Un même verset pouvant alors connaître plusieurs sens, voire des sens contraires, ce
en fonction des causes à défendre et des conceptions des uns ou des autres. Pour
cela, il fallut, et il le faut encore plus aujourd’hui, que l’on se justifiât de la pluralité
des lectures. Mêmes maux pour mêmes mots ne laissent guère espérer de guérison.
Je suis un croyant simple ; un seul Dieu, un seul Coran, un seul texte, un seul
message. Je ne peux me résoudre à admettre que Dieu ait voulu révéler une chose et
son contraire. Je suis un esprit simple ; un verset ne peut avoir qu’un sens, celui
voulu par Dieu et non pas ceux voulus par les hommes.
L’on pourrait s’offusquer, crier à la dictature intellectuelle, alléguer de la liberté de
penser, de la pluralité salvatrice. Serais-je un idéicide, un partisan de la pensée
unique, la mienne en l’occurrence ? Dans le sillage de la libération textuelle des
Chrétiens à partir de la fin du XIXème siècle, nous devrions rattraper notre retard et
prouver notre modernité en prêchant la pluralité des lectures, la multiplication des
interprétations, l’explosion puis l’implosion exégétique ! Alors, face aux chantres de
ce nouvel ordre bien incertain, un autre rempart se dresse ; les ulémas classiques
seraient-ils les gardiens du temple de la pensée “orthodoxe” en dehors desquels
point de salut et, pis encore, point de pensée ?
Le verset que nous avons cité en exergue devrait nous permettre de réfléchir
concrètement sur ces enjeux semblant par trop théoriques mais dont les
implications sont malheureusement fort concrètes. Voici un texte nous semblant
fondamental et auquel nous donnons tous un sens particulier. Un verset qui a été
largement traité par les commentateurs de l’âge classique et, de même, est-il
régulièrement évoqué par les réformateurs, les exégètes modernes. Mais aussi par
les simples citoyens musulmans responsables, vivant non plus en une communauté
fermée mais ouverte, par choix, ou du fait qu’ils résident en minorité en Occident ou
en Orient.
Mais que dit vraiment ce verset, que signifient réellement ces quelques mots :
lâ ikrâha fî-d-dîn :
“Point de contrainte en religion. ”
A priori le sens est clair, la lecture pourrait sembler unique, l’idée une. Pourtant, en
arabe comme en français, l’on peut interroger le texte comme s’interroger, double
sollicitation constituant principal du process de lecture. Le texte délivre alors
plusieurs significations dont il s’agira par la suite de déterminer les possibles des
impossibles, les jutes des fausses, la vérité de l’erreur.
De notre verset, nous dirons que, littéralement et a priori, il est possible de dégager
sept sens principaux :
- Point de contrainte en religion.
- L’on ne peut imposer l’Islam par la contrainte.