Les HILLERET - Photos du lycée Montesquieu du Mans

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Les HILLERET ,
une famille étroitement liée au lycée,
en particulier pendant les années de l’occupation allemande.
Ce document vient compléter celui paru sur la lettre info n°15.
René HILLERET, Inspecteur d’Académie de la Sarthe d’octobre 1935 à janvier 1941 puis d’août 44 à mars
45, et de ses cinq fils, tous anciens élèves du lycée : Maurice Ian (1921), Claude Alexandre (1923), Georges
Alfred (1924), Albert Jacques (1926) et Marcel Alain (1932)1.
Né en 1889 à Paris, M. René HILLERET, après de brillantes
études couronnées par une agrégation de langue et littérature
anglaises, devait consacrer toute sa carrière à l’enseignement.
Après la Grande Guerre – quatre ans de front dont Verdun – dont il
sort lieutenant de réserve, Croix de Guerre 1914-18, cité à l’Ordre
du Régiment, il est nommé successivement professeur à Lorient, à
Grenoble, où il est chargé de cours à la Faculté de Lettres, puis
Inspecteur d’Académie du Lot, du Morbihan, et, enfin, de la Sarthe,
où il se fixe définitivement.
Répondant à l’appel du 18 juin 1940 du Général de Gaulle, René
HILLERET, entre dans la Résistance active2, ce qui lui vaut d’être
déplacé d’office, par le gouvernement de Vichy, à Blois, où il est
inscrit sur la liste des otages jusqu’en 1943, date à laquelle il est
relevé de ses fonctions pour refus de révoquer les instituteurs
réfractaires au STO. Il échappe de justesse à la Gestapo. A la
Libération, il reçoit les Félicitations officielles du Gouvernement
britannique pour avoir hébergé pendant l’Occupation des Agents
René HILLERET vers
supérieurs de l’Intelligence Service et d’avoir travaillé avec Londres, ainsi
que
1950.
celles du gouvernement provisoire de la République pour son action émérite
dans
la Résistance. Mais il a eu la douleur de perdre l’in de ses fils, Claude, mort au maquis, dont l’une des rues du
Mans perpétue aujourd’hui le souvenir.
Réinstallé Inspecteur d’Académie de la Sarthe en août 1944, René HILLERET, qui fut toute sa vie
passionné de sport, car il avait été un remarquable athlète universitaire et un grand expert en la matière, se
voit nommé Directeur Régional des Sports à Caen l’année suivante, et, quelques mois plus tard, chargé
d’Inspection Générale de la Jeunesse et des Sports au Ministère de l’Education nationale. Il prendra sa
retraite en 1956.
René HILLERET avait assuré pendant dix-huit ans, de 1947 à 1965 les fonctions de Maire-Adjoint au
Mans, au sein de la municipalité R.P.F., ainsi que celles de Conseiller général de la Sarthe, de 1949 à 1954.
A partir de 1956, il partagera son activité entre ses fonctions à la Mairie du Mans et une importante
œuvre de traduction des œuvres maîtresses de William Falkner, l’illustre romancier américain, comme « Le
Domaine » et « Le Hameau » ou de l’écrivain islandais Halldor Laxness, Prix Nobel 1955, pour son ouvrage
principal, « Le Paradis Retrouvé ». M. René HILLERET était Officier de la Légion d’Honneur, Crois de Guerre
1914-18, Commandeur de l’Instruction publique, Médaille d’Or de l’Education physique, Médaille
Commémorative de Verdun.
1
En annexe un document de Maurice MARREAU, Président du groupement des Volontaires, Combattants et Résistants
de la Sarthe.
2
Jules Bréant, proviseur du lycée pendant la guerre, le cite plusieurs fois dans son discours de 1945.
http://montesquieu.lemans.free.fr/discoursde/breant.pdf
Née en 1891 à Abernethy (Ecosse), Evelyn HILLERET, née Evelyn Guthrie EASSON MACKIE, est contactée dès
le début de l’occupation par les services secrets britanniques.
Elle entre dans la Résistance avec ses fils. Dès janvier 1941, son mari est déplacé d’office à Blois. Dans la grande maison
familiale du 8, rue Saint André, une chambre est réquisitionnée et occupée par un officier allemand. Ce qui n’empêche
nullement la famille de recevoir et d’abriter des résistants ou des réfractaires, par exemple le commandant HUDSON,
du réseau Buckmaster.
