Philosophie de la systématique

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Philosophie de la systématique
Philosophie de la biologie
Cours 7
Plan
1. 
2. 
3. 
4. 
5. 
6. 
Remarques historiques
Le cladisme
Le phénétisme
La taxinomie évolutionnaire
Qu'est-ce qu'une espèce ?
La métaphysique des espèces
La taxinomie de Linné
Karl von Linné : Systema Naturae (1735)
Nomenclature binomique : [genre] [espèce], e.g., Panthera tigris
L'hiérarchie linnéique :
Classe (e.g. Mammalia)
Ordre (e.g. Carnivora)
Genre (e.g. Panthera)
Espèce (e.g. Panthera tigris)
Mammalia, Carnivora, Panthera, Pathera tigris : taxa
La taxinomie de Linné
Linné considéra les espèces comme immuables. Donc son
système de la nature n'est pas une représentation de l'arbre
généalogique
Néanmoins, pour Linné les genres et les espèces représentent
des divisions naturelles. Par contre, les catégories plus hautes
ne sont que des groupements convenables
Le système de Linné est fondé sur un essentialisme
taxinomique, selon lequel il existe des conditions nécessaires
et suffisantes pour l'appartenance d'un organisme à un certain
genre / espèce. De plus, la classification présuppose que les
membres de différents taxas sont objectivement distincts.
Conséquences de la révolution darwinienne
(1) La variabilité continu de toute forme de vie (condition
nécessaire pour l'évolution !) n'est pas compatible avec
l'essentialisme taxinomique. Parfois, différents organismes ne sont
pas clairement distincts ; il y a souvent des séries continues et
beaucoup de formes intermédiaires. De plus, tous les traits d'un
organisme sont très variables, donc il n'y a pas de collections de
traits que l'on pourrait considérer comme l'essence d'un taxon.
(2) DARWIN proposa que la taxinomie doit représenter la
phylogénie (=la descendance évolutionnaire) des groupes
classifiés. Il pensa qu'ainsi un système naturel de la taxinomie est
uniquement déterminé. Il serait très étonné s'il entendait les débats
vifs du 20e siècle en ce qui concerne les principes propres à la
taxinomie !
2. Le cladisme
[étymologie : grec κλαδοσ : branche]
Selon le cladisme, le système de la taxinomie
représente exclusivement des relations
phylogénétiques
Le principe principal de la classification est la
monophylie, c.à.d. la descendance du même
ancêtre
2. Le cladisme
Une clade est un groupe d'organismes qui ne contient
qu'un seul ancêtre commun, tous les descendants et
seulement des descendants de cet ancêtre.
La taxinomie donc consiste exclusivement en des
cladogrammes, qui ne contiennent qu'information
sur l'ordre des branchements dans l'histoire des taxa
considérés
L'inférence phylogénétique
Homologie : trait qui descend d'un ancêtre commun (e.g., les bras
de l'homme et les ailes des oiseaux, les yeux de tous les
animaux)
Homoplasie : traits avec différentes origines (e.g. les nageoires du
requin et du dauphin)
Plésiomorphie : trait qui descend d'un ancêtre
Symplésiomorphie : trait qui est nouveau dans une clade mais qui
est présent dans toute la clade
Synapomorphie : trait qui n'est présent que dans quelques
membres d'une clade. Ces derniers permettent la mise en
œuvre de l'analyse de parcimonie (calcul des cladogrammes
les plus probables, c.à.d. avec le nombre minimal des
modifications évolutionnaires)
Taxinomie moléculaire
Q : Pourquoi les cladogrammes produits à l'aide de
données moléculaires (séquences ADN) sont-ils
considérés plus fiable que les cladogrammes fondés
sur l'analyse morphologique ?
Taxinomie moléculaire
Q : Pourquoi les cladogrammes produits à l'aide de
données moléculaires (séquences ADN) sont-ils
considérés plus fiable que les cladogrammes fondés
sur l'analyse morphologique ?
A: Parce que la probabilité que l'évolution produise la
même ou des séquences ADN très similaires d'une
façon indépendante est négligeable. Donc un peut
compter sur l'homologie des séquences ADN
similaires.
3. Le phénétisme
Le phénétisme considère la morphologie comme le fondement de
la taxinomie. Tandis que dans le cladisme, les traits
morphologiques peuvent aussi être utiles pour l'inférence des
relations phylogénétiques, ce n'est pas la similarité morphologique
qui définit les taxons. Par contraste, le phénétisme exige que tous
les taxa soient définies par des similarités phénotypiques.
