Dossier du mois - Ville de Troyes

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Dossier
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Press’Troyes | Janvier 2016 | n°248
Ça bouge
au muséum !
Bongo
(tragelaphus eurycerus).
Antilope africaine acquise
grâce à l'aide des Amis des musées
d'art et d'histoire, de l'état et du Fonds
régional d'acquisition pour les musées
Le muséum d’histoire naturelle a fait sa mue.
Muséographie, animaux, activités pour enfants,
le musée Saint-Loup dynamise ses collections
et en présente de nouvelles. Mammifères,
oiseaux, crocodiles, de l’Aube aux plaines
d’Afrique, un nouveau parcours permet de
découvrir les animaux et la diversité du vivant
sous l’angle de la classification et de l'évolution
des espèces chère à Darwin.
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Dossier
Ça bouge
au muséum !
Depuis le 19 décembre, le public peut admirer
la nouvelle muséographie du muséum d’Histoire
naturelle. En plus de la nouvelle présentation
des vitrines, de nouveaux animaux ont pris
place et des cartels illustrés permettent d’en
apprendre plus sur les espèces exposées.
Voyager avec les animaux
Les collections du muséum, installées au rez-dechaussée du musée Saint-Loup, ont pris un coup de
jeune. Après plusieurs semaines de travaux, les salles
ont fait peau neuve et intègrent, désormais, de nouveaux
spécimens. Véritable invitation au voyage, le visiteur
peut ainsi aller à la découverte des animaux d’ici...
et d’ailleurs.
Des animaux et des hommes
Les collections du muséum se sont constituées au gré
du temps grâce à plusieurs générations de naturalistes
et voyageurs naturalistes. Aujourd’hui, cette tradition
perdure par l’acquisition régulière de nouveaux spécimens
et par la naturalisation d’animaux dont les dépouilles ont
pu être récupérées après leur mort naturelle avant de
passer entre les mains d’un taxidermiste.
La faune régionale explorée
Quelques témoins de la biodiversité auboise sont venus
enrichir les collections du muséum cette année. Parmi
les animaux nouvellement naturalisés, les visiteurs
pourront se familiariser avec le ragondin, l’écureuil
roux, la huppe fasciée...
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Le monde à portée de regard
Avec l’aide de l’État et de la Région ChampagneArdenne, via le Fonds régional d'acquisition pour les
musées et grâce au soutien des Amis des musées
d’art et d’histoire, le patrimoine muséal s’élargit
régulièrement. Dernièrement, ce sont sept grands
mammifères d’Afrique et d’Amérique qui ont rejoint les
collections de Saint-Loup : un zèbre, un bœuf musqué,
un ours noir, un phacochère et des antilopes africaines.
Des trésors disparus
La nouvelle muséographie est l’occasion de mettre au
jour quelques trésors des collections comme certains
spécimens rares et précieux telles des huppes de
Bourbon, espèce endémique de l’Île de la Réunion,
aujourd’hui disparue.
Bongo
(tragelaphus
eurycerus).
L’arbre phylogénétique
des vertébrés tétrapodes
L’arbre de l’évolution
La nouvelle scénographie du muséum présente, sous
la forme d’un arbre, la classification des vertébrés
tétrapodes (qui comptent deux paires de membres),
un arbre plus détaillé sur les mammifères et un autre
sur les oiseaux. Il s’agit d’arbres phylogénétiques*
reflétant l’évolution des espèces. Les êtres les plus
proches ne divergent qu’au fil des dernières branches
de l’arbre, tandis qu’une ancestralité commune
éloignée est marquée par un positionnement sur des
branches très divergentes. Ainsi, on découvre sur l’un
des arbres qu’oiseaux et crocodiles sont plus proches
entre eux que les crocodiles et les lézards !
C’est Charles Darwin qui a introduit le concept
d’arbres phylogénétiques. En expliquant l’évolution
par la sélection naturelle, il a été l’un des premiers
à exprimer une idée de parenté entre les espèces,
et à justifier l’utilisation d’un arbre afin de sceller la
proximité entre elles. Dans son ouvrage le plus célèbre,
L’origine des espèces, publié en 1859, il n’y a qu’une
seule illustration, celle d’un arbre phylogénétique. Au
fil des années, ces arbres ont beaucoup évolué dans
leur représentation. Ceux dessinés aujourd’hui sont
le fruit de plusieurs dizaines d’années de recherches,
même récentes, et en corrélation avec l’étude de
l’ADN.