Evelyn HILLERET par son courage et son opiniâtreté a été la cheville ouvrière de l’action de la famille dans la
Résistance. Elle était très amie avec Mme BRÉANT, épouse de Jules BRÉANT, proviseur de lycée.
Maurice-Ian HILLERET est né le 13 mars 1921 à Grenoble. Après des études au lycée Gambetta de
Cahors puis au collège Jules Simon de Vannes, il arrive au lycée du Mans en troisième en 1935. Il en sortira
en 1941 avec le baccalauréat de Philosophie. Son action dans la Résistance lui valent entre autres la Croix de
Guerre et une citation à l’Ordre du Régiment.
En 1946, il fonde le ciné-club du Mans avec Yves DRANS (Annexe 4), dont nous avons parlé dans la
lettreinfo 14. En 1947, il gagne le premier prix du concours « Cinémonde » pour la meilleure critique de film.
En 1948, il est nommé Secrétaire du jury du Festival de Cannes.
Il mènera ensuite une carrière de journaliste (Paris-Match, Petit Echo de la Mode, etc.) Il travailla avec
Gaston Palewsky, ministre du général de Gaulle et Jacques Estérel, couturier.
Il disparaît en 2004.
Maurice en 2de, en 1937.
Claude HILLERET naît le 24 février 1923 à Grenoble. Il entre en 1935 au lycée du Mans, en 5ème. On
trouve son nom jusqu’en 39-40. Il entre dans la Résistance en 1942, suit les Arts Décos de Paris en 1943. En
1944 il revient au Mans, instructeur pour le maquis.
Claude Hilleret est Chevalier de la Légion d’Honneur, Croix de Guerre avec Palme à titre posthume, une rue
du Mans porte son nom. (Voir annexe 6)
En 4ème, en 1938.
En 3ème en 1939
Claude vers 1942.
Georges HILLERET est né à Grenoble le 13 novembre 1924. Après des études au lycée Gambetta de
Cahors, au collège Jules Simon de Vannes, il arrive au lycée du Mans en 1935 ; il y restera jusqu’en 1941, en
seconde. Il passera son bac philo plus tard par correspondance. C’est au printemps
42 qu’il prendra contact avec la formation clandestine de l’OCM, dirigée par
Victor DAUM, professeur au lycée. Recrutement, organisation, distribution de
tacts et de journaux clandestins, faux-papiers…Il rejoint le réseau Buckmaster en
décembre 43, sous le commandement du major Hudson. Croix de Guerre décernée
par le Général Hary le 4 octobre 1945. (Voir annexes 1 et 3)
Il commence une carrière de journaliste à Télé 7 jours , qu’il continuera jusqu’à sa
retraite en 90. Il est membre actif du CNEA, Comité national pour l’Education
artistique.<
http://www.cnea.fr/pages/index.html >
Il est membre de l’Association des anciens
élèves du lycée Montesquieu depuis
Georges en
plusieurs décennies.
ème
3
en 1940.
Aujourd’hui.
Albert-Jacques HILLERET est né le 14 août 1926 à Grenoble. Il
entre au lycée en 1935, en 8ème, il y restera jusqu’en 1941. C’est
probablement à la rentrée 41 qu’il entrera à l’Ecole pratique. Il rejoint
ses frères dans la Résistance en 1942. Il a 16 ans. Ses activités dans
la Résistance clandestine peuvent être consultées sur un document du
site. Après l’obtention de son Brevet supérieur en 1945, il fera toute
sa carrière à l’Inspection académique du Mans.
En 7ème en 1938
Vers 1990.
Alain HILLERET naît en 1932 à Vannes. Il entre en sixième en 1943. Voici la liste des professeurs de Lettres et de
Philo qu’il eut au cours des huit années passées au lycée : M. Letessier et Mlle Mouchelet, M. Duhamel, M. Berger, M.
Bouzeau, M. Boisaubert, M. Deshayes, M. Pontoise et M. Gréco.
Il fut écrivain de Science-fiction sous les pseudonymes d’Arcadius et de Allan George (« La Terre Endormie » et
« Planète d’exil » (Rayon fantastique, Hachette). Comme journaliste, il a
collaboré à de nombreux journaux (La Nouvelle République de Bordeaux,
Continent, Paris-Presse, Candide, Paris-Match, Midi-Mini, Télé 7 jours). Il fut
également dessinateur, membre de l’Académie Internationale Greci Marino et
récompensé par la Médaille d’or du Mérite et Dévouement Français.
http://www.noosfere.net/Icarus/livres/auteur.asp?
numauteur=1779&Niveau=Romans
Alain en Philo en 1951.
