Université 1. Le bloc opératoire 2. Les sutures et le fil chirurgical 3. Instrumentation chirurgicale & stérilisation des dispositifs médicaux 4. Principes d'électrochirurgie 5. La « Safe surgery checklist » au bloc opératoire 6. La revue de mortalité et de morbidité 7. La chirurgie ambulatoire Le bloc opératoire Pr L.Abid. UNIVERSITE ALGER 1.FACULTE DE MEDECINE.1ére POSTGRADUATION.CHIRURGIE GENERALE Le bloc opératoire Pr. Larbi ABID Service de chirurgie viscérale & oncologique Hôpital Bologhine, Alger Rappel historique Dans un premier temps, dans les hôpitaux, les actes chirurgicaux se faisaient dans les salles d’hospitalisation : les chirurgiens opérant les malades dans leur lit. Ce n’est qu’au 18ème siècle avec les hôpitaux militaires qu’apparaîtra une salle annexe à l’hospitalisation, salle réservée aux interventions chirurgicales. Ces salles d’opération se sont multipliées en même temps que s’étendait le champ des indications opératoires… Mais c’est seulement au 19ème siècle, avec les avancées sur la notion d’asepsie opératoire et la prise de conscience du risque de contamination aéroportée, que les locaux opératoires ont été isolés du reste de l’hôpital. Au total, le bloc opératoire est issu de ces évolutions mettant en évidence le besoin d’un environnement de plus en plus lourd et complexe de matériel, de diagnostic, d’assistance et de contrôle. Parallèlement, l’équipe opératoire s’est agrandie et diversifiée. Ces exigences croissantes ont conduit aux évolutions techniques : matériel et mobilier spécialisé, protection contre les contaminations, rapprochement de la stérilisation, éclairage du champ opératoire, traitement de l’air, et pour la rationalisation du personnel, les salles ont été regroupées en blocs opératoires. Mais avec la spécialisation des activités chirurgicales, on assiste à une évolution vers des blocs opératoires spécialisés qui trouvent leurs limites dans la difficulté de faire fonctionner correctement un ensemble de plusieurs salles. Le caractère déterminant des circuits (entrée et sortie des malades, personnel et matériel) influence l’implantation des blocs opératoires dans le bâtiment et sa position dans l’ensemble de la structure hospitalière. Tout cela pour souligner que le bloc opératoire est une enceinte spécifique construite selon une architecture bien déterminée et régie par des procédures particulières. Les comportements, les circulations des personnes, des malades, des matériels et des déchets peuvent être à l’origine, même dans le bloc opératoire le mieux conçu, de dysfonctionnements en matière d’hygiène et d’éventuelles infections nosocomiales. La salle opératoire au début du 20ème siècle en Europe et aux USA 1 L’Organisation du Bloc Opératoire Au sein d’un hôpital, le bloc opératoire représente une des pièces maîtresses du plateau technique. C’est un lieu où sont pratiqués des actes de haute technicité nécessitant d’importants impératifs de sécurité. La diversité des actes réalisés, le fait qu’ils soient pratiqués en activité réglée ou en urgence, la cohabitation entre différentes spécialités, la multiplicité des ressources humaines engagées, le nécessaire respect des réglementations et le souci permanent de la qualité sont autant d’éléments à prendre en compte dans la bonne gestion d’un bloc opératoire. Son organisation est une entreprise particulièrement complexe à mettre en route. De nombreux jeunes chirurgiens (souvent dans le cadre du service) ont eu à faire démarrer un service de chirurgie (et donc une activité opératoire) dans un hôpital de wilaya ou de daïra sans qu’ils aient été formés dans ce sens, durant leur cursus de formation. De multiples aspects doivent être pris en compte dont la taille et le mode de fonctionnement de l’établissement où l’on exerce. Le bloc opératoire d’un grand centre hospitalier universitaire ne peut être organisé comme celui d’un hôpital régional plus modeste et encore moins comme celui d’un établissement privé. La prise en compte des facteurs humains est essentielle dans une période où la pénurie de personnels est criarde. La lutte contre les infections du site opératoire représente un des éléments majeurs dont il faut impérativement tenir compte dans cette organisation du bloc opératoire. Le Bloc Opératoire Pluridisciplinaire Si dans beaucoup de nos CHU de type pavillonnaire, le bloc opératoire est contigu au service, c’est le concept de bloc opératoire pluridisciplinaire unique, solution beaucoup moins coûteuse et plus rationnelle qui prédomine tant dans nos EPH qu’à travers le monde. L’avantage essentiel est de mettre en commun les équipements mais aussi la majorité des personnels : anesthésistes, infirmiers de bloc, aides soignants, agents de service, brancardiers. L’unité de réanimation ou la salle de réveil est généralement attenante à ce bloc opératoire Outre le bloc pluridisciplinaire, la notion de salles polyvalentes s’est également développée, en s’appuyant sur le même principe de rationalisation et de mise en commun des moyens humains et matériels. Même si on continue toujours à distinguer une salle pour la chirurgie orthopédique (ou la chirurgie cardiovasculaire) et une salle pour les urgences bien que les normes actuelles de bionettoyage entre deux interventions autorisant cette polyvalence sans risque supplémentaire dans la plupart des cas. Dans nos hôpitaux, en Algérie, tout dépend de l’importance de l’activité chirurgicale et du nombre de salles opératoires. A chaque fois où on peut consacrer une salle opératoire pour la chirurgie « hyperpropre », celle-ci est individualisée. Il en est de même pour la salle dédiée aux urgences surtout s’il existe un bloc opératoire distinct au niveau du Pavillon des Urgences. Une surface moyenne de 40 m2 est raisonnablement nécessaire pour un fonctionnement correct, compte tenu des appareillages actuels et de l’évolution des techniques innovantes. Circuits du bloc opératoire Il s’agit d’un sujet difficile et complexe ; de nombreuses possibilités existent, qui vont toutes avoir des conséquences sur les flux au sein du bloc opératoire. Un des principes fondamentaux à respecter est celui de « la marche en avant », en allant du plus sale vers le plus propre. Ce concept de l’asepsie progressive, constitue un des remparts essentiels à l’infection au bloc opératoire. Il délimite cinq zones d’asepsie différente 2 et croissante, tout le long du cheminement, depuis l’extérieur du bloc opératoire jusqu’à la table d’opération. L’asepsie progressive va être obtenue par la mise en place d’une surpression d’environ 15 pascals entre différentes zones du bloc opératoire et le franchissement de «douanes» dont le rôle est de réduire l’introduction de micro-organismes de la zone d’amont vers la zone d’aval. La conception du bloc opératoire – La première douane permet ainsi le passage de l’extérieur du bloc à la zone commune du bloc opératoire, s’appliquant aussi bien au chirurgien (sas du vestiaire) qu’au patient (sas de transfert) et au matériel (sas de décartonnage). – La deuxième douane conduit à la salle d’intervention, par l’intermédiaire de la salle de préparation pour le chirurgien, de la salle d’induction pour le patient et de l’arsenal stérile pour le matériel. – La zone opératoire doit être approchée par des personnes ou du matériel ayant reçu une préparation spécifique : pour le patient, il s’agit de la préparation et de l’antisepsie cutanée, pour l’équipe opératoire du lavage chirurgical des mains et de l’habillage stérile, et pour le matériel stérile de la sortie de son emballage ou de son contenant. Cette zone « hyperpropre » autour de la table d’opération peut par ailleurs être délimitée et signalée par un revêtement de sol de couleur différente. zone 4 Zone 1 équipe opératoire table d'instruments zone 2 zone 3 salle d'opération préanesthésie SAS vestiaire Salle de reveil salle de détente Reserve matériel Transport patient zone 5 Exterieur SAS décartonnage Organisation du bloc opératoire (d’après Buisson et col.) 3 Pendant très longtemps, le dogme retenu pour les circuits au sein du bloc opératoire a été celui du double circuit, isolant le propre et le sale, sachant qu’il existe de très nombreux circuits en dehors des circuits des personnels et des patients : matériel, déchets, linge. La solution idéale proposée est de séparer les entrées et les sorties, sans possibilité de croisement, autant pour les patients que pour les personnels du bloc, les matériels et les déchets, mais ceci a pour principal inconvénient d’occuper beaucoup de place. La tendance actuelle est revenue au simple circuit, au moins pour les matériels et les déchets. Ce principe largement adopté est tout à fait fiable dans la mesure où tous les matériels et les déchets sont évacués dans des contenants étanches et solides permettant d’éviter toute contamination du circuit. L’un des avantages essentiels du simple circuit est le gain de place. En réduisant les accès, les mouvements d’air et les risques d’aérocontamination. Pour accéder au bloc opératoire, il faut se changer intégralement, et passer plusieurs sas de sécurité. Pour les personnels, le secteur sensible est celui des vestiaires. Il est actuellement admis de mettre en place des vestiaires divisés en deux zones, une « zone entrante » où l’on laisse ses vêtements extérieurs avant de revêtir les habits de bloc et une « zone sortante » où les mêmes habits sont déposés avant de reprendre les vêtements extérieurs. Pour diminuer encore les risques, les portes de ces vestiaires ne s’ouvrent que dans un sens. Il est anormal de rencontrer dans nos hôpitaux médecins et paramédicaux portant des tenus de bloc, utilisées comme blouse pendant la journée mais également pour les interventions chirurgicales. La tenue de bloc doit être d’une couleur précise et n’être portée que dans la zone du bloc. Si le personnel de santé utilise des tenues de bloc pendant leurs autres activités, elles doivent être d’une autre couleur que celle utilisée pour les actes opératoires. Pour les patients, des systèmes de passe-malade ainsi que systèmes de supports de translation sont utilisés. La qualité de l’air au bloc opératoire est bien sûr un élément majeur à prendre en compte dans le cadre de la lutte contre les infections nosocomiales, en empêchant l’introduction et la stagnation de particules susceptibles d’infecter le site opératoire. On distingue des systèmes de flux dits « unidirectionnels » ou « laminaires », qui peuvent être horizontaux ou verticaux, et des systèmes non directionnels dits « flux turbulents ». L’équipement du bloc opératoire L’équipement du bloc influe directement sur l’organisation du bloc opératoire, en particulier les tables par leur retentissement sur la gestion des flux. La mise en place de bras plafonniers, anesthésiques ou chirurgicaux, est un concept qui améliore l’ergonomie, facilite 4 le bionettoyage et apporte une meilleure accessibilité. Nos anciens bloc en sont dépourvus mais dans les nouvelles structures hospitalières, la plupart des chefs de service ont opté pour ce type d’installation (Ex : CAC de Batna). À côté de bras élémentaires assurant les branchements habituels et servant de support à un bistouri électrique, on assiste de plus en plus au développement de bras lourds recevant en particulier des colonnes endoscopiques. Ces bras peuvent, si besoin, être escamotés de l’espace chirurgical lors d’une intervention où ils ne sont pas utilisés, et cela grâce à un large débattement. Table d’opération, scialytique et bras anesthésiste Il existe deux grands types d’équipements au bloc opératoire : – Les équipements de base : tables d’opération, éclairage opératoire principal, éclairage opératoire mobile d’appoint, appareil d’anesthésie ou bras anesthésiste, mur technique : il s’agit de produits stabilisés à durée de vie importante. – Les équipements spécifiques : bistouris électriques, instrumentation, colonne de cœliochirugie, colonne d’arthroscopie, échographe, mobile de radiologie, négatoscopes, microscope opératoire, endoscopes, équipements laser , bistouris à ultrasons, aspiration mobile, appareil de circulation extracorporelle, générateurs de radiofréquence de microwaves, et dans l’avenir générateur d’électroporation irréversible (nanoknife), robot Da Vinci ? 