sur le client », que l’hôpital a adoptée. Les infirmières décident donc de
faire des lectures sur l’utilisation des aides dans les grands hôpitaux améri-
cains et de se familiariser avec la documentation qui préconise le recours
aux infirmières autorisées pour donner des soins sécuritaires de qualité aux
clients. 6
On a déterminé que la question primordiale ici était la sécurité des clients.
Les infirmières craignent que l’utilisation d’aides ne garantisse pas des
soins sécuritaires. Elles appréhendent d’être tenues responsables pour des
soins sur lesquels elles n’ont aucun contrôle. Elles savent trop bien que la
clientèle de l’hôpital se compose de plus en plus de grands malades qui
requièrent des soins complexes. Elles redoutent donc leur éloignement du
chevet du client où elles seront remplacées par des aides pour des périodes
plus étendues, et l’atteinte à la sécurité et à la qualité des soins infirmiers
qui en résultera.
Les infirmières doivent ensuite « vérifier les lois, politiques, directives et
procédures en vigueur » associées à la question du changement de l’éven-
tail de compétences que l’hôpital propose. Un document qu’elles trouvent
particulièrement utile est le guide de leur association professionnelle qui
détermine la catégorie appropriée de personnel soignant dans une gamme
de complexité de soins aux patients et une variété de milieux de pratique.
À l’aide de cette documentation, elles déterminent les aspects des soins
que les aides peuvent donner aux patients dont l’état est stable.
La consultation de la documentation à leur disposition en vertu de leur
convention collective permet aux infirmières de se familiariser avec les
procédures nécessaires pour rapporter et documenter des situations de soins
aux clients qui ne sont pas sécuritaires. De nombreuses infirmières sont
surprises d’apprendre qu’elles ont l’obligation de rapporter ces cas à l’au-
torité compétente en vertu de la disposition sur la responsabilité profes-
sionnelle de leur convention collective.
La troisième étape consiste à « consulter, au besoin, des collègues,
d’autres membres de l’équipe [de soins de santé], et l’association profes-
sionnelle d’infirmières de leur province. » Les infirmières consultent leur
association professionnelle et leurs représentants syndicaux qui les
conseillent sur la meilleure méthode d’exprimer leurs préoccupations aux
infirmières gestionnaires de l’établissement. Les infirmières consultent
ensuite leurs infirmières gestionnaires pour qu’elles les aident à transmettre
leurs préoccupations aux décisionnaires de l’établissement. Les infirmières
gestionnaires organisent un forum pour que les infirmières aient la possibi-
lité d’exprimer leurs inquiétudes et pour leur fournir des éclaircissements
sur les changements proposés. Après avoir résumé et documenté les préoc-
cupations des infirmières, les infirmières gestionnaires ont décidé de faire
un exposé aux gestionnaires de l’échelon suivant.
Les infirmières gestionnaires se sont ainsi attachées à « essayer de régler
le problème de la façon la plus directe possible et en veillant à l’intérêt de
tous les intéressés. » Après de considérables délibérations, l’hôpital a déci-
dé d’employer des aides selon le nouvel éventail de compétences prévu
dans le cadre du nouveau modèle de soins. Il a toutefois été entendu que
les aides ne travailleraient pas dans les unités de soins intensifs. La prise
des signes vitaux et le changement des pansements seraient éliminés de
leurs fonctions.
Les infirmières de chevet ont pris des mesures pour « tenir les intéressés
informés des points non résolus...», en particulier la préparation adéquate
des aides et des infirmières pour les aider à assumer leurs nouvelles res-
ponsabilités. Les infirmières, par l’entremise des conseils de leurs unités,
ont fait part aux infirmières monitrices et aux infirmières gestionnaires de
leurs besoins de formation en cours d’emploi pour endosser leur nouveau
rôle et assumer leurs responsabilités de délégation de tâches et de supervi-
sion des aides. Les infirmières ont aussi demandé qu’une procédure d’éva-
luation soit instaurée pour estimer l’emploi des aides en termes de coût-
efficacité, des résultats cliniques et de la satisfaction des clients et des
employés. On a déterminé que cette question devait être classée comme
une priorité de l’hôpital et du comité d’assurance de la qualité des unités,
et qu’ils devaient l’examiner.