Annexe 1 : Document de Maurice MARREAU.
Le Mans. Sarthe. Dès le début de l’Occupation, le père de Georges Hilleret, René Hilleret, Inspecteur
d’Académie de la Sarthe, et son épouse, Evelyn Guthrie Easson Mackie, britannique, née à Abernethy
(Ecosse) avaient des liens avec les services de renseignements britanniques. Activités diverses dont
hébergements d’agents britanniques dans la maison familiale, 8, rue Saint André. Monsieur René Hilleret
sera en janvier 1941 déplacé d’office et nommé Inspecteur d’Académie du Loir-et-Cher. Mais le reste de la
famille demeurera au Mans.
C’est au printemps 1942 que Georges Hilleret prendra contact avec la formation clandestine de l’OCM,
région M, dans la Sarthe, dirigée par M. Victor Daum, professeur alors au lycée du Mans, qui sera déporté
par la suite et interné en 1944. Recrutement de partisans, organisation de réseaux, distribution de tracts
et, plus tard, de journaux clandestins (Flamme et Résistance), confections de faux papiers. Réseau
Buckmaster en décembre 1943, sous le commandement du major Hudson à la tête des groupes mobiles
franco-anglais. Edmond Cohin, dit « Ignace » sera le chef du maquis de la Charnie, près de Chemiré-enCharnie, à trente kilomètres à l’est du Mans. En annexe 3, l’énumération précise des actions effectuées avec
son frère Jacques-Albert et Roger Adolphe, interprète à la Feldkommandantur du Mans, avant, et pendant le
débarquement des Alliés, en 1944, jusqu’à la Libération. Toutes ces actions, bien évidemment, ont été
menées en étroite liaison avec les groupes mobiles franco-anglais. Claude Hilleret, son frère, est tombé au
combat de la Charnie le 20 juin 1944, avec Eugène Bec, officier instructeur canadien. Chevalier de la Légion
d’Honneur, Croix de Guerre avec palme à titre posthume, Claude Hilleret a une rue à son nom au Mans.
Les frères de Georges Hilleret, Maurice et Jacques sont titulaires de la Croix de Guerre, décernées le 4
octobre 1945 par le général Hary, Commandant de la 4e région.
Annexe 2 : Article du Maine Libre du 22 décembre 1944.
Je vous apporte la salut personnel du roi d’Angleterre et du général de Gaulle,
dit un colonel britannique aux représentants des groupes mobiles Franco-Anglais…
Un déjeuner officiel servi salons du « Petit-Vatel », et empreint de la plus franche camaraderie réunissait,
autour du colonel britannique attaché à l’état-major du général de Gaulle, les représentants des groupes
mobiles franco-anglais de la Sarthe dont on connaît l’activité au sein de la Résistance, et quelques officiers
britanniques, dont l’un fut parachuté dans notre région pendant l’occupation.
Le colonel était venu remercier les groupes mobiles de l’activité déployée pendant l’occupation et
principalement du travail de sabotage intensif et journalier qui a permis aux armées alliées de libérer la
France beaucoup plus tôt que ne le pensait l’état-major.
Dans le discours qu’il prononça à la fin du déjeuner, il souligna l’importance des actes accomplis par les
résistants des groupes mobiles en coopération avec les officiers anglais parachutés par la Royal Air Force.
« Ces actes, déclara-t-il, ont avancé de six mois la date de la libération de la France et ont dépassé toutes
nos espérances « . Il termina en déclarant : « Je vous apporte le salut personnel de S.M. le roi d’Angleterre
et du général de Gaulle ».
Au cours de l’après-midi, Français et Britanniques se rendirent au Grand Cimetière sur la tombe des trois
héros, Paul Illias, Claude Hilleret et Jean, officier britannique, tombés au champ d’honneur pour la
Libération.
Des fleurs furent déposées sur les tombes de ces soldats auxquels Le Mans a fait il y a quelques semaines
de grandioses funérailles. Puis tous observèrent une minute de silence.
Cette réunion simple mais émouvante symbolisait d’une façon concrète cette fraternité qui nous unit au
peuple britannique, fraternité née de l’Entente Cordiale et renforcée pendant les longues années
d’occupation et qui se continuera dans la paix pour le plus grand bien de nos deux grandes nations.
Annexe 3 :Activités dans la résistance clandestine de Georges et Jacques HILLERET en
collaboration avec Roger ADOLPHE, interprète à la Feldkommandantur 755.
