SDC 2 patient 2008 31/03/08 14:25 Page 4 ◗◗◗ ARTICLES MÉDICAUX ◗ Artériopathie périphérique À chaque contraction, le coeur envoie une certaine quantité de sang riche en oxygène vers les organes ; les canaux utilisés pour transporter ce sang sont les artères ; après avoir délivré l’oxygène aux organes cibles, le sang revient vers le coeur via un réseau composé d’autres canaux, les veines. Dans l’artériopathie périphérique – le terme exact étant en fait "artériopathie oblitérante des membres inférieurs" ou AOMI – les artères qui transportent le sang vers les membres sont sténosées. Le problème touche surtout les membres inférieurs. Cette affection n’a en principe rien à voir avec les varicosités (varices), un trouble au niveau des veines des membres inférieurs également connu sous le nom de "vasculopathie périphérique." Quelles en sont les conséquences ? Comme elles sont rétrécies, les artères peuvent transporter moins de sang, et donc moins d’oxygène, jusqu’aux membres inférieurs. Ce sont les muscles qui y sont le plus sensibles, car ceux-ci ont besoin d’une grande quantité d’oxygène lors de tout effort ; si les muscles reçoivent moins d’oxygène, leur fonction se retrouvera en difficulté. La manifestation la plus évidente se produit lors de la marche. Dans les formes plus avancées de la maladie, la peau sera également atteinte : outre les décolorations, une plaie ouverte peut se développer et cicatriser difficilement en raison du manque d’oxygène. Soulignons que toutes les plaies ouvertes au niveau des membres inférieurs ne sont pas consécutives à une artériopathie : il existe de nombreuses autres causes, comme la vasculopathie périphérique par exemple. posé, ce qui n’empêche toutefois pas que les dangers qui y sont liés risquent bel et bien de se manifester. Quelles sont les causes de l’artériopathie périphérique ? La sténose est quasi toujours provoquée par une athérosclérose, un dépôt de substances graisseuses dans la paroi des artères. C’est cette même maladie qui est à l’origine d’autres problèmes, ailleurs dans l’organisme, comme au niveau des artères coronaires ou des vaisseaux sanguins du cerveau. Les causes de l’athérosclérose sont les mêmes dans les membres qu’ailleurs et sont très nombreuses. Les facteurs de risque d’athérosclérose les plus connus sont le tabagisme, l’hypertension artérielle, le sucre, l’obésité et, bien sûr, l’hypercholestérolémie. Le tabagisme joue par ailleurs un rôle très important dans l’artériopathie périphérique, surtout lorsqu’il est combiné au diabète. Chez qui la maladie se développe-t-elle ? L’artériopathie périphérique apparaît principalement dans la deuxième moitié de la vie – après l’âge de cinquante ans – tant chez les hommes que chez les femmes. Selon les estimations, notre pays compte au moins 300000 patients souffrant d’artériopathie périphérique ; la moitié d’entre eux n’a probablement aucun symptôme ; mais tous sont exposés à un risque accru (cf. ultra). Le diagnostic peut-il être posé facilement ? Oui, le diagnostic est relativement simple Que ressent le patient ? Dans la forme la plus classique de la maladie, le patient aura l’impression que son mollet est serré dans un étau lorsqu’il marche ; cette douleur augmentera tant que le patient continue de marcher et ne s’arrêtera que lorsqu’elle aura raison de lui et qu’il s’arrêtera ; ensuite, la douleur disparaît relativement vite, le plus souvent en quelques minutes seulement. Ce signe, également appelé claudication intermittente, est certes caractéristique de la maladie, mais il n’est pas très fréquent. Très souvent, le patient ne ressent absolument aucune gêne et n’est donc pas du tout conscient de la maladie. Il n’est pas rare que les plaintes soient confondues avec d’autres problèmes touchant les membres, comme des crampes musculaires, une arthralgie au niveau de la hanche ou du genou … Tous ces éléments nous permettent de comprendre pourquoi le diagnostic n’est souvent pas Mesure de la tension artérielle au niveau de la cheville à poser, même si le patient ne rapporte aucun symptôme caractéristique. La mesure du pouls dans les membres inférieurs, par ex. au niveau de la cheville et du dos du pied, est très instructive. Un autre moyen très efficace est de mesurer la tension au niveau des artères de la cheville ; cette mesure se fait au moyen d’un brassard, comme lorsque l’on mesure la tension artérielle au niveau du bras, et d’un petit dispositif qui émet des ultrasons. La procédure est totalement indolore et inoffensive. Normalement, la tension