1
Les Taux de Change d’Équilibre des Pays Sud
Méditerranéens :
Une estimation à partir de l’économétrie de données
de panel non stationnaires.
Hmida LOUHICHI1
CEPN
Université Paris XIII
Résumé :
L’objectif de ce papier est d’estimer les taux de change
d’équilibre de 11 pays Sud Méditerranéens entre 1980 et 2008. Le
cadre méthodologique que nous retenons repose sur l’approche
comportementale du taux de change d’équilibre (approche BEER) et
consiste à estimer une relation de long terme entre le taux de change
effectif réel et un certain nombre de fondamentaux. L’estimation
économétrique repose sur l’économétrie de données de panel non
stationnaires. Nos résultats indiquent qu’une augmentation du revenu
par habitant, des dépenses du gouvernement, des termes de l’échange
et de la position extérieure nette a tendance à apprécier le taux de
change d’équilibre de long terme des pays considérés, alors qu’une
augmentation du degré d’ouverture tend à le déprécier.
Mots clés : Taux de change d’équilibre, BEER, cointegration en
panel, Pays Sud Méditerranéens.
Classification JEL: E69, C15, C23, F0, F31.
1Doctorant au Centre d’Economie Paris Nord, (CEPN)
108 Avenue Aristide Briand
92220 Bagneux, La France
Tél : +33 6 13 92 37 97
louhichi.hmida@gmail.com
2
Introduction :
La détermination d’un taux de change d’équilibre dans les pays
émergents fait l’objet d’une vaste littérature tant théorique
qu’empirique. Les premières définitions proposées reposent sur la
PPA. Cependant, celle-ci ne semble guère appropriée dans le cas des
pays émergents dont les niveaux de prix sont beaucoup plus faibles
que dans les pays développés. Dès lors, l’appréciation tendancielle du
change réel est perçue comme un phénomène naturel compte tenu du
processus de rattrapage de ces pays (effet Balassa-Samuelson). Dans
ce contexte, ce sont les productivités relatives dans les secteurs des
biens échangeables et non échangeables qui déterminent le niveau
d’équilibre du taux de change réel. Pourtant, cette définition n’est pas
pleinement satisfaisante car elle propose un niveau d’équilibre de
"long terme" et ne permet pas de relier le taux de change réel à la
situation extérieure du pays. Une littérature relativement abondante a
mis en exergue l’importance du taux de change pour des pays en
transition comme les pays Sud Méditerranéens en tant qu’instrument
de régulation et devant la nécessité de mettre en œuvre une politique
de change capable d’atténuer, voire d’éliminer, les répercussions
défavorables des mésalignements des taux de change. D’autant que
l’expérience passée a montré qu’un taux de change durablement
inadéquat peut être à l’origine de retombées négatives sur les
performances et est, généralement, révélateur de dysfonctionnements
structurels. En effet, de nombreuses difficultés rencontrées par
certains pays durant les années 80 ont été, très souvent, attribuées à
des politiques de change inappropriées. A titre illustratif, certains
auteurs, n’hésitent pas à considérer que l’effondrement du secteur
agricole, la stagnation économique et le surendettement d’un certain
nombre de pays, notamment des pays Sud Méditerranéens, sont
directement liés au maintien, pendant une longue période, d’un taux
de change surévalué (Aglietta, Baulant et Coudert, 1999).
Les tenants d’une telle approche considèrent que :
les surévaluations, surtout quand elles persistent dans le temps,
sont, généralement, des signes annonciateurs de profondes
crises, comme ce fut le cas pour le Mexique en 1994 ou, plus
récemment, pour le Sud-est asiatique;
3
les écarts du taux de change réel par rapport à sa trajectoire
d’équilibre, sont, souvent, associés à de faibles taux de
croissance économique sur le moyen et long terme.
Le Partenariat Euro-méditerranéen entre l’Union Européenne et
les pays méditerranéens a été lancé à Barcelone en 1995 afin de faire
du bassin méditerranéen une zone de dialogue, d’échanges et de
coopération. Cependant, sous l’effet de ce partenariat et de l’objectif
ambitieux d’instaurer une zone de libre-échange euro-méditerranéenne
d’ici à 2010, des processus de libéralisation se sont mis en place
avec, comme caractéristiques communes, une plus grande ouverture
au commerce international et, sur le plan intérieur, des réformes allant
dans le sens du recul de l’Etat dans le fonctionnement de l’activité
économique. Ces changements se sont accompagnés d’adaptation
progressive des politiques budgétaires et monétaires pendant les
dernières décennies.