Les phénétistes préfèrent des traits quantitatifs pour la
classification. L'ensemble des traits quantitatifs d'un organisme
définit un espace hyperdimensionnel où chaque trait est représenté
par une dimension. Donc il y aura des clusters de points dans les
hypervolumes de l'espace des traits. Tous les taxa sont considérés
comme des nuages de points dans cet espace.
3. Le phénétisme
L'idéologie du phénétisme est un positivisme puriste selon lequel
la classification en tant que méthode empirique doit être
indépendant de toute théorie, en particulier la théorie de l'évolution.
Les phénétistes ne sont pas contre la théorie de l'évolution, mais
selon leur philosophie il faut d'abord classifier les phénomènes
avant d'élaborer des explications théoriques.
Malheureusement, cette méthode s'est révélée complètement
impraticable.
Le problème du poids taxinomique
Il est impossible d'accorder le même poids a tous les
traits d'un organisme en vue de la classification
Le nombre des vertèbres est sûrement plus important
que le nombre des cheveux dans la classification
Mais les jugements du poids taxinomique exigent des
postulats théoriques
Ce n'est qu'à l'aide d'une théorie que l'on peut pondérer
les données empiriques ("la théorie sans l'expérience
est vide, mais l'expérience sans la théorie est aveugle")
4. La taxinomie évolutionnaire
Cladisme : seulement phylogénie
Phénétisme : seulement morphologie
TE : Le système de classification doit inclure des
informations concernant la phylogénie ainsi que la
morphologie des organismes
5. Qu'est-ce qu'une espèce ?
Aristote : les espèces biologiques comme le paradigme
des espèces naturelles caractérisées par leur essence
Cuvier, Linné: essentialisme voire Platonisme, espèces
comme types abstraits
Darwin: le rejet de l'essentialisme à propos des espèces
aboutit à l’espèce polytypique
N.B. l'espèce polytypique n'est pas connue dans la
chimie ! Une espèce moléculaire est toujours
monotypique
5. Qu'est-ce qu'une espèce ?
Les possibilités pour la constitution des espèces :
Morphospecies (morphologie)
Biological species (communauté reproductive)
Genospecies (génome commun)
Ecospecies (habitat commun)
Phylospecies (monophylie)
Les espèces phylogénétiques sont sous-déterminées
par la phylogénie !
6. La métaphysique des espèces
Deux interprétations métaphysiques:
(1) Espèces comme universaux (universals)
(2) Espèces comme individus (particulars)
Universaux :
-  Abstrait
-  Général (répétable, exemplifiable)
-  Spatio-temporellement non-limités, non-muable (!)
-  Nommés par des concepts généraux
Individus :
-  concrets
-  Particulier (non-répétable, non exemplifiable)
-  Spatio-temporellement limité, muable
-  Nommés par des noms propres
Espèces comme universaux
Problème : semble présupposer l'essentialisme
Solution: les espèces comme clusters des propriétés
homéostatiques (homeostatic property cluster)*
Il n'y a pas d’ensembles de propriétés qui sont individuellement
nécessaires et conjointement suffisants. Mais il existe des
clusters de propriétés qui sont souvent co-instantiées et dont
l'exemplification facilite l'instantiation d'autres propriétés du
même cluster par des mécanismes homéostatiques
*R.N. Boyd (1999), Homeostasis, Species, and Higher Taxa. In:
R.A. Wilson (ed.), Species: New Interdisciplinary Essays.
Cambridge, Mass.: MIT Press
Espèces comme individus (particulars)
Problème : les espèces sont des ensembles d'individus, comment
peuvent-elles être des individus eux-mêmes ?
Solution*: Méréologie au lieu de l'exemplification. Les espèces
sont des super-organismes qui ne sont pas exemplifiées par
des individus comme Fido, le chien mais dont le rapport entre
l'espèce "chien" et Fido est un rapport méréologique (le rapport
entre le tout et les parties)
Critères de l'individualité :
-  Cohésion interne
-  intégration, homéostase (équilibre), changement sous la
relation d'identité diachronique
*D. Hull (1978), A Matter of Individuality. Philosophy of Science 45
Universaux ou individus ?
Des concepts qui réfèrent à des universaux
normalement soutiennent des inférences sur leurs
référents. Puisque les espèces biologiques semblent
en fait soutenir de telles inférences, on peut
argumenter qu'elles doivent être des universaux. Les
noms propres ne soutiennent pas d'inférences sur les
parties de l'individu.
Mais les défenseurs de la thèse des espèces comme
individus argumentent que c'est, en fait, un avantage
parce que les inférences sur les membres d'une
espèce ne sont pas fiables.
Universaux ou individus ?
En tout cas, la conception classique des universaux
n'est pas compatible avec le changement. Puisque les
espèces sont des entités qui changent selon Darwin, il
faudrait modifier la conception
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