5 Le fonctionnement du bloc opératoire Les acteurs du bloc opératoire La chirurgie est un véritable travail d'équipe. Dans une salle opératoire, une dizaine de protagonistes s'affairent autour du patient. Les principaux intervenants sont le médecin anesthésiste, le technicien anesthésiste (AMAR) l’infirmier de bloc et bien sûr l’équipe chirurgicale. L’infirmier du bloc opératoire est le premier à intervenir en réceptionnant le patient qui doit être opéré. Par la suite c’est le médecin anesthésiste et le technicien anesthésiste (AMAR) qui vont intervenir auprès du patient Une fois le patient anesthésié, l’équipe chirurgicale entame son travail. La première étape est l'installation du patient qui doit respecter le confort, la sécurité du patient et faciliter le geste chirurgical. Une fois l'installation terminée, l'opération peut débuter. L’équipe d’anesthésie est chargée d'adapter l'anesthésie en fonction des différents temps opératoires. De l'autre côté du champ opératoire, l’équipe chirurgicale s'affaire autour du patient. Un membre important de l’équipe est l’instrumentiste, prolongement de la main du chirurgien : il peut être un infirmier spécialisé ou même un résident. Son rôle est de donner au chirurgien les instruments en temps voulu, au moment voulu, quand il en a besoin. L'instrumentiste doit suivre attentivement le déroulement de l’intervention et anticiper les gestes du chirurgien pour mettre à sa disposition l’instrument dont il a besoin, l’équipe d’anesthésiste procède au réveil, moment délicat. L'équipe du bloc opératoire poursuit son travail bien après la fin de l'intervention. Le chirurgien doit préparer un compte-rendu opératoire, l'instrumentiste range le matériel, l'équipe d’anesthésie doit quant à elle continuer à surveiller le patient jusqu'à la salle de réveil. La complexité du fonctionnement d’un bloc opératoire et la multiplicité des intervenants nécessitent une structure de coordination afin d’orchestrer l’ensemble des activités qui se déroulent. Dans la plupart de nos blocs opératoires, cette tâche est dévolue au chef de bloc (dans quelques blocs opératoires c’est un chirurgien qui a cette tâche), mais hélas nous avons pu constater que de jeunes (et parfois moins jeunes) résidents ignorent les prérogatives et bafouent des règles élémentaires d’asepsie en particulier durant la garde. Son pouvoir décisionnel et son rôle d’arbitre doivent être reconnus et respectés de tous, ce qui nécessite une parfaite collaboration avec les différents chefs de service concernés par l’activité opératoire et l’administration de l’hôpital pour la prise en charge des dysfonctionnements et des éventuels conflits, les arbitrages, les manquements aux règles et les sanctions qui peuvent en découler. « Le bloc opératoire, lieu de haute technicité, souvent refuge de fonctionnements archaïques et individualistes, nécessite la mise en place d’une structure de gestion, d’arbitrage et de leadership. Celui-ci représente un espace clos où le non-respect des règles génère inefficience et risques, et où l’esprit d’équipe est essentiel. Il doit être en fait conçu 6 comme un outil collectif au service du patient en évitant toute hégémonie d’une discipline sur une autre. Il s’agit en effet de passer d’une niche anthropologique avec ses statuts, ses symboles et ses tabous à une organisation rationnelle en réseau des différents métiers » (Direction régionale des affaires sanitaires et sociales des Midi-Pyrénées : risques au bloc opératoire : cartographie et gestion). Très souvent, dans les blocs opératoires centraux multidisciplinaires, les salles opératoires sont réparties entre les différentes spécialités et chaque chef de service organise l’activité opératoire dans les salles qui sont dédiées à sa spécialité. Le chef de bloc ainsi que l’équipe d’anesthésie-réanimation prend note du programme opératoire établi pour préparer les salles et affecter le personnel de bloc. Si une salle d’une spécialité donnée se libère tôt, elle peut être utilisée pour terminer le programme opératoire d’une autre spécialité ou pour réaliser une intervention non programmée ou urgente. Dans conflits naissent parfois entre opérateurs et médecins anesthésistes ou entre opérateurs de spécialités différentes, lorsque des interventions son reportées ou rajoutées, chacun accusant l’autre de mauvaise foi. Beaucoup de jeunes chirurgiens ne comptabilisent que le temps de l’acte opératoire dans le temps d’occupation d’une salle et programment plus d’interventions que ne peut contenir une salle. Les équipes médicales doivent se plier à certaines contraintes nécessaires au bon fonctionnement du bloc opératoire : disponibilité, ponctualité, discipline et courtoisie, et être interpellées au besoin en cas de non-respect, puisque le moindre écart peut ralentir, voire paralyser le fonctionnement du bloc. Il est indispensable de connaître et de maîtriser un certain nombre d’indicateurs afin d’établir une bonne planification du programme opératoire. Le temps réel d’occupation d’une salle opératoire comprend : la durée de l’induction (intervalle de temps entre l’entrée du patient au bloc et l’incision), la durée de l’acte chirurgical proprement dit, la durée du pansement, le réveil du patient, la remise en état de la salle. Si la durée de l’acte opératoire est variable selon la technique opératoire, il peut également varier pour une même technique, selon l’expérience de l’opérateur, selon le patient et la maladie. Les autres temps devraient être maitrisé dans une fourchette afin d’optimiser l’exploitation des salles. 7 Temps d’occupation des salles opératoires (D’après : Raymond Chabot Grant Thornton, Mars 2008) 8 Les sutures et le fil chirurgical Pr. Larbi ABID Nouer, c’est rapprocher deux éléments, les attacher. Les marins connaissent depuis toujours l’importance des nœuds qui a été érigé en art nécessitant un apprentissage. Les chirurgiens et les marins ont en commun leur rapport avec les nœuds : l’action de nouer fait partie du savoir faire du marin comme du chirurgien auquel il faut ajouter la suture qui est utilisée depuis la nuit des temps. Les plus anciennes traces de cette technique proviennent d'Égypte avec des instruments chirurgicaux possédant un chas datant de 4000 av. J.C. Les premiers textes mentionnant la réalisation de sutures sont le papyrus d'Edwin Smith (-1650) et le Samhito, un traité de chirurgie écrit vers -600 par Sushruta, un médecin indien. Papyrus Edwin Smith Chaque époque et chaque culture a contribué à développer les techniques de suture. Durant l’âge d’or de la médecine arabe (VIIème au XIème siècle) c’étaient les cordes de harpe, le catgut, les crins de cheval et les épines qui étaient utilisées. L’une des contributions les plus importantes est celle d’Abu El Kassim El Zahraoui dit Abulcassis (912-961) qui a consacré son livre « Kitab El Tasrif » à la chirurgie et ses outils. Il y décrit l’utilisation de fil de suture fabriqué avec de l’intestin d’animaux et l’utilisation de tête de fourmis. Abu El Kassem El Zahraoui: « Kitab El Tasrif » Les techniques de suture moderne ont vu le jour au milieu du XIXème siècle ; le catgut étant le matériau le plus utilisé. L’origine des fils de suture peut être naturelle ou synthétique. Les fils naturels (collagène, soie et lin) sont les premiers à avoir été mis sur le marché. Ils ont peu à peu été remplacés par des fils synthétiques fabriqués à base de polymères. Toutefois, les sutures naturelles conservent quelques rares indications (chirurgie ophtalmologique pour la soie) malgré leurs inconvénients (forte capillarité, problèmes de tolérance, réaction 9 tissulaire). Les fils synthétiques non résorbables sont apparus vers les années 50 puis vers les années 70, les fils résorbables synthétiques ont été commercialisés. Aujourd’hui la majorité des sutures utilisées sont d’origine synthétique. Les fils chirurgicaux présentent des propriétés physiques et chimiques très différentes les uns des autres. Ils peuvent être classés selon plusieurs critères : selon leur structure : monofilament, gainé, tressé, câblé, cranté. selon leur origine : naturelle ou synthétique selon leur résorption : non résorbable, à résorption lente, à résorption rapide. Les fils non résorbables Si les fils non résorbables ont joué un grand rôle dans le développement des procédures chirurgicales. La sévérité des réactions locales générées par certains d’entre eux a accéléré la mise à disposition de sutures résorbables. Ils restent toutefois employés dans certains contextes en particulier pour la chirurgie cardio-vasculaire. En restant de façon permanente dans l’organisme, les fils non résorbables offrent un soutien à long terme. Ils sont constitués de matériaux stables du point de vue physicochimique. Le polypropylène est à ce jour, le plus utilisé car présentant de nombreux avantages : Il est neutre, il n’est pas thrombogène, et la bonne tenue des nœuds est assurée par son comportement plastique (déformation permanente) qui permet de garder le pli. Il est inaltérable après plusieurs années d’implantation tissulaire, donc