PHYSIQUE QUANTIQUE
(UNE PETITE INTRODUCTION)
L'expérience montre que les échanges d'énergie entre le rayonnement et la matière se font toujours
par petites quantités bien définies, appelées quanta (pluriel de quantum en latin). Dans le cas
particulier de la lumière, on donne à ces quanta le nom de photons.
Dans le cas général d'un rayonnement éventuellement différent, comme les divers rayonnements
radioactifs par exemple, on peut toujours mettre en évidence ce même double aspect : Le
rayonnement se propage comme une onde, mais interagit avec la matière comme une particule
caractérisée en particulier par son énergie totale (énergie propre plus énergie cinétique) et sa
quantité de mouvement ou impulsion.
Cette évidence expérimentale, dont le canisme est difficile à imaginer, mais qui est clairement
incontestable du point de vue expérimental, est appelée pudiquement "dualité onde-corpuscule".
Onde monochromatique plane
On appelle ainsi une onde dont la propagation dirigée dans le sens Ox dans un repère orthonormé
Oxyz lié à un référentiel inertiel R, est modélisée par une équation de la forme :
Ψ=A eiω tk x
ou
Ψ
(psi) symbolise la quantité oscillante, quelle que soit sa nature,
A
son amplitude
d'oscillation,
ω
(oméga) sa pulsation ou fréquence angulaire,
k
son nombre d'onde,
x
la
position,
t
le temps, et où la fonction exponentielle complexe d'une variable réelle
θ
(téta) :
e=cosθisinθ
est une généralisation de la notion de fonctions périodiques sinusoïdales.
La fréquence
correspond à :
f=ω
=1
T
T
est la période de l'onde,
et la longueur d'onde
λ
(lambda) correspond à :
λ=
k
Le vecteur
k=kux
qui pointe dans la direction de propagation de l'onde est appelé vecteur d'onde.
Ψ
est ainsi une fonction complexe des deux variables réelles
x
et
t
, indépendante ici des
coordonnées
y
et
z
.
La vitesse de propagation de l'onde
vp
(vitesse de phase) est définie par :
vp=λ
T=ω
k
L'amplitude
A
peut être elle-même une quantité complexe, de même nature que
Ψ
:
A=A. eiφ
φ
représente la phase à l'origine, en
x=0
et à
t=0
, de l'onde
Ψ
, qui peut s'écrire :
Ψ=A eiω t k x=A.eeiω t k x= ∣Aeiω t k x φ
N.B. L'emploi des nombres complexes pour décrire le mouvement ondulatoire, qui est une simple
astuce de calcul en physique classique, s'avèrera ici indispensable en physique quantique.
Dualité onde-corpuscule
Il revient à Max Planck le mérite d'avoir mis expérimentalement en évidence le quantum d'énergie
E
transporté par une onde de fréquence
:
E=h f = ℏ ω
avec pour valeurs les plus précises actuellement :
h=6, 626 069 57×1034 J.s ± 0, 000 000 29×1034 J.s
ℏ = h
=1, 054 571 628×1034 J.s ± 0, 000 000 053×1034 J.s
On pourra retenir que la constante de Planck réduite
est de l'ordre de 10-34 Joules-secondes.
D'autre part, Louis de Broglie a su formuler le quantum d'impulsion de la particule matérielle
associée, qui peut être un photon, un électron, ou autre :
p=mv= ℏ
k
Soit dans le cas présent où l'onde se propage dans la direction de l'axe Ox :
px= ℏ k
La fonction d'onde va donc pouvoir s'écrire en tenant compte de cette dualité :
Ψ=A eiωtk x=A e
i
E t pxx=A.e
i
E t
.e
i
pxx
Les dérivées partielles de cette fonction sont :
Ψ
t=− iE
Ψ
Ψ
x=ipx
Ψ
relations que l'on peut écrire :
iΨ
t=E Ψ
iΨ
x=pxΨ
Mises sous cette forme, on pourrait être tenté de simplifier les équations par
Ψ
, ce qui aurait de
quoi faire hurler un mathématicien ! En effet
i
x
est un opérateur de dérivation, alors que
px
est un nombre réel observable qui représente la
mesure physique de la quantité de mouvement de la particule associée à l'onde.
Mais cette intuition saugrenue conduit à l'idée plus acceptable d'associer à la quantité observable px
un opérateur mathématique :
px= −i
x
qui peut agir sur toute fonction
φx
dérivable en donnant :
pxφx = −iφ' x
Il transforme donc une fonction φ en une autre fonction
iφ '
de la même manière qu'une
fonction transforme une variable en une autre variable.
