Responsabilité éthique du travail social envers autrui et envers la société…
Vie Sociale – n° 3/2009
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un partage au sein de toute personne entre responsabilités « égoïstes »
et « altruistes ».
Sous le second aspect, être responsable, c’est être redevable de ses
actes devant la loi, dans une relation juridique.
Le terme « responsabilité » comporte ce double sens et signifie ré-
pondre devant une autorité souveraine (tribunal intime de la cons-
cience ou tribunal externe institué). Il y a ainsi être responsable et être
tenu pour responsable, deux principales formes de responsabilité sui-
vant l’autorité devant laquelle on doit répondre : la responsabilité
morale vis-à-vis de son for intérieur, fierté de l’homme libre, possibili-
té pour chaque être humain de s’accomplir ; et la responsabilité so-
ciale qui peut être une responsabilité professionnelle, une responsabili-
té pénale ou civile, une responsabilité politique… Cependant, on ne
peut être responsable que lorsque l’action a au moins un élément de
liberté, car rappelons que liberté et responsabilité sont intrinsèquement
liées.
Dans « l’Éthique à Nicomaque5 », Aristote pose le principe de la
responsabilité, il affirme que l’homme doit répondre de ses actes dès
lors qu’il en a pris l’initiative et qu’il est même responsable de son
irresponsabilité. Répondre présent, répondre de l’autre – c’est du vi-
sage de l’autre que naît le sentiment de responsabilité –, considérer
toujours une personne en tant que fin (le visage bouleversant d’une
personne saisie dans le face à face, selon Emmanuel Levinas6), tel est
le premier contenu de la responsabilité éthique personnelle d’un indi-
vidu, libre et pleinement conscient. Dans Soi-même comme un autre7
en réponse à son interrogation « Que faut-il faire pour atteindre la vie
bonne avec autrui et pour soi-même ? », Ricœur en appelle également
à une éthique de responsabilité ; celle-ci a pour rôle d’examiner la
situation qui pose problème, passer la décision au crible de la loi mo-
rale afin d’éviter une aspiration trop individuelle et de revenir à
« l’intuition fondamentale de l’éthique », c’est-à-dire à l’esprit du de-
voir que seul le discernement peut apprécier. Il souligne que la souf-
france des victimes crée des obligations pour les autres. « La souf-
france oblige, dit-il, elle rend responsable ses témoins. Le premier
droit est ainsi du côté de la victime. Son droit est d’être reconnu ». À
ce droit originaire correspond l’obligation inconditionnelle de porter
secours. « Ce devoir, selon Ricœur, est un impératif catégorique qui
dérive de celui, plus formel, de traiter les personnes comme des fins et
non pas seulement comme des moyens ». Ainsi, le souci d’assumer son
5. ARISTOTE, Éthique à Nicomaque, Paris, Garnier-Flammarion, 1965.
6. Dans Difficile liberté. Essais sur le judaïsme, Levinas indique qu’autrui est « celui
qui par son visage ouvre à l’au-delà, invite au dialogue et suscite une vigilance éthique ».
7. Paul RICŒUR, Soi-même comme un autre, Paris, Seuil, 1996.
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