Renseignements fournis –
1° - Forêt d’Ecouves bombardée deux fois
Forêt de Perseigne où deux sur trois des dépôts (Monika, Bemo et Einheit Weber) ont été
anéantis – 37 Allemands tués, de nombreux blessés. Il est à noter que ce dépôt était parmi les plus
importants de l’Ouest et était secret, et a contribué puissamment à l’enfoncement du front par les
Américains, par retard dans l’arrivage des munitions.
Forêt de Clinchamps, près de Mamers (un bataillon de SS Panzergrenadiers mis hors de combat
par bombardement aérien, avec ses réserves d’essence et de munitions).
Forêt de Sillé-le-Guillaume, plusieurs fois bombardée, dépôts anéantis.
Donné aussi les plans des dépôts Moltke, situés entre La Flèche et Le Lude.
2° Dépôts de carburants –
200 000 litres détruits en forêt de Maresché, près de Beaumont-sur-Sarthe, par bombardement
aérien.
3° Luftwaffe – Bombes volantes –
Donné les plans de l’installation située à Villaines-la-Carelle (rampe et dépôt souterrain de V2).
Donné les plans de la « Stellung Made » où se trouvaient les appareils ondes hertziennes
destinées à diriger les V2 partant de Villaines (base jamais utilisée en raison du repli des Allemands). Made a
été attaquée deux fois par la R.A.F. (près de Les Mées).
Emplacement de la rampe de V1 détruite par lé R.A.F. près de Bertreville St. Ouen (SeineInférieure).
Donné l’emplacement à Lourai(Orne), de l’escadrille de chasse Moelders, dont la plupart des
appareils ont été détruits.
Installation téléphoniques de la Luftwaffe situées entre St. Paterne et Alençon, réseau
totalement saboté et inutilisable (Georges HILLERET et Roger ADOLPHE ont personnellement pris part à
cette destruction).
4° - Installations téléphoniques Destruction quasi complète des installations téléphoniques allemandes dans le secteur
Alençon,Bellême, Mamers, Fresnay-sur-Sarthe, Le Mans et La Flèche (voir les unités Manne, Ida, etc.),
destructions opérées à la fois par le groupe Albin dont Jacques HILLERET faisait partie, et le groupe de
Malik SEYERS.
5° - Itinéraires suivis par convois –
Panzerdivision L montant au front le 8 juin, attaquée à plusieurs reprises sur la route et
parvenant aux abords de Caen avec de fortes pertes (attaques à javron, etc.)
Sabotage des chemins empruntés par les convois entre Fresnay et Alençon, Le mans et Alençon,
région de Château du Loir, Fresnay à Mamers (A Fresnay, cinq véhicules détruits en une fois, tous les
occupants tués).
6° - Coopération avec la 5ème D.B. U.S. –
Renseignements transmis au major PATEY de la 5 ème D.B. Américaine. (Panzerdivision
Hohenstaufen et une S.S Panzergrenadiere dans la secteur Marolles-Mamers où ils ont subi de fortes
pertes).
Donné au major Pathey l’itiniraire d’une division S.S. Adolf HITLER et la division
GROSSDEUTSCHLAND passant au Sud-est de Paris et devant se retrancher sur le canal de l’Ailette,
d’après une indiscrétion d’un officier de l’A.O.K. 7 (7ème armée allemande, Général VON DOLHMANN
commandant).
7° - Renseignements sur les opérations effectuées contre le maquis,
en collaboration avec Alain DENINIOLLE, contacté le 25 juin.
Donné l’emploi du temps journalier de la gestapo du Mans, prévenu à temps les maquis issus du
groupe Albin, donné les itinéraires des voitures de la gestapo, a permis un grand nombre d’opérations
impossibles à réaliser sans ces renseignements.
8° - Itinéraires des patrouilles de la Feldgendarmerie Trupp692
de Mamers, commandée par le lieutenant KORTE.
Renseignements transmis à Hudson et à Malik SEYERS, dont le P.C. se trouvait près de Mamers
(Thoigné).
9° - Papiers allemands Confection de faux certificats allemands de toutes sortes, de l’organisation TODT et de faux
WAFFENSCHEIN (certificats de ports d’armes) utilisés par 27 hommes dont HUDSON en mission
permanente dans les lignes ennemies, sur les bords de la Loire.
Cachets dérobés dans les Kommandanturs du Mans et de Mamers. Ces papiers allemands ont
servi non seulement au groupes mobiles Franco-Anglais mais à quantité de ressortissants du 2è Bureau et de
L’Intelligence Service anglaise.