Les mathématiciens appellent fonction propre
ψ
d'un opérateur donné
α
toute fonction vérifiant
une relation de la forme
α ψ =αψ
le nombre
α
(alpha) correspondant étant lui-même appelé valeur propre de cet opérateur.
On voit donc ici que la relation
iΨ
x=pxΨ
peut s'interpréter en disant que la fonction d'onde
Ψ
qui représente la fonction d'état de la
particule est ici une fonction propre de l'opérateur
px= −i
x
et que le nombre réel observable
px
, l'impulsion de la particule, est la valeur propre associée à
cette fonction propre
Ψ
.
Nous avons l'idée de base de toute la physique quantique, la traduction mathématique de cette
étonnante dualité onde-corpuscule :
A toute quantité physiquement observable on doit associer un opérateur dont les fonctions propres
sont des fonctions d'état du système mesuré. Les valeurs propres correspondantes représentent les
seules valeurs que l'on peut observer selon l'état du système lors d'une mesure de cette quantité.
Pourquoi en est-il ainsi ? Nul n'a pu en donner une image mentale conforme au bon-sens commun.
cependant, l'objet de la recherche scientifique n'est pas de rendre les faits conformes au bon-sens de
l'honnête homme qui cherche des réponses au pourquoi des choses, mais plutôt de décrire d'une
manière logiquement cohérente comment le monde se comporte dans la réalité. Le pourquoi restant
du domaine de la métaphysique et de la philosophie.
Nous allons donc voir comment on peut mettre en oeuvre ces principes en les combinant à des
notions qui ont déjà fait leurs preuves dans le cadre de la physique classique.
Equation de Schrödinger
Le principe de conservation de l'énergie dans un système isolé, par exemple une particule, disons un
électron pour fixer les idées, enfermé dans une boite, ou encore isolé près d'un proton dans un
atome d'hydrogène libre de toute interaction avec l'environnement, se traduit en mécanique
classique en écrivant que la somme
E
des énergies cinétique
Ec
et potentielle
Ep
de
l'électron reste constante.
Soit donc :
EcEp=1
2mv2Ep=p2
2mEp=1
2mpx
2py
2pz
2Ep=E=constante réelle
Selon le principe précédent, on doit associer l'opérateur correspondant à chaque composante de la
quantité de mouvement pour écrire le 1er membre sous forme d'un opérateur, que l'on appellera
l'opérateur hamiltonien
H
.
Compte tenu de
px= −i
x
on obtient :
H=1
2m px
2 py
2 pz
2Ep=2
2m2
x22
y22
z2Ep
L'opérateur
Δ=2
x22
y22
z2
est appelé opérateur laplacien.
L'équation aux valeurs et aux fonctions propres qui permet de calculer les valeurs observables de
l'énergie, ainsi que les fonctions d'état de l'électron qui leur sont associées, est alors :
H ψ =E ψ
C'est l'équation de Schrödinger indépendante du temps.
Si le système n'était pas isolé, et donc si son énergie interne était variable au cours du temps, il
deviendrait nécessaire de remplacer
E
par l'opérateur correspondant :
E=i
t
Etudions à titre d'exemple un cas simple au point de vue des calculs.
Particule dans une boite
Considérons le cas particulièrement simple d'une particule enfermée entre deux murs de potentiel
infini, l'un situé aux abscisses
x0
, l'autre pour
xa
. Le problème est ici à une seule variable
x, et les fonctions d'état de la particule seront donc de la forme :
ψ=ψx
L'énergie potentielle étant définie à une constante additive près, on choisira
Ep=0
pour
0xa
et
Ep= ∞
partout ailleurs, ce qui impose les conditions aux limites :
ψ0 = ψa = 0
L'équation de Schrödinger se réduit alors à :
2
2m
2ψ
x2=E ψ
C'est une simple équation différentielle linéaire très classique du type :
ψ ' ' x = −k2ψx
avec ici :
k2=2m E
2
et qui admet pour solution générale :
ψx = Asin kx   Bcoskx
La condition aux limites
ψ0 = 0
impose
B=0
et
ψa = Asin ka  = 0
impose
k a =n π
, en éliminant la possibilité
A=0
qui traduirait
une absence de particule. C'est à dire que k ne peut prendre pour n entier que les valeurs discrètes :
kn=nπ
a
auxquelles correspondent pour la particule les niveaux d'énergie possibles :
En=kn
22
2m=n2π22
2m a2
et les fonctions d'état correspondantes :
ψnx = Ansinn π
ax
qui sont respectivement les valeurs propres et les fonctions propres de l'opérateur hamiltonien
H
.
Le cas
n=0
est évidemment sans intérêt, équivalent au cas
A=0
.