non résorbable et conserve sa résistance dans le temps. Les fils résorbables Les premières sutures synthétiques résorbables à avoir été mises sur le marché (1970) étaient à base d’acide polyglycolique, un biomatériau synthétique composé de polymères de glycolides. Ce matériau se résorbe par hydrolyse et de façon prévisible. Son soutien tissulaire est excellent avec une réaction tissulaire a minima. Les sutures à base de PGA ont rapidement été adoptées en raison de leur meilleure résistance à l’étirement et de leur bonne sécurité du nœud. Ces fils sont préconisés pour le rapprochement des berges de plaies tout particulièrement dans des interventions concernant l’appareil digestif, la gynécologie ou l’urologie ainsi que pour les sutures sous-cutanées et les ligatures. Les sutures résorbables existent à la fois sous forme de monofilaments ou de tresses (multifilaments). Leur durée de dégradation est variable et on distingue ainsi des sutures résorbables à court terme (~50 j), moyen terme (60 à 90 j), long terme (180 à 210 j) et très long terme (390 j). Les fils monofilaments Les monofilaments ont des qualités séduisantes, comme la solidité, le faible entraînement tissulaire et la faible propension à favoriser l’infection. Il est admis que l’incidence de l’infection est significativement plus faible avec un monofilament comparativement à un fil tressé. Les monofilaments constituent un progrès chirurgical car leur structure facilite le passage intra-tissulaire et supprime le phénomène de capillarité. Les monofilaments ont des qualités séduisantes comme la résistance, un faible entraînement tissulaire et une faible propension à héberger les bactéries. L’incidence des infections est significativement plus faible avec les monofilaments comparativement aux tresses. Cependant, les monofilaments ne sont pas aussi faciles à manipuler que les tresses. 10 Les monofilaments non résorbables sont le plus souvent employés pour les plans superficiels, alors que les fils tressés résorbables sont le plus souvent employés pour le plan profond. Les monofilaments sont plus rigides, donc plus difficiles à manipuler et à nouer. Ils ont plus tendance à se dénouer que les multifilaments. Par contre, ces derniers, ayant généralement un diamètre plus important, provoquent des trous plus larges dans les tissus ou les prothèses. De plus, ils risquent davantage de provoquer des infections par capillarité, car les interstices entre les fibres peuvent faciliter la propagation d’éléments pathogènes le long de la fibre et donc, directement, dans le siège de l’implantation. Les fils multifilaments Les multifilaments (tressés ou torsadés) sont plus faciles à manipuler mais il a été montré qu’ils favorisent l’infection et la réaction tissulaire. L’augmentation de l’infection tissulaire est la conséquence de la pénétration par capillarité des bactéries et d’autres matériels étrangers. Une suture tressée peut héberger des bactéries dans ses fissures qui échappent ainsi à la phagocytose. Par ailleurs, ayant généralement un diamètre plus important que les monofilaments, ils provoquent des trous plus larges dans les tissus ou les prothèses. Aujourd’hui, c’est le matériel de suture synthétique qui est le plus utilisé. Comparativement aux monofilaments, les tresses risquent davantage de provoquer des infections par capillarité, car les interstices entre les fibres peuvent faciliter la propagation d’éléments pathogènes le long de la fibre et donc directement dans le siège de l’implantation. Les tresses ont une surface relativement rugueuse qui provoque « un effet de scie » lorsque le fil passe au travers des tissus. Comment choisir le fil de suture le plus approprié pour une intervention donnée? D’abord, plusieurs propriétés doivent être réunies pour satisfaire les exigences du chirurgien et du patient. La bonne tenue des nœuds, assurée par le comportement plastique de la fibre, est souvent considérée comme un des critères à prioriser. Les exigences concernant les propriétés du matériau constituant les fils de suture varient en fonction du type de chirurgie. En prenant l’exemple d’une suture employée en chirurgie vasculaire, le cahier des charges d’un fil de suture a été décrit comme suit : Ces exigences sont : la facilité de manipulation pour le chirurgien, la conservation de la résistance du fil après implantation, l’absence de déformations permanentes (étirement exagéré), la sécurité au niveau du nœud, la biocompatibilité (faiblement thrombogène), l’adhérence parfaite du recouvrement éventuel, la réaction inflammatoire (causée par le filament) minime, l’absence d’infections dues à la suture, la résistance aux contraintes mécaniques imposées, pendant et après l’implantation. Les fils de suture sont classés selon leur diamètre, le matériau les constituant, leur structure macroscopique (tressés ou extrudés), ainsi que leur comportement après 11 implantation. En général, les fils sont choisis selon la nature des tissus à suturer, la résistance requise, la capacité à se résorber ou non et la tenue des nœuds. Ils sont disponibles en différentes longueurs, pour pouvoir s’adapter aux différentes tailles d’incisions. Les longueurs les plus fréquentes sont : 45 cm, 70 cm et 90 cm. La capillarité d’une suture La capillarité d’une suture décrit la facilité avec laquelle les liquides peuvent être transportés le long du fi l de suture ; c’est une propriété inhérente aux multifilaments en raison des interstices libres qu’ils comportent. La capillarité est aussi en relation avec la capacité de la suture à transporter et à diffuser des microorganismes ; elle joue un rôle important en matière d’infection. Ce risque de contamination est à prendre en considération car les sutures se font dans des contextes chirurgicaux à plus ou moins fort potentiel infectieux. Cet inconvénient est réel puisque l’idée d’ajouter un antibactérien sur le matériel de suture a été proposée par un laboratoire qui a mis depuis déjà quelques années un fil de suture enduit d’un traitement antibactérien qui protège le fil contre la colonisation bactérienne, prévenant ainsi le risque d’infection. Néanmoins, dans le choix d’un fil c’est l’absence de capillarité qui est recherchée et seuls les monofilaments sont acapillaires. La réaction inflammatoire Tout fil de suture est identifié par le système immunitaire comme un corps étranger et la réponse inflammatoire qu’il provoque est décrite comme une réaction à corps étranger. La sévérité et la durée de la réaction dépendent de la nature du fil, de sa texture, du degré de traumatisme tissulaire occasionné, de la longévité in situ de la suture. La réaction inflammatoire est fonction de la quantité de matériel et donc du nombre et du volume des nœuds. Un des principes de la suture chirurgicale est donc d’allier sécurité de la suture et quantité de matériel minimale. Si la réponse inflammatoire est intense, la suture peut se fragiliser ou les tissus s’altérer autour de la suture. Un certain degré d’inflammation est nécessaire à une cicatrisation normale. Cependant, une suture qui entraîne une réaction inflammatoire sévère et prolongée peut retarder la cicatrisation et expose la plaie à l’infection. La tenue du nœud Pour un fil chirurgical, la tenue du nœud est une caractéristique déterminante car elle est garante de la sécurité de la suture pratiquée. Cette capacité de tenue du nœud est fonction de certains paramètres : raideur du fil, coefficient de friction, élasticité, plasticité du fil. En fonction même de ces paramètres, la tenue au nœud diffère selon que le fil est monobrin ou tressé. Les monofilaments sont communément plus raides que les tresses, notamment lorsque le diamètre augmente. Leur surface parfaitement lisse leur confère un plus faible coefficient de friction et une meilleure glissance. Ces deux caractéristiques, raideur et glissance, expliquent qu’en règle générale, les monofilaments ont une moins bonne tenue au nœud que les tresses. Toutefois, cette notion est à nuancer, notamment en raison de la plasticité de certains monofilaments. Pour plus de sécurité, un nœud doit avoir au moins 3 boucles avec des extrémités de 3 mm de long. Les surfaces molles diminuent la sécurité du nœud et doivent être compensées par des boucles supplémentaires. La classification décimale La classification décimale issue de la pharmacopée européenne (EP) est utilisée comme référence pour définir le calibre des fils (de 0,1 à 10). Exemple : une décimale 2 correspond à un fi l de 0,20 à 0,29mm de diamètre. Mais c’est la pharmacopée américaine (USP pour) qui est la plus utilisée : le calibre varie de 12/0 à 4 du plus fin au plus gros et en 12 fonction de l’origine de la suture et de son profil de résorption. Il existe une équivalence entre ces deux standards. Classification décimale des fils de suture Réaction tissulaire Couleur du fil de suture Les fils de suture, qu’ils soient naturels ou synthétiques, résorbables ou non résorbables, monofilaments ou tresses, sont disponibles en version teintée (violet, vert, bleu, noir) ou non teintée. La couleur joue le rôle de repère ce qui est particulièrement utile dans certaines chirurgies (Ex : chirurgie vasculaire) pour distinguer les différentes structures anatomiques. La couleur offre une meilleure visualisation même lorsqu’ils sont imprégnés de sang, ce qui facilite l’ablation des fils. Les couleurs utilisées en production sont principalement celles certifiées par la FDA (Food and Drug Administration). A l’inverse, les fils non teintés offrent l’avantage d’être peu visibles et discrets ; ils présentent un intérêt en chirurgie ophtalmique ou pour les sutures cutanées par exemple. Pour éviter l’effet tatouage, on n’emploie pas de sutures teintées sur la surface corporelle. Corps Les aiguilles Une suture est le plus souvent réalisée à l’aide d’un fil monté sur une seule aiguille. L’aiguille est une composante essentielle du montage ; elle est la première à traverser les tissus et conditionne en partie la réussite de la suture. C’est un des éléments majeurs d’une suture ; elle doit concentrer un certain nombre de propriétés pour garantir des résultats optimaux à la fois du point de vue fonctionnel et esthétique. L’aiguille se caractérise par 3 parties : la pointe, le corps et la courbure. Chacune de ces caractéristiques doit être soigneusement identifiée pour faire le meilleur choix, adapté au patient et au type de chirurgie. 