Huppe fasciée (Upupa
epops) – (origine Aube)
naturalisée en 2015 par
Damien Barbary pour le
Muséum de Troyes grâce
à l’aide des Amis des
musées d’art et d’histoire
* R eprésentations schématiques et buissonnantes permettant de mettre en avant
une parenté entre espèces ou groupes d’espèces.
Le muséum en chiffres
Un parcours
pour petits et grands
Les enfants, dès la maternelle, peuvent venir
découvrir les nouveaux animaux du muséum :
loutre, ornithorynque, pangolin, zèbre, crocodile
ou paradisier... autant d’espèces différentes
qui leur feront parcourir le monde le temps
d’une visite. Et pour que cette aventure soit
ludique, les équipes du musée ont concocté
une série d’activités amusantes et éducatives.
De nouveaux îlots-jeux sont installés au gré
des salles avec, notamment, des empreintes
d’animaux à toucher et à reconnaître. Pour en
savoir plus sur le mode de vie des espèces
présentées, un livret-découverte, disponible à
l'accueil, a été élaboré pour les enfants ainsi
que des fiches « vrai ou faux » à retrouver en
salle d’exposition. Un espace avec des livres
à consulter sur place, des peaux d’animaux
à identifier et bien d’autres jeux encore, est
également dédié aux plus petits.
280
294
21
10
43
14
263
m² d’exposition
spécimens au total (hors nids et œufs)
squelettes d’oiseaux
squelettes de mammifères
œufs
nids
animaux naturalisés
dont :
195
4
64
oiseaux
crocodiles
mammifères
dont :
Zèbre de Burchell
(Equus quagga) – spécimen
provenant d’Afrique du Sud,
don des Amis des musées
d’art et d’histoire au Muséum
de Troyes en 2015
3
7
antilopes
grands mammifères
acquis en 2015
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Après Darwin, la classification moderne des espèces
La nouvelle muséographie est développée autour
des mammifères, oiseaux et crocodiles. Elle est
très largement inspirée des travaux de Guillaume
Lecointre et Hervé Le Guyader**. Ainsi, les animaux
sont présentés par groupe (rongeurs, primates,
gruiformes, passériformes...) selon la classification
moderne des espèces. Pour résumer, les espèces qui
appartiennent à un même groupe ont des caractères
communs, hérités d’un ancêtre commun à toutes les
espèces du groupe et à elles seules.
L’évolution des classifications
Très tôt dans l’histoire il est apparu nécessaire
de nommer et classer les plantes et animaux pour
apprendre à les identifier. Il s’agissait alors de
reconnaître des plantes aux vertus médicinales, des
animaux à chasser ou pêcher...
Dès l’Antiquité, on a tenté de classer
le monde vivant d’après des critères
observables : taille, forme, couleur... pour
rassembler ensuite, dans un même
groupe, des espèces ayant des caractères
communs. Ainsi ont été regroupés
canards, cygnes et oies ayant tous
pattes palmées, corps massif, large bec
aplati et plumage imperméable.
Au 18e siècle, de grands naturalistes tels que
Tournefort, puis Linné, s’appuient sur ce principe
pour déterminer un ordre naturel du vivant qui serait
d’origine divine. Ils organisent le monde vivant selon
un système hiérarchisé : règne, classe, ordre, famille,
genre, espèce...
Au 19e siècle, Charles Darwin bouleverse l’ordre
établi avec sa théorie de l’évolution. On comprend
alors que la ressemblance entre espèces n’est pas
le fruit du hasard ni une volonté divine mais qu’elle
est due aux caractères hérités d’un ancêtre commun.
La classification devient le reflet de l’histoire de
l’évolution du vivant.