On remarque ici que les fonctions propres ne sont définies qu'à la constante multiplicative
An
près, ce qui est toujours le cas pour les fonctions propres de n'importe quel opérateur.
On peut les normaliser en leur imposant :
0
aψx2dx =1
Ce qui conduit ici pour toutes les valeurs de n, à :
An=
2
a
Probabilité de présence
En physique classique, on a établi et vérifié que l'énergie transportée par une onde de lumière est
proportionnelle au carré de son amplitude. D'un point de vue macroscopique, cette énergie est
constituée d'un très grand nombre de photons. Lorsque la lumière est absorbée par un écran
matériel, une plaque photographique par exemple, ces photons se répartissent sur toute la plaque,
proportionnellement au carré de l'amplitude en chaque point. Mais si maintenant la même onde est
d'intensité suffisamment faible pour ne transporter qu'un seul photon, celui-ci va être absorbé en un
seul point de la plaque, dont la position indéterminée à l'avance relève du calcul des probabilités.
Pour rester cohérent avec le cas macroscopique, il est donc nécessaire que la probabilité de présence
du photon en un point donné soit proportionnelle au carré de l'amplitude de l'onde en ce point.
Dans le cas précédent de la particule enfermée dans une boite d'épaisseur a, sa probabilité de
présence étant ainsi proportionnelle au carré de l'amplitude, on a évidemment
ψx = 0
dans les
régions d'énergie potentielle infinie il est impossible de trouver la particule, et la probabilité de
présence de la particule quelque part dans la boite doit être égale à 1. C'est ce qu'exprime la
condition de normalisation ci-dessus, en considérant que
ψx2dx
représente la probabilité de
présence de cette particule dans une tranche de boite d'épaisseur dx.
Relations d'incertitude
Mathématiquement, la fonction sinus peut s'exprimer à l'aide de la fonction exponentielle
complexe :
sinθ = 1
2iei θ ei θ
D'autre part, sans rien changer à ce qui précède, on peut mettre la fonction d'état de l'électron dans
la boite sous une forme dépendant du temps :
Ψx , t  = ψx.e
iE
t=Ansin n π
ax.e
iE
t=An
2ie
inπ
axe
inπ
ax.e
iE
t
elle apparaît comme la somme de deux ondes planes qui se propagent en sens inverse,
(correspondant en fait à une onde plane qui se réfléchit sur les parois de la boite).
Ψ1x , t  = An
2i.e
in π
ax
.e
iE
t
et
Ψ2x , t = − An
2i.e
inπ
ax
.e
iE
t
Il leur correspond les deux impulsions observables :
px1= − n π
a
et
px2= ℏ n π
a
dont il est impossible de savoir laquelle des deux serait le résultat d'une mesure donnée, bien que
l'impulsion de la particule soit nulle en moyenne.
On dit qu'il y a intrication des deux états propres Ψ1 et Ψ2 de la quantité de mouvement px .
On peut donc dire qu'en localisant la particule dans une boite d'épaisseur
a=2Δx
, on ne peut au
mieux connaître son impulsion (nulle en moyenne) qu'avec une incertitude :
Δpx=1
2px2px1= nπ
a=n π
2Δx
Soit dans le meilleur des cas où n = 1 :
Δx .Δpx=π
2
On peut monter que ce résultat a un caractère très général : Il est impossible de connaître
simultanément avec exactitude l'impulsion et la position d'une particule quantique.
Δx .Δpx ℏ
Ceci en toutes circonstances.
Et symétriquement pour l'énergie et le temps :
Δt .ΔE  ℏ
Dans le cas de la particule dans la boite, les niveaux d'énergie En ne sont donc ainsi définis avec
exactitude
ΔE =0
que pour autant les états correspondants soient parfaitement stationnaires, c'est à dire stables
pendant un temps infini
Δt = ∞
Boite tridimensionnelle
Une possibilité réaliste d'enfermer des électrons dans une boite est de considérer un bloc de métal
conducteur. Les électrons de conduction sont pratiquement libres de s'y déplacer à l'intérieur,
presque (et encore mieux si c'est un supraconducteur) sans interactions les uns avec les autres ni
avec les ions du réseau cristallin, à la manière dont les molécules d'un gaz peuvent se déplacer à
l'intérieur d'un récipient. Mais ils ne peuvent en pas sortir. Considérons un tel bloc métallique de
forme parallélépipédique et de dimensions a1, a2 et a3 pas obligatoirement petites. Il est ici facile en
se référant au cas mono-dimensionnel de montrer que l'équation de Schrödinger tridimensionnelle :
2
2mΔψEpψ=E ψ
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