Forum Rangueil 2007 : La crise d`algie vasculaire de la face

Forum Rangueil 2007 :
La crise d’algie vasculaire de la face
Nelly Fabre, service de Neurologie. Rangueil
L’algie vasculaire de la face (AVF) est une des affections les plus douloureuses qui puissent
exister. Elle peut être traitée efficacement en quelques minutes. Cette céphalée appartient à un
groupe de céphalées ‘primaires’ appelées : céphalées trigémino-dysautonomiques. Comme
leur nom l’indique la douleur se produit dans le territoire du nerf trijumeau (surtout autour de
l’œil) et s’accompagne de signes végétatifs locaux. L’évolution par crises relativement
courtes survenant plusieurs fois par jour est une autre caractéristique de ce groupe de
céphalées. Des progrès considérables ont été faits sur le plan thérapeutique. Comme les autres
céphalées primaires, l’algie vasculaire de la face, si elle a des manifestations périphérique
(douleur dans le nerf trijumeau, larmoiement, rhinorrhée), est néanmoins une maladie du
système nerveux central, avec probablement un ‘générateur’ dont on pense actuellement qu’il
est situé au niveau de l’hypothalamus. Ces données sont importantes à faire comprendre au
patient qui recherche toujours spontanément une cause locale et fait souvent le tour des ORL
et des ophtalmologistes.
Faire le diagnostic d’algie vasculaire de la face.
1) Vous assistez à la crise : c’est l’affolement dans la salle d’attente ou chez le patient, surtout
s’il s’agit des premières crises. Il s’agit le plus souvent d’un homme jeune, agité, se plaignant
d’une douleur terrible dans la région périorbitaire d’un seul côté. Il est difficile à examiner en
raison de l’agitation et de l’intensité de la douleur mais on constate une injection
conjonctivale, ou un oedème de la paupière, une sudation excessive. Peu d’affections peuvent
donner un tel tableau clinique.
Comment calmer le patient ?
Si vous avez de l’oxygène : lunette ; position semi assise, 7 à 15 litres/minutes pendant
une quinzaine de minutes.
Si le patient n’a pas de facteurs de risque vasculaire : un triptan : celui que vous avez.
Le plus efficace : le sumatriptan injectable
2) Vous n’assistez pas à la crise : vous obtenez une description par l’interrogatoire
C’est facile. L’évolution dans le temps est caractéristique. Des périodes douloureuses
(quelques semaines à mois) sont entrecoupées de périodes de rémission dans la majorité des
cas. Les crises surviennent tous les jours (parfois un jour sur 2 au début), toujours au même
endroit (autour de l’œil) avec des signes dysautonomiques dans la zone de la douleur :
larmoiement, injection conjonctivale, syndrome de Claude Bernard Horner (ptosis, myosis,
rétraction de la fente palpébrale). Les patients sont le plus souvent agités (comme dans la
colique néphrétique), déambulent, s’appliquent des compresses froides et réclament parfois de
manière véhémente un soulagement immédiat, tant la douleur est insupportable.
Il peut y voir jusqu’à 8 crises/jour et la durée de la crise est entre 15 minutes et 3 heures. Un
élément remarquable, au moins au début de l’affection : la survenue à heure fixe et très
souvent une crise se produit la nuit éveillant le patient.
Eliminer ce qui n’est pas une AVF
Il faut éliminer tout ce qui n’a pas les caractères que nous venons de voir et particulièrement
les douleurs évoluant par crises beaucoup plus courtes comme la névralgie ou beaucoup plus
longue comme la migraine. L’avis d’un spécialiste est alors utile.
Demander des examens complémentaires
En théorie, il n’y a pas besoin d’examens complémentaires si la description est typique et si
l’examen clinique est normal. Si par prudence, on demande un examen : ne faire qu’un seul :
une IRM de l’encéphale en attirant l’attention du radiologue sur l’hypophyse ou le sinus
caverneux du même côté car c’est là que se situent la majorité des très rares lésions pouvant
se manifester par des crises d’AVF, le plus souvent atypiques.
Que prescrire ?
Le traitement de la crise repose sur l’injection de sumatriptan (IMIJECT°). Il s’agit dans
cette indication du sumatriptan auto- injectable par stylo.
Les contre-indications sont un terrain vasculaire : HTA, angor ... car le sumatriptan est un
vasoconstricteur. Il faut faire attention aux associations médicamenteuses (IRS).
La prescription se fait sur une ordonnance de médicament d’exception en 4 exemplaires. Il
ne faut pas faire plus de 2 injections par jour.
Ces patients étant souvent de gros tabagiques (il s’agit d’une comorbidité quasi-constante), il
est préférable d’avoir un bilan cardiologique pour éliminer une coronaropathie. Il faut aussi
montrer ou expliquer au patient comment il doit se servir du stylo auto injecteur.
L’oxygène au masque est un traitement d’appoint qui a maintenant l’AMM. Pour le moment,
la prescription doit être faite par un neurologue, un ORL ou un centre de la douleur.
Le traitement de fond repose sur le vérapamil à forte dose (240 à 480 mg) voire plus. Ce
médicament est bradycardisant. Il importe donc avant de le prescrire d’avoir un ECG.
Donc en pratique, avant de traiter avec ces traitements spécifiques, il importe d’avoir
rapidement l’avis d’un cardiologue qui doit répondre aux 2 questions : 1) existe-t-il des
contre-indications au vérapamil à fortes doses, 2) existe-t-il des contre-indications au
sumatriptan à fortes doses ?
Par ailleurs, dans les traitements au long cours par vérapamil (il existe des formes chroniques,
sans rémissions) il faut faire un ECG tous les 3 à 6 mois pour dépister un trouble de la
conduction.
En pratique, avant l’avis cardiologique on peut proposer une coutre corticothérapie (1mg/kg
pendant une semaine) souvent efficace mais attention au risque de cortico-dépendance.
Le médecin généraliste a donc un rôle capital dans la prise en charge finalement simple de ces
patients. Il est toujours important de fournir les explications sur la maladie : notion d’un
« générateur » cérébral qui n’a rien avoir avec une cause ORL ou ophtalmologique, normalité
des examen s dont on dispose. On peut aussi orienter ces patients vers des associations de
patients, ce qui est rarement utile dans les formes épisodiques dans lesquelles les traitement s
sont remarquablement efficaces.
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