Il faudra attendre encore un siècle, avec Willi Hennig
en 1950, avant d’avoir une méthode opérationnelle
pour obtenir des classifications conformes à la théorie
de l’évolution. Hennig a compris qu’il fallait raisonner
uniquement avec des groupes comportant un ancêtre
commun et l’ensemble de ses descendants (et non
seulement une partie de ses descendants comme on
le faisait avant).
En parallèle, la biologie moléculaire connaît son
avènement avec notamment la découverte de la
structure de l’ADN dans les années 1950, puis celle
de son séquençage 20 ans plus tard.
Aujourd’hui, on ne s’appuie plus seulement sur
des caractères observables (forme du bec, couleur,
taille...) pour classer le vivant mais également sur
la comparaison de chaînes moléculaires, traitées
informatiquement, et pour lesquelles on obtient des
informations complémentaires en grande quantité.
Toutes ces avancées récentes, méthodologiques et
techniques, ont conduit à un bouleversement important
des classifications ces trente dernières années. Ce
domaine de recherche encore très actif peut induire
des changements sur nos connaissances actuelles
dans les années à venir.
** Auteurs de Classification phylogénétique du vivant,
aux éditions Belin
Épervier d’Europe
(Accipiter nisus)
L'exemple des passériformes
Il s’agit du groupe des passereaux. Le nom « Passériforme » vient de passer domesticus,
nom scientifique du moineau domestique. Immense, ce groupe compte 93 familles pour
plus de 6 000 espèces. Au muséum, les visiteurs pourront ainsi découvrir les corvidés,
dont font partie la pie bavarde ou la corneille noire ; les paridés, avec la mésange bleue
ou la mésange charbonnière ; les fringillidés avec le pinson des arbres ou le chardonneret
élégant, et bien d’autres encore.
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Chardonneret élégant (Carduelis carduelis)
Le chardonneret se nourrit de graines et apprécie
particulièrement les « mauvaises herbes ».
Il tire son nom de son habitude de consommer,
en été, des graines de chardon.
Au rythme des travaux
Avant d’accueillir les animaux, le muséum
a fait l’objet d’une rénovation complète
pendant près de trois mois. La muséographie,
plus moderne et aérée, a été réalisée
en interne par les techniciens du musée
(menuisiers et peintres) d’après une
scénographie conçue par l’équipe du
muséum et les médiatrices culturelles.
La nouvelle présentation dynamise les
collections. Certaines grandes vitrines ont
été déplacées pour harmoniser les salles
qui ont été totalement repeintes dans des
tons clairs pour gagner en luminosité.
Le ludique n’a pas été oublié, ainsi, les
îlots-jeux du parcours enfants, également
fabriqués en interne, proposent des tables
avec des empreintes, des sièges-cubes,
des panneaux de peaux à toucher, un tableau
magnétique... Un nouvel espace-découverte,
en libre-accès pour les visiteurs et où sont
proposés des ouvrages à consulter sur place,
a été créé. Les nouvelles salles du muséum
gagnent ainsi en modernité et en attractivité
tout en conservant leur caractère didactique.
Le muséum
dans le temps
Un premier cabinet d’histoire naturelle voit le jour à Troyes à la fin du 18e siècle.
Une bombe incendiaire détruit une grande partie des collections lors de la campagne
de France en 1814. Le musée prend vraiment forme à la fin du 19e siècle grâce
à la Société Académique de l’Aube. Elle fait appel à la générosité des Troyens
et constitue peu à peu une collection d’art, d’archéologie, d’ethnographie et
d’histoire naturelle. Avec l’aide de la Ville, ces objets sont installés au rez-dechaussée de l’ancienne abbaye Saint-Loup (vendue comme bien national
à la Révolution après la destruction de l'église). Ainsi, le premier musée ouvre
le 6 janvier 1833. Les collections s’enrichissent au gré des achats, dons ou legs.
Le musée Saint-Loup devient musée municipal en 1945 – exceptée l’histoire naturelle
qui reste la propriété de la Société académique jusqu’en 1965. Le 6 avril 1968
naît le Muséum d’histoire naturelle occupant le rez-de-chaussée du musée Saint-Loup
qui regroupe également, au sous-sol et dans les étages, les Beaux-Arts du 14e
au 19e siècle et l’archéologie régionale.
Crocodile nain
(Osteolaemus
tetraspis)
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