e-santé, m-health, biG Data méDiCaux
L’information médicale n’a pas vocation à être dif-
fusée à l’ensemble des soignants exerçant au sein
de l’établissement de santé. Mais un patient peut
être amené à fréquenter plusieurs services dans
son parcours de soins. L’information médicale est
dès lors partagée par un nombre plus important de
soignants. Pour faire face à cette « perte de confi-
dentialité potentielle », certains évoquent la création
d’un tronc commun de données. Ce tronc commun
hébergerait des informations partagées, chaque
service étant par ailleurs susceptible de disposer
de ses propres données qu’il ne partagerait pas
avec les autres services. Cette notion qui implique
une hiérarchisation des données médicales se
heurte aux limites qu’entraînerait une vision trop
partielle de l’état de santé du patient, et susceptible
de nuire à sa prise en charge.
Pour le vice-président du Conseil national de
l’ordre des médecins, Jacques Lucas, les infor-
mations médicales inscrites dans les conclusions
de l’acte médical doivent être présentes dans le
dossier informatisé de coordination des soins et
être connues totalement par le patient qui en est
le véritable propriétaire13.
Dans ces conditions, l’équilibre entre la disponi-
bilité des données de santé, leur confidentialité et
protection s’avère difficile à établir. À notre sens, la
technologie ne permet pas de répondre totalement
à cette problématique. La déontologie et l’adoption
de comportements (ne pas héberger des informa-
tions médicales nominatives de patients sur un site
ou plateforme Internet isolé du SIH, hors poste de
travail et équipements sécurisés, ne pas transférer
des données professionnelles à son domicile via une
messagerie Internet non sécurisée ou un disque
dur externe amovible, changer régulièrement le
mot de passe de sa session de travail, etc.) par
les professionnels de santé sont nécessaires pour
garantir la confidentialité des données.
Dans ces conditions, l’utilisation du SI a des réper-
cussions sur tous les acteurs impliqués dans la vie
de l’hôpital : le personnel, le patient, les familles
et les éditeurs de SI. Elle impose aux concepteurs
SI de réfléchir sur des questions d’ordre multi-
sectoriel tels que les standards, normes, règles
et procédures14, guides de bonnes pratiques15,
protocoles, implications et textes juridiques impor-
tants (conservation des données, hébergement,
authentification, identification, etc.) et interrelations
entre l’usage quotidien du SI, dans les contextes
variés de travail, et de son management. ENCADRÉ 2
Enfin, le classement et le tri des données s’effec-
tuent en fonction de l’importance qu’on leur accorde
et des questions posées par leur utilisation et
8. Elle contribue au bien-être d’autrui. Elle doit répondre
à deux règles précises : l’action entreprise doit être
bénéfique et utile, c’est-à-dire avoir un rapport coût/
bénéfice positif.
9. Elle désigne le fait qu’une personne se donne à elle-
même sa règle de conduite, puisque les termes grecs
autos et nomos signifient respectivement « soi-même »
et « loi », « règle ». Ce principe vise à la participation du
patient au processus décisionnel.
10. Éviter le mal à celui dont on a la responsabilité
(le patient) et lui épargner préjudices ou souffrances
qui n’auraient pas de sens pour lui. Sa finalité implique
que l’on fasse du bien et que l’on s’abstienne de nuire.
Ce principe apparaît dans la maxime hippocratique
Primum non nocere (« D’abord ne pas nuire »).
11. Elle a pour vocation de partager entre tous les
patients les ressources disponibles (en temps, argent,
énergie). Ce principe est étroitement lié aux notions
d’égalité et d’équité qui interviennent dans le processus
d’une décision de justice. Idéalement, toute action
devrait tendre vers une égalité parfaite, mais selon
les circonstances et la nature des personnes, l’équité
s’impose souvent afin d’établir des priorités et une
certaine hiérarchie dans les actes à réaliser.
12. V. Ravix, 2013. Voir bibliographie associée à l’article.
13. J. Lucas, 2013. Voir bibliographie associée à l’article.
14. Table ronde Télémédecine, Journée internationale
de l’lnstitut international de recherche en éthique
biomédicale (IIREB), 19-20 mars 2013.
Conférence « Les enjeux et bonnes pratiques éthiques de
la télé-expertise radiologique en recherche clinique »,
congrès Atlanpôle biothérapie : TIC & Santé, Nantes
10 décembre 2013.
15. Hôpital numérique : Guide des indicateurs des
pré-requis et domaines prioritaires du socle commun.
avril 2012.
Conférence et table ronde « Vers une éthique de l’usage
des systèmes d’information en santé », colloque
« Éthique & NTIC », Espace éthique méditerranéen,
5 décembre 2012.
TEXTES DE RÉFÉRENCE ENCADRÉ 2
• Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique,
aux fichiers et aux libertés.
• Directive 95/46/CE en matière de protection
des données à caractère personnel.
• Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades
et à la qualité du système de santé
• Art. L. 1111-7 CSP relatif à l’accessibilité
de l’information médicale.
• Art. L. 1142-4 CSP relatif au droit à la transparence de
l’information médicale.
• Décret n°2002-637 du 29 avril 2002 relatif
à l’accessibilité aux informations personnelles.
• Code de déontologie médicale : art. 4 al. 1, art. 72 al. 1,
art. 73 al. 1 relatif au secret médical
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REVUE hospitalière DE FRANCE # 562 Janvier - Février 2015 73
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