13 Configuration d’une aiguille La pointe est, avec le corps, l’un des éléments constitutifs d’une aiguille chirurgicale. Elle peut avoir différentes géométries ; chacune de ces formes a un impact sur les tissus qu’elle traverse et donc une indication particulière qui tient compte de la nature du tissu à suturer. – La pointe ronde : sa pénétration dans les tissus se fait par écartement des fibres sans les sectionner. Elle ne déchire pas les tissus mous et fragiles ; son pouvoir de pénétration est limité dans les tissus denses comme la peau. Ses utilisations principales sont la chirurgie vasculaire, digestive, urinaire et tous les tissus fragiles. – La pointe triangulaire : elle pénètre facilement dans les tissus serrés (peau, aponévrose) en sectionnant les fibres ; ce type d’aiguille est utilisée pour la peau et les muscles. Elle a peu de place en chirurgie digestive. – La pointe diamant : avec une pointe tranchante résistante à 4 côtés, suivie d’un corps rond atraumatique, cette aiguille assure une bonne pénétration dans les tissus avec un traumatisme minimum. – La pointe mousse : elle permet la traversée des tissus fragiles tout en limitant la blessure des petits vaisseaux et des parenchymes (hépatique, rénal ou splénique). – La pointe spatulée et lancéolée : ces pointes sont piquantes mais plates pour des utilisations en microchirurgie et en ophtalmologie. A chaque type de pointe correspond une lettre et un symbole qui figurent sur le packaging pour une identification immédiate. Une des caractéristiques essentielles des aiguilles chirurgicales est la résistance à la torsion. L’aiguille ne doit pas se tordre lors du passage tissulaire. Si l’aiguille se tord, les tissus et la plaie pourront être endommagés. Le contrôle de la trajectoire de l’aiguille, lors du passage tissulaire, repose sur la capacité de l’aiguille à conserver ses caractéristiques d’origine (ductilité). Les seules aiguilles utilisables pour suturer la peau sont les aiguilles à section triangulaire, par opposition à la section ronde, utilisée en chirurgie viscérale. Les aiguilles droites n’ont que de très rares indications en chirurgie plastique, où ce sont les aiguilles courbes qui sont en règle utilisées, avec un choix entre les formes 3/8e de cercle et 4/8e de cercle. 14 Courbure : En pratique, plus le plan est profond, plus l’aiguille doit être courbe. Le corps est l’autre partie d’une aiguille. Il peut avoir différentes formes (triangulaire, ronde…) ; chacune de ces formes répond à un usage. Le corps de l’aiguille est la partie qui est saisie par le porte – aiguilles, selon la règle du 1/3 – 2/3 pour une bonne stabilité et prise en main. La courbure est une des caractéristiques des aiguilles. Il existe des aiguilles droites et des aiguilles courbes. On exprime la courbure en 8ème de cercle : 5/8e ou 3/8e, la 4/8e correspondant à ½ et 2/8e au quart de cercle (1/4). Les aiguilles droites peuvent être utilisées sans porte aiguille ; elles sont le plus souvent employées pour les plans superficiels. Les innovations 1. Les fils de suture peuvent constituer un vecteur mécanique de migration des bactéries vers la plaie, phénomène pouvant être renforcé par la capillarité du fil de suture. Pour diminuer ce risque des laboratoires proposent un fil de suture synthétique, résorbable et stérile enduit d’un traitement antibactérien qui protège le fil contre la colonisation bactérienne, prévenant ainsi le risque d’infection. 2. Le V-Loc, suture crantée de type monofilament résorbable, est commercialisé depuis juin 2009. Ce fil permet de s’affranchir des nœuds de fixation, entraînant un gain de temps opératoire intéressant. Pour les anastomoses sous cœlioscopie, il est particulièrement utile. Il libère le chirurgien de la contrainte de faire tenir le surjet par son aide. La suture ne peut pas fuir par insuffisance de tension. S’il est très apprécié par les chirurgiens, il est néanmoins trop onéreux (trop onéreux : six fois plus cher que le fil classique). Fil cranté 3. L’Endoloop : dans le domaine particulier des sutures pour chirurgie endoscopique, les chirurgiens disposent de diverses techniques : La technique de ligature à boucle qui utilise un fil prémuni en extrémité d'une boucle ou lasso à nœud coulissant. Pour utiliser cette ligature la boucle est introduite dans la cavité du corps, par un trocart, engagée sur l'organe à ligaturer, puis serré sur celui-ci. Le serrage de la boucle peut être opéré à l'aide d'un instrument pousse-nœud. 15 4. les agrafes: il est possible d'utiliser des agrafes métalliques pour maintenir les deux lèvres de la plaie en contact. La pose des agrafes se fait à l'aide d'une agrafeuse chirurgicale spécialement conçue pour ce domaine. Le principal avantage de cette technique est sa rapidité, même si le gain n'est que de quelques minutes dans des mains entraînées4. Les inconvénients en sont une qualité esthétique moindre dans certains cas5 et une fréquence un peu plus importante d'infections dans d'autres cas. Agrafes de Michel pour la peau et agrafes de suture mécanique 5. les clips et les multi-applicateurs de clips : lorsque dans une technique chirurgicale, il y a de nombreuses ligature à réaliser et pour écourter le temps opératoire on peut utiliser des clips métallique (en titane) ou résorbables. Ces clips peuvent être mis en place un à un à l’aide d’un applicateur de clips ou par l’utilisation d’un multiapplicateur contenant une vingtaine de clips résorbables. Clips pour cœliochirurgie et chirurgie ouverte 16 Applicateurs de clips pour chirurgie ouverte et cœliochirugie 6. les sutures mécaniques : toujours pour un gain de temps, des appareils de suture mécanique ont été mise au point pour la réalisation de différents types de suture digestive. Sutures digestives mécaniques 7. Dans certains cas, l'utilisation d'une colle cutanée remplace les sutures classiques à fils ou agrafes. Cette technique est utilisée dans le cas de blessures de petite taille et peu profondes. On utilise une colle cyanoacrylate pour coller ensemble l'épiderme de chaque côté de la plaie. La blessure étant. Ce type de colles a de multiples avantages : son pouvoir adhésif est très important et les résidus de polymérisation sont totalement biocompatibles. La colle ne peut cependant pas être utilisée pour suturer une plaie à proximité immédiate de l'œil, au niveau des viscères ou au contact de vaisseaux sanguins car elle entraînerait une nécrose de ces tissus. Techniques de suture Les berges d’une perte de substance doivent être rapprochées par des points assurant un bon contact tissulaire en profondeur et en superficie. Des points profonds et des points superficiels sont utilisés. Une suture se fait plan par plan, de la profondeur à la superficie. Les couches rencontrées sont : le muscle, l’aponévrose, le tissu cellulaire sous-cutané et la peau. Tout décalage doit être évité. Dans le sens horizontal, les points homologues sont rapprochés. Dans le sens vertical, les berges sont affrontées plan par plan à niveau pour éviter tout chevauchement d’une berge sur l’autre 17 Point simple et point de Blair-Donati affrontant les 2 plans d’une plaie cutanée Surjet simple (pouvant être ischémiant) et surjet intradermique (aucune trace n’est laissée sur la peau) Délai de cicatrisation des tissus La cicatrisation des tissus (d’une plaie chirurgicale ou traumatique) est un phénomène naturel qui met en jeu des processus de réparation et de régénération. La durée et la qualité de la cicatrisation dépendent de nombreux facteurs à la fois locaux et généraux (étiologie, localisation, type du tissu lésé, état général du patient, infection etc…). Le rôle d’une suture est d’accompagner la cicatrisation en offrant un soutien aux tissus pendant toute la phase critique. C’est pourquoi il est important de connaître le délai de cicatrisation des différents tissus de l’organisme. C’est une information majeure à mettre en correspondance avec le temps de résorption de la suture ; ainsi, l’adéquation entre le délai de cicatrisation du tissu à suturer et le temps de résorption du matériel permet de sélectionner la suture adéquate et d’assurer des conditions optimales de réalisation. TISSU Peau Tissu sous cutané Péritoine Fascia abdominal Tube digestif vessie Uretère Capsule articulaire Ligament/tendon DELAI DE CICATRISATION 1à 2 semaines 2 semaines 4 à 10 jours 5 à 6 semaines 2 à 3 semaines 5 jours 7 jours 5 à 6 semaines 6 semaines Délai de cicatrisation en fonction des tissus 18 Instrumentation chirurgicale & stérilisation des dispositifs médicaux Pr. Larbi ABID Dès l’Antiquité, les médecins ont utilisé des outils pour explorer les plaies, inciser les abcès, trépaner. Les archéologues ont découverts les ancêtres de nos scalpels datant de 10.000 ans avant JC et des exemples de sutures datant de 2500 avant JC. Des outils de craniotomie ont ainsi été découverts dans de nombreux sites datant du néolithique. En Inde, les chirurgiens et médecin ont utilisé des instruments chirurgicaux sophistiqués depuis l'Antiquité. Sushruta (aux alentours de 500 av. J.-C.), connu comme le « père de la chirurgie », a probablement été le chirurgien le plus important de l'Antiquité. Dans l'ouvrage collectif Sushruta Samhita, il y décrit plus de 120 instruments chirurgicaux, 300 interventions et y réalise une classification en huit catégories de la chirurgie humaine. Toujours dans l'Antiquité, les chirurgiens et médecins grecs et romains ont réalisé de nombreux instruments en bronze, fer et argent tels que des scalpels, curettes, lancettes, pinces, spéculums, perceuses, cathéters, dilatateurs, tubes et couteaux chirurgicaux, qui sont actuellement conservés en bon état dans les musée de médecine du monde entier. Un des personnages ayant joué un rôle clé dans le progrès des instruments chirurgicaux est Abu El Kasim Al Zahraoui (Abulcasis) considéré comme le « père de la chirurgie moderne », notamment pour son encyclopédie Kitab El Tasrif qui rend compte d'une expérience accumulée pendant 50 ans de pratique de la chirurgie et se termine par un traité qui présente une collection comprenant plus de 200 'instruments. Illustration d'instruments chirurgicaux de l’encyclopédie médicale d’Abulcasis : Kitab al-Tasrif. Spéculum en bronze, découvert au Liban, datant du 1er-3ème siècle après JC. L’invention de l’acier inoxydable au début du 20ème siècle marque un tournant significatif et transforme les procédés de fabrication. Les instruments utilisés en chirurgie sont très nombreux, mais en se limitant au matériel courant, on peut parvenir à une liste raisonnable qu’un résident se doit de connaitre. Pour la plupart des interventions, un chirurgien utilise une cinquantaine d’instruments que l’on appelle parfois « la trousse générale » et auxquels on ajoute des instruments spéciaux fonction du type d’intervention. 