HISTOIRE
PHEIDIPPIDÈS
I
I existe un certain nombre d’auteurs qui
prétendent à tort que l’estafette diurne,
Pheidippidès — et non Philippidès comme
indiqué dans son article par le Dr de Mon-
denard — serait le guerrier qui, à l’issue de
la bataille de Marathon (490 av. notre ère),
courut jusqu’à Athènes porter la nouvelle
de la victoire grecque sur les Perses, avant
de s’écrouler et de mourir. Le prestige et la
diffusion mondiale de la Revue Olympique
m’offrent l’occasion de restituer ce haut fait
dans son contexte historique le plus vrai-
semblable.
Pheidippidès était une estafette diurne
de profession qui, en tant que messager
des cités grecques, acheminait les commu-
nications officielles des unes aux autres.
Les Athéniens l’avait envoyé quérir l’aide
de Sparte contre les forces perses qui, sous
le commandement de Datis et d’Artha-
phèrne, venaient de débarquer sur la côte
de I’Attique et menaçaient Athènes. Les his-
toriens ne sont pas d’accord sur I’impor-
tance des forces en présence, leurs estima-
tions allant de cent à cinq cent mille
hommes.
Pheidippidès courut d’Athènes à Sparte
en deux jours. II convient de préciser qu’à
l’époque les messagers ne se déplaçaient
pas de nuit par crainte des animaux sau-
vages et des bandits. Comme l’indique leur
titre, ils étaient des estafettes diurnes. Ainsi
Pheidippidès en courrier expérimenté, pre-
nant tous les raccourcis possibles à travers
la plaine et la montagne, réussit-il, comme
je l’ai dit, à couvrir la distance d’environ
1200 stades en deux jours, soit à peu près
220 kilomètres, le stade correspondant
grosso modo à 183 mètres.
Les Spartiates furent sensibles à l’appel
à l’aide mais se devaient d’attendre la nou-
velle lune et d’achever au préalable leurs
rites sacrificiels. Et lorsque les deux mille
hommes, qu’ils expédièrent à la suite de
Pheidippidès, arrivèrent à Athènes, après
une marche forcée de trois jours, la bataille
de Marathon était terminée. Miltiade, à la
tête de huit mille Athéniens et d’un corps
auxiliaire de deux mille Platéens, alliés
d’Athènes, avait vaincu les Perses, les
forçant à fuir à bord de leurs navires, non
sans avoir abandonné dans la plaine de Par Kléanthis
Marathon des milliers de morts et un riche
butin. Dans ce contexte, on ne peut pas ne Paléologos
pas saluer une fois encore l’exploit presque
incroyable des deux mille guerriers spar-
tiates qui réussirent à couvrir la distance de
220 kilomètres en seulement trois jours.
Voilà ce que l’on peut dire de Pheidip-
pidès mais il convient de ne pas le confon-
dre avec le guerrier, pratiquement inconnu,
qui annonça la victoire aux Athéniens.
Hérodote, l’historien qui, étant né entre
490 et 480 (avant notre ère) vécut assez
près de ce grand événement, raconte de
nombreux détails sur la course de Pheidip-
pidès à Sparte (Livre VI, 105), ne dit rien du
soldat qui courut de Marathon à Athènes.
Pausanias, dans ses Arcadiennes, Livre H
de son Itinéraire de la Grèce, raconte que
Pheidippidès, tandis qu’il escaladait le
mont Parthénon, vit apparaître en face de
lui le dieu Pan. Celui-ci lui commanda de
dire aux Athéniens qu’ils les aiderait à vain-
cre les Perses. C’est pourquoi, quelque
temps plus tard, s’éleva sur l’Acropole la
statue du dieu aux pieds de bouc, avec
l’inscription de Simonide : « Les Athéniens
et Miltiade m’ont érigé, moi, Pan d’Arcadie
aux pieds de bouc, en reconnaissance de
leur victoire sur les Perses ».
LE COUREUR INCONNU
DE MARATHON
Voyons maintenant de quelles informations
historiquement prouvées nous disposons
en ce qui concerne le soldat qui, au sacri-
fice de sa vie, porta le message de joie,
celui de la victoire, à Athènes. L’historien
Plutarque, de beaucoup postérieur à Héro-
dote, puisque né entre 47 et 50 de notre
ère, et donc très éloigné de l’époque de la
bataille, mentionne deux noms de messa-
gers. Le premier Thersippos Ereous et le
second Euclès Thersippou avaient été
repris d’Héraclide du Pont, contemporain
de Platon. Le passage où les deux noms
sont mentionnés (Ethiques, Livre B 347
C.D., Leipzig 1888) a la teneur suivante :
« Cette bataille de Marathon, ainsi que le
relate Héraclide du Pont, fut annoncée par
Thersippos I’Eroeus. Nombreux furent ceux
qui croient que ce fut Euclès qui courut en
armes, encore chaud de la bataille et qui,
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