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N. HABER ET AL.
Discussion
Le virus respiratoire syncytial (VRS) est un virus à ARN
de la famille des paramyxovirus. Deux groupes antigéni-
ques distincts, A et B, ont été identifiés. Dans les climats
tempérés, il sévit chaque année sur un mode épidémique,
de novembre à avril, avec un pic d’activité en janvier.
Identifié pour la première fois en 1957, il est vite apparu
comme la cause la plus importante des infections respira-
toires aiguës du nourrisson et du jeune enfant [1]. Chez
l’adulte, les ré-infections sont fréquentes. D’abord décrites
comme bénignes, mimant un simple rhume, elles semblent
en fait associées à une morbidité significative avec notam-
ment une hyper-réactivité bronchique pouvant se prolon-
ger pendant 8 semaines [1-6]. Quelques cas d’infections
sévères ou fatales ont été rapportés chez l’adulte sain [7-
11]. Le VRS est également un agent connu de décompen-
sations cardio-respiratoires chez l’adulte atteint de BPCO
ou d’insuffisance cardiaque [12-16].
Plus récemment, le VRS a été reconnu comme une cause
d’infection respiratoire sévère chez l’adulte immuno-
déprimé [17] et le sujet âgé.
É
PIDÉMIOLOGIE
Infections à VRS en institution
C’est dans les années 80 que plusieurs études chez le
sujet âgé institutionnalisé identifient le VRS comme un
agent associé à une morbi-mortalité importante dans cette
population. Les premières études rapportent des épidé-
mies en institution, où 10 à 40 % des résidents sont infec-
tés par le VRS, avec un taux de pneumopathies de 5 à
65 % et un taux de décès de 2 à 20 % [18-23]. Des études
prospectives ont trouvé que le VRS est impliqué dans 1 à
27 % des infections respiratoires en institution durant
l’hiver [24-34]. Cette grande variabilité s’explique par le
fait que ces études ont été effectuées le plus souvent sur
un seul hiver. En fait, des études plus récentes, effectuées
sur plusieurs hivers consécutifs montrent la coexistence
de nombreux virus en institution, avec une grande varia-
tion de l’agent viral prédominant en fonction des années
et du lieu géographique [35, 36]. Les virus circulants en
institution sont, en fait, un reflet des épidémies virales
communautaires.
Infections à VRS communautaires
Dans les années 1990, deux études épidémiologiques ont
suggéré que la morbi-mortalité liée au VRS était probable-
ment équivalente à celle des virus grippaux [37, 38] ; en
1993, Fleming et Cross constataient, sur 4 hivers consécu-
tifs, que les pics d’activité des virus grippaux et du VRS
correspondaient aux pics de mortalité par infections respi-
ratoires aiguës, ceux-ci survenant le plus souvent chez des
sujets âgés de plus de 65 ans [37].
En 1995, Falsey effectuait la première étude mesurant
l’impact des infections à VRS, dans une population âgée
de plus de 65 ans (âge moyen : 80 ans) : il trouvait dans
cette étude portant sur trois hivers consécutifs, que le VRS
était associé à 10 % des hospitalisations pour infections
respiratoires basses, décompensations de BPCO ou
décompensations cardiaques, comparé à 11 % pour le
virus influenza A, avec un taux de mortalité respective-
ment de 10 % pour les patients VRS positifs et 6 % pour
les patients influenza A positifs [39].
D’autres études menées chez l’adulte indiquent que le
VRS est impliqué dans 2 à 6 % des infections respiratoires
basses [40-44]. Dans ces études n’incluant pas spécifique-
ment le sujet âgé, il est noté que les patients infectés par
le VRS sont parmi les patients les plus âgés (> 60 ans).
Ces études varient par leurs critères d’inclusion (infection
respiratoire basse ou pneumopathie), la sensibilité des
méthodes diagnostiques (diagnostic viral direct ou séro-
diagnostic), la périodicité de l’étude (pendant l’hiver ou
l’année entière)
(tableau II)
. À partir des résultats de ces
études et des registres nationaux d’hospitalisation et de
mortalité, Han estime le taux de pneumopathie lié au
VRS, chez le sujet âgé, entre 2 à 14 % pendant l’hiver,
soit un taux de 2 à 9 % sur l’année entière. Il conclue que
la morbi-mortalité du VRS chez le sujet âgé, par infection
respiratoire basse, décompensation cardiaque et décom-
pensation de BPCO est probablement équivalente à celle
des virus grippaux [45].
T
RANSMISSION
La transmission se fait par inoculation de grosses gout-
telettes de salive dans les yeux ou le nez, lors de contacts
rapprochés avec un sujet infecté ou par auto-inoculation
manuelle vers les muqueuses oculaires et nasales à partir
de surfaces contaminées. La transmission par voie
aérienne à partir de fines particules d’aérosols est un
mode mineur de contamination [46]. Le VRS est trouvé
de façon prolongé dans l’environnement : il peut persister
6 heures sur des surfaces contaminées, 90 minutes sur
des gants, 30 à 45 minutes sur du papier, et 20 minutes
sur la peau [47].
Chez l’adulte, l’incubation est en moyenne de 5 jours
(extrêmes : 2-8 jours) et la durée du portage est de 2 à
3 jours, pouvant atteindre 4 semaines chez le jeune enfant
[1, 48, 49].
En institution, la dissémination nosocomiale est fré-
quente. Il est vraisemblable que le personnel soignant joue
un rôle central dans l’introduction et la diffusion du virus :
l’infection serait importée par des membres du personnel
ou des visiteurs pauci-symptomatiques, puis progresserait
dans l’institution entre les résidents et le personnel soi-
gnant [48, 49].
C
LINIQUE
La sévérité de l’infection est très variable, pouvant aller
du simple rhume à la détresse respiratoire aiguë. Le
tableau clinique associe le plus souvent des signes géné-
raux d’intensité variable (anorexie, asthénie, fièvre), des
signes d’atteinte respiratoire haute (rhinite, pharyngite,
dysphonie) compliqués de signes d’atteinte respiratoire