Cahier Local 02 TEMPS FORT LE BIEN PUBLIC Lundi 5 mai 2014 Texte TECHNOLOGIES. De la recherche de nouveaux traceurs à l’utilisation sur le malade, Dijon est à la pointe. Dans l’œil du cyclotron Pharmacoimagerie. C’est le suivi de l’effet des traitements en utilisant les moyens de l’imagerie : IRM, Pet scan, Spect… Nucléaire. L’autorité de sûreté nucléaire doit délivrer une autorisation pour l’exploitation d’un cyclotron. Pour l’heure, le cyclotron installé en 2011 à Dijon ne produit pas encore. Le centre Leclerc utilise la production d’autres accélérateurs de particules en France. S avez-vous que des doses de radioéléments injectés aux patients permettent de mieux évaluer l’étendue d’un cancer et, d’autre part, la pertinence d’un traitement ? En fonction de la fixation du produit injecté, on peut observer qu’un médicament atteint sa cible, ou pas… Dans cet essor de la médecine nucléaire, Dijon se montre pionnière. En juillet 2011, l’installation d’un cyclotron, dans le nouveau bâtiment du groupement d’intérêt économique (GIE) Pharm’Image (lire notre encadré), dans la zone de l’Espace régional d’innovation et d’entreprenariat de la cité des ducs, marque une avancée. « Le cyclotron est un outil d’équipement exceptionnel », souligne François Deseille, vice-président du Grand Dijon en charge de la recherche et du transfert de technologie, précisant qu’au moment de la livraison de celui-ci, le conseil régional avait donné 400 000 €, le conseil général 200 000 € et autant le Grand Dijon. « On s’est battu avec certaines villes pour l’obtenir ; c’est un équipement que beaucoup nous envient. » Pas encore productif Aujourd’hui, le cyclotron ne fonctionne, tous les mois, que dans le cadre de sa maintenance. Il n’a donc réalisé aucune production pour les membres du GIE, pour alimenter les plateformes de radiochimies directement associées ; il n’a rien produit à titre expérimental. Comment expliquer ce retard ? Après un rachat qui a gelé momentanément son implantation à Dijon, le projet repart avec l’exploitant du cyclotron : Cyclopharma, entreprise basée à ClermontFerrand. « Le cyclotron Le cyclotron est utilisé pour la lutte contre le cancer par le biais de la médecine nucléaire. Photo archives LBP devrait produire d’ici la fin de l’année, entre novembre et janvier », assure Jean-Bernard Deloye, directeur recherches et développement de Cyclopharma. La société possède actuellement dix cyclotrons sur la vingtaine existant en France. « Nous allons investir trois millions d’euros à Dijon, à partir de mai. Il s’agit de matériels et d’un peu de construction, à côté de Pharm’Image. » Et de préciser : « Ce qui nous a motivés à nous installer à Dijon, c’est, d’une part, le bassin de population en adéquation avec la production et, d’autre part, la “ Les doses de radioéléments ont une durée de vie très courte. D’où l’intérêt d’avoir un cyclotron à Dijon.” Le professeur Pierre Fumoleau, centre Leclerc (lutte contre le cancer) collaboration avec Pharm’Image et Oncodesign. Le cyclotron fabrique des isotopes actifs. C’est très important de développer de nouvelles molécules dans l’oncologie, notamment pour améliorer diagnostics et thérapies ». De son côté, Philippe Genne, administrateur du GIE Pharm’Image et P-DG d’On- Les membres du GIE Pharm’image Les membres du GIE Pharm’Image (créé en 2008) sont le Centre de compétences internationales en télé-imagerie (CCITI) créé en 2004 ; le centre Georges-François-Leclerc, centre de lutte contre le cancer pour la région Bourgogne ; CheMatech, société créée en 2005 issue du laboratoire de chimie moléculaire de l’Université de Bourgogne ; le CHU de Dijon ; la société de biotechnologie NVH Medecinal ; Welience, filiale de valorisation de la recherche de l’Université de Bourgogne ; la société Oncodesign, entrée en bourse en mars dernier, qui aide les entreprises pharmaceutiques à identifier et valider de nouvelles molécules efficaces dans le traitement des cancers. codesign, déclare : « Le GIE va investir un million d’euros dans du matériel spécialisé, avec le soutien des collectivités, sur sa plateforme expérimentale. Ce qui intéresse Cyclopharma, c’est d’avoir accès à de nouveaux radio-traceurs pour découvrir des thérapies ». À Chicago Pour sa part, l’Université de Bourgogne, en relation avec Pharm’Image, travaille à la création d’un pôle hospitalouniversitaire en pharmacoimagerie. Il correspond à la montée en puissance de Dijon dans ce domaine, qui s’est illustré par plusieurs communications internationales. Au centre Georges-François-Leclerc de Dijon, centre régional de lutte contre le cancer, le professeur et directeur général Pierre Fumoleau explique qu’un médecin de son équipe va se rendre en juin au Congrès mondial de cancérologie, à Chicago, pour démontrer que le fait d’utiliser un Pet scan permet de modifier la prise en charge thérapeutique de patientes atteintes de cancer du sein. Le Pet scan consiste à injecter un produit légèrement radioactif (isotope) dans le corps, qui va se fixer sur les tumeurs ou métastases. « Cette association du Pet scan et de la modification du traitement permet d’améliorer le devenir de ces malades. C’est la première fois dans le monde que nous démontrons que le Pet scan permet de modifier la stratégie thérapeutique : nous sommes leader mondial pour cette technologie du Pet scan dans le cancer du sein, qui nécessite un produit en provenance du cyclotron. » Et le professeur de souligner : « Grâce aux chimistes de l’Université de Bourgogne, on peut marquer nos molécules et assurer la médecine personnalisée : le bon médicament, au bon moment, pour le bon malade, avec une bonne tolérance ». ANNE-FRANÇOISE BAILLY