Annexe 4 Un article du Maine Libre de 1946.
Une bonne nouvelle pour les amateurs de cinéma, la fondation au Mans d’un ciné-club.
Quand Marcel Pagnol présentera lui-même l’un de ses films, au Rex…
M. Maurice HILLERET, fils de l’Inspecteur général des Sports, délaisse volontiers le javelot pour le
stylo, qu’il manie avec élégance. Deux volumes de lui – un roman et un recueil de nouvelles – sont annoncés.
Précisons – car tous les détails concernant nos écrivains ont leur prix – qu’il utilise le stylo qui se qualifie luimême d’atomique, et qui est, en effet, une invention destinée à ceux qui rédigent vite, au fil de l’événement.
Ce détail peint notre auteur. Il est intensément moderne et se situe volontiers à l’avant-garde des Arts et
des Lettres.
Le studio où notre enquête matinale le surprenait hier est évocateur de ses préoccupations raffinées,
avec ses gracieuses aquarelles et ses portraits de stars. Mais n’omettons pas d’ajouter que le puissant profil
du général de Gaulle attire premièrement l’attention du visiteur, non loin d’images infiniment émouvantes, qui
rappellent l’héroïque sacrifice de ce jeune artiste plein de promesses que fut aussi Claude HILLERET, soldat
de la Résistance, tombé au champ d’honneur.
Pour être purement esthétique, notre entretien n’en fut pas illuminé, comme en transparence, par la
noble ambition de servir qui est l’apanage de la jeunesse.
Depuis plusieurs années, M. Maurice HILLERET est attiré par le « septième art » , et surtout depuis la
date de la Libération. Sait-on assez quelle lutte passionnée mène le cinéma français pour préserver son
rayonnement ? D’autre part, le cinéma anglo-saxon nous apporte un courant qui ne cesse de se renouveler et
dont nous avons à tirer les leçons.
D’une manière ou d’une autre, les producteurs dignes de ce nom ont un besoin urgent d’être soutenus, le
public d’être éclairé, devant l’avalanche des productions médiocres ou malsaines. C’est l’idée-mère des CinésClubs, qui pullulent en France depuis deux ans.
- Plus de 100 sections, groupant plus de 100 000 adhérents, forment la Fédération Française des Cinésclubs, explique M. Maurice HILLERET. Il en existe à peu-près dans tous nos départements de l’Ouest,
à Nantes, en particulier, fort remarquables par leur activité.
- De là vous est venue la pensée de créer au mans une section ?
- C’est cela même.
- Avez-vous rencontré des appuis ?
- Certes, et d’abord chez les « Amitiés Franco-Alliées » et le Comité « France-URSS » ; leurs
dirigeants, M. Henri DELGOVE et le docteur GABELLE, ont accepté la vice-présidence du Club. C’est
provisoirement dans le local même des « Amitiés Franco-Alliées » que nous recevrons les premières
adhésions. Notre secrétaire général est un étudiant passionné de cinéma , M. Yves DRANS ; tandis
que nous aurons pour conseiller technique M. Robert CRANSAC, dont nul n’a oublié les bons débuts
cinématographiques (Un rôle de mousquetaire dans le film « L ‘arrivée au pouvoir de Louis XIV » Note
de A. Vivet). Le directeur du cinéma « Rex », M. BÉALAY, nous accorde la disposition de cette salle.
Enfin, Mme CHELET, MM. Yvon BELAVAL, Marcel DANCETTE, Pierre DESNOS, Pierre PASQUET
nous apportent également leur appui autorisé.
- Félicitations pour cet heureux départ. Mais comment fonctionnera le nouveau Club ?
- Nous organisons, à l’intention de nos adhérents, des séances qui seront, en principe, bihebdomadaires,
sans parler d’une permanence avec bibliothèque, revues, etc. , qui viendra dans la suite.
- Quelle sera la tendance de ces représentations ?
- Nous puiserons dans le répertoire de la Cinémathèque de Paris. Nous commencerons par les chefsd’œuvre indispensables à une véritable culture cinématographique : Émile et les détectives, Le
cuirassé « Potemkine », le Napoléon d’Abel Gance, les films de Méliès, Charlot, Jean Painlevé, etc.
