L’islam de France : le religieux au service de la diplomatie :
C’est au cours de la première guerre mondiale que cette construction
du fait musulman dans sa double acception : l’Islam en et Islam de France,
voit le jour.
En 1916, les pouvoirs publics français manifestèrent leur intention de
donner une traduction concrète à l’idée d’utiliser des personnalités
musulmanes originaires de l’empire dans le jeu diplomatique international.
En effet, une double mission, politique et militaire, connue sous le nom de
mission d'Egypte était envoyée au Hedjaz auprès du chérif de la Mecque. La
mission politique était composée uniquement de personnalités
musulmanes d'Afrique du Nord et d'Afrique Occidentale Française
et elle
était dirigée par ’Abdelqader Ben Ghabrit
. Ces objectifs, définis par le
président de la république lui-même
, étaient par ordre d’importance
d'entrer en relation avec le Chérif de la Mecque après la révolte arabe de
1916, afin de lui manifester le soutien de la France et de ses populations
musulmanes dans sa lutte contre la domination ottomane, de souligner la
magnanimité de la France à l’égard de l’Islam et des Musulmans, de
répondre à la question sur le khalifat si elle était posée de la manière
suivante : « vous indiqueriez très nettement que les affaires d'obédience
Pour l'Algérie, de l'Agha Sahraoui et Si Mustapha Cherchali, professeur honoraire à la medersah d'Alger
et cadi de Draâ El Mizen; pour la Tunisie, de Si Chadly Okby, caïd de la banlieue de Tunis et de Si Larbi
ben Ech Cheikh, notable de la régence; pour le Maroc, de Si Ahmed Skiridj, nadir des Habous à Fes-Djedid;
pour l'Afrique occidentale, du cadi supérieur Abdou Kane.
Plus connu sous le nom de Si Kaddour Ben Ghabrit, cet important personnage avant sa mission au Hedjaz,
avait déjà joué un rôle essentiel dans l'établissement du protectorat marocain, et était devenu un des
principaux inspirateurs de la politique musulmane de la France. Simple drogman au début de sa carrière, il
devint consul à Fès, ministre plénipotentiaire honoraire et recteur de la mosquée de Paris; ceci pour ces
fonctions en France. Il était également chef du protocole du makhzen marocain et conseiller des sultans
Alaouites et ce jusqu'à sa mort le 24 juin 1954.
Lettre en date du 1er septembre 1916, du ministre des affaires étrangères à Ben Ghabrit, dans laquelle les
caractères et les objectifs de la mission politique sont définis.