2ECAS :LES GESTES PERSONNELS
POUR ASSURER DES SOINS SÉCURI-
TAIRES
La présentation du cas suivant fait appel au Modèle circulaire de décisions
éthiques élaboré par Janet Storch en 1992 (Voir figure). Ce modèle est
utile dans les situations éthiques qui comportent plusieurs « étapes » de
prise de décisions. Chaque décision peut devoir être examinée à la lumière
des décisions antérieures. Les questions éthiques sont observées à travers
une « lentille » qui permet de discerner les aspects personnels, profession-
nels, sociaux, éthiques et juridiques de la décision à prendre. Une descrip-
tion plus détaillée du modèle est donnée dans Déontologie quotidienne : Le
Code mis en pratique.• • • • •
Rita est infirmière gestionnaire dans un établissement de soins de longue
durée. Ces dernières années, les pensionnaires sont plus âgés et plus frêles.
Actuellement, de nombreux résidents ont besoin de traitements médicaux
tels qu’une thérapie intraveineuse, un cathéter urinaire et un respirateur.
L’éventail actuel de personnel dans l’établissement comprend des infir-
mières autorisées, des infirmières auxiliaires autorisées et des aides-infir-
mières. Cet arrangement donne de bons résultats au chapitre de la sécurité
et de la qualité des soins. Le directeur de l’établissement a demandé à Rita
d’examiner la possibilité de modifier l’éventail des compétences pour
réduire les coûts. Il a suggéré que les aides-infirmières soient formées pour
s’acquitter de fonctions additionnelles, incluant l’administration des médi-
caments aux pensionnaires dont l’état est stable. Une fois que les aides
auront été formées, elles remplaceront les infirmières auxiliaires autorisées.
Rita est consciente du besoin d’épargner, mais elle ne se sent pas capable,
au chapitre de l’éthique, d’accepter la proposition du directeur.
1. Information et identification
Le problème. Rita essaie d’éclaircir le dilemme en établissant les faits.
Elle convient que la situation financière est déplorable. Pour que l’établis-
sement continue de fonctionner sans augmenter la charge financière des
pensionnaires, il faut effectuer des compressions budgétaires. Rita recon-
naît que les changements proposés par le directeur réduiraient les coûts des
soins, mais elle se demande quels effets ils auraient sur la qualité des soins
aux pensionnaires et sur la qualité de la vie au travail des employés.
Les personnes. Les personnes touchées par cette décision comprennent les
employés, les pensionnaires et la direction de l’établissement, et les
familles des pensionnaires.
Les composantes éthiques. Les composantes éthiques de la situation
incluent : 1) le risque de ne pas maintenir la sécurité et la qualité des soins
aux clients; 2) l’absence de consultation des pensionnaires et de leurs
familles sur le nouvel éventail de compétences proposé; 3) la position diffi-
cile des aides-infirmières qui doivent assumer des responsabilités pour les-
quelles elles ne sont peut-être pas formées.
2. Clarification et évaluation
Rita réfléchit aux principes éthiques d’autonomie, de bienfaisance, de non-
malfaisance et de justice pour l’aider à déterminer les enjeux éthiques. Elle
juge que l’autonomie est une question qui concerne les pensionnaires et
leurs familles. Ils ne sont peut-être pas tout à fait au courant de la portée de
la décision qui modifiera la répartition des employés et l’attribution de cer-
taines tâches, et ils n’ont pas participé à la prise de décisions. Elle pense
aussi à l’autonomie des infirmières, à la préoccupation qu’elles ont de don-
ner des soins de qualité aux pensionnaires, et à la relation fondée sur la
confiance qu’elles ont tissée avec eux. En examinant la bienfaisance et la
non-malfaisance, Rita soupèse les risques qu’encourent les pensionnaires,
et l’engagement des employés à travailler pour le bien des pensionnaires.
Le principe de justice est aussi pertinent car l’enjeu porte uniquement sur
l’attribution de ressources adéquates pour garantir la sécurité et la qualité
des soins infirmiers.