-
-
Certaines séances seront consacrées plus tard, à des films d’avant-garde, de recherches, destinés à
un public plus évolué Le champ est infini. Les possibilités du cinéma en couleur seront aussi explorées
par nous. Essentiellement, nous voudrions apprendre à voir au public, le plus souvent aveugle, des salles
obscures, qu’il en arrive à rejeter spontanément les inepties et les fadaises ; enfin, rien que des
versions originales, restituant l’atmosphère de la création des films. Nous sommes, vous le voyez,
ambitieux…
Mais cette ambition est louable. Je regrette seulement que vos séances paraissent réservées à un
public adulte. La jeunesse des cinémas n’a que trop le goût déformé.
Aussi bien, aurons-nous un secteur scolaire, avec séances réservées aux jeunes. J’ajoute que nos
séances seront précédées de présentations explicatives, confiées à des personnalités. Ainsi Marcel
Pagnol commentera lui-même, en fin d’année, son film Merlusse…
Et vous commencerez quand donc ?
Le 29 octobre, avec Quatorze Juillet , de René Clair, présenté par Jean Mitry, professeur d’Histoire
du Cinéma ; séance suivie, le 9 novembre, par Le Chemin de la Vie, le célèbre film soviétique.

L’entretien dériva, ensuite, sur des sujets de littérature générale, qui furent à M. Maurice HILLERET
l’occasion de monter ses goûts et ses relations, qui sont de qualités. Mais nous le louerons surtout d’avoir
obéi à l’exemple de son sublime frère et de son respectueux père, en s’efforçant de travailler, lui aussi, selon
sa mesure, au progrès et au salut de la pensée française.
C’est pourquoi nous sommes heureux d’être les premiers dans la presse sarthoise à saluer la naissance du
Ciné-Club.
Louis GUÉRANDE
Annexe 5 : deux articles du Maine Libre du 6 mai 1999 à propos du retour en
Sarthe du Major HUDSON3.
C’est une page émouvante de l’histoire de notre département qui sera de nouveau ouverte
le 8 mai prochain avec la venue au Mans du Major HUDSON.
Cet ancien commandant des Forces Spéciales britanniques fut parachuté en France dès
1942 pour animer les réseaux français de résistance, mais, capturé par la police de Vichy du
côté de Clermont-Ferrand, il se retrouva condamné à la forteresse pour une période de cinq
ans. Heureusement, quelques mois plus tard, parvenant à s’évader de sa cellule, il regagnera
son pays natal, via l’Espagne.
Début 44, en prévoyance du débarquement, Sydney HUDSON fait partie d’un second
parachutage composé cette fois d’officiers anglais. « Il se retrouve le 24 avril sur le
territoire français avec la mission de coordonner, département par département, l’action
entre les maquis et le commandement allié. Ce fut le début des Groupes Mobiles FrancoBritanniques », nous indique le colonel LOISEAU qui est à l’origine du retour d’HUDSON, 55
Sydney HUDSON
ans plus tard.
Pour le président du Groupement des Volontaires Combattants et Résistants de la Sarthe
qui souhaitait depuis longtemps de recueillir le témoignage du Britannique, il est temps que la lumière soit faite sur un
certain nombre de faits liés aux dernières heures de l’occupation allemande.
« On a dit et écrit beaucoup de contre-vérités sur cette époque et notamment sur le plastiquage du central
téléphonique, au sous-sol de la poste, place de la République dont il est l’auteur. Alors, je suis entré en contact avec
Hudson grâce à un ami de l’Organisation de Résistance des Armées, Jehan de LAROCHEFORDIÈRE et il a accepté de
venir présider les cérémonies du 8 mai. J’espère que son témoignage mettra un terme à bien des inepties entendues
depuis la Libération ».
C’est début mai 44, venu à bicyclette depuis Issoudun, que celui qui allait porter le nom de code d’ »Albin » entrait
en contact dans la Sarthe avec un certain « Ignace », chargé de mettre en place ce qui deviendrait par la suite le
maquis de la Charnie. Basé au château des Bordeaux (la propriété du dit « Ignace »), près d’Amné-en-Champagne, ce
groupe de résistance dépendait des Groupes Mobiles Franco-Anglais et était chargé de récupérer les parachutages
d’armes tout en commençant à déstabiliser l’ennemi en prévision du 6 juin.
Bientôt fort d’une cinquantaine d’hommes, ce maquis prit très vite l’habitude de
vider les lieux chaque soir et d’aller camper dans les bois car la présence au château de
nombreux hommes n’était pas sans faire jaser dans le coin. « D’ailleurs, il s’en faudra
de peu à plusieurs reprises qu’Albin ne soit arrêté à la suite de guet-apens des
Allemands, mais il réussira toujours à s’en sortir. » Ce ne sera pas le cas de Claude
HILLERET qui sacrifiera sa vie le 20 juin en compagnie du radio anglais BEC pour
couvrir la fuite des maquisards quand la Gestapo piègera le réseau au cœur de la forêt
de Charnie ; ou encore fin juillet, entre Parigné et Le Grand-Lucé, quand l’attaque d’un
convoi allemand tournera mal.
