Éducation thérapeutique : comment motiver nos patients

Professions Santé Infirmier Infirmière N° 55 • mai 2004
Pra tique So i n s
1 7
L
e concept d’éducation thé-
rapeutique initié dans le
monde de la diabétologi e
et de l’asthme, s’étend progr e s s i-
vement aux autres spécialités, et
la notion de diagnostic éducatif
(qu’est-ce qu’il a, qu’est-ce qu’il
fait, qu’est-ce qu’il sait...) sim-
pose dans les pratiques. Cela a
amené à la création de structures
spécialisées dans l’éducation,
avec des équipes multidiscipli-
naires pouvant recevoir un
patient et son entourage afin
d’amorcer une démarche éduca-
tive et éventuellement de faire
évoluer certains comport e m e n t s .
Toutefois, il ne faut pas penser
que léducation thérapeutique
doit se limiter à de telles struc-
tures, et chaque soignant, méde-
cin ou paramédical, peut au quoti-
dien essayer de la mettre en
pratique. En effet, nous sommes
tous quotidiennement confrontés
à des patients conscients ou non
de la nécessité de modifier leur
mode de vie, mais qui ne sont
pas prêts, en fait, à changer leurs
habitudes quotidiennes.
Bien sûr, le monde de la diabétolo-
gie réfléchit depuis longtemps à ce
problème, et certains points ont
été longuement détaillés : impor-
tance de lenthousiasme du soi-
gnant pour faire passer le mes-
s a g e ; nécesside hiérarchiser les
priorités pour ne pas tout imposer
d ’ e m b l é e ; insister sur laspect
positif que l’on peut trouver, par
exemple à l’arrêt du tabac (notion
de plaisir), mais dautres points
paraissent fondamentaux.
Estime de soi
Essentiellement dans les popula-
tions défavorisées, dont le man-
que de formation limite l’accès à
l’emploi et qui vivent des difficul-
tés personnelles et des situations
familiales instables, il est import a n t
de travailler sur la notion d’estime
de soi. En effet, ce n’est que
lorsque le patient a confiance en
lui quil peut se sentir capable
d’accepter et de prendre en main
sa pathologie (surveillance, traite-
ment...). Quels que soit notre
fonction et notre mode d’exercice,
il faut essayer de trouver le soi-
gnant (médecin, infirmier, diététi-
cien, psychologue, kinésithéra-
peute) ou le membre de la famille
qui peut trouver le mot juste pour
redynamiser le patient.
Pas de fatalité
Un autre obstacle à la réalisation
d ’ e f f o r ts personnels est la notion
de fatali. Pour bon nombre de
nos patients, cette maladie est
familiale, ce qui équivaut à “je n’y
peux rien. Nombre dentre eux
expliquent qu’ils sont conscients
que les médecins font tout leur
possible pour leur éviter la maladie
et que, grâce aux progrès, en part i-
culier techniques (pontages...), ils
vivront peuttre plus longt e m p s
que leurs parents, mais vivent en
fait les conséquences de la mala-
die (néphropathie, infarctus...)
comme une fatalité. Les convain-
cre « que l’accident peut être pré-
venu, la récidive doit être évitée »
est déjà une première étape pour
la motivation.
Une autre piste est de surveiller
ts attentivement les mots que
nous utilisons. Lorsque nous
essayons de féliciter un patient en
raison d’un bilan biologique excel-
lent ou lorsque nous l’informons
qu’une intervention de type pon-
Q u e ntend-on par éduca tion th é ra p e u tique ? Qu’est- ce
que le diagnostic thérapeutique ? Le Pôle de prévention
des maladies cardio-vasculaires et d’éducation du patient
d’Abbeville (Somme) témoigne de son expérience.
Éducation thérapeutique
Comment motiver nos patients
tage s’est bien passée, le patient
peut être faussement rassuré et
ne pas comprendre lintérêt de
poursuivre ses efforts au long
cours. À l’inverse, si le soignant
d i t : « En arrêtant de fumer, tout
devrait aller mieux », c e rtains de
nos patients nen sont pas
convaincus et pensent que l’arrêt
du tabac ne changera pas le cours
des choses. Évitons cert a i n e s
phrases comme : « Si j’étais à votre
p l a c e . . . » , car nous ne sommes
pas à leur place et admettons que
le fait d’avoir logiquement ou
médicalement raison naboutit
pas obligatoirement à ce que les
patients adhèrent à nos recom-
m a n d a t i o n s .
Il faut donc prendre le temps de
réfléchir à notre propre compor-
tement, et il faut insister sur l’une
des
règles de léducation tra-
p e u t i q u e :
lécoute du patient
pour quil comprenne lintérêt
que lui porte l’équipe soignante
dans le but de faire de lui un
acteur de sa santé.
Isabelle Grosset, infirmière
Sophie Jagieniak, psychologue
Claudine Trochet, diététicienne
Pôle de prévention cardiovasculaire,
CH d’Abbeville (Somme)
Q u est- c e que l’ é d u c a ti o n
th é r a p e u t ique du pati e n t ?
L’ é d ucation th é rapeu t ique est un en-
sem ble de pratiques visa nt à perme tt r e
au patient l’acqu i s ition de comp é t en ces,
afin de pou v oir pr e ndre en cha rge de
manière ac ti ve sa ma lad ie, ses soi n s et
sa su r vei l la n c e, en pa r tena r iat avec ses
soig na n ts. Elle s’ ad r e sse aux patients
attei nts essentiel l ement de ma l ad i es
ch ron iques mais aussi de ma l ad ies de
durée limit é e. Les patholog ies en cause
sont sou vent asy mptomatiques en de-
hors de leurs ma n i f e s tations initia les,
mais el les nécess itent au quo tid ien de
la pa r t des patients une ad h é s i on
é t roite aux diver s es mo da l ités du tra ite-
ment et de la su rvei l la n c e afin d’éviter
la su r venue de compl ications.
Source : ministère de la Santé
Actualités 22/06/04 16:19 Page 17
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