19 Les scalpels (bistouri froid) Ils sont faits pour couper, inciser. Ils sont composés d’une lame amovible et d’un porte-lame (autoclavable). Les plus usités sont les n°3 et 4. Il existe des bistouris d’un seul tenant (lame non détachable) en métal et d’autres à poignée en matière plastique à usage unique. Lames et porte-lames de bistouri froid Les ciseaux Ils servent à couper les tissus, les sutures, les bandages et les vêtements. Ils sont droits, courbés, angulés. Les ciseaux droits sont utilisés pour les soupes franches des sutures, des nerfs et vaisseaux. Les modèles courbés son souvent préférés pour les dissections parce qu’ils procurent une meilleure visibilité. Les ciseaux Metzenbaum, délicats sont très appréciés pour disséquer. Les ciseaux de Mayo, robustes, courbes servent à couper et à disséquer les tissus résistants. Les ciseaux de Mayo droits servent à couper les sutures. Il existe une très grande gamme de ciseaux spécifiques aux différentes spécialités telles que les ciseaux Iris, Troutman ou Baraquer pour l’ophtalmologie ou encore les ciseaux Knight utilisés en ORL pour la rhinoplastie. Ciseaux Metzenbaum, de Mayo et à pansement Lister 20 Les porte-aiguilles Ils servent à suturer. Similaires à une pince hémostatique, ils possèdent des mors plus épais et plus courts. Plus l’aiguille est petite, plus les mors du porte-aiguille doivent être petits. Les écarteurs Ils servent à écarter, exposer ou pousser les tissus, muscles, ou organes lors d’une intervention. Les écarteurs manuels sont tenus durant l’acte opératoire ; les écarteurs autostatiques demeurent en place par eux-mêmes. La taille et le modèle sont déterminés par la taille de l’incision et la profondeur du champ opératoire. Écarteurs manuels Écarteurs auto-statiques 21 Les pinces hémostatiques Elles sont utilisées pour tenir, saisir, disséquer les tissus, muscles et organes. Elles sont droites, recourbées ou angulées. Pince hémostatique de Hartmann-Mosquito & de Halsted Pince hémostatique de Kelly & de Péan 22 Pinces de Babcok et de Duval (de forme ovale pour la 1ère, triangulaire pour la 2ème, elles sont moins agressives et traumatiques, utilisées dans la chirurgie intestinale et thoracique) Pince de Satinsky (utilisée en chirurgie vasculaire, conçue pour contrôler le flux sanguin) Pince d’Allis (dotées de petites dents à la pointe, utilisées surtout dans la chirurgie intestinale) 23 Les pinces à dissection Elles peuvent être mousses ou à griffes. Les pinces mousses sont conçues pour saisir et tenir les tissus et la peau. Les canules d’aspiration Elles sont reliées au moyen d’un tuyau au vide et permettent d’aspirer les sérosités et épanchement au niveau du champ opératoire. Un trocart d’aspiration mérite d’être signalé : il s’agit du trocart de Legueu utilisé dans la ponction aspiration des kystes hydatiques du foie (voir chapitre kystes hydatiques du foie). 24 Instrumentation pour chirurgie laparoscopique 25 Il s’agit là de quelques uns des instruments utilisés en chirurgie viscérale. Le résident se familiarisera avec ces instruments au fur et à mesure qu’il participera au déroulement des différentes interventions à laquelle il sera programmé. La préparation de la table d’opération par l’instrumentiste est également un excellent moyen pour apprendre à connaitre ces instruments. L’instrumentiste préparant la table Mais on ne saurait terminer ce chapitre consacrée à l’instrumentation chirurgicale sans parler de leur nettoyage et stérilisation. L’obtention de l’état stérile de l’instrumentation chirurgicale et le maintien de cet état jusqu’à son utilisation correspondent à une obligation de résultat pour le personnel mettant en œuvre le processus de stérilisation. La Stérilisation des dispositifs médicaux La Stérilisation des dispositifs médicaux dans les établissements de santé occupe une place primordiale dans la lutte contre l’infection. C’est la mise en œuvre de méthodes et de moyens visant à éliminer de tout produit ou objet propre, les micro-organismes vivants quelle que soit leur nature et leur forme qui pourraient être présents. En pratique, il est impossible de stériliser à 100%. Autrement dit, la stérilisation est une opération de réduction de la contamination, dont le seuil maximal est fixé à un millionième. La stérilité est l’absence relative de germes pathogènes et de germes saprophytes ou l’absence de tous micro-organismes de forme végétative, de spores, pathogènes ou non. Le processus hospitalier de stérilisation est un processus complexe associant plusieurs étapes successives. La qualité du résultat final dépend de la qualité et du soin apportés à chacune de ces étapes. En matière de stérilisation, une formule bien connue, consiste à dire qu’« on ne stérilise bien, que ce qui est propre ». Ceci doit être également appliqué à chaque étape. Les étapes préparatoires : Le résultat de la stérilisation dépend de la qualité de chacune des étapes qui précédent la stérilisation proprement dite. Le but de ces étapes préalables est de réduire le nombre de germes présents sur l’objet à stériliser et de faciliter l’étape suivante. Les différentes étapes à mettre en œuvre sont : la décontamination, le nettoyage, le rinçage, le séchage, le conditionnement et l’étiquetage. On ne stérilise que ce qui est propre. La qualité de 26 stérilisation dépend donc directement de celle de la décontamination et du nettoyage. Ces deux étapes sont fondamentales. L’organisation des locaux doit séparer les zones de lavage, du conditionnement, de la stérilisation et du stockage. La zone de lavage doit être en dépression et la zone de conditionnement doit être en surpression. Quand l'intervention est terminée, le matériel est évacué : les instruments réutilisables après prédésinfection et nettoyage sont adressés à la stérilisation, les dispositifs médicaux non stérilisables sont désinfectés, ceux à usage unique sont éliminés avec les déchets gérés selon le protocole. La salle d'opération est nettoyée selon un protocole préétabli puis soit fermée, soit préparée de nouveau pour l'intervention suivante. 1/ La prédésinfection ou décontamination C’est le premier traitement à effectuer sur les objets et matériels souillés. Elle se fait en principe sur le lieu d’utilisation des matériels. Il s’agit d’une opération « au résultat momentané permettant d’éliminer, de tuer ou d’inhiber les microorganismes indésirables présents au moment de l’opération ». C’est une phase préalable nécessaire pour préparer les étapes suivantes. Elle fait appel à des procédés chimiques (immersion du matériel dans un bain décontaminant composé de solution détergente et désinfectante) et mécaniques. Les produits utilisés sont bactéricides, fongicides, virucides et sporicides. Le matériel doit être décontaminé très rapidement après utilisation pour supprimer le réservoir des germes pathogènes, éviter la dissémination des germes pendant le transport des objets souillés, supprimer la menace de contamination du personnel qui doit le manipuler pour le nettoyer avant la stérilisation et éviter que les résidus protéiniques ne s’incrustent (ce qui rendrait difficile le nettoyage ultérieur). Cette décontamination précède toujours le nettoyage du matériel. Le matériel est immergé dans une solution décontaminante en récipient étanche : cette phase vise à diminuer les risques de transmission au personnel. L’efficacité de la décontamination dépend de quatre facteurs : le choix du décontaminant (action chimique), le temps de contact, la température du produit et le nettoyage. Bacs de prédésinfection 2/Le nettoyage ou lavage On ne stérilise que ce qui est propre et sec. Le nettoyage élimine les salissures, véritables gîtes pour bactéries, et permet d’atteindre un niveau minimal de contamination indispensable à une stérilisation correcte. Il associe une action mécanique (décollement des salissures), une action chimique (solubilisation des souillures) et une action thermique (accélération optimale de la vitesse de nettoyage de 45 à 60°C). Ce nettoyage étant une étape indispensable avant le conditionnement, doit être compatible avec le dispositif médical et ne doit pas le détériorer. Le nettoyage peut être manuel pour le matériel ne pouvant être lavé en machine. Ce lavage manuel fait appel à une action mécanique (brossage, écouvillonnage, …) et à une action chimique (action détergente). Les détergents-désinfectants utilisables sont les mêmes 27 que ceux utilisés pour la phase de prédésinfection. L’utilisation de brosses métalliques ou de tampons à récurer est proscrite. Les dispositifs médicaux sont ensuite soigneusement rincés pour éliminer toute trace de détergent-désinfectant susceptible d’entraîner l’apparition de taches lors de la stérilisation. Le séchage de l’instrumentation est assuré au moyen d’un chiffon propre, ou au moyen d’air comprimé médical. Cette technique devrait être réservée aux dispositifs médicaux fragiles ne pouvant être lavés en laveur-désinfecteur (instrumentation thermosensible ou non immergeable). Le lavage en laveur-désinfecteur permet la succession automatique des différentes phases, au sein d’une même enceinte : rinçage, lavage, rinçage, désinfection thermique puis séchage. Ses avantages sont nombreux : mise en œuvre simplifiée, et doubles portes permettant de respecter la marche en avant. Il existe plusieurs types de machines à laver : par aspersion (principe du lave-vaisselle), par immersion (principe du lave-linge de type tambour rotatif), par ultrasons (uniquement pour les instruments en acier inoxydable de très bonne qualité) et en tunnel de lavage (dispositifs de grande taille destinés aux chariots, conteneurs,...). On peut également utiliser des ultrasons, comme procédé de lavage, en particulier pour les instruments délicats en remplacement du lavage manuel (microchirurgie, odontologie, …). Chargement des laveurs-désinfecteurs 3/Le rinçage et le séchage Le rinçage a pour but d’éliminer toutes les traces résiduelles de détergent ou de désinfectant. L’eau utilisée pour le rinçage ne doit être contaminante ni sur le plan physicochimique, ni sur le plan bactériologique. Le rinçage final doit être effectué avec une eau spécialement traitée . Le séchage empêche la constitution d’un milieu humide propice à la prolifération bactérienne. Il est effectué au moyen d’un chiffon propre et non pelucheux. Les instrument creux et tuyaux sont séchés à l’air comprimé médical. Ces deux étapes sont importantes et précèdent le tri et le contrôle du matériel propre, sec et fonctionnel. Le bon fonctionnement des dispositifs médicaux est donc vérifié avant conditionnement et stérilisation. Le matériel cassé ou endommagé doit être éliminé ou donné en réparation. Certains dispositifs doivent être lubrifiés. 