« Hudson était quelqu’un de très habile, par exemple faisait semblant de bégayer »,
nous racontera Jacques HILLERET, retraité au Mans. « Quelques semaines avant le
drame, il était venu à la maison, malgré la présence des Allemands. Mon frère avait
Sydney HUDSON en
quitté les Beaux-Arts à paris. Il avait 21 ans et voulait se battre. Pour nous, la résistance
2001. Il décèdera en
allait de soi ! »
2005, à l’âge de 94
Le 24 juillet, « Albin » allait définitivement marquer la mémoire des Manceaux en
ans.
posant 5 kilos de plastic dans le sous-sol de l’hôtel des Postes, l’explosion soufflant le tout
nouveau central téléphonique que les nazis s’apprêtaient à mettre en service pour
accélérer les communications entre le front de Normandie et l’Allemagne. Etait-il seul ou accompagné ?
Samedi prochain, il sera parmi nous pour se recueillir mais aussi pour répondre aux nombreuses questions qui lui
seront posées car bien des zones d’ombre demeurent liées à cette époque.
3
http://fr.wikipedia.org/wiki/Sydney_Hudson
Le témoignage de Jean RAGUIDEAU
A l’époque des faits, c’est-à-dire durant l’été 44, Jean RAGUIDEAU4 avait 24
ans.
Nanti d’un baccalauréat « math’élem », il avait postulé en février 1939 pour un
emploi aux PTT et s’était retrouvé assez vite Place de la République au service des
dérangements téléphoniques. « Nous étions au 2e étage de l’immeuble et
curieusement mon père qui occupait le poste de Contrôleur principal des recettes,
travaillait au premier. Peu à peu, au fur et à mesure que les renforts allemands
remontaient du Sud pour venir épauler le front de Normandie, on a senti la tension
monter parmi les soldats. Jusqu’à présent on avait travaillé ensemble sans
problème particulier. Il y avait encore peu d’abonnés au Mans et dans la Sarthe.
Mais avec l’annonce du débarquement, tout s’est accéléré pour les deux
fonctionnaires allemands. La Gestapo venait leur réclamer de plus en plus de lignes
Jean Raguideau
en 4è en 1934
et c’est là qu’ils décidèrent d’installer au sous-sol un nouveau répartiteur destiné au
central allemand situé en face, à la Bourse du Commerce. »
Bien vite, grâce à Pierre RAGUIDEAU (le frère de Jean) qui militait au sein du
groupe mobile franco-britannique en compagnie de Claude HUREAU, le major sut
que les Allemands avaient mis en chantier un nouveau central plus puissant. « Mon
père les avait amenés quelquefois en repérage des lieux derrière la Poste. J’ai su
ensuite, car il a été déporté à cause de l’attentat et je ne l’ai jamais revu, qu’il
avait fourni un double des clés du sous-sol à HUDSON. L’explosion eut lieu très
tard un soir et une partie du plancher s’est soulevée.
Les deux portes de l’entrée furent soufflées et je me
souviens de la peur rétrospective d’un des Allemands
En Math élem en
qui avait travaillé tard au répartiteur. Mais je ne peux
1938
pas vous dire si Hudson a fait son coup tout seul ou
non. »
C’est à l’occasion d’une arrestation de HUREAU et de Pierre RAGUIDEAU un
peu plus tard que la Gestapo fit le rapprochement avec l’attentat de la Poste et
envoya le malheureux Pierre RAGUIDEAU mourir, 3 jours seulement avant la
Libération du Mans.
En 2007, lors de
l’Assemblée
générale.
4
Jean RAGUIDEAU entra en 6è à la rentrée 31 ; il en sortit avec le bac maths en 1938. Aujourd’hui il est un des doyens de
l’association des anciens élèves, adhérent depuis toujours. Il participe encore aux différentes réunions, repas, qu’ils soient à Paris ou
au Mans.
Annexe 6 : la page que Joseph ESTEVÈS consacre à Claude HILLERET dans son livre
« 200 FIGURES DE LA RESISTANCE ET DE LA DEPORTATION EN SARTHE » dont une nouvelle édition est
prévue en septembre 2009.