mesurée au niveau de la cheville est à peu près identique à celle mesurée au niveau du bras ; si la tension artérielle est inférieure au niveau de la cheville, il y a lieu d’envisager la possibilité d’une sténose ; plus la tension est basse, plus le rétrécissement est important. Il est donc très intéressant de connaître non seulement sa tension au bras, mais aussi sa tension à la cheville. Chez qui mesurer la tension artérielle au niveau de la cheville ? ◗ Les personnes qui se plaignent de douleurs dans les mollets lorsqu’elles marchent ◗ Les personnes de 50 ans et plus qui présentent des facteurs de risque d’athérosclérose (voir texte) ◗ Toutes les personnes de 70 ans et plus Pourquoi l’artériopathie périphérique est-elle importante ? Tout d’abord, elle peut expliquer toute une série de plaintes au niveau des membres ; une personne qui doit sans SDC 2 patient 2008 31/03/08 14:25 Page 5 ◗◗◗ cesse arrêter de marcher à cause de crampes dans les mollets peut éventuellement y trouver la cause de son problème. Ensuite, il convient de citer un autre point au moins aussi important. Nous avons dit précédemment qu’il y a lieu de déterminer la cause du rétrécissement dans l’athérosclérose. Le problème de l’athérosclérose, c’est qu’elle ne survient souvent pas en un seul endroit du corps, mais en plusieurs endroits simultanément. Dans le cas de l’artériopathie périphérique, il n’est pas rare d’avoir aussi une sténose des artères coronaires ou des vaisseaux sanguins du cerveau. L’artériopathie périphérique n’est donc pas importante uniquement pour les membres, mais aussi parce qu’elle peut s’accompagner d’autres lésions, ailleurs, et de toutes les conséquences possibles qui en découlent (angine de poitrine, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, …). Ce risque est présent non seulement chez les patients symptomatiques, mais aussi chez ceux qui ne présentent (encore) aucune manifestation de la maladie. Le lien est à ce point évident qu’une relation directe peut être établie entre une tension inférieure au niveau des artères de la cheville et le risque de développer des complications au niveau du coeur ou du cerveau. C’est la raison pour laquelle diverses campagnes ont été menées cette année à l’attention de la population, certaines initiatives offrant même la possibilité aux intéressés de mesurer leur tension au bras et à la cheville. Peut-on intervenir sur la maladie ? Oui, il y a beaucoup d’interventions possibles. Les mesures prises pour lutter contre l’athérosclérose en général sont au moins aussi pertinentes contre l’artériopathie périphérique. Faites en sorte de connaître vos facteurs de risque (tabagisme, hypertension, obésité, cholestérol, taux de sucre dans le sang) et faites tout ce que vous pouvez pour les corriger. Le mot d’ordre est d’adapter ses habitudes, et en particulier d’adopter un régime alimentaire sain et équilibré. Dans l’artériopathie périphérique, l’accent est mis sur le sevrage tabagique et sur la pratique régulière d’exercices simples. Les promenades quotidiennes sont très utiles. Très souvent, une grande partie des symptômes peuvent s’améliorer grâce à des exercices ciblés (se tenir sur la pointe des pieds pendant quelques secondes). Parfois, lorsque les adaptations du mode de vie n’apportent pas un soulagement suffisant, il faut passer aux médicaments. L’acide acétylsalicylique (aspirine) est souvent prescrit, à faible dose, pour éviter la formation de caillots. Ce traitement doit toujours faire l’objet d’une concertation avec le médecin car il augmente la propension aux saignements. Si les résultats obtenus ne sont pas suffisants ou si des problèmes se font jour, le médecin peut opter pour d’autres médicaments, comme le clopidogrel. En résumé … L’artériopathie périphérique est un rétrécissement des artères des membres inférieurs, généralement dû à une athérosclérose. La maladie provoque une douleur ARTICLES MÉDICAUX ◗ dans les membres de l’individu qui marche, mais un grand nombre de patients ne ressentent absolument rien. La maladie est importante, car il n’est pas rare qu’elle soit associée à une athérosclérose au niveau des artères coronaires et des vaisseaux sanguins du cerveau. Il est primordial de contrôler les facteurs de risque (tabagisme, cholestérol, taux de sucre dans le sang, hypertension, obésité) ; une adaptation du mode de vie et de l’alimentation est très utile. Le sevrage tabagique et l’exercice régulier (marche, exercices ciblés) sont très efficaces. Prof. Ém. D.L.Clement ◗ Université de Gand