4/ le conditionnement L’état stérile d’un dispositif médical est un état éphémère. Il convient donc de conserver cet état stérile par un conditionnement adapté. Le conditionnement est la mise sous emballage des dispositifs médicaux. Il a pour but d’interdire l’entrée des micro-organismes tout en autorisant le passage de l’agent stérilisant. Il doit être effectué le plus précocement possible après le nettoyage. Il maintient l’état stérile jusqu’à l’emploi en protégeant son contenu de 28 toute contamination extérieure. On distingue les conditionnements réutilisables et ceux à usage unique. Ces conditionnements varient en fonction du procédé de stérilisation choisi et de l’objet à stériliser. Il existe des conditionnements rigides, barquettes métalliques, en carton ou plus souvent en plastique, boites en métal, et des emballages souples, sachets, feuilles ou gaines en papier, en plastique ou dans un mélange des deux. Les conditionnements doivent être adaptés au mode de stérilisation et répondre à des exigences générales de norme internationale. 5/Les différentes méthodes de stérilisation Les procédés de stérilisation peuvent s’effectuer soit à l’hôpital, soit industriellement. En Algérie et à l’heure actuelle, seule la stérilisation hospitalière est disponible. Il existe cinq types de stérilisation : par la chaleur sèche, par la chaleur humide, par l’oxyde d’éthylène, par les gaz, par les rayons. - Stérilisation à la vapeur d’eau : c’est le procédé de référence communément employé en milieu hospitalier pour les textiles recyclables (champs opératoires, habillement chirurgical), les pansements (tissés et non tissés), les instruments chirurgicaux en acier inox, la verrerie, le caoutchouc et les polymères et les élastomères. L’association de chaleur et d’eau réalise une dénaturation protéique. L’opération est régie par trois paramètres : température, durée et pression de vapeur d’eau saturée. L’autoclave à double ouverture peut servir de barrière physique entre la zone de préparation du matériel et la zone de stockage des produits stériles. - Stérilisation par la chaleur sèche : dans le stérilisateur à air chaud, le Poupinel, l’oxygène de l’air est porté à une température élevée qui provoque la dénaturation des protéines bactériennes par oxydation, et il faut habituellement de 2 à 3 heures à 160°C afin que la température soit atteinte au coeur de la charge, le temps étant décompté à partir du moment où la température a atteint le plateau thermique. C’est un procédé simple et peu coûteux, mais avec des inconvénients : l’air est un mauvais conducteur de la chaleur et la température élevée altère le matériel. ce procédé est, d’une part, inefficace vis à vis des Agents Transmissibles Non Conventionnels (ATNC ou prion) et, d’autre part, susceptible de fixer fortement l’infectiosité résiduelle des prions. C’est pourquoi ce procédé de stérilisation est proscrit, son usage est interdit en Algérie. - Stérilisation par l’oxyde d’éthylène. L’oxyde d’éthylène est un gaz au pouvoir bactéricide, virucide et sporicide puissant par dénaturation des acides nucléiques et des protéines des micro-organismes. C’est un procédé chimique de stérilisation à basse température (55°C) applicable à des objets thermosensibles qui ne supportent ni la chaleur sèche, ni la chaleur humide (matériel électronique, 29 caméras, microscopes, appareils photos,…).la stérilisation par l’oxyde d’éthylène est un mode de stérilisation contraignant, pratiqué uniquement en service spécialisé. Il nécessite une installation particulière et d’importantes précautions Il possède une toxicité immédiate et retardée. Il est toxique pour le personnel par inhalation et par contact. Il est toxique pour les malades par voie entérale et par réactions avec différents corps chimiques et forme un mélange explosif en se combinant avec l’oxygène de l’air. - Stérilisation par le gaz plasma est destinée aux matériels thermosensibles. elle utilise le peroxyde d’hydrogène, qui possède une action bactéricide, sporicide, fongicide et virucide. Ce gaz est activé à l’état de plasma par un champ électromagnétique induit par une onde radio dans un vide très poussé. Les composants du plasma ainsi formé détruisent les acides nucléiques et les membranes cellulaires des micro-organismes. - Stérilisation par les radiations ionisantes (rayons gamma et béta). Leur propriété bactéricide nait de l’arrachement des électrons aux atomes. Le temps d’exposition (débit de dose) est en seconde pour les rayons béta et en heures pour les rayons gamma. C’est une stérilisation à froid fiable et reproductible, qui ne nécessite pas de désorption et se fait en emballage définitif (bonne conservation de la stérilité). Les contrôles En fin de cycle, le bon déroulement de la procédure et l’état des emballages sont contrôlés. Toute anomalie doit faire réfuter la stérilisation. Quel que soit le mode de stérilisation utilisé, il est indispensable d’en contrôler l’efficacité. On utilise des témoins et des contrôles physiques, chimiques et biologiques. Les témoins, comme leur nom l’indique, témoignent seulement du passage d’un produit ou objet dans le procédé de stérilisation choisi. Ces témoins sont nombreux, spécifiques de l’appareil et du mode de stérilisation utilisés. Ils ne sont pas totalement fiables. Les contrôles sont d’ordre physique ou mécanique (procédure de vérification du bon fonctionnement des appareils ; d’ordre chimique, composés de bandes, bandelettes ou ampoules sensibles à la chaleur ou à l’humidité et d’ordre biologique, les seuls qui traduisent réellement la stérilité des produits. Ces contrôles biologiques consistent soit à prélever un objet du lot stérilisé, puis à le mettre en culture afin de vérifier qu’aucune souche bactérienne ne se développe, soit à inclure dans le lot à stériliser un petit tube contenant des souches sporulées de bacilles, choisies spécialement selon le mode de stérilisation utilisé, et de mettre ce tube en culture à la fin du cycle de stérilisation pour vérifier là encore que ces bacilles ont bien été tués. Conclusion Comme on peut le constater, le service de stérilisation à l’hôpital est un endroit stratégique. La qualité de chaque étape du traitement du matériel chirurgical influence la qualité de la « stérilité terminale ». Chaque étape doit donc faire l’objet de vigilance : que se soit la décontamination, le nettoyage, le rinçage, le séchage, le conditionnement, la désinfection proprement dite, le stockage. Une étape inefficace de tout ce processus peut compromettre la qualité de la stérilisation. La conscience professionnelle doit être de mise tout au long de ce processus de stérilisation. 30 Principes d'électrochirurgie Pr. Larbi ABID L’effet de l’utilisation du bistouri électrique au bloc opératoire résulte du passage d’un courant alternatif à haute fréquence (HF) à travers le corps du patient entre deux électrodes. L’utilisation d’un générateur HF impose une bonne connaissance du matériel et l’application de règles fondamentales rendant son effet prévisible, reproductible et efficace, afin de garantir une sécurité optimale pour les utilisateurs et les patients lors des interventions. Le courant électrique, dans les tissus biologiques, entraine 3 effets : - un effet électrolytique - une excitation neuromusculaire - un effet thermique Seul, l’effet thermique est utilisé grâce à des courants alternatifs de haute fréquence supérieure à 300Khz. La chaleur délivrée et ses conséquences au niveau des tissus dépendent de l’intensité du courant, l’impédance spécifique du tissu et de la durée d’application du courant. La section est obtenue avec de fortes intensités à l’origine d’une chaleur très importante qui entraine une sortie brutale de l’eau des cellules qui explosent et provoquent la section. Une dessiccation sans arc électrique est obtenue pour des intensités moins importantes, entrainant une chaleur moins forte. L’eau sort doucement des cellules ainsi que de l’espace extracellulaire. L’ensemble des tissus se rétracte. Une coagulation forcée est également une dessiccation, mais avec des tensions élevées comme pour la coupe, et avec des arcs électriques provoquant une carbonisation du tissu. Une fulguration est une dessiccation du tissu superficiel avec carbonisation du tissu provoquée par un voltage très élevé produisant des arcs électriques importants, mais sans contact de l’électrode avec les tissus. Le circuit est composé du générateur HF, d’électrodes actives, du patient et d’une électrode de retour, la plaque électrochirurgicale. Des chemins au sol sont nombreux, pouvant inclure la table d’opération, les étriers, les membres du personnel et l’équipement. Les tissus du patient créent l’impédance produisant de la chaleur lorsque les électrons traversent la résistance. Le courant électrique standard varie à une fréquence de 50/60 Hz mais étant donné qu’un courant transmis à travers le corps à 60Hz peut entrainer une stimulation neuromusculaire excessive voire une électrocution et que la stimulation des nerfs et des muscles cesse à 100Hz, l’électrochirurgie est utilisée à des radiofréquences au-delà de 100Hz. Un générateur électrochirugical utilise un courant de 60Hz avec une fréquence pouvant aller jusqu’à 200 kHz, fréquence permettant à l’énergie électrochirurgicale de traverser le patient sans risque d’électrocution et avec une stimulation neuromusculaire minimale. La plupart des générateurs électriques actuels possèdent deux parties distinctes : une partie monopolaire et une partie bipolaire. Le mode monopolaire Il est le plus communément utilisé en électrochirurgie du fait de sa polyvalence et de son efficacité. L’électrode active est dans le site chirurgical, l’électrode de retour ou plaque est placée sur le corps du patient. Le courant passe à travers le patient et complète le circuit en allant de l’électrode active vers l’électrode de retour. 