Claude HILLERET
1923 - 1944
Au Mans, une rue, du quartier de la Mariette, honore la mémoire de Claude Hilleret mort pour
la France à l’âge de vingt ans. C’est au cours des combats de la Libération que ce jeune homme
trouve une mort héroïque deux semaines après le Débarquement.
Fils de René Hilleret, l’Inspecteur d’Académie de la Sarthe muté d’office à Blois par le
régime de Vichy, il s’engage dans les GMFA (Groupes Mobiles Franco-Anglais). On a aussi surnommé,
réseaux Headmaster, ces groupes de harcèlement équipés et dirigés par les Britanniques pendant
l’été 1944. Comme Paul Ilias ou Maurice Hureau, Claude Hilleret fait partie de ces combattants
déterminés qui s’illustrent dans notre département, en cette période cruciale. Leurs discrètes
actions de guérilla ont joué un rôle capital sur l’arrière des forces allemandes. A ce moment le plus
décisif de la Libération de la France, ils ont essayé de compenser les multiples arrestations de leurs
prédécesseurs. En assurant la présence continue de la Résistance, ils ont réussi, mais à quel prix,
des coups de main ponctuels mais propices à l’avancée des Alliés.
Aux confins de la Sarthe et de la Mayenne s’étend la forêt de la Grande Charnie. Elle est
située entre deux grands axes très utilisés par les convois allemands. La route Nationale 157 : Le
Mans-Rennes, passe juste au sud alors que la grande voie ferrée entre Paris et la Bretagne
serpente à quelques kilomètres au nord. C’est donc un endroit opportun pour des francs-tireurs en
cette période agitée. Au printemps 1944, l’un des principaux maquis de la Sarthe (25 à 30 hommes)
s’installe dans ces bois étendus sur près de trois mille hectares. Le major Sydney Hudson en a
confié la direction à Edmond Cohin dit « Ignace », domicilié aux Bordeaux à Amné-en-Champagne.
Claude Hilleret devient son adjoint et le lieutenant anglais Francisque-Eugène Bec, alias « Hugues
ou Borer », est l’instructeur technique du groupe. Trois aviateurs alliés abattus à Villaines-la-Juhel
le 9 juin et quatre sénégalais évadés d’un commando de prisonniers du camp d’Auvours, se trouvent
en leur compagnie. Toujours aux avant-postes, Claude Hilleret exécute des missions primordiales. Il
réalise certaines liaisons qui sont des modèles de courage. De jour comme de nuit, il fait preuve de
la plus grande audace pour récupérer, transporter, cacher les armes et les vivres parachutés.
Pendant la nuit du 13 juin 1944, deux avions de la Royal Air Force les ont ravitaillés.
Le 20 juin, alors que ces maquisards espèrent un nouveau parachutage pour la nuit suivante,
ils entendent à 21h 15 la confirmation : « Le chacal mange les chevaux, deux fois ». Mais victime
d’une trahison ou des inévitables bavardages de certains habitants du secteur, le maquis de la
Charnie est attaqué. De nombreux miliciens, fervents soutiens du régime de Vichy aident et guident
une centaine d’Allemands. Le petit groupe des FFI revenant de Sillé est repéré dans un étroit
vallon du côté de Chemiré-en-Charnie, près de l’ancienne abbaye bénédictine d’Etival. Vers 21h 30,
les Allemands, puissamment armés, ouvrent le feu à cinquante mètres du groupe. Le lieutenant Bec
est tué; l’accrochage devient périlleux. Cohin donne l’ordre de dispersion profitant de la nuit qui
commence à poindre. Faisant preuve d’un sang-froid et d’un courage remarquables, le lieutenant
Hilleret protège la retraite de ses compagnons en se lançant à l’assaut de l’ennemi. Tel Gavroche sur
les barricades, ce rebelle de vingt ans se précipite avec bravoure face à l’adversaire (une dizaine
d’Allemands et deux miliciens restent sur le terrain). « En avant, c'est pour la France ! » seront ses
derniers mots…
Et c’est pour sa patrie, qu’il tombe en héros comme l’officier franco-britannique qui est venu,
lui aussi, combattre la barbarie nazie. Ils reposent ensemble en terre sarthoise, maintenant au
cimetière du Mans. En forêt de Charnie, une stèle rappelle l’endroit où ils ont résisté et personne
ne doit l’oublier. A la rentrée 1944-1945, René Hilleret, le père de Claude, retrouva son poste à
l’Inspection Académique du Mans.
Annexe 7 . Article du journal « Les Nouvelles, l’Echo Fléchois » du 7 mai 2009.
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