Planification des soins entre deux zones géographiques et impact de la télémédecine Myriam LE GOFF – PRONOST Virginie LETHIAIS Département Economie et Sciences Humaines ENST Bretagne Technopôle Brest Iroise BP832 29285 Brest cedex [email protected] [email protected] Le secteur de la santé, en France, présente de très grandes inégalités géographiques, en ce qui concerne l’offre médicale. Le corollaire est un déséquilibre dans l’accès aux soins, trahissant une iniquité et une inefficacité du système public de santé. Les soins spécialisés se trouvent concentrés en ville alors que la population rurale a de réelles difficultés à accéder aux prestations dont elle aurait besoin. On observe, de plus, en France une dichotomie nord/sud avec une démographie médicale plus élevée au sud. La concentration des activités médicales dans certaines régions, l’hypercentralisation parisienne (Vigneron, Tonnellier, 1999), l’agglomération des centres hospitaliers spécialisés dans les villes, correspondent au schéma centre-périphérie mis en avant dans les modèles d’économie géographique, le centre étant la région parisienne et son expertise spécialisée et la périphérie correspondant aux autres régions relativement peu dotées et présentant des inégalités. Les méthodes de planification de l’offre actuellement utilisées par l’Etat semblent aujourd’hui insuffisantes pour contrecarrer cette tendance au déséquilibre spatial. Il est indéniable que les centres hospitaliers ne peuvent être délocalisés et que la ville restera la prestataire privilégiée des soins. L’investissement des acteurs du domaine de la santé dans les NTIC pourrait, selon nous, apporter une solution innovante et différente à la régulation physique de l’offre de soins par leur capacité à délocaliser l’offre, notamment l’offre de soins spécialisés, grâce aux liaisons numériques, via la télémédecine. Dans cet article, nous nous intéressons à la répartition de l’offre de soins entre deux régions ainsi qu’à l’impact de l’introduction de la télémédecine dans le système de santé. La majorité des projets de télémédecine étant développée par des centres hospitaliers, notre étude portera sur les dépenses de santé hospitalières uniquement. www.fed-eco.org Au plus proche du système de répartition actuel1 , nous supposons qu’un planificateur dispose d’une enveloppe de financement globale dédiée aux soins de santé publics qu’il doit partager entre deux régions. Deux effets jouent alors sur la qualité des soins offerts dans chaque région : un effet richesse car un financement plus important induit une meilleure offre de soins et un effet encombrement car une meilleure offre attire les malades de l’autre région et un trop grand nombre de patients dégrade la qualité. Nous montrons que, malgré la présence d’un coût de transport, la situation optimale, en terme d’utilité sur l’ensemble des deux régions, consiste à allouer la quasi-totalité du financement à la région la plus grande, sacrifiant ainsi les malades de la petite région qui supportent un coût de déplacement pour avoir accès au soins. L’étude d’autres modes de financement des dépenses de santé publiques, en particulier par un impôt régional, fait aussi apparaître ce résultat de déséquilibre inter-régional dans l’accès aux soins. Cela nous confirme qu’une solution alternative à la délocalisation physique de l’offre de soins s’impose. La télémédecine, parce qu’elle évite la migration des patients et donc fait disparaître les coûts de transport, a un effet bénéfique sur l’utilité des patients de la petite région. De plus, il apparaît qu’elle conduit à une qualité des soins supérieure ce qui bénéficie aussi aux patients de la grande région. La télémédecine ne conduit donc pas seulement à résoudre le déséquilibre inter-régional dans l’accès aux soins, mais a un impact positif sur l’utilité des patients sur l’ensemble des deux régions. 1 Chaque année est voté un objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) qui est réparti en cinq enveloppes (hospitalisation publique, privée, médecine de ville généraliste, médecine de ville spécialiste et institutions médico-sociales). L’ enveloppe hospitalière, qui nous intéresse ici, est alors répartie entre les différentes régions. www.fed-eco.org