31 Dans le mode monopolaire, le chirurgien peut contrôler plusieurs paramètres : La puissance, c'est un facteur important de la sécurité du patient. On ne peut proposer une puissance fixe, tant celle-ci est liée à la taille de l'électrode: plus celle-ci est fine, moins la puissance devra être élevée pour obtenir l'effet voulu. En pratique, on travaille en électrocœliochirurgie avec des puissances de l'ordre de 35 à 45 W. La Nature de l'onde électrique : pour obtenir une section ou une coagulation, le générateur délivre des ondes électriques différentes dans leur rythme et dans leur voltage. Plus le voltage est élevé, plus le risque d'arc électrique est grand, plus le danger est élevé pour les patients. La forme de l'électrode : l'effet tissulaire est différent suivant qu'on utilise une pointe monopolaire ou une spatule. Plus l'électrode est fine, plus la densité de puissance est grande. Une pointe fine sera utilisée pour délivrer un courant de section précis et puissant alors que la spatule permet, quant à elle, d'appliquer le courant sur une plus grande surface en même temps, permettant d'obtenir un effet coagulant. Le temps d'application du courant monopolaire détermine l'extension de l'effet. Plus celui-ci est long, plus les effets tissulaires sont majorés. Ainsi, une section peut être trop profonde et lors d'une coagulation, les dommages tissulaires périphériques trop importants. Suivant la nature du tissu, le chirurgien modifie les paramètres électriques utilisés. L’effet de section est plus efficace sur la peau ou le muscle que sur la graisse (tissu peu conducteur). La plaque électrochirurgicale Elle permet la sortie du courant du corps du patient de manière sécurisée. Une brulure du site de la plaque survient lorsque la chaleur produite, par rapport au temps, n’est pas dissipée de manière sécurisée par la taille ou la conductivité de la plaque. Pour éliminer le risque d’une concentration du courant, la plaque doit présenter une large zone de contact avec une faible résistance et être placée sur un tissu conducteur pour assurer la sécurité du site opératoire. Elle doit être placée sur un site bien vascularisé, le plus près possible du site opératoire et loin des proéminences osseuses. La plaque utilisée doit être compatible avec le bistouri utilisé. 32 Le mode bipolaire En électrochirurgie bipolaire, les fonctions actives et de retour sont toutes deux accomplies sur le site de chirurgie. Les 2 extrémités de la pince jouent le rôle d’électrode active et de retour. Lors de son utilisation, les paramètres contrôlables par le chirurgien sont moins nombreux. Cependant, si aucun risque de couplage n'existe, le risque de brûlure de proximité reste réel et impose la maîtrise de cette énergie. La pince bipolaire est un instrument spécifique de ce type d'énergie. Les deux mors de la pince doivent être convenablement isolés l’un de l'autre jusqu'à leur extrémité active. La fermeture de la pince sur le tissu boucle le circuit électrique. Si la pince est fermée sans qu'aucun tissu ne soit interposé, l'activation de la pédale crée un court-circuit avec échauffement de l'extrémité de la pince. Clips, lasers, Ligasure, Ultracision et Radiofréquence Si la coagulation bipolaire est un moyen d'hémostase peu onéreux, simple, efficace et relativement sûr, utilisable dans la majorité des situations tant en chirurgie conventionnelle qu’en cœliochirurgie, d'autres méthodes d'hémostase, de section et de coagulation existent qui ont chacune leurs avantages et leurs inconvénients. Les clips à hémostase La pose de clips en titane sur les vaisseaux crée une obstruction mécanique et pose peu de problème pour les tissus environnants lorsqu'ils sont appliqués avec précision. Le laser Le laser est l’intensification de lumière. Un faisceau laser permet de couper ou de coaguler. Comme l’électrochirurgie, le laser entraine un échauffement du fluide cellulaire de 33 manière intensive, ce qui amène la membrane à exploser (section) ou à se déshydrater (coagulation). Le LigaSure Basé sur la coagulation bipolaire, ce système délivre au vaisseau un courant élevé et un faible voltage (200 V). C’est un dispositif qui permet l’hémostase des vaisseaux de diamètre jusqu’à 7 mm. Il nécessite l’emploi d’un générateur d’électrochirurgie dédié. Son fonctionnement est basé sur la thermofusion. L'élévation thermique engendrée entraîne une dénaturation du collagène et de l'élastine de la paroi vasculaire. La force appliquée aux tissus par les mors de la pince comprime les parois du vaisseau l'une contre l'autre qui fusionnent, ce qui occlut la lumière du vaisseau. Le générateur mesure l'impédance et la résistance au contact de l'électrode et arrête automatiquement de délivrer l'énergie une fois la fusion atteinte. L’Ultracision Le système Ultracision emploie l'énergie ultrasonore pour réaliser la coagulation et la section des vaisseaux. Le dispositif coupe et coagule en utilisant des températures plus basses que celles utilisées par l’électrochirurgie ou les lasers. Le principe repose sur le transfert aux tissus d'une haute fréquence de vibration induite par une lame vibrante qui est utilisée pour attraper le tissu contre un mors non vibrant. La coagulation se fait par la dénaturation des liaisons d'hydrogène et des protéines du vaisseau entraînant la formation d'un coagulat qui va occlure la lumière du vaisseau. Les températures atteintes sont de l'ordre de 50 à 100°C contre 150°C en moyenne pour la coagulation bipolaire. Ces procédés ultrasonores, qui existent en modèles de 5 et 10 mm de diamètre, présentent plusieurs avantages par rapport aux systèmes classiques d'électrochirurgie: moindre dispersion d'énergie thermique aux tissus environnants avec un moindre risque de lésions de proximité, double action de coagulation et section des tissus ce qui apporte le bénéfice d'un outil multifonction en diminuant le trafic des instruments à travers les trocarts, et absence de production de fumée donc meilleure vision et moindre toxicité péritonéale L'effet obtenu est contrôlé par le chirurgien qui ajuste la puissance du générateur, l'épaisseur de la prise, la pression des mors et le temps d'application. Ce système est acceptable pour le traitement de vaisseaux mesurant jusqu'à 3 mm de diamètre 34 La radiofréquence Association de l’énergie radiofréquence à un liquide conducteur (dissecting sealer, TissueLink), pré-coagulation avant dissection simultanées. Les accidents électriques en chirurgie cœlioscopique La fréquence des accidents électriques (brulure d’organe, perforation) varie entre 0,1 et 0,5%, chiffres probablement sous-évalués car ces accidents sont souvent méconnus en peropératoire et les complications secondaires (chute d’escarre, abcès, péritonite) ne sont pas forcement rattachés à l’accident initial. En chirurgie monopolaire, o un risque de brûlure électrique peut survenir par arc électrique (le pneumopéritoine étant un milieu aérien fermé et humide, le courant électrique peut s'y propager sous la forme d'arc électrique, notamment pour des voltages élevés.) ou au niveau de la plaque de retour. o Un risque de brûlure électrique peut également survenir par défaut d’isolation des instruments cœlioscopiques. En chirurgie bipolaire le risque est thermique par diffusion de l’énergie thermique par contigüité. 35 Conclusion Malgré l’émergence des nouvelles techniques (laser, ultrasons, radiofréquence, microondes etc.), l’électrochirurgie HF (bistouri électrique) reste la méthode la plus utilisée en salle d’opération car c’est un instrument polyvalent, fiable, efficace et sécurisant qui peut être utilisé dans de nombreuses interventions chirurgicales. Néanmoins les nouvelles méthodes ont leurs avantages et sont d’un apport certain dans certaines interventions longues ou hémorragiques (exemple : chirurgie d’exérèse hépatique). 36 La « Safe surgery check-list » au bloc opératoire Pr. Larbi ABID La sécurité du patient se définit comme la réduction de tout risque de préjudice évitable subi par le patient… Elle a pour ambition première d’éviter toute inversion du bénéfice/risque à se faire soigner. Un événement indésirable associé aux soins est un évènement inattendu qui perturbe ou retarde le processus de soin, ou impacte directement le patient dans sa santé. Cet évènement est consécutif aux actes de prévention, de diagnostic ou de traitement. Cet événement indésirable peut être grave comme un décès inattendu, une complication grave mettant en jeu le pronostic vital ou la perte permanente d'une fonction qui ne résulte pas de l'évolution naturelle de la maladie. Il peut aussi être sans conséquence s'il est détecté et récupéré à temps. Le plus souvent ces évènements indésirables sont le fait de défauts d’organisation, de manques de vérification, coordination, communication, en résumé à un manque de travail en équipe. Or nous avons vu qu’au niveau du bloc opératoire une multiplicité de ressources humaines de différente spécialités, est engagée. Afin d’éviter la survenue d’un événement indésirable, a été élaboré (comme lors d’un voyage en avion) une check-list qui doit être mise en application par l’équipe du bloc, pour chaque acte réalisé. La « Safe Surgery Check-list » a été conçue en suivant l’exemple des procédures de sécurité du secteur aéronautique, qui utilise systématiquement des check-lists. La « Safe Surgery Checklist » fut créée par un groupe d'experts désignés par l'OMS dans le but d'améliorer la sécurité des patients qui subissent une opération chirurgicale de par le monde. La coordination des anesthésistes, des infirmiers du bloc opératoire, des chirurgiens, des patients et autres professionnels de la santé fut une condition sine qua non au bon développement de cet outil. Testée au cours d’une étude pilote multi-sites dont les résultats furent publiés dans le New England Journal of Medicine, la « Safe Surgery Check-list » a contribué à réduire de plus de 30 % les complications et la mortalité liées à une série de procédures chirurgicales. La « Safe Surgery Check-list » a été conçue en suivant l’exemple des procédures de sécurité du secteur aéronautique, qui utilise systématiquement des check-lists. 