Sociologie des organisations

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Christian Mailliot – Décembre 2012
http://axesocionancy.canalblog.com
Sociologie des organisations
Quelques définitions et éléments du cours
Qu’est-ce qu’une organisation ?
Du verbe organiser à la notion d’organisation
« Organiser, dans l’usage commun, c’est mettre un certain ordre dans un stock de ressources diverses
pour en faire un instrument ou un outil au service d’une volonté poursuivant la réalisation d’un projet.
Organiser un groupe d’hommes pour en faire la section d’une armée, c’est instituer entre eux une
hiérarchie qui les rendra capables de coopérer à la réalisation d’une fin qui constituera la règle pour
l’action de chacun, même si le sens et le résultat de sa propre action échappent à plus d’un intervenant.
Dans toute organisation se trouvent donc conjointement posés le problème de la coopération et celui de la
hiérarchie »1.
Selon le Petit Robert (2006), le mot organisation (1390) vient du verbe organiser (14e « rendre apte à la vie »), qui vient
du mot organe. Ce mot organe est emprunté :
- au latin organum « instrument, machine », « moyen », « organe (du corps) »
- et « instrument de musique ; orgue » du grec organon, de même sens et appartenant à la famille de ergon
« action ; activité, travail » [ergo- et -ergie : ergonomie ; énergie, synergie, allergie / -urge et –urgie : liturgie, sidérurgie,
démiurge].
Les organisations sont des ensembles humains ordonnés et hiérarchisés en vue d’assurer la coopération
et la coordination de leurs membres pour des buts donnés.
Les organisations sont analysées de plus en plus comme des lieux où des négociations s’opèrent sans
cesse pour construire des accords entre les acteurs.
Du terme organisation à l’analyse des organisations (la sociologie des organisations)
Une organisation, dans un sens très général, c’est un ensemble d’éléments qui sont reliés entre eux et qui
forment un tout [idée de système ou de structure]2
« La sociologie des organisations analyse la transformation institutionnelle des entreprises et des
administrations et, par conséquent, des systèmes sociaux depuis le début du siècle. Elle met en évidence
les facteurs qui sous-tendent cette évolution et détermine ses conséquences individuelles et collectives.
L’étude des organisations apporte également des solutions aux problèmes que pose la gestion de ces
ensembles humains complexes. Cette double vocation, scientifique et pratique, est une spécificité de ce
domaine qui a été – et est encore – une source d’enrichissement et d’ambiguïté. »3
Selon Claudette Lafaye4, l’analyse des organisations est traversée par quatre grandes séries de questions
récurrentes :
- Les organisations sont-elles des univers rigides ?
- Quel changement pour les organisations ?
- Des organisations indépendantes de leur environnement ?
- Comment sont prises les décisions ?
La sociologie des organisations analyse les différents modes de fonctionnement des organisations et les
règles, tacites ou explicites, qui régissent les comportements des individus en leur sein5.
La sociologie des organisations «a pour objet d’étude des règles et de la logique de fonctionnement de
l’action collective au sein des groupements organisés tels que les entreprises ou les administrations »6.
1
BOUDON R., BOURRICAUD F., Dictionnaire critique de la sociologie, Paris, Quadrige/PUF, 2000, p. 433.
POISSON B., « Schéma d’analyse de l’organisation religieuse », Sociologie et société, I, 2, p. 147.
3
BALLE C., Sociologie des organisations, Paris, P.U.F, 1998 [QSJ ? n° 2499], p. 12.
4
LAFAYE C., La sociologie des organisations, Paris, Nathan, 1996, coll. 128, p.51.
5
AVRIL C., CARTIER M., SERRE D., Enquêter sur le travail. Concepts, méthodes, récits. Paris, La découverte, 2010, p. 9.
2
Christian Mailliot – Décembre 2012
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Les traits caractéristiques d’une organisation
On caractérise souvent les organisations par les cinq traits suivants :
- Une division des tâches ;
- Une distribution des rôles ;
- Un système d’autorité ;
- Un système de communication ;
- Un système de contribution-rétribution7.
L’organigramme
L’organigramme est soit la représentation très schématique de la structure d’une organisation, soit une
description détaillée de tous les services de l’organisation et de leurs fonctions8.
« L’organisation est une idéologie, au sens où les représentations des responsables sur ce que doivent être
les rapports humains façonnent les structures. Il faut pouvoir lire, ou du moins expliciter, la place de
chacun et sa fonction. C’est le rôle de l’organigramme. »9
L’organisation sous le regard de trois courants sociologiques contemporains
L’organisation comme système complexe (Michel Crozier, 1963)
« Elle [une organisation] est un ensemble complexe de jeux entrecroisés et interdépendants à travers
lesquels des individus, pourvus d’atouts souvent très différents, cherchent à maximiser leurs gains en
respectant les règles du jeu non écrites que le milieu leur impose, en tirant parti systématiquement de tous
leurs avantages et en cherchant à minimiser ceux des autres. Ces jeux sont très profondément
déséquilibrés ; mais aucun joueur, pour ce qui le concerne, n’est totalement privé de chances. »10
L’organisation comme lieu de socialisation et d’appartenance identitaire (Renaud Sainsaulieu)
« L’organisation doit, en effet, être analysée comme un lieu important de régulations culturelles où les
rapports sociaux qu’exigent les impératifs de la production ne peuvent éviter de faire appel à des
structures de représentations et de valeurs articulées en cultures pour fonder autant les échanges
stratégiques que les formes de sociabilités collectives reconnues. »11
L’organisation comme montage composite (Luc Boltanski § Laurent Thévenot, 1991)
« L’accumulation de ces travaux ouvre la voie à une approche nouvelle et systématique des organisations
traitées non comme des entités unifiées caractérisées par références à des sphères d’activité, des systèmes
d’acteurs ou des champs, mais comme des montages composites comportant des dispositifs relevant de
différents mondes. »12
« Aucune organisation, aussi industrielle soit-elle, ne peut survivre si elle ne tolère pas des situations
d’une autre nature. C’est précisément la pluralité des dispositifs relevant des différents mondes qui rend
compte des tensions par lesquelles ces organisations sont travaillées. La même approche conduit à porter
attention non seulement aux critiques mais aussi aux dispositifs de compromis qui permettent de
maintenir en présence des êtres dont la justification supposerait la remontée en généralité dans des
mondes différents. »
6
BEITONE A., et al. Sciences sociales, Paris, Dalloz/Sirey, 2009, p. 413.
Je m’appuie ici sur : BERNOUX P., La sociologie des organisations, Paris, Point-Seuil, 1990, p. 118.
8
Cette définition est fortement inspirée du Dictionnaire économique et social (Hatier, 1981, p. 199). J’ai remplacé le mot
entreprise par celui d’organisation, le mot organes par celui de services.
9
BERNOUX P., La sociologie des organisations, Paris, Point-Seuil, 1990, p. 124.
10
CROZIER M., Le phénomène bureaucratique, Essai sur les tendances bureaucratiques des systèmes d’organisation
modernes et sur leurs relations en France avec le système social et culturel, Paris, Edition du seuil [Points/essais], 1963, p. 8.
11
SAINSAULIEU R., Sociologie de l’entreprise, Organisation, culture et développement, 1997, p. 262
12
BOLTANSKI L., THEVENOT L., De la Justification. Les économies de la grandeur, Paris, Gallimard, 1991, p. 32
7
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