiovasculaire,
CH d’Abbeville (Somme)
Qu’est- ce que l’éduca ti o n
th é r a p e u tique du pati e nt ?
L’ é ducation th é rapeu tique est un ensem ble de pratiques visa nt à perme tt r e
au patient l’acqu i s ition de compéten ces,
afin de pou voir pr endre en cha rge de
manière ac ti ve sa ma lad ie, ses soins et
sa su rvei l la n ce, en partena r iat avec ses
soig na nts. Elle s’ ad r esse aux patients
attei nts essentiel lement de ma lad ies
ch ron iques mais aussi de ma lad ies de
durée limit é e. Les patholog ies en cause
sont sou vent asy mptomatiques en dehors de leurs ma n i f es tations initia les,
mais el les nécess itent au quo tid ien de
la pa rt des patients une ad h é s ion
é t roite aux diverses moda l ités du tra itement et de la su rvei l la n ce afin d’éviter
la su rvenue de compl ications.
Source : ministère de la Santé
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 55 • mai 2004
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