37 Elle consiste à vérifier systématiquement, de manière croisée au sein de l'équipe, 19 points critiques aux trois temps clés d'une opération : avant l'anesthésie, avant l’acte opératoire proprement dit et après l’intervention. • avant l’anesthésie il faut vérifier l'identité du patient, la présence d'allergie... • avant l'intervention proprement dite : l’intervention prévue, sa localisation, l'administration des antibiotiques si nécessaire... • après l'intervention : le décompte des matériels (compresses, aiguilles...), la prise en charge postopératoire du patient... Avant l’induction anesthésique, l’infirmier du bloc et l’anesthésiste doivent s’assurer que : – – – – – les membres de l’équipe chargé de l’acte opératoire sont tous présents ; confirment l’identité du patient, l’intervention et le site de l’incision ; vérifier si une antibioprophylaxie a été administrer au cours des 60 dernières mn ; anticiper la survenue d’événements critiques les documents d’imagerie essentiels sont disponibles en salle. Avant que la patient ne quitte la salle d’opération, l’infirmier du bloc, l’anesthésiste et le chirurgien doivent s’assurer que : – – l’infirmier confirme oralement le type d’intervention, le décompte final des instruments, des compresses et des aiguilles et que les prélèvements éventuels sont étiquetés. le chirurgien, l’anesthésiste et l’infirmier doivent s’assurer des principales préoccupations concernant le réveil et de la prise en charge postopératoire. Mais bien avant cette « Safe Surgery Check-list », et chaque matin, l’infirmier responsable de la salle opératoire devrait établir une feuille d’ouverture de salle d’opération avant de débuter toute matinée opératoire. Y figure la vérification de la table d’opération, de l’éclairage opératoire, du bistouri électrique, des fluides, du mobilier et de tout matériel spécifique pouvant être utilisé au cours de la journée opératoire. De même, le technicien anesthésiste (AMAR) devrait également procéder aux vérifications du matériel anesthésique. Outre cette feuille d’ouverture, une feuille de suivi d’intervention, qui peut être incluse dans un registre de la salle opératoire mentionnera l’identité du patient, la date de l’intervention, le numéro de la salle, l’ordre de passage dans le programme opératoire, l’état nominatif complet de l’ensemble des personnes présentes en salle d’opération, les heures d’arrivée en salle du patient, de fin de temps anesthésique, d’incision, de fermeture, de sortie de salle, les éléments de préparation cutanée, la mise en place d’une plaque de bistouri, d’un garrot , l’utilisation d’un amplificateur de brillance, la réalisation de prélèvements, la mise en place d’un drainage, le type et le nombre de compresses, leur décompte sont notifiés. L’ensemble du matériel utilisé est identifié. La qualité des soins apportés aux patients et la lutte contre les infections liées aux soins doivent rester de toute façon les priorités de toute action touchant à l’organisation du bloc opératoire. La réussite de cette organisation passe obligatoirement par la mise en place d’une structure de coordination efficace dont le chef de bloc est le pilier. 38 39 La revue de mortalité et de morbidité Pr. Larbi ABID "La seule véritable erreur est celle dont on ne retire aucun enseignement." (John Powell.) Une Revue de mortalité et de morbidité (RMM) est une analyse collective, rétrospective et systémique de cas marqués par la survenue d'un décès, d’une complication, ou d’un évènement qui aurait pu causer un dommage au patient, et qui a pour objectif la mise en œuvre et le suivi d'actions pour améliorer la prise en charge des patients et la sécurité des soins (définition de la Haute Autorité de Santé française : HAS). Elle a pour finalité l’amélioration continue de la qualité des soins et leur sécurisation. Historique Le concept de conférence d’analyse des décès est apparu aux USA au début du XX ème siècle dans les services de chirurgie comme outil pédagogique. Les conférences de mortalité ont été intégrées aux standards pour les pratiques hospitalières élaborés par l’American College of Surgeons en 1917 sont à l’origine du dispositif d’accréditation des hôpitaux nord-américains. En 1983, cette activité est rendue obligatoire par « l’Accreditation Council for Graduate Medical Education » pour les résidents de chirurgie. Les revues de mortalité ont ensuite tenu une grande part dans l'enseignement des spécialités chirurgicales et depuis 1983 aux Etats-Unis, elles font partie de la formation obligatoire des chirurgiens. De la même manière, le Royal College of Surgeons au Royaume-Uni exige depuis 1987 qu’un hôpital organise régulièrement des revues de mortalité et morbidité pour être reconnu comme lieu de formation des jeunes chirurgiens. Des activités de revue de mortalité et morbidité existent également dans les hôpitaux en France et dans la plupart des pays européens. Elle est l’occasion pour les médecins en formation de présenter les cas de patients décédés ou ayant développé des complications et de focaliser la discussion sur les stratégies alternatives qui auraient pu modifier la survenue de telles complications. La RMM est ainsi considérée comme un véritable dispositif d’apprentissage par l’erreur, permettant une critique constructive des pratiques professionnelles. Outre l’ intérêt pédagogique, la RMM a un intérêt éthique en se préoccupant du service rendu au patient grâce à la réflexion menée sur les conséquences des actes réalisés , ainsi qu’une action structurante sur l’équipe en mettant en place une organisation réactive et apprenante entre les professionnels de santé. Les 3 types de cas pouvant être analysés en RMM sont : un décès, une complication inhabituelle ou même banale (indicateur de la qualité et de la sécurité des soins) et enfin un évènement qui aurait pu causer un dommage au patient (appelé aussi "near miss", "close call"). Ce dernier type d’événement est riche d’enseignements car il permet d’identifier les causes immédiates de l’évènement, mais aussi les barrières efficaces ayant empêché la survenue de dommages. On voit à travers ces différents chapitres, que la sécurité du patient en milieu hospitalier, et à fortiori en milieu chirurgical, nécessite une organisation rigoureuse de la part de l’équipe et une attention soutenue de la part de chaque membre de cette équipe. A l’heure du projet d’établissement et du projet de service et de la contractualisation que le MSPRH est en train de mettre en application, chaque service devrait développer ces outils qui ont fait la preuve de leur efficacité dans tous les établissements de santé où ils sont utilisés. Concernant la RMM, il appartient à l'établissement de santé et à son Conseil Médical d'intégrer cette activité dans son dispositif de gestion de la qualité et des risques. Mais même si le Conseil Médical n’inscrit pas une telle démarche, tout service de chirurgie se doit de consacrer régulièrement un de ses colloques à la revue de morbimortalité. Dans de nombreux pays les RMM sont des moments pédagogiques qui font obligatoirement partie du cursus de formation de certains spécialistes, en particulier chirurgiens, anesthésistes et réanimateurs. La participation des personnels de l’équipe paramédicale ayant participé à la prise en charge du patient est recommandée. Elle est dispositif d'apprentissage par l'erreur non culpabilisant. 40 La chirurgie ambulatoire Pr. Larbi ABID Elle se définie comme une chirurgie programmée et réalisée dans les conditions techniques nécessitant impérativement la sécurité d’un bloc opératoire, sous une anesthésie de mode variable, suivie d’une surveillance postopératoire permettant, sans risque majoré, la sortie du patient le jour même de son intervention (one day surgery des anglo-saxons). En Algérie, la chirurgie ambulatoire est une activité soumise à l’autorisation de la Direction Générale des Services de Santé du MSPRH pour les établissements hospitaliers privés. A l’heure actuelle, seules les spécialités d’ophtalmologie et d’ORL sont autorisées à la pratiquer. Dans le secteur public, aucune réglementation ne précise les modalités d’exercice d’une activité de soins en ambulatoire et toute la latitude est laissée aux professionnels de la santé sans obligations ou contraintes en termes de sécurité et de qualité des soins. Mais devant les demandes émanant des autres spécialités du secteur libéral, les services concernés du MSPRH seront dans l’obligation de baliser cette activité. Au niveau international, les terminologies synonymes one day surgery, ambulatory surgery, same-day surgery et day-only ont été retenues et correspondent à des séjours sans hébergement de nuit. Cette modalité de chirurgie est pratiquée avec l’accord du patient et sous certaines conditions, tenant compte à la fois du type d’intervention chirurgicale réalisée, des conditions de vie du patient (présence d’un accompagnant) et de l’organisation des services de chirurgie. Les opérations concernées Les interventions les plus courantes sont l’ablation de la cataracte, la cure de varices, les arthroscopies, la cure des hernies. Des interventions de plus en plus complexes sont aussi réalisées en ambulatoire : la cholécystectomie cœlioscopique, certaines interventions gynécologiques, pathologie ligamentaire et méniscale du genou, de pathologie de la main, de l’épaule… Pratiquement dans toutes les spécialités, des interventions peuvent être réalisées en ambulatoire. L’appendicectomie, la pose d’une prothèse de genou et/ou de hanche, d’un by-pass pour les personnes obèses… En cancérologie, la chirurgie conservatrice du sein. Dans environ 2 % des cas (imprévu, saignement, récupération incomplète de l’anesthésie…), le patient est finalement hospitalisé pour la nuit. La chirurgie ambulatoire réduit les risques d’infections associées aux soins et de phlébites qui augmentent avec la durée d’hospitalisation. Enfin, elle permet un gain d’efficacité dans l’organisation des services de chirurgie, ainsi qu’une réduction des coûts pour les établissements de santé. Cependant elle implique une organisation irréprochable de l’équipe de soins, basée sur la gestion des risques, la maîtrise des suites opératoires et l’information du patient. Toutes les étapes de la prise en charge doivent être organisées afin de permettre la sortie du patient le jour même de son intervention dans des conditions de sécurité optimale. Les quatre phases principales de la prise en charge sont : l’évaluation préopératoire, au cours de laquelle la décision de réaliser la chirurgie en ambulatoire est prise sur la base du triptyque patient-acte-structure. Il s’agit d’évaluer le rapport bénéfice/risque, d’anticiper les effets secondaires prévisibles et de préparer la sortie du patient ; la phase opératoire en ellemême ne présente pas de spécificité ; la phase d’autorisation de sortie repose sur une évaluation médicale à l’issue de laquelle un bulletin de sortie est remis par un des médecins de la structure. Celui-ci précise les conduites à tenir en matière de surveillance postopératoire, 41 les coordonnées de l’établissement de santé assurant la permanence et la continuité des soins, et le numéro d’urgence à joindre ; le suivi du patient est assuré par un appel téléphonique le lendemain de l’intervention. La coordination renforcée des différents acteurs permet le bon déroulement de ces étapes et d’optimiser le flux des patients au sein de la structure. La chirurgie ambulatoire peut être effectuée quelque soit l’âge du patient et elle est à privilégier chez les personnes âgées en raison du moindre risque de perte de repères par rapport à une hospitalisation de quelques jours. Elle nécessite un certain nombre de conditions pour pouvoir être réalisée : o avoir le téléphone et être apte à comprendre et appliquer les consignes de soins. o pouvoir être raccompagné le soir de l’intervention chirurgicale. o ne pas demeurer seul la première nuit après une anesthésie générale. 42