L’enjeu était alors clair, il s’agissait de permettre aux pays
méditerranéens de pénétrer dans les étapes de la transition
économique qui suivent l’étape de la stabilisation et de la bonne
gestion macroéconomique, à savoir la libéralisation de leurs régimes
de commerce et de leurs systèmes financiers, ainsi que l’adoption
d’instruments de politique monétaire fondés sur les mécanismes du
marché. A la lumière de ces changements, les pays méditerranéens
ont envisagé d’assouplir leurs régimes de change afin de faire face aux
chocs extérieurs, de duire le risque de crises bancaires et de
contribuer à la stabilité financière.
Les études concernant la question des taux de change els
d’équilibre des pays méditerranéens ne sont pas nombreuses.
L’objectif poursuivi dans cet article est de déterminer le taux de
change d’équilibre c’est-à-dire compatible avec les équilibres
interne et externe - des pays Sud méditerranéens. Plus
particulièrement, il s’agit de savoir si les taux de change de ces pays
convergent ou non vers leur valeur d’équilibre afin d’évaluer
l’ampleur des déséquilibres qui affectent ces pays. Les calculs
s’appuient au niveau théorique sur l’approche comportementale du
4
taux de change d’équilibre (approche BEER). Nous estimons une
équation réduite du taux de change effectif réel où ce dernier est
expliq par un certain nombre de fondamentaux économiques. Au
niveau économétrique l’analyse repose sur les développements récents
en économétrie de données de panel non stationnaires: tests de racine
unitaire et de cointégration en panel. En nous basant sur les vecteurs
de cointégration issue de la méthode Fully Modified OLS, nous
calculons les taux de change d'équilibre afin d’en déduire leur degré
de sur ou de sous-évaluation.
La suite de cet article est organisée de la manière suivante. Une
première section décrit le cadre théorique de l’approche
comportementale du taux de change d’équilibre. La seconde section
présente notre démarche économétrique et les résultats auxquels nous
aboutissons. La dernière section présente nos principales conclusions.
5
1. Le cadre théorique : l’approche BEER :
Dans le cadre des pays émergents, les études empiriques
s’appuient généralement sur l’approche BEER (Behavioural
Equilibrium Exchange Rate). Elles reposent sur l’estimation d’une
équation réduite le taux de change réel est régressé sur un certain
nombre de fondamentaux censés affecter les équilibres interne et
externe. Cette méthodologie permet de dépasser la disponibilité
limitée des séries de volume de commerce dans les économies
émergentes, qui contraint l’utilisation de la méthodologie de
Williamson ou de tout autre modèle structurel.
1-1- Le modèle de base :
Clark et MacDonald (1999) proposent une modélisation
générale de l’approche BEER. Elle consiste à retenir un ensemble de
variables fondamentales pouvant influencer le taux de change el de
long terme (terme de l’échange, productivité du travail, prix du
pétrole, stock d’actifs étrangers nets, taux de chômage…) puis de
chercher des relations de cointégration entre le taux de change
t
q
et
ces variables.
Le modèle BEER se décline alors de la façon suivante : Clark et
MacDonald (1999) partent de la condition de la parité des taux
d’intérêt pour modéliser le taux de change d'équilibre. :
t
ektt
ektt
ekt rrq
*,,
(1)
ekt
q
est la variation
anticipée en t+k du taux de change réel.
ektt
ektt pir
,
et
ektt
ektt pir ***,
représentent respectivement les taux
d'intérêt réels domestique et étranger.
t
représente une mesure de la
prime du risque. L’équation (1) peut se réécrire :
t
ektt
ektt
ekttt rrqq
)( *
,,,
(2), Si
est interprété
comme une composante du taux de change réel espéré dans le "long
terme", on peut le remplacer par
ektt
x,
dans l’équation
(2) :
t
ektt
ektt
ektt
trrxq
)( *
,,
,
(3)
1 / 23 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !